B. L'UICN, UN ACTEUR CAPABLE D'ÉVOLUER POUR MIEUX PRENDRE EN COMPTE LES INTERACTIONS CLIMAT-BIODIVERSITÉ ET ASSOCIER PLUS ACTIVEMENT LES COLLECTIVITÉS LOCALES
Au-delà des réflexions de fond, le congrès de Marseille a également été l'occasion de renforcer la capacité d'expertise de l'UICN en adaptant son mode de fonctionnement et sa gouvernance. Deux motions de procédure ont ainsi été opportunément adoptées pour, d'une part, tirer les conséquences des interactions fortes entre crise climatique et érosion de la biodiversité et, d'autre part, associer plus étroitement les collectivités territoriales à la gouvernance de l'UICN .
1. Une commission nouvelle dédiée au changement climatique
La motion 3 adoptée lors du congrès de Marseille a consacré la mise en place d'une septième commission , la commission du changement climatique , appelée provisoirement « Commission sur la crise climatique », dans le but de « mobiliser et d'assurer la coordination de l'Union et de participer aux efforts plus vastes des comités nationaux et régionaux de l'UICN et de la société civile visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à s'adapter au changement climatique ».
Cette nouvelle instance aura pour tâche d' aborder de front les crises jumelles du climat et de la biodiversité , grâce à l'appui de nouveaux experts chargés d'étudier plus spécifiquement les relations et interactions entre le climat et la biodiversité. L'exposé des motifs de la résolution indique notamment que « la protection de la biodiversité et de l'intégrité des écosystèmes peut apporter une contribution essentielle à la réalisation des objectifs adoptés en vertu de l'Accord de Paris visant à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C au maximum ». La commission salue le décloisonnement des approches , préalable nécessaire à la conception de politiques publiques et de stratégies globales, génératrices d'effets d'entraînement bénéfiques à la fois pour le climat et la biodiversité, ainsi que l'illustre l'adoption par le Sénat le 2 novembre 2021 de la résolution visant à affirmer la nécessité d'un accord ambitieux lors de la COP26 de Glasgow permettant de garantir l'application effective de l'Accord de Paris sur le climat 7 ( * ) .
2. Des collectivités locales reconnues au statut de membres à part entière de l'UICN
La motion A adoptée le 10 septembre 2021 à plus de 84 % des suffrages exprimés a fait évoluer les statuts de l'UICN pour y inclure les autorités infranationales parmi les membres de catégorie A. Peuvent désormais adhérer à l'UICN les « organismes publics au niveau national, provincial, local, territorial ou régional qui ont été élus, ont un pouvoir décisionnel effectif dans le domaine de la conservation de la nature et/ou sont compétents pour assurer une utilisation équitable et écologiquement durable des ressources naturelles ».
Les autorités infranationales membres au sein d'un même État disposent collectivement d'une voix , qu'elles proviennent ou non d'un État membre. Cette modalité particulière de vote - une seule voix collective - s'explique notamment par le souci pragmatique de ne pas diluer le poids des États au sein de l'UICN.
Cette position était défendue notamment par le comité français de l'UICN ainsi que Sébastien Moncorps, directeur du comité français de l'UICN, l'avait indiqué à la commission lors de son audition le 7 juin dernier 8 ( * ) : « Le comité français de l'UICN, en accord avec le Gouvernement, souhaite que les collectivités soient une nouvelle catégorie de membres de l'UICN en raison de la place prise par ces dernières à la suite de toutes les vagues de décentralisation dans le monde. Les collectivités sont dorénavant des acteurs majeurs pour la préservation de la nature. Il est donc normal qu'elles soient représentées et aient un droit de vote lors de l'assemblée générale. Elles doivent pouvoir soumettre des recommandations afin de forger la politique internationale de l'UICN. »
La commission salue cette avancée bienvenue : le triptyque États-collectivités-ONG est propice à impulser les changements décisifs et urgents qui doivent intervenir pour répondre à la crise de la biodiversité. Avec des curseurs à la fois nationaux et régionaux, les instances et membres de l'UICN bénéficieront de nouvelles grilles de lecture et d'analyse des problèmes et des solutions à apporter, ce qui devrait contribuer au meilleur équilibre entre les niveaux d'action nécessaires et la mise en oeuvre effective du principe de subsidiarité . Comme le souligne le manifeste publié à l'issue du congrès, l'action locale est un outil puissant pour le changement , qui vient compléter les mesures prises à d'autres niveaux.
En matière de conservation de la nature, la pertinence du maillon infraterritorial n'est plus à démontrer : les élus locaux jouent un rôle moteur dans la lutte contre l'érosion de la biodiversité. Ils sont en effet en première ligne dans leurs territoires pour agir et prévenir.
* 7 La résolution a été déposée le 8 octobre 2021 par Didier MANDELLI, Ronan DANTEC, Jean-François LONGEOT et plusieurs de leurs collègues. Pour en savoir plus, consulter le dossier législatif .
* 8 Le compte rendu de l'audition est consultable en annexe du présent rapport et sur le site du Sénat .