E. FACE AUX ÉVÈNEMENTS MÉTÉOROLOGIQUES EXTRÊMES PLUS FRÉQUENTS ET PLUS VIOLENTS, UN RÔLE TOUJOURS PLUS SENSIBLE
Les dérèglements climatiques à l'oeuvre aujourd'hui se traduisent déjà et vont se traduire à l'avenir par une multiplication de phénomènes météorologiques extrêmes qui gagnent également en intensité. En France comme à l'étranger, l'actualité récente nous a malheureusement montré tous les dégâts matériels et humains qui pouvaient résulter de tels évènements. La prévision et l'anticipation de ces phénomènes, le bon fonctionnement de la chaîne d'alerte mais aussi le développement d'une culture du risque au sein des pouvoirs publics mais aussi plus largement parmi les populations sont autant d'enjeux majeurs dans lesquels Météo-France est appelé à jouer un rôle déterminant . Aussi, aujourd'hui, toutes les décisions relatives à l'établissement, notamment sur le plan budgétaire et des effectifs, doivent être pesées et soigneusement réfléchies au prisme de cette perspective.
La capacité de Météo-France à mieux prévoir , plus tôt et de façon plus fine, les phénomènes météorologiques dangereux ainsi qu'à alerter efficacement pouvoirs publics et populations quant à leur imminence et aux risques qu'ils pourraient occasionner, doit en grande partie guider les orientations stratégiques de l'établissement mais aussi les décisions prises par l'État à son endroit.
Les liens entre le processus de réchauffement climatique et la multiplication de phénomènes météorologiques extrêmes ne font plus de doutes. Ils sont largement documentés. Le rapport de l'observatoire national sur les effets du réchauffement climatique portant sur « les évènements météorologiques extrêmes dans un contexte de changement climatique » 24 ( * ) , publié en 2018, pointait notamment les risques associés à l'amplification des vagues de chaleur , des épisodes de sécheresse , du risque de feux de forêts , de l'intensité et de la fréquence des pluies intenses , de l'activité cyclonique ou encore du risque avalanche .
La France n'est et ne sera pas épargnée , notamment par des vagues de chaleur estivales plus intenses, plus longues et plus fréquentes. Elle est aussi concernée par un risque de sécheresse accru et potentiellement dramatique pour le secteur agricole. Les risques incendies, avalanches ou encore vague submersion vont devenir plus prégnants tandis que pour nos territoires ultra-marins, les cyclones pourraient gagner en intensité . Une autre préoccupation majeure tient à la multiplication de pluies extrêmes comme les épisodes dits « cévenols » qui devraient gagner en intensité et s'étendre à des territoires jusqu'ici épargnés .
La relation entre le changement climatique et plusieurs phénomènes météorologiques extrêmes survenus en 2021 a été récemment mise en évidence dans une publication de l'organisation météorologique mondiale (OMM) 25 ( * ) , organisation qui estime par ailleurs que 90 % des catastrophes naturelles sont causées par des phénomènes liés au temps, au climat et à l'eau . Le 1 er septembre 2021, l'OMM a publié une étude démontrant que les catastrophes liées à des phénomènes météorologiques, climatiques et hydrologiques extrêmes ont été multipliées par cinq entre 1970 et 2019 . En moyenne, sur les cinquante dernières années, ce type de catastrophes a causé 115 morts et 202 millions de dollars de dégâts chaque jour . Toujours selon l'OMM, les conséquences économiques de ces évènements ont été multipliées par huit sur la même période, passant de 49 millions de dollars par jour en 1970 à 383 millions de dollars aujourd'hui. Publié en août 2021, le dernier rapport du GIEC souligne la tendance à l'accélération des dérèglements climatiques et de leurs conséquences sur les phénomènes météorologiques extrêmes.
Le système d'alerte est fragile , les crues qui ont durement frappé l'Allemagne et la Belgique en juillet 2021, nous l'ont démontré. Dans l'hexagone, Météo-France est un maillon déterminant de la chaîne d'alerte . Il en est le déclencheur. Aussi, pour prévenir les risques accrus liés aux phénomènes météorologiques extrêmes il est essentiel de veiller à ce que l'opérateur soit en mesure de jouer tout son rôle .
Pour répondre aux risques accrus induits par les phénomènes météorologiques extrêmes , souvent très localisés , l'établissement concentre ses efforts pour affiner les prévisions de ces épisodes dangereux. À ce titre, le développement d'une prévision fine à l'échelle infra-départementale sera un enjeu déterminant pour Météo-France dans les années à venir. En proposant de « faire progresser l'anticipation des risques météorologiques » , le deuxième axe stratégique du contrat d'objectifs et de performance (COP) 2017-2021 porte cette ambition. Elle s'est notamment traduite par la création de nouvelles productions relatives aux prévisions de phénomènes dangereux ayant pour vocation de signaler des événements météorologiques pouvant entraîner des conséquences graves pour la sécurité des personnes et des biens à compter du surlendemain et jusqu'à sept jours.
Le dispositif de vigilance doit descendre le plus finement possible à l'échelle des territoires en donnant la priorité aux zones les plus à risque . Les vigilances crue et pluie-innondation doivent continuer d'être optimisées en relation avec la direction générale de la prévention des risques (DGPR). Essentiel et ayant fait ses preuves en période de crises aigües, le dispositif avertissements pluie intense à l'échelle des communes (APIC), récemment étendu aux zones de montagne, couvre désormais l'ensemble du territoire . Il s'agit désormais de mieux le valoriser . Ces dernières années, les cartes de vigilance et les bulletins météo qui leur sont associées ont été enrichis d'informations plus fines. Il est néanmoins nécessaire d' aller plus loin dans l'amélioration de la prévision infra-départementale , tant en termes d' anticipation que de précision dans l'espace et dans le temps .
Au titre de la mission de sécurité de l'établissement, le projet de nouveau COP 2022-2026 retient comme premier objectif « d'améliorer l'utilité des dispositifs d'aide à la décision en matière de phénomènes dangereux » . Il est indispensable que sur la période du prochain COP Météo-France perfectionne son dispositif d'avertissement pour fournir des prévisions anticipées, à l'échelle infra-départementale et intégrant les vulnérabilités spécifiques aux territoires . Les premiers jalons d'une vigilance à l'échelle infra-départementale ont été posés . Il est impératif de les approfondir .
Recommandation n° 2 : face aux conséquences des dérèglements climatiques, diriger prioritairement les capacités de l'opérateur vers une prévision anticipée et plus fine dans le temps comme dans l'espace des phénomènes météorologiques extrêmes et des risques qui leur sont associés.
* 24 Rapport de l'observatoire national sur les effets du réchauffement climatique remis au Premier ministre et au Parlement portant sur « les évènements météorologiques extrêmes dans un contexte de changement climatique », décembre 2018.
* 25 http://public.wmo.int/en/media/news/summer-of-extremes-floods-heat-and-fire