B. UN BESOIN DE RATIONALISATION DE CERTAINS ASPECTS DU DISPOSITIF
Plusieurs éléments du SMV mériteraient une définition ou une clarification : son financement est illisible pour la représentation nationale au moment de l'établissement du budget de l'État à cause de la pluralité de ses financements et l'absence de présentation du budget global ; la forme que doit prendre l'extension des capacités d'accueil du SMV ; la position du SMV au sein des politiques d'intégration de la jeunesse.
1. Un manque de lisibilité budgétaire regrettable
Le SMV est un dispositif qui dispose de sources de financement multiples, dont des financements européens et des financements régionaux. Cette multiplicité des financements génère une opacité budgétaire, puisqu'aucun des documents à la disposition de la représentation nationale ne récapitule clairement le coût total de son dispositif.
Les financements issus de la mission « Défense », qui correspondent aux dépenses de personnels, sont noyés dans ceux des armées (à l'exception des volontaires stagiaires eux-mêmes dont le « plafond d'emploi » apparait explicitement). Pour la même raison, les coûts de travaux immobiliers réalisés pour le SMV ne sont pas connus.
Les financements issus de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » ne correspondent qu'aux dépenses « coeur de métier » (formation et publicité du dispositif) assumées par l'État. Le financement par les régions n'apparait qu'indirectement dans la documentation afférente. Le rapporteur spécial salue cependant l'intégration de l'opération budgétaire « FSE » dans le suivi des crédits du SMV en exécution.
La situation actuelle n'est pas satisfaisante car s'il est possible d'approcher un coût approximatif du SMV en exécution, il n'est pas possible d'obtenir une estimation, même proche, du coût du dispositif en partant des informations disponibles de la documentation budgétaire au moment de l'établissement du budget général de l'État.
Le rapporteur spécial regrette cette situation et appelle de ses voeux une information synthétique sur le coût global du dispositif dans la documentation budgétaire afférente à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » à laquelle le SMV est rattaché.
Recommandation : Tenir une comptabilité synthétique du coût total du dispositif dans la documentation budgétaire. |
2. Des centres et antennes devant être davantage stabilisés et un modèle d'extension des capacités d'accueil à mieux définir
Le SMV a besoin de stabiliser ses centres et régiments actuels avant toute ambition de hausse de la de la taille des cohortes. La situation de l'antenne de Marseille doit également faire l'objet d'une décision sur le modèle de pérennisation devant être retenu.
Une politique d'extension des capacités d'accueil du SMV, allant de pair avec la volonté d'accueillir plus de volontaires, doit être définie.
a) La nécessaire stabilisation des capacités d'accueil existantes
Deux problématiques se posent sur l'existant :
Premièrement, les capacités d'accueil actuelles, basées sur des bâtiments préexistants, atteignent leurs limites. Ainsi, des travaux ont pu être lancés pour augmenter les capacités d'accueil et développer des infrastructures plus adaptées pour le SMV. Le site d'Ambérieu-en-Bugey a lancé la construction de 2 nouveaux bâtiments, un pour l'hébergement des volontaires et un pour disposer de salles de cours.
Les coûts liés aux travaux d'infrastructure du SMV ne sont pas connus et ne sont pas intégrés dans le coût de 53 millions d'euros du dispositif. Ils sont estimés à 21 millions d'euros en 2023, hors Brest.
Le rapporteur spécial regrette que ces coûts ne soient pas connus et appelle à ce qu'ils puissent être identifiés, afin de permettre une meilleure appréciation du coût complet du dispositif.
Deuxièmement, l'état actuel de l'antenne de Marseille n'est pas satisfaisant. Cette antenne ne dispose que de 10 agents et 5 volontaires experts, ce qui est très peu au regard des obligations d'encadrement auxquelles le SMV est soumis (surveillance des volontaires 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7). Ces obligations entrainent des horaires très importants pour l'encadrement.
Si l'antenne doit s'inscrire dans la durée, un développement sur le modèle de l'antenne de Châlons-en-Champagne peut être envisagé. Cette antenne accueille en autonomie 150 jeunes par an avec 34 agents, ce qui permet un fonctionnement durable et reste un rapport volontaires stagiaires-agents bien inférieur à celui d'un régiment ou d'un centre SMV38(*) grâce à la mutualisation des fonctions support avec le régiment SMV de rattachement.
b) Un modèle d'extension des capacités d'accueil à définir pour atteindre l'objectif affiché de 1500 volontaires annuels
La volonté politique de développement du dispositif, exprimée par le nombre de volontaires stagiaires en hausse, conduit à deux modèles de développement possibles : l'augmentation des capacités d'accueil actuelles dans les centres existants et/ou l'ouverture de nouveaux centres ou antennes du SMV.
Plusieurs raisons militent en faveur de la seconde solution, à savoir l'ouverture de nouveaux centres ou antennes :
- l'accueil d'un plus grand nombre de volontaires dans les centres actuels nécessiterait des travaux immobiliers, dont le coût n'est pas connu ;
- l'accessibilité géographique du dispositif bénéficierait grandement de l'ouverture d'un centre ou d'une antenne dans une zone non couverte ;
- l'ouverture d'une nouvelle antenne, en améliorant l'accessibilité géographique, permettrait d'atteindre un nombre de recrues potentielles plus important, ce qui faciliterait le recrutement de volontaires stagiaires et ouvrirait l'accès à de nouveaux bassins d'emplois pour intégrer ces volontaires. En effet, quand bien même les capacités d'accueil des centres et régiments actuels seraient augmentées, il n'est pas certain que le SMV puisse trouver suffisamment de volontaires pour les occuper au regard des difficultés de recrutement auxquelles il fait face.
S'agissant du choix entre, soit l'ouverture d'un centre ou régiment, soit l'ouverture d'une antenne, ce dernier choix présente l'avantage considérable de ne pas multiplier les services supports du SMV.
L'ouverture d'un centre ou d'une antenne du SMV nécessitera de prendre de nombreux éléments en compte : existence de recrues potentielles et d'un bassin d'emploi dans lequel les intégrer ; les conséquences de l'ouverture en termes d'accessibilité territoriale ; l'existence de ressources préexistantes, notamment immobilières, facilement mobilisables.
En tout état de cause, le SMV concernant désormais les armées de terre, de mer et de l'aire, il faudra également déterminer quelle armée devra prendre en charge cette extension du SMV.
3. Résoudre les difficultés de recrutement
Si le recrutement du SMV fonctionne bien sur le plan qualitatif, celui-ci rencontre de fortes difficultés sur le plan quantitatif. Ainsi, le SMV a du mal à recruter au-delà de 1000 volontaires stagiaires par an.
Le SMV n'a réussi à dépasser le plafond des 1100 volontaires stagiaires qu'en 2018 et 2021. Seuls 997 volontaires stagiaires ont pu être recrutés en 2022. Par ailleurs le nombre de recrutements depuis 2018 fluctue d'une année à l'autre entre 1000 et 1200 recrues sans qu'une tendance ne se dégage.
Ce défaut de recrutement est une difficulté structurelle de nature à rendre inopérant l'objectif de 1500 volontaires stagiaires par an et à remettre en cause les investissements réalisés pour permettre d'accueillir autant de volontaires.
Une stratégie de recrutement permettant d'atteindre les objectifs de volontaires stagiaires fixés devra être définie dans la stratégie pluriannuelle du SMV.
Cette dernière pourrait passer par un accès à de nouveaux bassins de recrues potentielles et par une meilleure information des organismes prescripteurs du SMV.
4. Mieux intégrer le SMV au sein des politiques de la jeunesse
Le SMV s'intègre au plan « 1 jeune, 1 solution » et s'ajoute à une très longue liste de dispositifs en faveur de l'insertion professionnelle des jeunes :
- contrat d'engagement jeune, dont le SMV est une modalité de réalisation ;
- le parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (PACEA) ;
- les contrats initiative emploi (CIE) et les parcours emplois compétence (PEC) ;
- le travail alternatif payé à la journée (TAPAJ) ;
- le plan d'investissement dans les compétences (PIC).
Au sein de ces dispositifs d'accompagnement des jeunes vers l'emploi, le SMV comporte des spécificités distinctives. Il est ainsi particulièrement intensif, se démarque par sa militarité et l'importance qu'il attache au passage du permis B par les volontaires.
Cependant, du fait de sa relative confidentialité et du peu de volontaires annuels, le SMV passe généralement inaperçu au sein de ces dispositifs et n'est connu des missions locales et des services de pôle emploi concomitants des centres et régiments SMV qu'au prix d'efforts considérables et soutenus de la part de ces SMV locaux.
Les agents des SMV doivent réaliser un travail de communication très important à destination des agents des missions locales et de pôle emploi, qu'il faut donc renouveler à chaque rotation de personnel.
Le rapporteur spécial regrette l'absence de communication institutionnelle des organismes prescripteurs potentiels du SMV sur l'existence de ce dernier et sur le rôle qu'il peut jouer dans le cadre de la politique d'insertion professionnelle de la jeunesse.
Le SMV indique travailler à l'élaboration d'une convention avec la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) afin d'assurer sa visibilité. Le rapporteur spécial salue vivement cette initiative.
Recommandation : Mieux coordonner le SMV avec les autres dispositifs d'aide à la jeunesse et organiser une communication institutionnelle sur le SMV auprès des organismes prescripteurs. |
* 38 Par exemple, le centre d'Ambérieu accueille un peu plus de 100 volontaires stagiaires pour la totalité de leur formation et s'occupe d'une partie de la formation initiale et de la formation complémentaire des 100 volontaires de l'antenne de Marseille, le tout avec 46 agents et 13 volontaires experts.