B. L'AGRICULTURE EN PREMIÈRE LIGNE DE LA BATAILLE DE L'EAU

1. Pas d'agriculture sans eau
a) L'agriculture a besoin d'importantes quantités d'eau

Les plantes ont besoin de cinq éléments pour se développer :

- de lumière, fournie par le soleil ou de manière artificielle. La lumière permet aux plantes de fabriquer du glucose, indispensable à leur croissance ;

d'air, contenant notamment de l'azote, de l'oxygène et du dioxyde de carbone. En utilisant l'énergie lumineuse, les plantes allient chimiquement le dioxyde de carbone et l'eau pour créer du glucose et de l'oxygène, c'est la photosynthèse ;

d'eau, indispensable à la photosynthèse et contenant des éléments nutritifs nécessaires à la croissance ;

- de nutriments et principalement d'azote, de phosphore et de potassium. Ces éléments sont absorbés par les racines des plantes. Les engrais fournissent le complément et participent à accélérer la croissance de la plante ;

d'espace pour croitre, développer leur système racinaire indispensable à l'absorption de l'eau et des nutriments.

Ces cinq éléments permettent de comprendre nombre d'enjeux actuels entourant l'agriculture : fixation du carbone, répartition de l'espace agricole ou encore problématique de l'accès à la ressource en eau.

Les besoins en eau des différentes cultures interviennent en quantités variables et à des moments de l'année qui ne sont pas identiques, même si l'essentiel du besoin en eau est concentré durant la période de pousse.

Comme l'indique l'INRAE dans ses contributions écrites, il n'est pas aisé d'obtenir des données relatives à la consommation moyenne d'eau des principales productions céréalières. Les besoins en eau sont en effet variables selon les conditions climatiques, les variétés utilisées ou encore le type de sol.

L'agriculture représente un peu moins de 10 % des prélèvements d'eau dans les milieux naturels, mais l'eau d'irrigation est considérée comme très majoritairement consommée car elle est absorbée par la végétation et ne réalimente donc pas, ou peu, les réserves en eau (cours d'eau, nappes phréatiques). Sachant que 90 % de l'eau consommée en agriculture l'est aux fins d'irrigation, on peut estimer qu'environ 51 % de l'eau consommée en France est destinée à l'irrigation agricole.

Selon le ministère de la transition écologique, l'agriculture peut représenter jusqu'à 80 % des consommations d'eau du pays en été. Dans un contexte de tensions autour de la disponibilité de la ressource dans certains territoires, des conflits d'usage peuvent dès lors émerger.

Les prélèvements d'eau destinés à l'agriculture peuvent s'effectuer dans les eaux de surface ou bien par pompage dans les nappes phréatiques. Pour réduire la pression sur la ressource en été, certains agriculteurs irrigants disposent de réserves dites de substitution alimentées par des pompages effectués hors saison sèche.

Dans une moindre mesure que l'agriculture stricto sensu, l'industrie agroalimentaire est également consommatrice d'eau. Selon les données communiquées par l'Association de la transformation laitière (ATLA) l'industrie laitière consomme 70 millions de m3 d'eau par an. Mais elle est aussi elle-même fortement productrice d'eau non conventionnelle, issue du processus de concentration du lait. C'est d'ailleurs à ce titre qu'elle est la principale filière du monde agricole et agroalimentaire à encourager l'évolution du cadre règlementaire relatif à la réutilisation des eaux usées, y voyant un potentiel de réutilisation de 16 millions de m3 par an, contre seulement 5 millions actuellement222(*), et permettant ainsi une baisse de la pression sur la ressource en eau puisée dans le milieu.

Répartition des volumes d'eau utilisés en agriculture en milliards m3/ an

Source : Secrétariat général de la Planification écologique

b) L'irrigation est consubstantielle à l'agriculture

L'histoire de l'agriculture se confond avec celle de l'irrigation. Les traces les plus anciennes d'activités agricoles ont été retrouvées au niveau du croissant fertile, zone unique qui a vu certaines des premières civilisations du monde émerger, serpentée par le Jourdain, l'Euphrate, le Tigre et le Nil. Il n'est pas étonnant que ce soit également dans cette région que l'on retrouve les plus anciennes traces d'irrigation, vers 5 000 av. J.-C.

Hérodote évoque, dans son Enquête, le légendaire lac Moeris, creusé, écrit-il, par la main de l'homme, complété de canalisations souterraines de manière à guider les flots du Nil223(*). Même si la recherche a depuis établi qu'il est peu probable que ce lac ait été en réalité artificiel, ce témoignage nous enseigne que l'homme a toujours cherché à maitriser et orienter les eaux à son profit.

En 2000, le système d'irrigation de Dujiangyan, en Chine, a été classé au patrimoine mondial de l'Unesco. Ce système d'irrigation construit au IIIe siècle av. J.-C. « continue de réguler les eaux de la rivière Minjiang et de les distribuer sur les terres fertiles des plaines de Chengdu224(*) ».

Plus proche de nous, l'héritage du Pont du Gard témoigne encore de nos jours de l'ingéniosité humaine dans la conduite et l'utilisation de l'eau. Destiné prioritairement à alimenter Nîmes en eau potable, à un débit de 400 litres par seconde, les agriculteurs des abords de l'aqueduc romain de 49,5 kilomètres de long furent autorisés, au IIIe siècle, à percer la base du canal pour irriguer leurs champs. Dès ces époques lointaines, les questions d'accès et de partage de l'eau existaient donc bien.

Selon les chiffres de la FAO, l'agriculture représentait en 2021 dans le monde 72 % des consommations d'eau et l'agriculture irriguée couvrait 20 % de la superficie totale de terres cultivées, mais fournissait 40 % de la production alimentaire mondiale totale. On observe un stress hydrique élevé dans les zones intensément irrigués et densément peuplées, ce qui explique les tensions de plus en plus vives autour que la question du partage de l'eau225(*). Dans les pays en développement, l'utilisation de l'eau pour l'irrigation demeure vitale pour sécuriser la production alimentaire.

L'irrigation ne concerne qu'une part réduite des surfaces exploitées en France. L'essentiel de l'apport en eau pour les productions agricoles repose sur une « agriculture pluvieuse ». L'irrigation n'intervient que là où les apports naturels en eau sont insuffisants et dans les territoires subissant des épisodes de sécheresse fréquents.

D'après les données du recensement agricole de 2020, 6,8 % de la surface agricole utile (SAU) est irriguée, soit plus de 1,8 million d'hectares sur environ 27 millions d'hectares à vocation agricole. L'irrigation est en légère progression par rapport au recensement de 2010 : il y a une décennie, 5,7 % de la SAU était irriguée. Il convient de noter une diversification des cultures irriguées avec une baisse notable des surfaces de maïs irriguées, de 40 % en 2010 à 34 % en 2020226(*). Les fruits et légumes représentent 15 % du total des surfaces irriguées. 50 % des surfaces de vergers et 60 % des surfaces de légumes sont irriguées.

Les conditions climatiques influent sur les besoins en irrigation. Ainsi, moins de 1 % des surfaces sont irriguées dans le Nord-Est et en Normandie, contre près de 20 % en basse vallée du Rhône, dans le Sud-Ouest ou en Alsace227(*).

Répartition des surfaces irriguées en 2020

Source : Agreste

Les finalités de l'irrigation varient selon les territoires et les cultures. Elles sont de trois ordres : amélioration de la production (Sud-Ouest et zones à pluviométrie aléatoire), sécurisation des rendements en cas de sécheresse (Centre, Bassin Parisien) et amélioration de la qualité des productions (semences, maraîchage, horticulture, vergers, cultures contractuelles).

Comment détermine-t-on le besoin en eau d'une culture ?

La détermination des besoins en eau d'une culture se fonde sur plusieurs paramètres :

• détermination de l'évapotranspiration de référence d'une culture en fonction de paramètres donnés ;

• détermination du besoin maximal en eau (ETM), qui résulte d'une pondération de la valeur obtenue grâce à l'étape précédente par un coefficient cultural dépendant du stade de développement de la plante ;

• détermination des stocks d'eau dans le sol (réserve utile) utilisables (RU) et facilement utilisables (RFU) par une plante, qui dépend de la texture de ce sol ;

• calcul des apports en eau à l'échelle de la parcelle à l'aide d'un pluviomètre, permettant de différencier l'irrigation de la pluviométrie ;

• réalisation du bilan hydrique, consistant à comparer à la semaine la différence entre l'ETM et les apports en eau issus des pluies et de l'irrigation, avec les valeurs de RFU. Si le bilan aboutit à une valeur inférieure à la RFU, un apport supplémentaire par irrigation est possible ; si la valeur est supérieure à la RU, les apports sont trop importants et l'irrigation doit être réduite.

L'irrigation contribue grandement à la régularité de la production agricole et donc à la performance économique des exploitations.

 
 

Par ailleurs, l'irrigation des prairies est en train de devenir un enjeu fort du maintien de l'élevage. Comme l'indique le délégué interministériel au Varenne agricole de l'eau dans sa contribution écrite, « l'élevage est grandement fragilisé par les sécheresses : le maintien de la productivité des prairies dans des conditions de plus en plus sèches est une grande difficulté. Ces prairies sont la base de l'alimentation dans l'élevage allaitant, et tiennent un rôle central de biodiversité de puits de carbone, mais également pour le maintien d'une agriculture de polyculture élevage qui permet un transfert de fertilité vers les cultures ».

Le maïs, culture très consommatrice d'eau, mais très productive

Originaire d'Amérique du Sud, cette plante tropicale, originellement téosine, dont la domestication remonte à plus de 9 000 ans, s'est répandue sur tous les continents par l'intermédiaire des conquistadores, qui pensaient avoir découvert du « blé d'Inde ». Hybridée et faisant l'objet d'un constant travail de sélection, ses rendements sont passés de 10 à 50 quintaux par hectare à 80 à 130 quintaux. Ses utilisations se sont multipliées puisque le maïs peut servir à l'alimentation humaine comme animale et, plus récemment, à l'industrie de la chimie du végétal (matériaux-bio-sourcés, bioéthanol, biogaz) ainsi qu'à l'industrie pharmaceutique (l'amidon servant dans la production de médicaments).

La pousse du maïs nécessite beaucoup d'eau. Sachant qu'environ 32 % de l'irrigation est destinée à la production de maïs grain et de maïs semences, et que 7 % l'est pour le maïs fourrage et autres cultures fourragères, il est possible d'estimer la consommation annuelle totale du maïs à un peu moins d'1 milliard de m3.

Il n'est, en revanche, pas aisé de déterminer un volume type d'eau consommée par hectare, dans la mesure où la consommation d'eau est fonction des conditions climatiques locales, des variétés choisies, de l'intensité de l'irrigation, ou encore de la nature du sol. Comme le souligne l'INRAE, il est plus pertinent de parler de fourchette de consommation.

Plusieurs estimations sont disponibles, permettant d'avoir une idée de cette fourchette de consommation. La FAO estime le besoin en eau du maïs à 5 750 m3 par hectare228(*), et le CNRS aboutit au chiffre de 4 994 m3 pour le maïs grain et 4 268 m3 pour le maïs fourrage229(*). Enfin, la compagnie d'aménagement du Bas-Rhône et du Languedoc (BRL) fournit des chiffres concernant les cultures irriguées en 2019 en Occitanie et aboutit à un besoin en eau du maïs grain de 7 610 m3 par hectare230(*).

En somme, la fourchette pertinente pour estimer le besoin en eau du maïs semble être comprise entre 4 500 et 7 500 m3 d'eau par hectare.

Cette fourchette représente le besoin en eau, et non les quantités irriguées. En Occitanie en 2019, la BRL évalue le besoin annuel d'irrigation du maïs à 4 730m3 par hectare en année médiane.

Ce chiffre de 4 730 m3 n'est pas très éloigné des besoins d'autres cultures : ainsi, le besoin annuel d'irrigation pour la production de cerises est de 3 230 m3, il est de 7 870 m3 pour le kiwi, 5 000 à 6 000 m3 pour la pêche, 5 590 m3 pour la poire et la pomme, 7 730 m3 pour la luzerne ou encore 3 410 m3 pour le sorgho. D'autres cultures ont, en revanche, des besoins bien moindres, et notamment le blé dur, 1 390 m3, ou bien le colza, 2 290 m3, ces cultures exprimant des besoins au printemps.

Enfin, lorsqu'une comparaison de la quantité moyenne d'eau nécessaire à la production d'un kilogramme de matière sèche est effectuée, la productivité du maïs apparait assez clairement. Selon le CNRS, 238 litres d'eau sont nécessaires à la production d'un kg de maïs fourrage et 454 litres pour le maïs grain. Ce chiffre est de 590 pour le blé et la pomme de terre ou encore de 900 pour le coton.

La véritable difficulté concernant la production de maïs (dont une partie importante de la production est destinée à l'alimentation animale) tient en réalité à sa temporalité : ses besoins en eau sont au maximum en juillet et août, au moment où cette dernière est la plus rare.

Quantité moyenne d'eau nécessaire (en litres) pour fabriquer
1 kg de matière sèche

Source : CNRS

Une des priorités du monde agricole et de la recherche technique est depuis longtemps celle de l'usage efficient de l'irrigation, ce qui, depuis plusieurs décennies maintenant, passe par l'amélioration des techniques et du matériel employés. Selon l'Association de coordination technique agricole (ACTA), le profil d'équipement des exploitations agricoles en matériel d'irrigation, en pourcentage de la surface équipée, est le suivant :

• enrouleur : 70 % ;

• pivot, rampes : 20 % ;

• couverture intégrale : 2 à 5 % ;

• irrigation localisée dit goutte-à-goutte : 5 à 7 %.

Le taux d'utilisation de systèmes d'aide à la décision pour le pilotage de l'irrigation est, quant à lui, estimé à 17 %.

C'est bien souvent le coût à l'hectare qui préside au choix du mode d'irrigation, ainsi que le type de culture visée. Pour irriguer une surface de 30 hectares de maïs, l'investissement nécessaire s'élève à 40 590 euros à l'aide d'un enrouleur, 46 650 euros à l'aide d'un pivot et monte à 118 900 euros pour du goutte-à-goutte enterré. À ces coûts d'acquisition s'ajoutent des charges fixes, opérationnelles, ou encore de main d'oeuvre231(*). Le goutte-à-goutte est le système le plus coûteux, et l'est encore plus lorsqu'il est enterré. Il n'est donc rentable que pour des cultures pérennes à forte valeur ajoutée comme la vigne ou encore l'arboriculture.

De manière générale, l'irrigation s'est perfectionnée depuis les années 1980. Dans sa contribution écrite, l'ACTA retrace les progrès qu'elle enregistre depuis 40 ans :

Années 1980-1990 : mise en place des réseaux d'avertissement dans les principaux bassins d'irrigation ; utilisation du bilan hydrique manuel, bilanomètre ; premières expérimentations et diffusion des sondes tensiométriques à colonne d'eau ; premières campagnes de contrôle et réglage des installations d'irrigation ;

Années 1990-2000 : développement des gouteurs autorégulants en microirrigation (maitrise des variations de pression) ; - poursuite du développement des avertissements irrigation via le bilan hydrique ; - développement des sondes tensiométriques de type diélectrique (plus fiables) ; références expérimentales sur les volumes, doses et fréquences d'irrigation sur différentes cultures (maïs, sorgho, soja, tournesol,...) ; lancement des rampes basse pression et rampes frontales en complément des installations pivot ; lancement d'Irrinov, méthode de pilotage de l'irrigation des cultures ; travaux sur le réglage optimal des canons d'irrigation ; développement du logiciel Lora pour étudier la répartition optimale de l'eau sur les cultures de l'exploitation et du territoire.

Années 2000-2010 : développement des canons à retour lent pour une meilleure régularité ; poursuite du développement des sondes tensiométriques ; apparition des premières sondes capacitives (gain de précision) ; développement d'Irriparc (réglage du canon, secteur arrosé et espacement entre passages, en fonction du vent, force et direction) ; mise en place de l'UMT Eau Arvalis-Inra en vue de la mise au point de simulateurs de gestion de l'eau à l'échelle du territoire ; réactualisation des courbes de réponse à l'eau sur les différentes espèces (maïs, sorgho, soja, tournesol, etc.) en vue de re-paramétrer les logiciels de gestion de l'eau ; mise à jour du modèle de culture STICS avec ces nouvelles références pour tester de nouveaux scénarios de répartition de l'eau ; utilisation de la télédétection pour la gestion de l'irrigation dans le bassin Adour-Garonne (projet InfoAgri) ;

Années 2010-2020 : retour de la micro-irrigation sur le marché avec le GAG enterré ; mise en place d'essais comparatifs sur les systèmes d'irrigation (GAG/aspersion) ; perfectionnement des outils Lora et Azalee (outils d'aide au choix d'assolement pour une meilleure gestion des volumes d'eau d'irrigation) ; développement d'Irré-Lis, bilan hydrique numérisé.

Ce perfectionnement de l'irrigation a été mis en évidence à l'occasion des auditions conduites par le rapporteur de la mission d'information. Auditionné, André Bernard, vice-président de Chambres d'agriculture France et président de la Chambre régionale d'agriculture de Provence-Alpes-Côte d'Azur, indiquait « quand j'ai commencé mon activité, je prélevais dans le canal quelques heures par semaine entre 5 000 et 7 000 mètres cubes par hectare ; aujourd'hui, 2 500 à 3 000 mètres cubes à l'hectare, voilà ce qu'on a réussi à faire en une génération ».

Dans sa contribution écrite, le délégué interministériel au Varenne agricole de l'eau souligne lui aussi que l'efficacité de l'irrigation a progressé de 30 % entre 1990 et 2010, selon des études de l'INRAE.

L'INRAE a produit en 2017 une étude pour le ministère de l'agriculture, mettant en évidence qu'il reste encore de très importantes marges de manoeuvre pour économiser l'eau, par l'amélioration des matériels d'irrigation et de leur pilotage. Ces économies seraient de l'ordre de 30 à 40 % si toutes les mesures d'économies disponibles étaient prises (rajeunissement du parc d'irrigation, développement du goutte-à-goutte, développement de capteurs et de logiciels d'avertissement à l'irrigation).

La poursuite de la modernisation des outils d'irrigation est d'ailleurs rendue nécessaire au regard des conséquences du changement climatique sur les cultures déjà irriguées. Comme le souligne le délégué interministériel, « À systèmes agricoles fixes, les besoins en eau d'irrigation augmentent en valeur absolue du fait du changement climatique (chaleurs, évapotranspiration plus intense) ».

Le goutte-à-goutte : solution pour une plus grande efficience de l'irrigation ?

Le goutte-à-goutte est souvent présenté comme la solution permettant d'économiser de grandes quantités d'eau, et de parvenir à une irrigation très efficiente, notamment par la réduction des pertes liées à l'évaporation. La réalité est plus nuancée. Plusieurs essais menés aboutissent à des économies d'eau de l'ordre de 10 % par rapport à un système par enrouleur, voire à l'absence de différences statistiquement significatives232(*).

L'ACTA indique que la plus-value de ces systèmes dépend en réalité des conditions climatiques et de la nature du sol. Celle-ci serait plus importante dans des conditions très chaudes et venteuses, sur le modèle israélien, mais beaucoup plus modeste dans le cas de sols profonds à la réserve hydrique plus importante.

Enfin, la perception de nombre d'agriculteurs de l'efficacité des systèmes de goutte-à-goutte tient aussi au simple effet du changement de matériel et du changement de conduite. Les matériels les plus récents sont les plus efficients, et les changements de conduite, allant vers un pilotage rationalisé de l'irrigation, aboutissent le plus souvent à d'importes économies d'eau.

c) Comme tout prélèvement d'eau, ceux destinés à l'irrigation agricole sont encadrés

L'usage de l'eau à des fins agricoles n'est ni gratuite, ni dénuée d'encadrement.

L'article L. 213-10 du code de l'environnement instaure en effet une série de redevances liées aux prélèvements, au stockage de l'eau, ainsi qu'aux pollutions du milieu233(*). En particulier, l'article L. 213-10-9 instaure une redevance pour prélèvement sur la ressource en eau à partir d'un certain seuil fixé à 10 000 m3 et réduit à 7 000 m3 en ZRE. Ce sont les agences de l'eau bénéficiaires de cette redevance qui fixent les montants, dans la limite des plafonds définis par la loi. Ainsi, l'Agence de l'eau Loire-Bretagne facture-t-elle les prélèvements d'eau à 1,42 centime d'euro par m3 hors ZRE et 2,13 en ZRE234(*).

Outre les redevances, le coût de l'eau en agriculture est principalement constitué du coût de construction des infrastructures nécessaires à l'irrigation et du coût de l'énergie et de la maintenance. Dans sa contribution écrite, Irrigants de France, se référant à une étude Arvalis, estime le coût moyen de l'irrigation de 20 à 30 centimes d'euros par m3.

Si le coût de l'eau constitue une forme de régulation, l'irrigation agricole fait aussi et surtout l'objet d'une régulation réglementaire concernant les prélèvements.

L'article R. 211-21-1 du code de l'environnement dispose que pour la mise en oeuvre d'une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau conformément aux objectifs fixés par l'article L. 211-1 du même code, les volumes d'eau dont le prélèvement est autorisé permettent, dans le respect des exigences de santé, de salubrité publique, de sécurité civile et d'alimentation en eau potable de la population, de satisfaire ou de concilier les différents usages anthropiques et le bon fonctionnement des milieux aquatiques dépendant de cette ressource.

La régulation des prélèvements s'opère, dans le cas général, dans le cadre des procédures de déclaration ou d'autorisation des ouvrages ayant vocation à prélever et stocker de l'eau235(*).

De plus, un encadrement spécifique des prélèvements est prévu concernant les zones en situation de déficit quantitatif. Cet encadrement a été largement revu et approfondi par le décret n° 2021-795 du 23 juin 2021 relatif à la gestion quantitative de la ressource en eau et à la gestion des situations de crise liées à la sécheresse, qui faisait suite à l'épisode de sécheresse de 2019 et aux recommandations de deux rapports d'inspection du CGEDD et du CGAAER. Il a été complété, enfin, par le décret n° 2022-1778 du 29 juillet 2022 relatif à la gestion quantitative de la ressource en dehors de la période de basses eaux.

Dans ces zones, sous-bassins ou fractions de sous-bassins en zone de répartition des eaux ou identifiés dans le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) comme sous-bassins en déséquilibre quantitatif ou montrant un équilibre très fragile entre la ressource et les prélèvements, conformément à l'article R. 213-14 tel qu'issu du décret du 23 juin 2021 susmentionné, la ressource fait l'objet d'une évaluation des volumes prélevables, pilotée et coordonnée par le préfet coordonnateur de bassin. Par suite, il arrête les volumes prélevables et leur répartition par usage. Le décret du 29 juillet 2022 susmentionné vient compléter l'article R. 213-14 en ouvrant la possibilité au préfet coordonnateur de bassin de mener des évaluations des volumes pouvant être disponibles pour les usages anthropiques hors période de basses eaux236(*).

L'article R. 211-21-1 précise que les autorisations sont délivrées au regard de la ressource disponible qui est constituée, pour un usage donné, de la part du volume prélevable pour cet usage, ainsi que des volumes d'eau stockés par prélèvements ou captation du ruissellement hors période de basses eaux et des volumes transférés à partir d'une autre ressource en équilibre.

Qu'est-ce qu'un volume prélevable ?

L'article R. 211-21-1 du code de l'environnement donne une définition du volume prélevable. Il s'agit du volume maximum que les prélèvements directs dans la ressource en période de basses eaux, autorisés ou déclarés tous usages confondus, doivent respecter en vue du retour à l'équilibre quantitatif à une échéance compatible avec les objectifs environnementaux du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux.

Ce volume prélevable correspond au volume pouvant statistiquement être prélevé huit années sur dix en période de basses eaux dans le milieu naturel aux fins d'usages anthropiques, en respectant le bon fonctionnement des milieux aquatiques dépendant de cette ressource et les objectifs environnementaux du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux237(*).

Pour les eaux de surface, constituées des cours d'eau et de leurs nappes d'accompagnement, l'évaluation du volume prélevable prend en compte le régime hydrologique du cours d'eau, ses relations avec les nappes ainsi que l'état biologique et le fonctionnement des milieux aquatiques dépendant des eaux de surface, c'est-à-dire des zones humides, des milieux annexes dépendant des débordements ou du ruissellement et des milieux avals, le cas échéant, littoraux. Elle intègre le volume de réalimentation éventuel des cours d'eau.

Pour les eaux souterraines, l'évaluation prend en compte le rythme de recharge des nappes de fonctionnement annuel ou pluriannuel. Le volume prélevable en eaux souterraines ne dépasse pas la capacité de renouvellement de la ressource disponible, compte tenu des besoins d'alimentation en eau des écosystèmes aquatiques de surface et des zones humides directement dépendants.

Le concept de « volume prélevable » est relativement nouveau. La détermination du volume prélevable, qui se fait sous la responsabilité des CLE, est le point central de l'établissement des demandes d'autorisations uniques de prélèvement des organismes uniques de gestion collective (OUGC). Les méthodes pour déterminer ce volume évoluent au fil des connaissances scientifiques. Deux principales méthodes existent à ce jour.

La première est celle employée par le BRGM, qui, partant d'objectifs quantitatifs déterminés par les SAGE, mobilise des modèles prédictifs très avancés pour aboutir à un volume prélevable respectant les objectifs de retour à l'équilibre quantitatif. C'est sur cette méthodologie, bien établie et faisant l'objet d'actualisations périodiques en fonction de l'état des connaissances, que repose l'AUP actuelle de l'Établissement public du Marais poitevin (EPMP), qui remplit la fonction d'OUGC sur tout le marais, incluant notamment les bassins de la Vendée et de la Sèvre Niortaise.

Une seconde méthodologie, plus récente, complexe et globale est la méthode HMUC. Cette dernière analyse le régime Hydrographique actuel, influencé par l'homme et désinfluencé, c'est-à-dire à l'état naturel. Elle analyse les besoins de l'ensemble des Milieux aquatiques, recense les Usages actuels et futurs et intègre le Climat actuel et futur. Par le croisement de HM et de UC, elle aboutit à une détermination des volumes prélevables. Cette méthodologie a été introduite dans le SDAGE Loire-Bretagne 2016-2011 et l'Agence de l'eau a élaboré un guide méthodologique pour mener à bien de telles études. Elle est désormais préconisée par les pouvoirs publics pour aboutir à une détermination plus fine des volumes prélevables dans les zones en tension comme le Marais poitevin. Cette méthodologie rencontre cependant de fortes difficultés de mise en oeuvre sur certains types de sols, notamment les secteurs sédimentaires infiltrants, au sein desquels, contrairement aux sols imperméables, le débit des cours d'eau est plus ou moins important, voire même quasi nul par effet de l'infiltration dans le sol vers les nappes, selon le lieu de relevé. La mesure des volumes prélevables y est dès lors plus complexe et moins fiable. C'est le cas sur le périmètre du SAGE Sèvre Niortaise.

Le décret de juillet 2022 relatif à la gestion quantitative de la ressource en dehors de la période de basses eaux, précédemment mentionné, introduit pour la première la notion de volumes prélevables en période de hautes eaux, ce qui constitue un nouveau défi méthodologique, et probablement une source de futurs contentieux.

L'encadrement des prélèvements d'eau fait l'objet de dispositions particulières au sein des zones de répartition des eaux (ZRE). L'article R. 211-71 du code de l'environnement définit une ZRE comme une zone caractérisée par une insuffisance, autre qu'exceptionnelle, des ressources en eau par rapport aux besoins. Ces zones sont définies par arrêté du préfet coordonnateur de bassin. Dans ces zones, et conformément à l'article R. 211-73 du même code, le seuil à partir duquel le prélèvement par l'intermédiaire d'ouvrages, installations ou travaux est soumis à autorisation est abaissé à 8 m3 par heure. Les autres prélèvements sont soumis à déclaration. Au sein de ces zones, l'autorité administrative peut, conformément à l'article L. 211-3 du code de l'environnement, constituer d'office un organisme unique de gestion collective (OUGC), qui aura pour mission de répartir entre tous les irrigants de son périmètre les volumes prélevables de l'année. Pour ce faire, l'OUGC sollicite auprès de l'autorité administrative une autorisation unique pluriannuelle de prélèvement d'eau pour l'irrigation et fournit le projet du premier plan annuel de répartition entre les préleveurs irrigants du volume d'eau susceptible d'être prélevé238(*). À la suite du décret du 23 juin 2021, les demandes d'autorisation unique de prélèvements doivent désormais comporter, au sein d'une étude d'impact :

1. les informations concernant l'historique sur les cinq à dix dernières années des volumes prélevés, ainsi que toutes les informations de nature à justifier les besoins de prélèvements ;

2. les informations disponibles sur les ouvrages de stockage pour l'irrigation, existants et envisagés, destinés à permettre la substitution des prélèvements en période de basses eaux par des prélèvements effectués en dehors de cette période ;

3. un argumentaire justifiant que les volumes demandés sont compatibles avec le respect du bon fonctionnement des milieux. Lorsque l'étude d'évaluation des volumes prélevables a été réalisée, cet argumentaire est élaboré au vu de cette étude ;

4. le cas échéant, le programme de mesures de retour à l'équilibre, issu d'une concertation territoriale239(*).

Par suite, un arrêté préfectoral portant autorisation unique de prélèvement est notifié, comprenant de nombreuses prescriptions parmi lesquelles :

1. la durée de l'autorisation, qui ne peut excéder 15 ans ;

2. le volume d'eau maximal annuel prélevable ;

3. les dates des périodes de prélèvements ;

4. la déclinaison de la répartition du volume en fonction de l'origine de la ressource et de la période de prélèvement ;

5. les modalités d'ajustement annuel des répartitions en fonction de l'état de la ressource ;

6. l'échéance prévue du retour à l'équilibre, dans les bassins en déséquilibre structurel en basses eaux240(*).

Par ailleurs, le plan annuel de répartition des prélèvements, outil opérationnel et stratégique de gestion de la répartition annuelle des prélèvements entre les irrigants des différentes zones de gestion, élaboré par l'OUGC en lien avec les services déconcentrés de l'État, fait également l'objet d'une approbation par le préfet241(*).

Selon un rapport du CGAAER d'août 2020, on compte au total 49 OUGC, essentiellement portés par des chambres d'agriculture242(*). Le ministère de la transition écologique explique qu'historiquement les sous-bassins versants ont opéré des choix différents dans leur politique d'encadrement des prélèvements. Le bassin Adour-Garonne, au sein duquel on observe une forte conflictualité autour des enjeux de l'eau, s'est orienté vers une régulation s'appuyant les ZRE, tandis que le bassin Rhône-Méditerranée a très tôt fait le choix d'élaborer des plans de gestion de la ressource en eau PRGR, devenus PTGE.

Carte des ZRE

Source : Ministère de la transition écologique

Enfin, l'agriculture, comme les autres activités consommatrices d'eau, est concernée par les restrictions d'eau dans le cadre des arrêtés sécheresse, avec des possibilités d'adaptations locales pour certaines cultures considérées comme stratégiques, telles que les semences ou encore certains plants pour cultures pérennes. Le guide de mise en oeuvre des mesures de restriction des usages de l'eau en période de sécheresse243(*), qui indique notamment les restrictions minimales à mettre en place selon les niveaux d'alertes, prévoit ainsi une interdiction d'irriguer entre 9 h et 20 h en situation d'alerte renforcée244(*) et une interdiction totale d'irriguer en situation de crise. Ces interdictions ne s'appliquent pas à l'irrigation issue de prélèvements à partir de retenues de stockage déconnectées de la ressource en eau en période d'étiage, sauf dispositions locales contraires245(*).

Quand l'augmentation de l'efficacité de l'irrigation conduit à une augmentation de la consommation d'eau : le paradoxe de Jevons

Des travaux académiques montrent que l'impact d'une amélioration de l'efficacité du système d'irrigation sur la consommation d'eau dépend de trois effets :

- l'effet technique permet de diminuer la consommation d'eau du fait de l'amélioration du matériel. C'est le point central des politiques de gestion d'eau d'irrigation. Il peut par ailleurs générer un effet revenu grâce à l'eau économisée ;

- l'effet productivité renvoie à l'augmentation de la productivité de l'eau en raison d'un matériel d'irrigation plus efficace. Cet effet crée une incitation à utiliser davantage d'eau, annulant alors l'effet technique. C'est le paradoxe de Jevons, ou effet rebond246(*) ;

- l'effet de la variation du coût de l'irrigation créé par l'amélioration de l'efficacité du matériel. Le coût de l'irrigation, en plus du coût initial de l'investissement, est essentiellement composé du coût de l'eau et de celui de l'électricité. L'amélioration de l'efficacité de l'irrigation emporte souvent une augmentation du coût énergétique, et donc du coût réel de l'irrigation247(*).

Ces analyses, fondées sur des travaux empiriques, tendent à montrer que si l'amélioration de l'irrigation vise à une plus grande sobriété des usages de l'eau, la mise en place de régulations contraignantes et notamment des quotas de prélèvements est souvent nécessaire. Cette régulation est d'ores et déjà, pour partie, à l'oeuvre, notamment au sein des zones en tension identifiées par les SDAGE, des ZRE, ou par l'intermédiaire de contrats d'engagement, à l'image de ce qui est mis en place dans les Deux-Sèvres concernant la construction de réserves de substitution dans le bassin de la Sèvre Niortaise248(*).

2. La question sensible des retenues
a) Le terme de retenue d'eau recouvre des réalités et finalités différentes

La France stocke peu l'eau lorsqu'on la compare à ses voisins européens. Comme l'indique le rapport d'information des sénateurs Catherine Belrhiti, Cécile Cukierman, Alain Richard et Jean Sol sur l'avenir de l'eau, seulement « 4,7 % du flux annuel d'eau est stocké en France (nos barrages ont une capacité de 12 milliards de m3 pour une pluie efficace de 190 à 210 milliards de m3), alors que l'on atteint presque 50 % en Espagne (54 milliards de m3 sur 114 milliards de m3 de pluies efficaces) »249(*).

Pour sécuriser leur accès à l'eau, de nombreux agriculteurs disposent de réserves grâce à des ouvrages et installations de stockage, dont l'objectif est de retenir l'eau pour l'utiliser ultérieurement en fonction des besoins.

Le guide juridique de construction de retenues du ministère de la transition écologique les définit comme : « toutes les installations ou ouvrages permettant de stocker de l'eau (réserve, stockage d'eau, plan d'eau, étang, retenues collinaires, retenues de substitution) quel que soit leur mode d'alimentation (par un cours d'eau, une nappe, par une résurgence karstique ou par ruissellement) et quelle que soit leur finalité (agricole, soutien à l'étiage, usage AEP, maintien de la sécurité des personnes, autres usages économiques). »250(*)

Les retenues à usage tout ou partie agricole peuvent donc prendre des formes très variées, avec des modalités de fonctionnement et de gestion très diverses. C'est d'ailleurs cette grande diversité, le manque de données consolidées à l'échelle nationale, ainsi que la diversité des situations hydrologiques locales qui rendent difficile, pour ne pas dire impossible la réponse à une question très médiatique pouvant se résumer ainsi : « Pour ou contre les retenues d'eau ? ».

Les différents types de réserves d'eau à usage agricole

1. Réserve alimentée par pompage dans la nappe

2. Réserve alimentée par pompage dans la rivière

3. Retenue collinaire alimentée par ruissellement (déconnectée du réseau hydrographique)

4. Retenue en dérivation

5. Retenue en barrage sur cours d'eau

Omniprésentes dans le débat public depuis plusieurs années déjà, les retenues d'eau sont paradoxalement des objets peu connus par les citoyens mais aussi par les pouvoirs publics eux-mêmes. Il n'existe en effet pas, à ce jour, de recensement exhaustif du nombre de retenues d'eau par catégorie. Si les grands barrages sont, pour d'évidentes raisons, bien connus, il n'en va pas de même des centaines de milliers de plans d'eau. Dans sa contribution écrite, le ministère de la transition écologique indique qu' « il manque actuellement en France un panorama réel et précis des volumes prélevés et stockés, ainsi que des impacts cumulés sur la ressource en eau ». Le délégué interministériel au Varenne agricole de l'eau, dans sa contribution, indique la même problématique. Dès lors, il devient complexe de poser les bases d'un débat éclairé, sans disposer d'un état des lieux précis faisant consensus.

Dans le cadre des actions conduites suite au Varenne agricole de l'eau, un recensement des plans d'eau supérieurs à 0,1 hectare a été effectué, aboutissant à l'identification de 350 000 plans d'eau, pour beaucoup non utilisés et qui nécessiteront un important travail de caractérisation. Une publication de 2017 de l'OFB évoquait le chiffre de 125 000 ouvrages de stockage, pour un volume total d'environ 3,8 milliards de m3 stockables251(*). Une estimation transmise par le CNRS avance le chiffre de 600 000 plans d'eau en France, dont 98% d'origine humaine252(*).

Les retenues collinaires sont l'une des modalités de stockage de l'eau les plus communes en agriculture. L'eau de pluie d'un versant ruisselle jusqu'à un bassin, dans lequel elle est alors stockée. Il n'existe pas de décompte officiel des retenues collinaires. Elles seraient des dizaines de milliers, voire très probablement davantage. Elles ont connu un fort développement, largement incontrôlé, dans les années 1980 et 1990, et dont les effets sont difficilement mesurables. Ces retenues, souvent de taille modeste, sont susceptibles, notamment, d'impacter les débits à l'étiage puisque récoltant l'eau ruisselant en hiver comme en été.

Il existe aussi des réserves alimentées par pompage dans la nappe ou dans les cours d'eau. La géologie et la topologie vont commander la structure de l'ouvrage.

Les retenues de substitution, en développement ces dernières années, sont des ouvrages destinés à prélever l'eau en période de hautes eaux, en hiver, pour ensuite l'utiliser en été, période de basses eaux, en substitution partielle ou totale aux prélèvements estivaux.

À noter qu'il existe d'autres types de plans d'eau comme les retenues en dérivation d'un cours d'eau, souvent destinées à l'eau potable, ou encore les retenues en barrage sur les cours d'eau, dont les plus importantes servent plusieurs usages, à l'image du lac de Serre-Ponçon, dans les Hautes-Alpes.

Le ministère de l'agriculture recense actuellement 164 projets de réserves, essentiellement pour les retenues de substitution individuelles de volume modeste (en moyenne de 140 000 m3). Les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Nouvelle-Aquitaine concentrent à elles deux près de 50 % des projets.

b) La construction d'ouvrages destinés à prélever et stocker l'eau est très encadrée

La construction d'ouvrages ayant vocation à prélever et stocker l'eau est très encadrée par le code de l'environnement. Pour assurer une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau, les Installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) sont soumis à déclaration ou autorisation, conformément à l'article L. 214-1 du code de l'environnement.

L'article L. 214-2 du même code précise que les IOTA sont définis dans une nomenclature qui détermine le régime de police, déclaration (D) ou autorisation (A), délivrée après enquête publique, auquel elles sont soumises. Le régime dépend des dangers que ces installations présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource et les écosystèmes aquatiques253(*).

Conformément à l'article L. 214-3, l'autorisation est l'autorisation environnementale, régie par les dispositions du chapitre unique du titre VIII du livre Ier. Elle intègre l'autorisation administrative pour les IOTA ainsi que les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), complétée des études de volumes prélevables pour les prélèvements d'eau en zone en tension et de l'évaluation environnementale, comportant une étude d'impact254(*).

Les IOTA soumis à autorisation sont ceux susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles255(*).

Les IOTA soumis à déclaration sont ceux qui n'étant pas susceptibles de présenter de tels dangers, doivent néanmoins respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3 du code de l'environnement, relatifs aux règles générales de préservation de la qualité et de répartition des eaux superficielles, souterraines et des eaux de la mer et aux pouvoirs de l'autorité administrative pour assurer le respect de ces règles.

Comme l'indique le guide juridique de construction de retenues susmentionné, « un projet doit être appréhendé de façon globale, en prenant en compte l'ensemble de ses impacts sur l'eau et les milieux aquatiques. Il peut relever de plusieurs rubriques ; dans ce cas, si l'opération se trouve soumise selon les rubriques concernées à la fois au régime de l'autorisation et à celui de la déclaration, le régime de l'autorisation prévaut en raison du caractère cumulatif des effets sur la ressource et les milieux aquatiques. »

Pour déterminer le régime juridique applicable à un projet de retenu, il convient de répondre à sept questions correspondant à autant de rubriques :

- quelle sera la superficie du plan d'eau occasionné par la retenue ?

- le prélèvement sera-t-il effectué dans une Zone de répartition des eaux (ZRE) ?

- comment sera alimentée la retenue ?

- la retenue sera-t-elle située dans le lit mineur ou majeur d'un cours d'eau ?

- quelle sera la hauteur de la retenue et le volume d'eau stocké ? Lorsque la capacité de la retenue est supérieure à 200 000 m3, le régime applicable est celui de l'autorisation.

- la retenue sera-t-elle située sur une zone humide ?

- quels seront les travaux d'entretien réalisés sur la retenue ?

Ainsi, une retenue sera soumise au régime de l'autorisation si sa superficie est supérieure ou égale à 3 hectares, et à la déclaration dans le cas contraire. De même, si le projet de retenue se situe en ZRE, dès lors que le prélèvement envisagé est supérieur ou égal à 8 m3 par heure, le régime de l'autorisation trouvera à s'appliquer.

Le régime de construction des réserves d'eau est donc strict, de même, par la suite, que les modalités de prélèvements destinés à alimenter ces réserves, particulièrement au sein des ZRE.

c) Des projets, sources de tensions

Réclamée par le monde agricole, pour faire face aux nouvelles conditions hydro-climatiques, la construction de nouvelles réserves fait l'objet de vives controverses et de conflits locaux qui rencontrent un écho médiatique croissant.

Les différents projets existants de retenues d'eau ont des caractéristiques différentes256(*) et sont désignés sous le vocable péjoratif de « bassines ». Plusieurs critiques récurrentes, de différents ordres, sont faites à l'encontre de ces ouvrages.

La question de la « privatisation de l'eau », bien commun, aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'environnement est l'une de ces critiques. En effet, il est souvent reproché aux réserves de mobiliser une grande quantité d'eau pour un nombre restreint d'agriculteurs pratiquant l'irrigation. Au sein même des irrigants, tous n'ont pas accès aux réserves. Et de fait, l'essentiel de l'agriculture étant une « agriculture pluvieuse », ces projets concernent par définition une petite partie des exploitations agricoles. Cette critique semble cependant méconnaitre, à tout le moins dans certains cas, certaines réalités locales. Ainsi, le projet de construction de 16 réserves de substitution dans le bassin de la Sèvre Niortaise, a-t-il pu être qualifié d'inéquitable puisque profitant à une extrême minorité d'agriculteurs. Le chiffre de 6 % a été parfois avancé. En réalité, le projet, qui fait l'objet de nombreux soutiens au sein de la profession agricole, bénéficiera à 93 exploitations raccordées ainsi qu'à 104 exploitations non raccordées par effet de ricochet257(*), soit un total de 529 agriculteurs. Au total, ce sont donc 25 % des agriculteurs du territoire qui bénéficieront de ces réserves. Par ailleurs, outre l'encadrement très fort relatif à la construction puis à l'exploitation de ces ouvrages, l'alimentation en eau potable des habitants demeurant naturellement la priorité absolue, conformément à l'article L. 211-1 du code de l'environnement, les irrigants devront s'acquitter des redevances liées à leurs prélèvements, sans compter les importants coûts liés au projet lui-même.

Un corollaire de la première critique est celle consistant à affirmer que l'agriculture irrigante serait une agriculture intensive dédiée à l'exportation. Le terme d' « agriculture intensive » peut faire débat quant aux réalités qu'il recouvre, selon les derniers chiffres issus du recensement agricole de 2020, on observe une diversification des cultures irriguées et une baisse notable des surfaces de maïs irrigué, de 40 % en 2010 à 34 % en 2020258(*). Les fruits et légumes représentent 15 % du total des surfaces irriguées, suivi d'une diversité de cultures comme le blé (12 %), les cultures permanentes (7 %), les cultures fourragères (7 %) ou encore les pommes de terre (5 %). Certaines de ces cultures, sur certains territoires, ont une vocation exportatrice, comme le maïs, exportations participant à la balance commerciale française ainsi qu'à la sécurisation alimentaire de certains pays. Il ne semble pas possible d'établir un constat unique et général. Par exemple, les productions agricoles du bassin de la Sèvre Niortaise ne sont que très faiblement destinées à l'exportation, l'essentiel de la production de maïs grain est destiné aux quatre usines d'aliments présentes sur le territoire, et l'agriculture en polyculture-élevage y étant assez développée.

Une deuxième critique récurrente est relative à la mobilisation d'importants fonds publics pour la construction des retenues, surtout lorsque ces dernières sont portées par des entités privées et non publiques. Les subventions, provenant essentiellement des agences de l'eau, après avoir fait l'objet d'un moratoire, sont désormais encadrées par l'instruction gouvernementale du 7 mai 2019 relative au projet de territoire pour la gestion de l'eau. Cette instruction précise que « Les financements seront limités, pour les ouvrages à vocation d'irrigation agricole, aux seuls ouvrages ou parties d'ouvrage correspondant à la substitution des volumes prélevés à l'étiage par des volumes prélevés en période de hautes eaux ou en provenance d'autres masses d'eau. Pour les ouvrages multi-usages (eau potable, soutien d'étiage, irrigation, autres usages, etc.), les agences de l'eau pourront éventuellement financer des parties d'ouvrage allant au-delà de la substitution, dans des conditions encadrées par le projet de territoire (...) » Le taux maximum d'aide, limité par l'encadrement européen, s'élève à 70 %, et peut être complété, le cas échéant, par des financements d'autres financeurs (les réserves de la Sèvre Niortaise bénéficient par exemple d'une enveloppe de France Relance). Par ailleurs, l'article 74 du règlement 2021/2115 du 2 décembre 2021 dispose d'une part que « les États membres ne peuvent octroyer une aide pour un investissement destiné à l'amélioration d'une installation d'irrigation existante ou d'un élément d'une infrastructure d'irrigation [...] lorsque l'investissement a une incidence sur les masses d'eaux souterraines ou de surface dont l'état a été qualifié de moins que bon dans le plan de gestion de district hydrographique pertinent » et d'autre part que « les États membres ne peuvent octroyer une aide à un investissement se traduisant par une augmentation nette de la zone irriguée ayant une incidence sur une masse donnée d'eau souterraine ou de surface que si : l'état de la masse d'eau n'a pas été qualifié de moins que bon, dans le plan de gestion de district hydrographique pertinent, pour des raisons liées à la quantité d'eau ». Reste que les crédits publics mobilisés sont bel et bien importants, ceci relevant du programme d'intervention défini par une agence de l'eau, lui-même orienté par les directives de la double tutelle du ministère de la transition écologique et du ministère de l'économie et des finances. Ce financement largement public légitime d'autant plus le droit de regard de l'autorité administrative sur les projets de réserves.

Une autre critique, faisant l'objet d'âpres débats, tient à la proportion de l'eau stockée s'évaporant, et donc perdue. Il n'est à ce jour pas possible de présenter un pourcentage global d'évaporation pour la simple raison que celle-ci dépend de nombreux facteurs comme la profondeur de la réserve, sa surface, la température de l'eau, du degré d'humidité de l'air ou encore le climat plus ou moins venteux. Une publication de 2008 estime le taux d'évaporation des petites retenues du bassin de Ségura en Espagne à 27 %259(*). Ces données semblent cependant largement contredites par les mesures répétées effectuées dans certaines réserves en France. Par exemple, selon les premières données transmises issues des relevés de la réserve de Mauzé-sur-le-Mignon, la fourchette serait de 3 à 7 %, sachant qu'une partie de cette évaporation est compensée par la pluie. La mesure de l'évaporation entre 2016 et 2021 des réserves du Sud-Vendée, pour lesquelles un recul plus grand existe, confirme cet ordre de grandeur. Un rapport d'avril 2022 du délégataire des réserves conclut : « Malgré le côté pessimiste de la mesure des pertes affectées à l'évaporation, les résultats restent cohérents et comparables au calcule théorique si on prend en compte l'effet de la pluie. La moyenne des calculs théoriques est de 2 % en solde évaporation-pluie, les mesures font état d'un pourcentage de perte de 0 à 6 % avec une explication des extrêmes et une moyenne hors valeurs extrêmes de 3 à 4 %. Il est donc raisonnable de retenir une valeur de 3 à 5 % de perte sur l'ensemble de la campagne sur les réserves de substitution du Sud-Vendée ».

Enfin, et de manière plus fondamentale, c'est bien l'impact général sur le milieu des réserves, prises individuellement ainsi que, surtout, collectivement, qui est critiqué. Cet impact est difficilement quantifiable au regard de la variété des situations hydrologiques et géologiques des territoires. L'état des nappes, profondes ou de surface, tout comme celui des cours d'eau est variable d'un territoire à l'autre, même si la tendance est à l'amélioration, du point de vue quantitatif comme qualitatif260(*). De manière générale, il est logique et indéniable que la présence de retenues d'eau impacte le milieu dans lesquelles elles s'inscrivent. Dans leurs contributions écrites, l'INRAE explique : « Une expertise scientifique collective de 2016, pilotée par les chercheurs d'INRAE, a analysé la littérature scientifique sur l'impact cumulé des retenues d'eau. L'expertise a montré que la présence de retenues sur un bassin versant influence toujours le milieu aquatique : elles entraînent une modification du régime hydrologique, et une baisse des débits d'autant plus forte que l'année est sèche ; elles constituent des pièges à sédiments, en particulier pour les particules les plus grossières, ce qui induit une évolution du lit de la rivière, incision ou colmatage selon les cas ; les retenues entraînent en général un réchauffement du cours d'eau, et favorisent l'eutrophisation en leur sein (pouvant entraîner la prolifération d'algues et la production de toxines). Enfin, les retenues modifient les communautés aquatiques, en changeant leurs conditions de vie et en réduisant la connectivité du milieu et donc le déplacement des espèces dans le réseau hydrographique. Le mode d'alimentation d'une retenue (par pompage dans la nappe ou la rivière, par ruissellement, en dérivation du cours d'eau ou en barrage du cours d'eau) et son usage (eau prélevée ou pas) module ces impacts, difficiles à quantifier quand de nombreuses retenues sont présentes sur un bassin versant. » L'impact des réserves est donc certain, mais il convient, à l'occasion de projets de construction de nouveaux ouvrages, de réaliser des études territorialisées de ces impacts, en prenant en compte les très nombreux ouvrages préexistants.

d) Réserves de la Sèvre Niortaise, réserves du Sud-Vendée, lac de Caussade, trois exemples emblématiques de projets de retenues de substitution
(1) Les réserves du bassin versant de la Sèvre Niortaise et Mignon

Le « seuil du Poitou » où sont situés les Deux-Sèvres, se caractérise par un sol avec une couche sédimentaire fine et un socle granitique proche de la surface. En conséquence, les nappes phréatiques sont des nappes libres peu profondes, qui se remplissent et se vident rapidement (nappes à faible inertie, dites aussi nappes réactives).

Le bassin de la Sèvre Niortaise se situe dans une zone à forts enjeux liés à l'eau, celle du Marais poitevin, dont l'ensemble des zones de gestion sont classés en ZRE. L'eau y est répartie en trois aquifères principaux, comprenant quatre masses d'eau dont trois sont classés en état médiocre au regard des objectifs de la DCE261(*). La problématique y est quantitative comme qualitative.

Suite à la condamnation de la France en 1999 par la Cour de Justice de la Communauté européenne (CJCE) pour mauvaise application de la directive Oiseaux sur le secteur du Marais poitevin, liées à une gestion de l'eau entraînant la destruction des zones humides et des habitats naturels des oiseaux, la loi Grenelle II de l'Environnement (loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement) a créé l'établissement public du marais poitevin (EPMP) établissement public d'État dont le Conseil d'administration est présidé par le préfet de région. L'EPMP exerce le rôle d'OUGC et définit des règlements d'eau, en application du SDAGE Loire-Bretagne et du SAGE Sèvre Niortaise Marais poitevin, qui vise deux objectifs : mieux gérer l'eau en période d'étiage et améliorer la qualité des eaux et la biodiversité.

En 2011, la chambre d'agriculture des Deux-Sèvres et Coop de France Poitou-Charentes ont créé la Société coopérative anonyme de l'eau pour porter la maîtrise d'ouvrage d'un projet collectif de réserves de substitution devant s'implanter dans les zones de gestion Sèvre Niortaise amont, Sèvre Niortaise moyenne, Lambon et Mignon-Courance.

Localisation des 16 réserves de substitution du projet de la Coop de l'eau

Source : Chambre d'agriculture des Deux-Sèvres

Répartition des surfaces irriguées du bassin en 2018

Source : EPMP

Le territoire couvert par le CTGQ Sèvre Niortaise-Mignon compte 1 743 exploitations agricoles (2017) avec une surface agricole utile (SAU) d'environ 150 000 ha, soit 73 % de la superficie totale du territoire. En 2018, la superficie des 244 exploitations irrigantes disposant d'une autorisation d'irriguer représentait environ 35 000 ha. 55 % de ces exploitations avaient au moins un élevage. Dans le territoire d'implantation des réserves stricto sensu, on dénombre 847 exploitations, dont 210 irrigantes, soit environ 25 %262(*).

Les surfaces destinées à la production de maïs (grain et ensilage) représentent plus du tiers des surfaces irriguées, en baisse, avec, parallèlement, une hausse des cultures de protéagineux, légumineuses ainsi que les cultures spécialisées (semences, maraichage, plantes à parfum, aromatiques et médicinales).

La demande d'autorisation environnementale (AE) a été déposée le 20 juillet 2016 en préfecture, et visait initialement à la construction de 19 réserves sur le périmètre des départements de la Charente-Maritime, des Deux-Sèvres et de la Vienne, chiffre qui sera ramené à 16 dans le cadre de la concertation locale.

Le projet initial a fait l'objet d'une forte opposition locale, comme en témoignent les très nombreuses observations (environ 450) issues de l'enquête publique.

Les oppositions locales se sont notamment traduites par des recours dirigés contre les arrêtés interdépartementaux successifs, ainsi que par le refus de la part de cinq maires de délivrer les permis d'aménager.

La préfecture des Deux-Sèvres a engagé une médiation afin d'aboutir à un consensus pour lancer la construction de premières réserves. Une mission d'expertise CGEDD/CGAAER a été menée pour appuyer le préfet dans la recherche d'un compromis. Sur la base des conclusions des experts des conseils généraux et des réflexions conduites dans le cadre de groupes de travail associant l'ensemble des acteurs locaux, un protocole d'accord a été signé le 18 décembre 2018 avec la quasi-totalité des acteurs.

Le protocole d'accord du 18 décembre 2018

Fruit d'un important travail de concertation, un protocole unique en France a été signé le 18 décembre 2018, destiné à mettre en place les conditions et les structures nécessaires une forte évolution de l'agriculture du territoire.

Le porteur de projet concède une réduction du nombre de réserves (de 19 à 16) ainsi que du volume global du projet, de 15,9 millions de m à 12,7 millions de m, avec une baisse de 20 % des volumes prélevés à l'étiage263(*)

.

Par ailleurs, ce protocole comporte :

l'élaboration d'un schéma directeur en faveur de la biodiversité aquatique et terrestre et d'un observatoire des pratiques agricoles et de la biodiversité accessible au grand public ;

l'obligation pour tous les irrigants du bassin, raccordés ou non aux réserves, de réaliser un diagnostic complet de leur exploitation et de suivre des formations ;

la nécessité pour les exploitants de réaliser des actions en faveur de la biodiversité (haies, bandes enherbées, jachères...), de faire évoluer leurs pratiques agricoles et de réduire significativement l'usage des produits phytopharmaceutiques (-50 % d'ici 2025) ;

une suppression progressive des volumes d'eau accordés aux irrigants qui ne respectent pas leurs engagements, le règlement de l'OUGC ayant été révisé pour intégrer ce principe très novateur.

Au total, c'est toute une architecture, lourde, contraignante et plutôt transparente, comprenant les services de l'État, la chambre d'agriculture, l'EPMP et la Coop de l'eau qui a été mise en place à l'occasion du protocole.

La principale critique de certains acteurs, qui ne se réduisent pas aux seules associations de protection de l'environnement, est relative au choix laissé aux agriculteurs irrigants dans leurs engagements individuels. En effet, si le protocole prévoit un tronc commun d'engagements obligatoires, relatifs au diagnostic des exploitations et à la formation des agriculteurs, les engagements individuels se divisent en trois groupes, parmi lesquelles les irrigants choisissent. Certains acteurs ont fait observer à la mission que les engagements choisis peuvent s'apparenter à des engagements « a minima », notamment la mise en place de bandes enherbées ou de corridors écologiques, plutôt qu'une réduction de l'usage des produits phytopharmaceutiques. Un acteur résume la critique en indiquant que le protocole comporte « trop de « ou » et pas assez de « et » ».

Cette situation conduit la mission à émettre des doutes quant à l'atteinte de l'objectif ambitieux de réduction de 50 % de l'usage des produits phytopharmaceutiques d'ici 2025. Très peu d'informations sont à ce jour disponibles, ce qui suscite les critiques de certains signataires du protocole d'accord.

Le préfet coordonnateur de bassin Loire-Bretagne a labellisé le projet comme « projet de territoire pour la gestion de l'eau » (PTGE) au sens de l'instruction ministérielle du 7 mai 2019, en février 2020. Un arrêté préfectoral, le troisième, portant prescriptions complémentaires à l'autorisation « loi sur l'eau », a été signé en juillet 2020.

État des volumes avant et après la signature du protocole

À ce jour, seule la réserve de Mauzé-sur-le-Mignon, où la mission d'information s'est déplacée pour y rencontrer l'ensemble des acteurs, est sortie de terre264(*)

.

Cette réserve de 240 000 m3 bénéficie à cinq exploitations, deux céréalières, deux laitières et une d'élevage, employant un total de 25 agriculteurs sur une surface de 350 hectares. Selon la DDT, les engagements individuels, outre le diagnostic obligatoire des exploitations, pris par les agriculteurs irrigants sont les suivants :

- 600 mètres de bandes enherbées ;

- 2,5 hectares de jachères ;

- 9 630 mètres de haies.

Selon les informations à disposition de la mission, l'ensemble des diagnostics et des formations ont été réalisés et 70 % des engagements tenus dès 2022, avec pour horizon 100 % fin 2023265(*), conformément à l'obligation de mettre en oeuvre les engagements dans les deux années suivant la mise en service de l'installation. Par ailleurs, tous les points de prélèvement des agriculteurs raccordés et non raccordés ont été équipés de débitmètres télécommunicants.

Il est à noter que les engagements concernant la réserve de Saint-Soline266(*) sont également en cours de réalisation, avant même le début des travaux.

Source : Annexe n°1 au Contrat Territorial de Gestion Quantitative Sèvre Niortaise - Mignon

Au total, la direction départementale des territoires (DDT) des Deux-Sèvres a indiqué à la mission qu'entre 2017 (projet initial) et aujourd'hui (projet finalisé après protocole et recours juridiques), la réduction du volume des prélèvements prévus à terme est de l'ordre de 22,1 % (pour un total de 13,955 millions de m3)267(*).

De manière générale, à l'échelle de l'ensemble du bassin du Marais poitevin, la trajectoire des prélèvements autorisés en vue de l'irrigation pour la période 2021-2026, prévoit une forte baisse des autorisations, de l'ordre de 33 % en cinq ans.

Trajectoire de réduction des volumes de prélèvement autorisés sur le périmètre de l'OUGC du Marais poitevin

Source : EPMP

Un projet mobilisant à la fois des fonds publics
et d'importants fonds propres des agriculteurs irrigants

Un contrat territorial de gestion quantitative (CTGQ) signé en juillet 2019 prévoit un financement de l'Agence de l'eau Loire-Bretagne à hauteur de 28,9 M € (pour un coût global du projet de 60 M €) et 0,9 M € du MASA (sur la partie réseau de distribution - 1ère tranche). Des crédits d'un montant de 7,9 M € du FEADER (dans le cadre du PDR ex-Poitou Charentes), un temps envisagés, n'ont pas été mobilisés par le Conseil régional, et des crédits « France relance » s'y substituent partiellement268(*).

Au total, le reste à charge pour le porteur de projet demeure élevé, représentant 38 % des 60 M € totaux, avec un prix de l'eau s'établissant à 10 centimes d'euro pour les agriculteurs non raccordés, et 30 centimes d'euro pour les agriculteurs raccordés. Les mesures de sécurisation supplémentaires requises aux abords des ouvrages, l'augmentation générale du prix des matériaux ainsi que des taux d'intérêt conduisent à une hausse du coût final du projet, posant la question, sans financements publics supplémentaires, du prix final de l'eau et donc de la soutenabilité du projet ainsi que de l'adhésion des agriculteurs irrigants.

Sollicité au total à trois reprises, le BRGM a confirmé que les volumes prélevés en période hivernale ne présentent pas d'impact négatif pour les milieux ; il a également confirmé un impact positif des réserves en période d'étiage.

Le troisième et dernier rapport du BRGM en date du 17 juin 2022269(*) porte sur le projet amendé à l'issue du protocole d'accord du 18 décembre 2018 et de la décision du tribunal administratif (TA) de Poitiers du 27 mai 2021. À l'issue de la simulation effectuée par le BRGM, celui-ci indique qu'en période d'étiage :

· « En additionnant les gains de débits sur les quatre cours d'eau alimentant le Marais poitevin (Sèvre Niortaise, Guirande, Courance et Mignon), on pourrait observer une augmentation du débit entrant dans le Marais poitevin de +200L /s à +300L/s via les cours d'eau, soit +5% à +6% du débit initial (simulation de référence). Il est probable que la hausse attendue des piézométries en été avec le projet de la Coopérative conduise également à un meilleur soutien des niveaux d'eau du Marais poitevin en période d'étiage. »

· « Comparé à la simulation du projet 2016 de la Coopérative, les piézométries en période d'étiage sont localement plus élevées sur le bassin Mignon-Courance avec la simulation du projet 2021 de la Coopérative, et légèrement plus élevées sur le bassin de la Sèvre amont. »

En période hivernale :

· « Les prélèvements en hiver pour le remplissage des retenues ne sont pas sans effets sur le milieu, bien qu'ils interviennent à une période de l'année où les nappes et les rivières sont moins vulnérables. Sur le bassin du Mignon et de la Courance, les rabattements piézométriques dus aux pompages hivernaux du projet 2021 de la Coopérative dépassent souvent 50cm sur la nappe libre du Jurassique supérieur par rapport à la simulation de référence. Le débit entrant dans le Marais poitevin serait diminué de -200 L/s à - 300L /s entre la simulation 2021 et la simulation de référence, soit -1% des 25m3/s à 30m3/s observées en moyenne en janvier sur la période 2000-2011. »

· « Les prélèvements pour le remplissage des réserves seront réglementés par des seuils hivernaux de gestion. Si, sur les indicateurs, les seuils piézométriques ou de débit de cours d'eau ne sont pas respectés, aucun prélèvement ne sera effectué. Cela permettra, par exemple en cas de déficit de recharge des nappes de limiter l'incidence du plan de prélèvement hivernaux sur le milieu ; pendant le remplissage, les piézométries et les débits devront donc rester supérieurs aux seuils de remplissage évalués lors de la constitution de l'étude d'impact du projet et indiqués dans le Protocole d'accord. »

Il convient de noter que l'ensemble des analyses du BRGM se fonde sur un modèle prenant en compte les années 2000-2010, seul modèle existant. Même si, en audition, il a été indiqué que cette décennie était considérée comme une « décennie classique », la simulation ne prend pas en compte les impacts pouvant résulter du changement climatique.

Le projet de réserve fait toujours l'objet d'une âpre bataille contentieuse

Le projet porté par la société coopérative de l'eau des Deux-Sèvres, fondé initialement sur la création de 19 réserves de substitution, a fait l'objet d'une AE délivrée le 23 octobre 2017270(*), qui a été déférée à la censure du TA de Poitiers en 2018 à l'initiative de plusieurs associations, de même que l'arrêté complémentaire du 20 juillet 2020.

Par un jugement « avant-dire droit »271(*) du 27 mai 2021, le TA a suspendu l'exécution de l'AE et de son arrêté complémentaire (actant une diminution du nombre d'ouvrages, de 19 à 16), pour 9 des 16 réserves, estimant que leur dimensionnement excédait les limites fixées par le SAGE Sèvre Niortaise Marais poitevin272(*).

Les associations requérantes ont fait appel de ce jugement avant-dire droit, contestant le fait que 7 des 16 réserves n'aient pas été jugées illégales.

Un arrêté du 22 mars 2022, complétant les deux précédents, prend acte de la modification du projet par le pétitionnaire. Cet arrêté a fait l'objet d'un nouveau recours devant le TA de Poitiers. Tenant compte des évolutions du projet consacré par cet arrêté, le TA a finalement rejeté les trois requêtes concernant les trois arrêtés précités, par un jugement au fond rendu le 11 avril 2023. Le pétitionnaire bénéficie donc bien d'une AE lui permettant d'exploiter régulièrement les 16 réserves du projet. Un appel, non suspensif, du jugement de fond a été déposé.

Il faut noter que l'appel du jugement avant-dire droit est toujours pendant devant la cour administrative d'appel (CAA) de Bordeaux. La date de l'audience n'est pas encore connue.

Au total, les contentieux relatifs aux réserves courent depuis désormais cinq ans, ce qui constitue un important facteur d'insécurité et de découragement pour tous les acteurs portant le projet.

Finalement, le projet de réserves de substitution de la Sèvre Niortaise semble souffrir d'un paradoxe : il est probablement le plus connu et le plus controversé projet à ce jour en France, alors même qu'il est aussi probablement le projet le plus abouti, le plus travaillé dans la mesure de ses impacts sur le milieu, et le plus engageant en termes d'évolution des pratiques agricoles. Il court le risque de devenir, comme l'ont montré les violences extrêmes du 25 mars 2023 à Sainte-Soline, un objet totémique de conflictualité entre des acteurs aux positions de plus en plus antagonistes. À ce titre, le patient et constant travail de médiation et de concertation mené par les services de l'État doit impérativement se poursuivre, notamment par l'intermédiaire de la Commission d'évaluation et de surveillance ainsi que par l'enrichissement de l'Observatoire en ligne des pratiques agricoles et des actions en faveur de la biodiversité mises dans le cadre du protocole, tout en restant ferme quant à la sécurité des personnes et des biens sur un territoire de plus en plus marqué par des années de conflit et par l'épisode extrême du 25 mars 2023.

(2) Les réserves du bassin versant du Sud-Vendée

La Vendée héberge de nombreuses retenues destinées à l'irrigation agricole du secteur de la plaine calcaire du Sud-Vendée. Elles ont en commun avec les réserves des Deux-Sèvres d'être situées dans le secteur du Marais poitevin.

Des dégradations de la bâche de deux retenues ont été signalées dans la nuit du 8 au 9 août 2022, mais les projets, décidés et mis en service entre 2007 et 2019, ont pu être menés à bien sans heurts majeurs.

Dans le cadre d'un programme de substitution sur le bassin des Autizes (2007-2011) et de deux contrats territoriaux de gestion quantitative pour la Vendée et le Lay (2007-2017), 25 retenues de substitution ont vu le jour : dix sur les Autizes, dix en Vendée et cinq pour le Lay, pour une capacité de stockage de 11 millions de m3 d'eau, soit près de deux fois plus que celle du projet de la Sèvre Niortaise.

Elles ont été construites pour mettre fin aux prélèvements désordonnés des agriculteurs via leurs forages individuels, la nappe ayant atteint un niveau critique en 1995. Elles n'ont fait l'objet d'aucun recours en justice, ce qui peut s'expliquer à la fois par le caractère précoce de la démarche et par le fait qu'elle visait à répondre à une situation initiale dégradée, constat partagé par l'ensemble des acteurs.

En 2021, l'Agence de l'eau Loire-Bretagne, dans un document de 253 pages273(*), dresse un premier bilan de l'impact de ces réserves. L'analyse conclut notamment que :

• « L'analyse des volumes autorisés sur les trois secteurs met en évidence une réduction de la pression de prélèvement printemps-été permettant d'atteindre les volumes cibles de chacun des territoires » ;

« Les actions menées dans le cadre des autres économies d'eau à réaliser, sous pilotage de la Chambre d'Agriculture de la Vendée, présentent une efficience et un degré d'adhésion des irrigants hétérogènes. Ainsi, la mesure agro-environnementale de désirrigation n'a pu aboutir274(*), une solution alternative a donc été trouvée à travers une diminution des volumes autorisés de prélèvements, inscrite dans l'arrêté préfectoral d'autorisation de prélèvements de 2015 » ;

« Depuis la signature des contrats, les systèmes d'irrigation n'ont que peu évolué. Il en est de même pour la Surface Utile Agricole irriguée. La principale évolution des pratiques agricoles repose sur les types de cultures. Sur l'ensemble des trois territoires, les volumes des réserves de substitution couplés à la gestion collective ont permis de retarder et de limiter les restrictions de prélèvements. Cette sécurisation a facilité la diversification des cultures avec une diminution des superficies en maïs au profit des cultures spécialisées à plus forte valeur ajoutée » ;

« Le nombre de conversion d'exploitation agricole vers l'agriculture biologique n'a pas permis d'atteindre les objectifs inscrits dans les contrats. Toutefois, il est important de préciser que de nombreuses exploitations agricoles s'étaient rapprochées de la chambre d'agriculture de Vendée pour une conversion totale ou partielle de leurs parcelles. Ainsi, en raison des délais nécessaires à de tels changements, la période d'évaluation semble courte pour être conclusive sur les bassins Lay et Vendée. (...) Concernant la part de la superficie en agriculture biologique par rapport à la Surface Agricole Utile totale (SAU totale), les années 2017 à 2019 font ressortir une très forte conversion des superficies agricoles » ;

« Les différentes analyses mettent en évidence une remontée de la nappe sur l'ensemble des piézomètres consécutivement à la construction et aux modes de gestion des réserves de substitution » ;

« Pour les secteurs du Lay et de la Vendée, les différentes analyses mettent en évidence une remontée du niveau du marais sur l'ensemble des limnimètres en lien avec le début de la gestion sur les différents territoires et la construction des réserves de substitution ».

Ainsi, il apparait que les réserves ont permis une rationalisation de l'usage de l'eau se traduisant par une amélioration notable de l'état quantitatif des milieux. En revanche, on ne constate pas une baisse de l'irrigation ni une amélioration notable des systèmes d'irrigation, ce qui plaide pour un encadrement strict des prélèvements, ce qui a été effectué par arrêté préfectoral. L'ensemble des constats figurant dans ce bilan souligne d'une part que la construction de réserves de substitution peut être pertinente à l'échelle d'un territoire, et d'autre part, l'importance de la formalisation en amont des obligations des irrigants et d'un suivi de la mise en oeuvre des engagements. En effet, le respect des engagements de l'ensemble des parties prenantes est un gage de l'adhésion du public à ces projets et de leur crédibilité.

(3) La retenue d'eau sur le bassin versant du Tolzac (lac de Caussade)

Le projet de construction d'une retenue d'eau sur le bassin versant du Tolzac, dans le Lot-et-Garonne est un projet ancien, qui remonte aux années 1980. Le territoire d'implantation du projet est couvert par le plan de gestion des étiages (PGE) du Tolzac, lequel prévoit la construction d'une retenue d'une capacité de 700 000 m3. Le SDAGE Adour-Garonne 2016-2021 prévoit également, sous certaines conditions, et notamment celles de la comptabilité avec le maintien ou l'atteinte du bon état des eaux et de la réalisation d'une analyse coût/bénéfice, la possibilité de réalisation de nouvelles réserves.

Ainsi, le projet prévoyait la création d'un barrage sur le ruisseau du Caussade permettant un stockage de 920 000 m3 sur 20 hectares, 47 % du total étant destinés à l'irrigation de 24 exploitations agricoles et 25 % destinés au soutien d'étiage du Tolzac, régulièrement asséché en période estivale275(*).

Déposé en juin 2017, le dossier d'autorisation environnementale a fait l'objet d'un avis favorable du commissaire enquêteur après enquête publique, d'un avis favorable du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst), d'un avis défavorable du conseil national de la protection de la nature, d'un avis réservé de la mission régionale de l'autorité environnementale Nouvelle Aquitaine et enfin d'un double avis défavorable de la direction régionale Nouvelle Aquitaine de l'Agence française pour la biodiversité.

Le projet est finalement autorisé par l'arrêté préfectoral du 29 juin 2018 portant autorisation de création et exploitation de la retenue d'eau de « Caussade » sur la commune de Pinel-Hauterive. Cet arrêté est contesté devant la juridiction administrative par les associations France Nature Environnement et Société pour l'étude, la protection et l'aménagement de la nature dans le Sud-Ouest le 17 septembre.

Le lendemain, les ministres de la transition écologique et solidaire et de l'agriculture demandent à la préfète de Lot-et-Garonne de retirer son autorisation, au regard des risques contentieux du projet ainsi que du risque d'enlisement du dossier. Par un arrêté du 18 octobre, la préfète retire l'arrêté initial. Cette décision a également fait l'objet d'un recours, de la part du Syndicat Départemental des Collectivités Irrigantes de Lot-et-Garonne (SDCI 47).

Par un jugement au fond le 28 mars 2019, le tribunal administratif de Bordeaux donne raison aux associations de protection de l'environnement, en rejetant la requête du SDCI 47. Entre-temps, le barrage fut tout de même édifié par le porteur de projet. Enfin, par un arrêt du 23 févier 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux confirme que le projet n'est pas compatible avec les orientations du SDAGE Adour-Garonne, que l'autorisation initiale était illégale, et que la préfète était fondée à la retirer par l'arrêté du 18 octobre 2018276(*).

S'engage alors un bras de fer entre trois parties prenantes, le porteur de projet, les associations de protection de l'environnement et les services de l'État. Un arrêté du 3 mai 2019 porte mise en sécurité de l'ouvrage, cessation définitive de travaux, suppression de l'ouvrage de retenue dite de Caussade, remise en état du site et sanctions administratives, faisant suite à un arrêté du 18 mars 2019 de mise en demeure de la chambre d'agriculture de Lot-et-Garonne, maître d'ouvrage, à un courrier du 18 avril 2019 de la préfète à cette même chambre d'agriculture ordonnant la cessation définitive des travaux, la suppression de l'ouvrage et la remise en état des lieux, aurait pu signer la fin des débats autour de l'ouvrage. Cet arrêté n'a, à ce jour, pas trouvé à s'appliquer, ce qui a conduit l'association FNE à déposer une plainte auprès de la Commission européenne le 26 juillet 2019.

Le climat de tension autour de l'ouvrage atteint un tel niveau que, selon la presse locale, des gendarmes venus poser des scellés sur les pelleteuses puis sur les panneaux du site ont été contraints de reculer face aux agriculteurs présents sur place. Malgré les inquiétudes fondées quant au risque de rupture de l'ouvrage, et aux impacts sur les habitations environnantes, la retenue a été remplie.

En mai 2020, une mission d'inspection interministérielle est chargée, outre d'une évaluation technique de la réalisation de l'ouvrage de « proposer une méthode de concertation et un processus de décision de nature à permettre le nécessaire retour au cadre légal dans une approche partagée avec l'ensemble des acteurs concernés. » Dans son rapport, la mission souligne que la réalisation illégale de l'ouvrage a été entreprise « sans recourir ni à des entreprises de travaux publiques ni à l'appui d'un bureau d'étude agréé ». Elle note que malgré les arrêtés préfectoraux susmentionnés : « Cette situation irrégulière perdure, dans un climat relationnel très dégradé, ponctué en outre depuis la fin du printemps 2020 par une série d'épisodes de nature judiciaire... Il convient en conséquence d'admettre que la recherche d'un dialogue apaisé constitue un objectif qui peut apparaître très difficilement accessible dans un tel contexte. » La mission a par ailleurs émis plusieurs recommandations de sécurisation de l'ouvrage, notamment dans l'hypothèse d'une crue.

Depuis lors, la situation n'a pas trouvé de dénouement, pour un projet à vocation multi-usage, largement soutenu par les acteurs locaux.

Le 3 février 2023, FNE et ses fédérations locales ont engagé la responsabilité pour faute de l'État devant le tribunal administratif de de Bordeaux.

Le 17 avril 2023, une experte de haut niveau a été nommée par arrêté de la Première ministre, pour « définir et porter une stratégie d'action concertée à l'échelle du bassin-versant du Tolzac », pour une durée de trois ans. L'ouvrage, désormais construit, et faisant l'objet d'un soutien très large de nombreux acteurs du territoire, y trouvera probablement sa pérennisation.

Ces trois exemples témoignent de la complexité et de la conflictualité que peut atteindre la question de l'accès et de la répartition de l'eau dans certains territoires, mais aussi de l'utilité des réserves de substitution et la possibilité de leur acceptation, si le cadre d'un dialogue constructif est posé et si des objectifs de baisse de la pression sur la ressource sont partagés.

Ils soulignent plusieurs points, qui sont communs à de nombreux projets de retenues sur les territoires :

· la question centrale et indispensable de la concertation large, inclusive, sur la base d'un constat initial partagé, ne préjugeant pas, à l'avance, de telle ou telle issue et ne se résumant pas à la seule question agricole. Ce cadre de consultation est désormais connu des acteurs des territoires, il s'agit de celui des PTGE. Dans sa contribution écrite, le ministère de la transition écologique souligne que « dans la démarche PTGE, « tout se joue au début » : le PTGE doit être un pacte de confiance entre parties prenantes », et rappelle la préconisation d'une « approche systémique de la gestion locale de l'eau » ;

· la question du rôle des pouvoirs publics dans l'accompagnement du dialogue local, dans le soutien à la fixation d'objectifs partagés, mesurables et contrôlables, mais aussi dans leur capacité ou non à faire respecter l'autorité de l'État sur les territoires, de ses décisions et des décisions judicaires ;

· la judiciarisation grandissante de ce type de projet, avec parfois, des délais de jugement finaux pouvant être excessivement longs, l'exemple des Deux-Sèvres en témoigne, peu compatibles avec la sécurisation des porteurs de projet ;

· le rôle primordial des élus locaux dans le soutien et l'aboutissement, ou non, de projets suscitant a minima du débat, voire de la conflictualité ;

· sur un aspect plus technique, il pose aussi la question de la remobilisation, de la rénovation de l'existant. Dans son avis sur le projet du lac de Caussade, l'Agence française pour la biodiversité notait qu'un inventaire réalisé sur le bassin versant aboutissait à un total de plus de 700 retenues déjà existantes. Aussi, les projets de construction de nouvelles retenues devraient comporter un important volet de type « éviter, réduire, compenser », visant à étudier les alternatives crédibles à la construction de réserves, permettant d'atteindre des objectifs finaux similaires.

Les projets de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE)

Créés dans le cadre des Assises de l'eau, les projets de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE) sont des outils de planification concertée portant sur l'ensemble des usages de l'eau sur un territoire (eau potable, agriculture, industries, navigation, énergie, pêches, activités récréatives...). Les PTGE s'insèrent notamment dans la logique de protection, d'amélioration et de restauration du bon état de la masse d'eau concernée dans le respect de la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau sur l'eau. Les PTGE doivent donc être construits en cohérence avec les SDAGE277(*) à l'échelle des bassins versants, et avec les SAGE lorsqu'ils existent, à l'échelle des sous-bassins278(*).

L'instruction du Gouvernement du 4 juin 2015 relative au financement par les agences de l'eau des retenues de substitution, faisant suite à la conférence environnementale des 19 et 20 septembre 2013, pose les bases des PTGE, dénommés « projets de territoire » et instaure le principe de la participation au financement des ouvrages de stockages d'eau par les agences de l'eau à la double condition suivante :

l'élaboration d'un projet de territoire ;

• la finalité de substitution des prélèvements d'eau à l'étiage par des prélèvements hors étiage.

L'instruction du Gouvernement du 7 mai 2019 relative au projet de territoire pour la gestion de l'eau, élaborée suite aux travaux de la cellule d'expertise relative à la gestion quantitative de l'eau pour faire face aux épisodes de sécheresse, abroge l'instruction susmentionnée pour venir poser le cadre actuel des projets de territoire, renommés « projets de territoire pour la gestion de l'eau » (PTGE).

L'instruction définit le PTGE comme suit : « Un projet de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE) est une démarche reposant sur une approche globale et co-construite de la ressource en eau sur un périmètre cohérent d'un point de vue hydrologique ou hydrogéologique. Il aboutit à un engagement de l'ensemble des usagers d'un territoire (eau potable, agriculture, industries, navigation, énergie, pêches, usages récréatifs, etc.) permettant d'atteindre, dans la durée, un équilibre entre besoins et ressources disponibles en respectant la bonne fonctionnalité des écosystèmes aquatiques, en anticipant le changement climatique et en s'y adaptant. Il s'agit de mobiliser à l'échelle du territoire des solutions privilégiant les synergies entre les bénéfices socio-économiques et les externalités positives environnementales, dans une perspective de développement durable du territoire. Le PTGE doit intégrer l'enjeu de préservation de la qualité des eaux (réductions des pollutions diffuses et ponctuelles)».

Elle précise le rôle de l'État, à savoir favoriser l'émergence de PTGE au regard des enjeux quantitatifs ou des besoins de dialogue entre acteurs pour parvenir à co-construire un projet dépassant les situations de blocage. Le préfet coordonnateur de bassin définit les situations dans lesquelles la conduite des PTGE doit être encouragée. Ce dernier, ou un préfet référent, est le garant de la pluralité des acteurs composant le comité de pilotage du PTGE. Il valide le diagnostic, se prononce sur le programme d'action et approuve les volumes d'eau associés. Il s'assure que le PTGE est compatible avec les orientations du SDAGE. Les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et les directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) sont également associées aux concertations.

Suite aux travaux du Varenne agricole de l'eau, un additif à l'instruction du 7 mai 2019, datant du 17 janvier 2023, a été publié. Cet additif revient sur les points fondamentaux pour la réussite de la démarche, sur la mise en place de la gouvernance, l'élaboration du programme d'action et l'accompagnement par les services de l'État durant tout le processus, ainsi que dans les situations de blocages.

Selon les données transmises par le ministère de la transition écologique, en mai 2023, 72 PTGE sont validés (dont 66 en Rhône-Méditerranée), 36 en cours de concertation et 12 en émergence. Dans sa contribution écrite, le délégué interministériel au Varenne agricole de l'eau indique « On observe que les PTGE sont essentiellement développés dans 3 bassins, au sud et centre du pays : Rhône-Méditerranée, Adour-Garonne et Loire-Bretagne. Le poids très important de Rhône-Méditerranée est liée à l'antériorité de la démarche via les anciens PRGE, sous l'égide de précédents SDAGE ».

Les PTGE sont ainsi des outils connaissant un fort développement sur les territoires confrontés à des problématiques autour de la ressource en eau. Ils peuvent permettre, le cas échéant, d'éviter le classement d'une zone en ZRE. Ils servent ensuite à alimenter, pour leur partie gestion quantitative, les CTGQ élaborés par les agences de l'eau. Le CTGQ est le bras armé de l'intervention financière des agences de l'eau sur un territoire donné, dans l'objectif de l'atteinte du bon état quantitatif, et, de plus en plus, qualitatif, des masses d'eau. C'est dans le cadre de CTGQ que des réserves, sous certaines conditions, notamment celle de la substitution, peuvent se voir attribuer des financements publics.


* 222 Certains usages sont d'ores et déjà autorisés.

* 223 Livre second, CXLIX : « Les eaux du lac Moeris ne viennent pas de source ; le terrain qu'il occupe est extrêmement sec et aride : il les tire du Nil par un canal de communication. Pendant six mois elles coulent du Nil dans le lac ; et pendant les six autres mois, du lac dans le fleuve. »

* 224 https://whc.unesco.org/fr/list/1001

* 225 FAO. 2021. The state of the world's land and water resources for food and agriculture - Systems at breaking point. Synthesis report 2021. Rome. https://doi.org/10.4060/cb7654en

* 226 Dans ses contributions écrites, l'INRAE précise que l'irrigation a régressé entre 2000 et 2010, après avoir triplé entre 1970 et 2000.

* 227 Agreste - Recensement agricole 2020.

* 228 Doorenbos, J. et Pruitt, W.O. 1977. Les besoins en eau des cultures. Bulletin FAO d'irrigation et de drainage No. 24. FAO, Rome.

* 229 https://www.cnrs.fr/cw/dossiers/doseau/decouv/usages/consoAgri.html

* 230 https://www.brl.fr/phototheque/photos/memento/memento_2019_web.pdf

* 231 Contribution écrite d'ACTA.

* 232 C. Serra-Wittling, B. Molle, Évaluation des économies d'eau à la parcelle réalisables par la modernisation des systèmes d'irrigation, 2017 ; Essais d'Arvalis dans l'unité expérimentale du Magneraud en 2014, 2015, 2016 et à Pusignan en 2016 et 2017.

* 233 Article L. 213-10 al 1 : « En application du principe de prévention et du principe de réparation des dommages à l'environnement, l'agence de l'eau établit et perçoit auprès des personnes publiques ou privées des redevances pour atteintes aux ressources en eau, au milieu marin et à la biodiversité, en particulier des redevances pour pollution de l'eau, pour modernisation des réseaux de collecte, pour pollutions diffuses, pour prélèvement sur la ressource en eau, pour stockage d'eau en période d'étiage, pour obstacle sur les cours d'eau et pour protection du milieu aquatique. »

* 234 Afin d'encourager la mise en oeuvre des OUGC, la règlementation prévoit un abattement de la redevance qui permet aux irrigants dont les OUGC sont principalement en ZRE de bénéficier d'un tarif réduit équivalent à celui hors ZRE.

* 235 Nomenclature des IOTA, cf. supra.

* 236 Ce décret a fait l'objet de fortes réserves de la part de certains acteurs de la politique de l'eau en ce qu'il semble acter le principe de construction de nouveaux ouvrages de stockage d'eau, en dehors de la logique de substitution, alors même que la notion de volumes prélevables en période de hautes eaux parait particulièrement délicate à mettre en oeuvre.

* 237 Plus précisément, l'article R. 211-21-2 indique que l'évaluation des volumes prélevables est réalisée par périmètres cohérents constituant tout ou partie d'un bassin hydrographique ou d'une masse d'eau souterraine sur une période de basses eaux fixée localement.

* 238 Article R. 214-31-1 du code de l'environnement.

* 239 Article D. 181-15-1 du code de l'environnement.

* 240 Article R. 214-31-2 du code de l'environnement.

* 241 Article R. 214-31-3 du code de l'environnement.

* 242 Bilan du dispositif des organismes uniques de gestion collective (OUGC) des prélèvements d'eau pour l'irrigation, août 2020.

* 243 https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Guide_secheresse.pdf

* 244 Avec pour corollaire obligatoire la réduction de 50% des prélèvements.

* 245 Ainsi, il a été décidé dans le Sud-Vendée que les réserves de substitution feraient l'objet des mêmes restrictions que celles s'appliquant aux prélèvements dans le milieu, dans une logique d'équité entre les agriculteurs, ce qui peut paraitre paradoxal au regard de l'objet même d'une réserve de substitution.

* 246 Sears L., Caparelli J., Lee C., Pan D., Strandberg G., Vuu L., Lin Lawell C.-Y.C., 2018. Jevons'paradox and efficient irrigation technology, Sustainability, 10, 1-12.

* 247 Belaud G., Mateos L., Aliod R., Buisson M., Faci E., Gendre S., Ghinassi G., Gonzales Perea R., Lejars C., Maruejols F., Zapata N., 2020. Irrigation and energy: issues and challenges. Irrigation and Drainage, 69, 177-185.

* 248 Voir infra.

* 249 https://www.senat.fr/rap/r22-142/r22-1421.pdf

* 250 https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/2012_03%20guide%20juridique_construction%20retenues.pdf.

* 251  https://www.eaufrance.fr/sites/default/files/2019-04/impact-cumule-des-retenues-d-eau-sur-le-milieu-aquatique-afb-2017-027.pdf.

* 252 Yang et al., RSE, 2020 ; Terasmaa et al., Heliyon, 2019.

* 253 L'article R. 214-1 du code de l'environnement précise la nomenclature évoquée à l'article L. 214-2, dans un tableau qui lui est annexé. Ce tableau se divise en plusieurs titres, prélèvements, rejets, impacts sur le milieu aquatique ou sur la sécurité publique et impact sur le milieu marin. Chaque titre est lui-même divisé en différentes rubriques.

* 254 Le ministère de la transition écologique indique, dans sa contribution écrite, que l'insuffisance des études d'impact est souvent un motif d'annulation des autorisations de retenues ou de prélèvements.

* 255 Article L. 214-3 du code de l'environnement.

* 256 Notamment leurs modes d'alimentation et leurs finalités, multi-usages pour les plus importants, mono-usage pour la plupart.

* 257 La logique de la substitution est de diminuer les prélèvements en été et donc de venir prévenir ou retarder les restrictions estivales de prélèvement d'eau. Ainsi, outre les irrigants directement connectés, qui sécurisent leur accès à l'eau en été, les irrigants non connectés bénéficieront de la remontée du niveau des nappes et donc sécuriseront aussi, dans une mesure moindre, leurs prélèvements estivaux. Le président de la Coop de l'eau, qui porte le projet de réserves en Sèvre Niortaise, ne sera lui-même pas connecté à une réserve.

* 258 Dans ses contributions écrites, l'INRAE précise que l'irrigation a régressée entre 2000 et 2010, après avoir triplé entre 1970 et 2000.

* 259 Martinez Alvarez et al (2008).

* 260 En 2015, 69,1 % des masses d'eau souterraines et 62,9 % des masses d'eau de surface sont en bon état chimique, en nette augmentation depuis 2009. 89,8 % des masses d'eau souterraines sont en bon état quantitatif, un chiffre stable par rapport à 2009. Enfin, 44,2 % des eaux de surface sont en bon ou très bon état écologique, et 39,4 % dans un état moyen, là aussi en augmentation. Source : Ministère de la transition écologique, Eau et milieux aquatiques, les chiffres clés, décembre 2022.

* 261 Annexe n°1 au Contrat Territorial de Gestion Quantitative Sèvre Niortaise - Mignon.

* 262 Chambre d'agriculture des Deux-Sèvres, « Les irrigants représentent le quart des agriculteurs du bassin Sèvre-Mignon ».

* 263 Pour mémoire, le volume de prélèvement printemps-été délivré à l'OUGC pour 2016 s'établissait à environ 15 Mm3.

* 264 Construction entre septembre 2021 et mars 2022 et entrée en service en avril 2022.

* 265 La Coop de l'eau indique que, vraisemblablement, les objectifs relatifs aux haies seront même dépassés.

* 266 La réserve profitera à 26 exploitations (incluant 10 élevages) dont 12 raccordées, pour un total de 47 agriculteurs. Parmi les 12 exploitations raccordées, quatre sont en reprise.

* 267 Incluant les volumes prélevés à l'étiage, les volumes prélevés en hiver pour l'alimentation des réserves et les volumes prélevés pour l'alimentation des réserves préexistantes au projet.

* 268 Chiffres fournis par la DDT.

* 269 Un premier rapport date de 2013, destiné à éclairer la Coopérative de l'eau sur le montage de son projet, et un deuxième a été produit en 2015 visant à venir en appui du dossier d'autorisation loi sur l'eau.

* 270 Parallèlement à cette procédure, les ouvrages ont donné lieu à la délivrance de permis d'aménager, délivrés tantôt au nom de l'État, tantôt au nom des communes ayant vocation à les accueillir. Certains ouvrages ont fait l'objet de refus d'autorisations d'urbanisme mais, selon les informations disponibles, le pétitionnaire n'a pas souhaité contester les décisions de refus ici concernées.

* 271 Un jugement avant dire droit est un jugement qui relève des manquements au droit mais permet de les régulariser en amendant la décision administrative concernée.

* 272 Le TA a jugé le volume de neuf réserves excessif, ce dernier a ainsi été réduit de 1,29 million de m3.

* 273 Évaluation des actions pour le retour à une gestion quantitative équilibrée de la ressource en eau sur le Marais poitevin, bassins Lay, Vendée et Autizes Rapport d'observation 15 avril 2021.

* 274 L'étude précise : « La mesure de MAE désirrigation a été abandonnée dès 2014, en raison de la non-conformité de cette action dans le cadre législatif. De plus, étant donné l'effort d'investissement lié à l'irrigation, nombreux sont les irrigants réticents à cette mesure. »

* 275 Le reste du volume étant destiné au culot et à la gestion interannuelle de la retenue.

* 276 La mission d'inspection interministérielle note dans son rapport qu'à ce moment, on assiste au « retrait du SDCI de la réalisation de ce projet, sur le plan technique et administratif, compte tenu de son souhait de ne pas s'engager sur la voie de l'illégalité, avec donc une réelle divergence de position avec la Chambre d'agriculture ».

* 277 Articles L.212-1 à L. 212-2-3 du code de l'environnement.

* 278 Articles L. 212-3 à L. 212-11 du code de l'environnement.