B. UNE AUTONOMIE QUI PEUT S'EXPRIMER DANS QUATRE DOMAINES

L'autonomie des établissements scolaires s'exerce de manière encadrée. Comme le rappelle l'article L. 421-4 du code de l'éducation, la mise en oeuvre de l'autonomie pédagogique et éducative doit se faire « dans le respect des dispositions législatives et règlementaires en vigueur et des objectifs définis par les autorités compétentes de l'État ». Néanmoins, dans les textes, les marges de manoeuvre des écoles et établissements scolaires sont importantes.

1. Une possibilité d'autonomie croissante en matière pédagogique et éducative

Ce volet est historiquement le premier à être apparu - dès 1973 - et s'est progressivement enrichi.

Il s'exerce notamment dans les domaines suivants : l'organisation du temps scolaire et les modalités de la vie scolaire, la préparation de l'orientation ainsi que de l'insertion sociale et professionnelle des élèves, la définition, compte tenu des schémas régionaux, des actions de formation complémentaire et de formation continue destinées aux jeunes et aux adultes, l'ouverture de l'établissement sur son environnement social, culturel, économique, le choix de sujets d'étude spécifiques à l'établissement, en particulier pour compléter ceux qui figurent aux programmes nationaux, sous réserve de l'accord des familles pour les élèves mineurs, les activités facultatives qui concourent à l'action éducative organisées à l'initiative de l'établissement à l'intention des élèves ainsi que les actions d'accompagnement pour la mise en oeuvre des dispositifs de réussite éducative4(*).

2. La gestion des moyens horaires

Les établissements scolaires disposent d'une autonomie pour « l'organisation en classes et en groupes d'élèves ainsi que les modalités de répartition des élèves » et pour « l'emploi des dotations en heures d'enseignement et, dans les lycées, d'accompagnement personnalisé mises à la disposition de l'établissement dans le respect des obligations résultant des horaires réglementaires »5(*).

Dès 1983, les établissements se voient attribuer une dotation horaire globale (DHG). L'enveloppe attribuée à chaque établissement est définie en fonction du nombre d'élèves. Tant pour le collège que le lycée, le rectorat peut abonder ces enveloppes horaires selon des critères qu'il définit. Il peut s'agir de critères sociaux (en fonction de l'indice de positionnement social de l'établissement, ou du nombre d'élèves issus d'une école située en éducation prioritaire par exemple), mais également pour mettre en oeuvre une politique académique. Ainsi, à la rentrée 2022, l'académie de Lille a souhaité faire un effort particulier sur la classe de seconde, pour mieux accompagner les élèves dans leurs parcours scolaires et éviter les décrochages : cinq lycées généraux et technologiques bénéficient de 38,5 heures pour la création d'une classe de seconde, afin de diminuer le nombre d'élèves par classe ; et six lycées professionnels de dix heures afin de renforcer l'accompagnement personnalisé.

L'attribution de la dotation horaire globale

L'article 6 de l'arrêté du 19 mai 2015 relatif à l'organisation des enseignements dans les classes de collège prévoit « outre la dotation horaire correspondant aux enseignements obligatoires, une dotation horaire, sur la base de trois heures par semaine et par division », à disposition des établissements scolaires. À titre d'exemple, un collège de 16 divisions (soit schématiquement 4 classes par niveau) dispose de 48 heures « d'autonomie », qu'il peut utiliser pour « favoriser le travail en groupe à effectifs réduits » ou « les interventions conjointes de plusieurs enseignants », ou encore proposer un ou plusieurs enseignements facultatifs, listés à l'article 7 du même décret. Il s'agit notamment des langues et cultures de l'Antiquité, une deuxième langue vivante étrangère ou régionale, un enseignement de langues et cultures européennes, les langues et cultures régionales ou encore une chorale.

Pour le lycée, c'est une enveloppe de 12 heures par semaine et par division en seconde, et de 8 heures en première et terminale6(*) qui est laissée à la disposition des établissements. Le conseil pédagogique doit être consulté sur l'utilisation de ces heures. Elles peuvent notamment être utilisées pour la mise en place d'une aide personnalisée, une limitation des effectifs par classe, la création d'options ou encore des heures d'orientation.

3. Le volet administratif et budgétaire

Conséquence de la création des établissements publics locaux d'enseignement, les collèges et lycées disposent d'un budget propre. Depuis 1985, le chef d'établissement est informé avant le 1er novembre du montant prévisionnel de la participation aux dépenses d'équipement ou de fonctionnement par le département pour les collèges, et par la région pour les lycées. Sur cette base, il prépare le projet de budget qu'il soumet au conseil d'administration. Il est transmis au représentant de l'État, à la collectivité de rattachement ainsi qu'à l'autorité académique dans les cinq jours suivant le vote. Celui-ci devient exécutoire dans un délai de trente jours7(*).

Doté de la personnalité juridique, l'établissement peut être signataire de marchés, contrats et conventions. Il peut également recevoir des financements dans le cadre d'appels à projets.

4. L'expérimentation pédagogique

Parallèlement aux marges de manoeuvre communes à l'ensemble des établissements, la loi d'orientation pour l'avenir de l'école de 2005 a défini un nouveau cadre pour les expérimentations au sein des établissements scolaires.

Ces expérimentations, d'une durée de trois à cinq ans, peuvent porter sur l'enseignement des disciplines, l'interdisciplinarité, l'organisation pédagogique de la classe, de l'école ou de l'établissement, la coopération avec les partenaires du système éducatif, les échanges ou le jumelage avec des établissements étrangers d'enseignement scolaire. La loi relative à l'encadrement de l'utilisation du téléphone portable dans les établissements d'enseignement scolaire du 3 août 2018 y a ajouté l'utilisation des outils et ressources numériques.

La loi pour une école de la confiance de 2019 a étendu les domaines d'expérimentation à la liaison entre les différents niveaux d'enseignement, l'enseignement dans une langue vivante étrangère ou régionale, la répartition des heures d'enseignement sur l'ensemble de l'année scolaire, les procédures d'orientation des élèves et la participation des parents d'élèves à la vie de l'établissement8(*). Cette loi prévoit également une association systématique des collectivités locales concernées à la définition des grandes orientations des expérimentations menées par l'éducation nationale et à leurs déclinaisons locales. Elle permet, sous réserve de l'accord des enseignants concernés, de modifier la périodicité des obligations réglementaires de service. Cette disposition vise à rendre possible un service des enseignants sur une base plus large que la semaine - le mois, le trimestre ou l'année -, pour permettre, par exemple des regroupements d'heures d'enseignement.

Cette possibilité d'expérimentation existe depuis bientôt 20 ans. Les rapporteurs estiment opportun que le ministère procède à un bilan de ce dispositif, notamment pour connaître le devenir des expérimentations pédagogiques menées.


* 4 Article L. 421-2 du code de l'éducation.

* 5 Article R. 421-2 du code de l'éducation.

* 6 Arrêté du 16 juillet 2018 relatif à l'organisation et aux volumes horaires de la classe de seconde des lycées d'enseignement général et technologique et des lycées d'enseignement général et technologique agricole.

* 7 Sauf si l'autorité académique ou la collectivité territoriale de rattachement a fait connaitre son désaccord motivé sur le budget.

* 8 Article L. 314-2 du code de l'éducation.