CONTRIBUTION DU GROUPE
ÉCOLOGISTE,
SOLIDARITÉ ET TERRITOIRES (GEST)
Le groupe Écologiste, Solidarité et Territoires tient tout d'abord à saluer la qualité des travaux entrepris par la mission d'information, la richesse des auditions et l'exhaustivité du rapport remis. Il remercie le président de la mission Rémy Pointereau, le rapporteur Hervé Gillé très soucieux de l'écoute de toutes les parties prenantes et le travail exceptionnel de l'administration du Sénat.
Le groupe écologiste partage les grandes orientations du rapport. Il considère que nous vivons actuellement une crise de l'eau, sans précédent pour notre pays. Le changement climatique entraîne un bouleversement des précipitations et la raréfaction grandissante de l'eau. Il porte le risque de générer des conflits d'usage plus fréquents entre exigence de fournir nos concitoyens en eau potable, préservation indispensable des milieux, nécessité d'accès à l'eau pour l'agriculture, mais aussi pour l'énergie et l'industrie.
Cet enjeu écologique et social majeur doit être au coeur des priorités de l'action publique pour une politique ambitieuse de l'eau, qui favorise la sobriété et la reconquête de la qualité de l'eau, la préservation des milieux naturels et la souveraineté alimentaire et industrielle du pays.
Notre groupe approuve globalement les préconisations nombreuses et diverses du rapport. Nous défendons la gestion publique de l'eau par les collectivités, sa tarification différenciée selon les usages, la rénovation massive des canalisations vieillissantes avec le soutien de l'État et le renforcement des moyens humains et financiers des agences de l'eau.
Sur le plan territorial, nous considérons que les commissions locales de l'eau et les projets territoriaux de gestion de l'eau, structures prometteuses, se renforceraient en élargissant leur accès à toutes les parties prenantes.
Sur le plan national, nous proposons d'organiser des assises nationales et/ou une convention citoyenne sur l'eau, les chemins, démarches qui nous semblent incontournables pour accéder à une véritable sobriété et flécher les priorisations en temps de sécheresse. En effet, une convention citoyenne favoriserait une réflexion et une contribution collective apaisée sur le partage de l'eau afin d'éviter l'apparition ou l'extension de conflits.
Concernant les préconisations pour faire face à la multiplication des conflits d'usage, le groupe écologiste préconise avant tout d'apporter des réponses démocratiques plutôt que sécuritaires. Plusieurs propositions du rapport tracent des pistes positives dans ce sens.
Nous soulignons la nécessité d'un moratoire sur les projets de retenues de substitution nécessaire pour rouvrir un dialogue apaisé et nourrir ce débat. Des nombreuses études scientifiques et académiques existent et permettent de requestionner les projets au vu des connaissances rétrospectives et prospectives concernant l'évolution de la ressource en lien avec le dérèglement climatique.
Le groupe écologiste constate enfin au sujet de l'usage agricole de l'eau que le problème sous-jacent du lien entre besoins en eau et modèle agricole n'est pas traité par ce rapport. C'est pourtant une question essentielle, car il ne s'agit pas seulement de se mobiliser pour la production agricole, mais aussi de se questionner sur ce que nous devons produire.
Le choix d'un modèle agricole plus respectueux de l'eau et de l'environnement doit être encouragé par l'État. L'agriculture industrielle et intensive a déjà largement montré ses limites et consomme aujourd'hui jusqu'à 60% de l'eau disponible. L'usage de pesticides, d'herbicides et de fongicides a un impact très fort sur la qualité de l'eau. Il y a là une problématique sanitaire, on ne peut pas à la fois vouloir une meilleure qualité de l'eau et encourager l'agriculture utilisant beaucoup d'intrants.
Le groupe écologiste propose une programmation de la sortie des pesticides et de l'élevage industriel, avec un accompagnement fort des agriculteurs au changement de pratiques. Cet accompagnement doit être déployé en priorité sur les aires de captage, pour y atteindre le zéro pesticides de synthèse et des pratiques de fertilisation respectueuses de la ressource.
Il est aujourd'hui indispensable d'accompagner fortement les agriculteurs, vers un modèle agricole plus vertueux et moins dépendant de l'irrigation. Le cap résolu vers l'agroforesterie et l'agriculture biologique - qui préservent la qualité des sols et celle des nappes - doit être affiché clairement. C'est aussi la voie pour concilier au mieux production agricole et préservation de la biodiversité.
Les investissements pour protéger les zones de captage et prévenir les pollutions doivent être privilégiées aux solutions curatives pourtant indispensables face aux nombreuses pollutions affectant la ressource. Les paysans et agriculteurs doivent être accompagnés dans cette transition pour ne pas se retrouver face au mur des crises climatiques, mais aussi pour ne pas aboutir à un éloignement des citoyens qu'ils nourrissent et à de nouveaux conflits d'usage.
De la même manière, les pratiques agricoles favorisant une plus faible utilisation de l'eau et son maintien dans les sols (plantation et gestion durable des haies, maintien des couverts végétaux, baisse des cheptels bovins, changement de variétés, etc.) doivent également être encouragées.
C'est vrai également pour les activités industrielles qui doivent être orientées sur le chemin de la sobriété et de la protection qualitative de la ressource.
Enfin, pour le groupe écologiste, la mise en place d'études scientifiques en amont de tous projets affectant le cycle de l'eau et le partage des ressources semble indispensable. Notre pays, fort d'une recherche d'excellence dont les moyens doivent être renforcés, doit davantage associer et écouter les scientifiques en amont des prises de décision. Il semble aussi indispensable que le Gouvernement fasse confiance aux citoyens, aux scientifiques, les ONG et les élus nationaux comme territoriaux.
L'eau est un bien commun et une nécessité vitale. Nous pensions qu'en France, elle était suffisante et accessible à tous et en toutes saisons. Il faut désormais apprendre la sobriété et trouver les voies d'une gestion et d'un partage démocratique dans notre pays et dans les échanges internationaux. Ce rapport donne des clés concrètes, c'est un bel espoir pour la mobilisation de chaque partie prenante et pour notre avenir commun.