D. LES AIDES À LA MODERNISATION

Les aides à la modernisation - 55,5 millions d'euros en AE et CP prévus en loi de finances pour 2021 - couvrent un champ assez large :

- L'aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et générale ;

- L'aide à la distribution de la presse ;

- L'aide à la modernisation des diffuseurs de presse ;

- Le fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) ;

- Le fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse (FSEIP).

1. Un dispositif en voie d'extinction : l'aide à la modernisation sociale

La loi de finances rectificative pour 2004 12 ( * ) a mis en place une aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et générale incarnant le soutien de l'État à la résorption des sureffectifs observés dans les services de fabrication des journaux quotidiens. Ce dispositif fait écho au plan de modernisation sociale mis en place au terme de négociations collectives impliquant tous les acteurs du secteur de l'imprimerie en 2004 et 2005.

L'aide vient financer deux mécanismes :

- le régime exceptionnel de cessation d'activité de la presse parisienne (RECAPP) 13 ( * ) qui se matérialise par le départ à partir de 50 ans pour les ouvriers et employés, et après 55 ans pour les cadres nés avant le 31 décembre 1955 assorti d'une interdiction de recrutement dans les entreprises concernées durant 3 ans. L'État prenait en charge 46,4 % du coût total du plan ouvert jusqu'au 31 décembre 2011, le montant de cette participation ne pouvant être supérieur à 75,4 millions d'euros et le nombre de salariés concernés ne pouvant dépasser 586 personnes ;

- un dispositif équivalent cette fois-ci dédié à la presse quotidienne régionale 14 ( * ) : l'État prenant encore en charge 46,4 % du coût total du plan, le montant de cette participation ne pouvant excéder 116 millions d'euros et le nombre de salariés concernés étant plafonné à 1 800 personnes.

Une commission de contrôle de l'aide à la modernisation sociale a été mise en place en 2009 afin de vérifier la bonne mise en oeuvre des deux dispositifs. Cette commission a été supprimée en 2012 au profit d'opérations de contrôle, sur pièces et sur place, confiées à des corps d'inspection de l'État 15 ( * ) . Ce contrôle a été ouvert, en 2014, à des experts extérieurs 16 ( * ) .

Compte tenu de la moindre entrée de potentiels bénéficiaires au sein des deux dispositifs mais aussi des effets des différentes réformes de retraites adoptées entretemps, le coût pour l'État a été ramené à 186,9 millions d'euros (68,7 millions d'euros pour la PQN et 118,2 millions d'euros pour la PQR) contre 191,4 millions d'euros initialement envisagés.

Montants versés par l'État au titre du financement des deux dispositifs de soutien à la modernisation sociale

(en millions d'euros)

Année

Montant

Année

Montant

2006

9,5

2013

17,8

2007

12,3

2014

10,7

2008

14,1

2015

6,9

2009

24,9

2016

1,7

2010

29,9

2017

1,0

2011

28,2

2018

0,5

2012

23,4

2019

0,0

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

2. L'aide à la modernisation de la distribution de la presse : un mode de financement connexe pour France Messagerie

L'aide à la distribution de la presse comprend trois niveaux, dont le dernier créé par décret en 2020 vise spécifiquement les difficultés induites par la liquidation de Presstalis ( cf infra ) 17 ( * ) .

La première section de l'aide vise la distribution de la presse quotidienne nationale d'information politique et générale vendue au numéro en France. Deux catégories de publications sont concernées :

- les quotidiens nationaux d'information politique et générale, de langue française, paraissant au moins cinq fois par semaine et bénéficiant du certificat d'inscription délivré par la commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) ;

- les publications nationales de périodicité au minimum hebdomadaire, présentant le caractère d'information politique et générale, imprimées sur papier journal pour au moins 90 % de leur surface et dont le prix de vente et la durée de présentation à la vente de chaque numéro sont comparables à ceux des quotidiens nationaux.

La répartition de l'aide au sein de cette première section entre les titres bénéficiaires est effectuée au prorata du nombre d'exemplaires vendus au numéro dans l'année n-1 par chacun des titres. Les ventes par quantité sont exclues de ce décompte. Le nombre d'exemplaires est arrêté annuellement sur la base d'une déclaration fournie par le titre bénéficiaire et certifiée par le Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP) en se référant à toutes sources professionnelles disponibles.

L'aide versée aux quotidiens nationaux dans le cadre de cette section est, en pratique, reversée à France Messagerie, qui a succédé à Presstalis, dans la mesure où elle demeure la seule messagerie qui distribue les quotidiens nationaux. La loi de finances pour 2021 prévoit une dotation de 27 millions d'euros.

La deuxième section concerne la distribution de la presse française à l'étranger, afin de renforcer son audience. La dotation prévue en loi de finances pour 2021 s'élève à 0,85 million d'euros. L'aide est ciblée sur des zones géographiques déterminées par le directeur général des médias et des industries culturelles. Les titres éligibles font partie de la presse d'information politique et générale (IPG). La rentabilité des titres à l'étranger est particulièrement difficile à maintenir en raison des frais de transport par avion. Ce mode de routage est pourtant impératif pour les titres IPG, en raison de leur périodicité qui les rend très sensibles aux délais de mise en vente. Reste une interrogation sur l'opportunité du maintien de cette aide face à la baisse constatée ces dernières années des exportations tant en valeur qu'en volume. L'année 2018 a ainsi enregistré une diminution de - 12,4 % en volume et de - 10 % en valeur (- 7,8 % en volume et - 6 % en valeur pour les titres IPG).

3. L'aide à la modernisation des diffuseurs de presse
a) Une crise latente exacerbée par la pandémie et la liquidation de Presstalis

Le nombre de points de vente spécialisés est passé de 28 579 en 2011 à un peu moins de 20 917 aujourd'hui.

Évolution du nombre de points de vente de 2011 à 2020

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

28 579

27 497

26 816

25 866

24 877

24 134

23 217

22 564

21 985

20 917

Source : Commission des finances du Sénat d'après le Conseil supérieur des messageries de presse

Cette diminution concerne pour l'essentiel les territoires : 75 % des pertes concernent des points de vente situé en dehors du réseau parisien (691 points de vente perdus en 2017, 578 en 2016). La dynamique est cependant la même dans Paris avec la disparition de 310 points de vente entre 2011 et 2017 (721 points de vente actifs en 2017). Seul, le réseau des kiosques parisiens présente une stabilité sur la période. Le réseau des magasins traditionnels est, quant à lui, en diminution sensible (- 40 % entre 2011 et 2017).

Évolution du nombre de points de vente de 2015 à 2020

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Enseignes presse

2 887

2 820

2 645

2 560

2 454

2 238

Maison de la presse

660

645

675

680

679

677

Mag Presse

959

933

804

755

700

663

Kiosques

548

555

522

500

454

466

Relay

720

687

644

625

621

432

Réseau traditionnel

16 892

16 285

15 721

15 252

14 805

14 229

Librairies papèteries

1 745

1 575

1 436

1 346

1 261

1 205

Presse & connexes

991

932

913

855

832

802

Tabac & Presse (hors bars)

7 620

7 539

7 421

7 330

7 202

7 045

Bars (dont tabac)

5 465

5 259

5 043

4 870

4 705

4 444

Alimentation (autres que superettes)

1 071

980

908

851

805

733

Enseignes non presse

3 480

3 474

3 433

3 393

3 358

3 273

Enseignes culturelles

126

130

142

147

152

150

Rayons intégrés d'hypermarchés

962

980

994

993

989

986

Rayons intégrés de supermarchés

1 632

1 640

1 607

1 595

1 565

1 522

Supérettes sous enseigne

591

573

548

533

543

519

Stations service

165

147

139

124

107

96

Points de vente thématiques 18 ( * )

4

4

3

1

2

2

Autres points de ventes

1 618

1 555

1 418

1 359

1 368

1 177

Points de vente quotidiens

865

797

735

707

751

658

Autres (campings, universités...)

753

758

683

652

617

519

Total

24 877

24 134

23 217

22 564

21 985

20 917

Dont point de ventes complémentaires (PVC) 19 ( * )

1 990

1 891

1 881

1 902

1 999

1 890

Source : Commission des finances du Sénat d'après le Conseil supérieur des messageries de presse

L'installation de rayons de presse dans les supérettes d'une surface de vente inférieure à 400 m² n'a de son côté pas enrayé cette tendance baissière. Seulement trois projets d'installation de presse en supérette ont été agréés en 2018. Les créations de points de ventes ont, de fait, surtout concerné les « points de vente complémentaires » (PVC) à offre réduite (entre 50 et 150 titres), présents notamment dans les grandes surfaces alimentaires mais dont le chiffre d'affaires annuel moyen (15 000 euros) est largement inférieur à celui des points de ventre traditionnels (150 000 euros).

Évolution du nombre de création de points de vente
de 2015 à 2020

2015

2016

2017

2018

2019

2020

361

369

369

298

338

219

Source : Commission des finances du Sénat d'après le Conseil supérieur des messageries de presse

La fermeture de points de vente engendre un effet de concentration du réseau : les 1 000 premiers diffuseurs ne représentaient que 4,3 % du réseau en 2018 mais réalisaient 23 % du chiffre d'affaires du secteur. Les 5 000 premiers diffuseurs réalisaient plus de 60 % des ventes.

Les conditions de travail contribuent à cette diminution du nombre de points de vente. Ceux-ci sont ouverts en moyenne 13 heures 30 par jour et 80 heures par semaine. 4 à 6 heures sont consacrées aux seules opérations de mise en place des produits et de gestion des stocks et des invendus. Par ailleurs, l'accroissement du nombre de produits à traiter via les produits hors presse (DVD, multimédias, livres, encyclopédies, etc.) et la progression des taux d'invendus (40 % en 2007, 45 % en 2014, 51 % en 2017) engendrent un encombrement croissant des linéaires, qui nuit à la bonne exposition des titres et fragilise les ventes.

Cette situation de grande difficulté a été renforcée en 2020 par la crise sanitaire et l'effondrement de Presstalis. La première a débouché sur une diminution de la fréquentation (- 40 %) et des ventes (- 20 % sur les seules ventes de presse et - 40 % sur les recettes du point de vente toutes activités confondues) aux mois de mars et avril 2020. Le redressement judiciaire de Presstalis prononcé le 12 mai a quant à lui induit un manque d'approvisionnement pendant plusieurs semaines et une baisse des marges. Cette double crise a conduit à la fermeture de 1 068 points de vente en 2020. Afin de faire face à cette double crise, une aide de 19 millions d'euros en faveur des diffuseurs indépendants et spécialistes a été adoptée à l'occasion de l'examen de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ( cf infra ).

b) Une aide externalisée

L'aide à la modernisation des diffuseurs de presse a été instituée en loi de finances rectificative pour 2004. Elle consiste en une subvention directe, accordée sous certaines conditions aux diffuseurs qui souhaitent informatiser ou moderniser le mobilier de leur point de vente. Il s'agit, par ce biais, d'accompagner le réseau des diffuseurs de presse aux fins d'amélioration de leurs performances commerciales. Le champ de l'aide couvre les projets de rénovation de l'espace de vente et, depuis 2005, les projets de modernisation informatique (¾ des investissements financés en 2017).

En 2019, 2 871 subventions ont été attribuées (+ 21 % par rapport à 2018) pour un montant d'aide moyen de 1 875 euros . La loi de finances pour 2021 prévoit une enveloppe de 6 millions d'euros, soit le montant retenu depuis la loi de finances pour 2017. Ces crédits sont complétés par une dotation d'un montant équivalent prévue dans le cadre du Plan de relance ( cf infra ).

Nombre de subventions et montants versés au titre de l'aide
à la modernisation de la diffusion depuis 2012

( en millions d'euros )

Montant inscrit en loi de finances

Nombre de subventions versées

Montant des attributions

Montant des versements

2012

5,64

1 111

3,1

2,7

2013

4

2 038

5,56

5,4

2014

4

1 604

4,46

4,2

2015

3,8

1 825

4,82

3,8

2016

3,68

1 775

4,83

4

2017

6

2 881

6,54

5,33

2018

6

2 368

4,65

5,03

2019

6

2 871

5,38

3,68

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

La gestion du dispositif a été externalisée dans le cadre d'une concession de service public (CSP). La société Deloitte Conseil est ainsi en charge de la distribution de l'aide depuis le 4 juillet 2019. Sa commission s'élève à 6,45 % toutes taxes comprises.

c) Une aide non financière : la réforme de la loi Bichet

La réforme de la « loi Bichet » ( cf infra ) permet de redonner aux diffuseurs de presse un droit de regard sur le choix des titres (assortiment) et sur les quantités fournies (plafonnement) . Les titres d'information politique et générale (IPG) ne sont soumis à aucune restriction ou règle d'assortiment et disposent d'un droit d'accès absolu au réseau de diffusion de la presse.

S'agissant des publications CPPAP, un accord interprofessionnel devrait déterminer ces règles d'assortiment et de plafonnement des quantités servies aux points de vente. Cet accord devra être validé par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP). Les titres non CPPAP et les titres CPPAP non retenus dans les assortiments seront quant à eux librement choisis par les diffuseurs de presse, en fonction du potentiel commercial du point de vente et de ses capacités d'exposition des titres.

L'ARCEP a mis en place un comité de suivi de l'assortiment, dont la première réunion s'est tenue le 13 février 2020. Les premières négociations, sous l'égide de ce comité ou entre professionnels, n'ont pas abouti à de réels résultats. Les organisations professionnelles représentatives (OPR) des éditeurs et des marchands de presse (auxquelles s'est associé le syndicat des dépositaires) ont abouti à la rédaction et la signature d'un accord interprofessionnel relatif à l'assortiment et à la régulation des quantités. Cet accord comprenait également un volet traitant de la distribution du « hors presse » et des titres non CPPAP, afin de s'assurer que ceux-ci ne puissent obtenir plus de droits que les titres CPPAP soumis à assortiment. La loi n° 2019-1063 relative à la modernisation de la distribution de la presse prévoit pour le hors CPPAP que leur distribution relève de conventions entre le marchand et les éditeurs, ou entre les représentants des marchands et ceux des éditeurs. Si l'accord a pu réunir les OPR - Alliance de la presse d'information générale (APIG), Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM), Fédération nationale de la presse spécialisée (FNPS) et Culture Presse pour les marchands -, les Messageries lyonnaises de presse n'ont pas approuvé le projet rendant impossible son agrément par l'ARCEP. En cas d'échec, l'ARCEP devra définir elle-même les règles d'assortiment qu'elle juge les plus adaptées.

L'ARCEP a, par ailleurs, mis en place un comité de concertation de la distribution de la presse (CoCoDiP) 20 ( * ) dans lequel siègent des représentants d'associations professionnelles d'éditeurs de presse, de sociétés de distribution de la presse et d'associations de diffuseurs afin d'entretenir un dialogue permanent entre le régulateur et le secteur.

4. Le Fonds stratégique pour le développement de la presse : une action entravée par Presstalis
a) Un fonds dédié aux projets innovants

Créé en 2012 21 ( * ) puis modernisé en 2014 et en 2016, le Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) accorde des subventions ou des avances remboursables à des projets d'investissements innovants.

Le FSDP est gouverné par un comité de pilotage, rassemblant les représentants des différentes familles de presse éligibles au dispositif. Ce comité propose l'attribution des aides. Un club des innovateurs est également intégré au sein du Fonds.

Des avances à taux bonifiés pouvant aller jusqu'à 70 % doivent permettre au secteur de faire face à de nouveaux défis, sans pour autant qu'une doctrine d'attribution des fonds ne soit précisée. Le taux de base est fixé à 40 %, le taux bonifié à 60 % bénéficie désormais également aux titres particulièrement fragiles et jugés précieux pour le pluralisme (publications nationales à faibles ressources publicitaires, quotidiens régionaux, départementaux et locaux à faibles ressources de petites annonces) ainsi qu'aux PME qui occupent moins de 25 personnes et qui ont plus de 3 ans. Le taux d'aide « super-bonifié » à 70 % a été créé pour les seuls médias émergents (soit des PME qui occupent moins de 25 personnes et qui ont moins de 3 ans).

Le périmètre des dépenses éligibles intègre pour les seuls médias émergents, au-delà des dépenses techniques, les dépenses de salaires directement afférentes à la conception éditoriale

Sont éligibles au FSDP, les publications d'information politique et générale (IPG), jusqu'à présent limitées aux publications de périodicité au maximum trimestrielle. Parallèlement, les services de presse en ligne qui développent l'information professionnelle ou qui favorisent l'accès au savoir et à la formation, la diffusion de la pensée, du débat d'idées, de la culture générale et de la recherche scientifique sont également couverts par le Fonds.

Le fonds stratégique pour le développement de la presse bénéficie également aux projets en vue d'assurer le rayonnement du traitement de l'actualité française et internationale par la presse française dans les pays francophones où l'accès en est limité par le niveau de vie et de diffusion des technologies numériques. L'aide prend la forme de remboursements partiels de frais de prospection et de promotion à l'étranger ainsi que ceux liés au manque à gagner dû à la baisse des prix de vente.

La direction générale des médias et des industries culturelles détermine les zones ou les actions prioritaires 22 ( * ) .

Aucune aide n'a été accordée en 2019 au titre du rayonnement de la presse française à l'étranger en raison, notamment, du protocole de conciliation avec Presstalis ( cf infra ). La même raison avait conduit à réduire l'intervention du FSDP à 21 000 euros en 2018. 450 000 euros avaient été versés en 2017.

b) La levée de l'hypothèque Presstalis et l'aide accordée dans le cadre du Plan de relance permettent de redynamiser le fonds

Afin de tenir compte des difficultés rencontrées par Presstalis, une partie des crédits du FSDP ont été réorientés vers l'aide à la distribution de la presse quotidienne nationale, ensuite reversée à Prestalis. 9 millions d'euros devaient ainsi être reversés chaque année entre 2018 et 2021 à cette société. En contrepartie, les éditeurs associés de la Coopérative de Distribution des Magazines et de la Coopérative de Distribution des Quotidiens renonçaient à présenter des dossiers de demande d'aide au FSDP pendant la même période. Suite à la disparition de Presstalis, la condition a finalement été levée en 2020 pour les éditeurs représentants les ventes en montant les plus faibles, et pour l'ensemble des éditeurs dès 2021. Le nombre de projets aidés a néanmoins considérablement augmenté en 2019 avec 120 dossiers aidés (86 en 2018). La totalité des crédits disponibles, soit 11 millions d'euros, a ainsi été attribuée.

Ce faisant, le Gouvernement a rompu avec une tendance baissière qui pouvait interroger quant à la réalité des ambitions accordées à ce fonds. En effet, au-delà de la ponction de 9 millions d'euros, les crédits accordés à ce dispositif tendaient à être rabotés : baisse de 4,91 % à périmètre constant entre 2019 et 2018 et diminution annoncée de 5,19 % entre 2020 et 2018. Le Fonds fait ailleurs l'objet de mesures de gel budgétaire systématiques depuis 2012. Elles ont concerné 27 % des crédits en 2019, ce qui fragilise un peu plus son efficacité.

Subventions accordées par le FSDP depuis 2012

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Total

Projets soutenus

140

176

117

78

71

93

77

120

70

942

Aides attribuées (en millions d'euros)

20,95

21,10

22,89

10,11

11,17

17,05

9,21

10,99

15,09

138,56

Aide moyenne (en euros)

149 669

119 886

195 625

129 297

157 370

183 348

119 636

91 592

215 530

147 097

Source : direction générale Médias et industries culturelles, réponse au questionnaire du rapporteur spécial

La troisième loi de finances rectificative pour 2020 (5 millions d`euros) et le Plan de relance (45 millions d'euros en 2021 et 2022 dont 22,5 millions d'euros en 2021) ont, dans le même temps, sensiblement réévalué la dotation accordée au FSDP. Les taux d'aide sont ainsi augmentés de 10 points de façon transitoire afin de soutenir l'investissement des entreprises de presse durement affectées pendant la crise liée à la pandémie. Le décret n° 2020-1152 du 9 décembre 2020 portant réforme du fonds stratégique pour le développement de la presse et du fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse facilite dans le même temps, la dématérialisation des procédures et le raccourcissement des délais de paiements. Le groupe Libération a ainsi pu bénéficier d'un financement à hauteur de 60 % en vue de l'acquisition de 190 ordinateurs portables destinés à toute sa rédaction, afin de permettre à celle-ci d'adopter le système d'édition du Washington Post , Arc Publishing .

Il apparaît désormais indispensable, compte tenu de la nouvelle dynamique du fonds, qu'une clarification de la doctrine d'attribution des subventions soit mise en oeuvre. Le rapporteur spécial relève que cette opacité peut, en effet, entretenir un soupçon de clientélisme.

5. Le Fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse (FSEIP)

Créé en 2016, le Fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse (FSEIP) dispose de trois outils :

- des bourses d'émergence ;

- des aides à des programmes d'incubation ;

- des aides à des programmes de recherche.

Les bourses d'émergence permettent aux entrepreneurs de presse de préciser leur concept éditorial et d'approfondir leur étude de faisabilité économique. Elle est d'un montant unitaire d'au maximum 50 000 euros. Cette bourse permet de contourner l'obligation d'inscription auprès de la commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP). Elle concerne les PME de moins de 3 ans et composées de moins de 25 personnes

Nombre et montant des bourses d'émergence attribuées
depuis 2016

Année

Nombre

Montant versé

2016

36

1 493 000

2017

19

670 800

2018

24

945 000

2019

24

756 000

2020

18

1 826 000

Total

143

5 690 800

Les programmes d'incubation dédiés aux médias émergents (presse et audiovisuel) et aux fournisseurs de solutions (technologiques, graphiques, commerciales...) destinées aux médias doivent permettre des échanges entre entrepreneurs et le lancement de projets collectifs, de fluidifier les collaborations entre éditeurs et fournisseurs de solutions dédiées, de faire bénéficier les entreprises émergentes de services administratifs, juridiques, sociaux, comptables, financiers mutualisés et de leur donner accès à des ateliers thématiques, des programmes d'accélération, des réseaux d'experts et de tuteurs.

Ces programmes d'incubation peuvent être portés par des incubateurs généralistes ou des groupes de presse. À travers l'hébergement, le conseil et la formation, ils renforcent la visibilité et donc l'attractivité de l'entrepreneuriat de presse et, plus largement, des médias.

Depuis 2016, 25 programmes d'incubation ont été soutenus pour un total de 5 708 604 euros :

- 10 programmes en 2017 pour 2 357 337 euros ;

- 9 programmes en 2018 pour 2 002 737 euros ;

- 6 programmes en 2019 pour 1 348 530 euros.

Le FSEIP lance également des appels à projets pour des programmes de recherche. Ceux-ci visent au développement et à la diffusion de l'innovation pour l'ensemble du secteur à travers de thématiques précises : monétisation de l'information, exploitation de big data , gestion de la relation client (CRM) prédictive, data journalisme, murs de paiement et micropaiements, kiosques, plateformes d'échanges et enchères en temps réel. Les premiers programmes ont été soutenus en 2018 : quatre projets ont ainsi été retenus pour un total de 627 152 euros. 5 projets ont été soutenus en 2020 pour un montant total de 1 409 207 euros.


* 12 Article 135 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004.

* 13 Décret n° 2005-1096 du 2 septembre 2005

* 14 Décret n° 2006-657 du 2 juin 2006.

* 15 Décret n° 2012-484 du 13 avril 2012 relatif à la réforme des aides à la presse et au fonds stratégique pour le développement de la presse.

* 16 Décret n° 2014-659 du 23 juin 2014 portant réforme des aides à la presse.

* 17 Décret n° 2020-814 du 30 juin 2020.

* 18 Les points de vente thématiques assurent la vente de titres sélectionnés selon la thématique du magasin dans lequel ils sont situés (bricolage, décoration, jardinage, sport...)

* 19 Les PVC assurent la vente des quotidiens et des publications de grande diffusion.

* 20 Décision n° 2020-0180 du 6 février 2020.

* 21 Décret n° 2012-484 du 13 avril 2012.

* 22 Les pays concernés sont les suivants : Albanie, Arménie, Macédoine, Moldavie, Haïti, Sainte-Lucie, Cambodge, Laos, Vanuatu, Vietnam, Algérie, Égypte, Liban, Maroc, Tunisie, Mauritanie, Burundi, Cameroun, Centrafrique, Congo, République démocratique du Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Rwanda, Tchad, Comores, Djibouti, Madagascar, Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée, Guinée Bissau, Mali, Sénégal, Togo

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