E. LE COÛT DE LA CERTIFICATION POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
1. Les coûts directs
La certification des comptes induit un coût financier pour la collectivité territoriale concernée. Le coût global se ventile entre des coûts directs, auxquels on peut assez spontanément songer s'agissant d'une mission tarifée par un prestataire externe, et des coûts indirects, moins intuitifs mais qui correspondent au temps passé par les services mettant en oeuvre la démarche.
Les coûts directs correspondent au paiement du marché de prestation du commissaire aux comptes, mais aussi à l'acquisition de nouveaux outils informatiques et à leur paramétrage30(*).
Par ailleurs, la certification implique une conduite de projet transversal au sein de l'administration mobilisée. En région des Pays-de-la-Loire par exemple, deux emplois temps plein (ETP) ont été recrutés, engendrant des coûts directement liés aux besoins de la certification : un chargé de projet dédié au pilotage de la démarche de certification et un chargé de mission contrôle interne.
Enfin, la fiabilisation des comptes des entités publiques locales engendre des incidences budgétaires qui dépendent de la situation de départ de chacune des collectivités. Pour la région des Pays-de-la-Loire, les principaux impacts concernent :
- les régularisations nécessaires au suivi des opérations patrimoniales ;
- les corrections d'erreurs d'imputation comptable (dépenses d'investissement réimputées en dépenses de fonctionnement) ;
- la juste évaluation des risques (avec l'enjeu de la juste évaluation des provisions) ;
- le rattachement à l'exercice des opérations comptables.
Certains coûts engendrés, par exemple au niveau des dotations aux provisions (la provision pour le compte épargne temps - CET - notamment), viennent dégrader les ratios financiers de la collectivité, et n'ont ainsi pas les mêmes conséquences que dans le secteur privé, où la comptabilisation d'une provision vient diminuer l'impôt sur les sociétés (IS).
2. Les coûts indirects
Les coûts indirects correspondent aux coûts des temps passés par les agents de la collectivité territoriale : surplus de travail pour les agents de la direction des finances, mais aussi des agents des directions opérationnelles, de la direction générale pour les arbitrages et le suivi du projet.
Même si certaines tâches sont au fur et à mesure intégrées aux missions courantes (avec la préparation de fonds de dossiers, l'intégration de contrôles clés), les temps d'audit à proprement parler, avec la venue sur site des auditeurs privés, sont difficilement compressibles.
À cet égard, Jean-Pierre Sabio, directeur général adjoint Ressources et transformation de l'action publique pour la région des Pays-de-la-Loire souligne que « le processus de certification conduit en effet à créer une nouvelle forme de contrôle, à périodicité annuelle, avec deux temps forts en fin d'année (au moment de la préparation budgétaire) et en mars / avril (au moment de la préparation du compte administratif). Or, les collectivités territoriales agissent dans un environnement déjà marqué par les contrôles, tels que ceux du comptable public ou encore de la Commission interministérielle de coordination des contrôles s'agissant des fonds européens. Alors même qu'il est souhaité une administration plus réactive, plus agile, et plus efficace, il est important de rappeler que le temps investi pour répondre aux auditeurs externes vient réduire le temps disponible pour la mise en oeuvre de l'action publique ».
3. L'estimation du coût total
Dans son rapport précité, la Cour des comptes présente une évaluation des coûts de l'expérimentation. Cette estimation se fonde sur les déclarations transmises par les collectivités expérimentatrices, vingt ayant répondu à la Cour des comptes sur ce point. Deux phases sont distinguées, celle correspondant à la préparation (2017-2019) et celle retraçant la mise en application (depuis 2020).
L'estimation des coûts annuels engagés par les collectivités expérimentatrices
(en euros)
Phase 1 |
Communes |
Intercommunalités |
Départements |
Régions |
Moyens humains |
20 000 - 300 000 |
8 000 - 104 000 |
40 000 - 230 000 |
120 000 - 235 000 |
Moyens techniques |
5 000 |
2 000 - 4 000 |
2 000 |
13 000 |
Cabinet externe |
26 000 |
30.000 |
200 000 |
|
Autre coûts |
10 000 - 15 000 |
8 000 - 54 000 |
15 000 - 35 000 |
|
Total |
35 000 - 320 000 |
44 000 - 188 000 |
87 000 - 297 000 |
333 000 - 448 000 |
(en euros)
Phase 2 |
Communes |
Intercommunalités |
Départements |
Régions |
Moyens humains |
45 000 - 400 000 |
20 000 - 300 000 |
50 000 - 250 000 |
260 000 - 400 000 |
Moyens techniques |
5 000 |
5 000 |
10 000 |
|
Cabinet externe |
20 000 - 105 000 |
30 000 |
60 000 |
200 000 |
Autre coûts |
30 000 |
25 000 |
100 000 |
|
Total |
100 000 - 540 000 |
55 000 - 335 000 |
145 000 - 345 000 |
560 000 - 700 000 |
Source : Cour des comptes, d'après les estimations des collectivités expérimentatrices
La Cour des comptes relève que « la mobilisation de moyens humains varie en fonction de l'implication de la collectivité et, surtout, selon sa taille ». Sans surprise, le facteur relatif à la taille de la collectivité territoriale constitue un déterminant important du coût des opérations de certification : en régime de croisière, le coût annuel revient à une fourchette située entre 560 000 euros et 700 000 euros pour une région, tandis qu'un coût minimum de 100 000 euros est présenté du côté des communes et un autre de 55 000 euros pour les intercommunalités.
* 30 Par exemple, pour la région des Pays-de-la-Loire, l'outil « Isilog » qui permet l'inventaire physique du campus régional.