II. COMMUNICATION DE M. JEAN-FRANÇOIS HUSSON, RAPPORTEUR GÉNÉRAL, ET ADOPTION DE L'AVIS DE LA COMMISSION (12 MAI 2021)

Réunie le mercredi 12 mai 2021 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de M. Jean-François Husson, rapporteur général, sur le projet de décret d'avance, en application de l'article 13 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), et a adopté l'avis de la commission.

M. Claude Raynal , président . - Notre commission a été destinataire jeudi dernier d'un projet de décret d'avance portant ouverture de 7,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement afin de financer des dépenses urgentes.

En application de l'article 13 de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001, ce décret doit être pris sur avis du Conseil d'État et après avis des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui disposent pour cela d'un délai de sept jours à compter de la notification qui leur a été faite du projet de décret.

Aussi le rapporteur général va-t-il nous présenter une communication à ce sujet et nous exposer un projet d'avis sur lequel notre commission devra statuer. L'avis de notre commission sera ensuite transmis à M. le Premier ministre.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Jusqu'en 2017, chaque année était marquée par la présentation d'un ou de plusieurs décrets d'avance, y compris par le Gouvernement actuel. Ce dernier s'est ensuite abstenu de prendre des décrets d'avance pendant trois années consécutives, de 2018 à 2020 : c'est une pratique plus respectueuse de l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), car le décret d'avance devrait rester une procédure d'exception pour des cas d'urgence.

Le projet de décret d'avance qui nous est soumis à présent ne ressemble guère à ceux que nous avions l'habitude d'examiner. Il s'en distingue en particulier par sa relative simplicité, puisque ses ouvertures et annulations ne portent que sur trois programmes d'une même mission, la mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire », mais aussi par son montant et par le contexte budgétaire exceptionnel dans lequel il s'inscrit.

Je dois d'abord faire un point sur sa régularité.

Première condition : un décret d'avance doit annuler un montant de crédits égal au montant des crédits ouverts : c'est bien le cas, puisque d'un côté, le texte ouvre 7,2 milliards d'euros de crédits, soit 6,7 milliards d'euros pour le programme 357 relatif au fonds de solidarité pour les entreprises et 0,5 milliard d'euros pour le programme 356, qui finance principalement l'activité partielle ; et de l'autre côté, il annule le même montant sur le programme 358 consacré au renforcement des participations financières de l'État.

Deuxième condition : les crédits de paiement ouverts doivent être inférieurs à 1 % des crédits ouverts dans la loi de finances de l'année et les autorisations d'engagement ne doivent pas dépasser 1,5 % de ces crédits. Là encore c'est bien le cas, puisque 7,2 milliards d'euros sont égaux très précisément à 0,995 % des crédits ouverts par la loi de finances pour 2021. Ceci m'amène à mes premiers constats.

D'une part, ce projet de décret d'avance est d'un montant historiquement élevé et le présent Gouvernement a d'ores et déjà ouvert beaucoup plus de crédits par décret d'avance que ses prédécesseurs.

D'autre part, il se prive de la possibilité de prendre un nouveau décret d'avance au cours de l'année, si un besoin urgent apparaissait. La marge restante, en valeur absolue, est de 35 millions d'euros. À titre de comparaison, les dépenses du fonds de solidarité sont en ce moment de 190 millions d'euros par jour.

Troisième condition : les ouvertures de crédit doivent correspondre à un besoin urgent. Je distinguerai les deux programmes concernés.

Les crédits disponibles sur le programme 356 de la mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire », qui finance l'activité partielle et deux autres dispositifs, sont aujourd'hui de 0,7 milliard d'euros seulement alors que les dépenses sont supérieures à 1 milliard d'euros par mois. Mais la situation est en fait un peu plus complexe et je vais tenter de vous l'expliquer.

Si les crédits disponibles sont si faibles, c'est parce que le Gouvernement a, par un arrêté pris le 18 mars dernier, annulé 2,3 milliards d'euros de crédits de ce programme. Sans cette décision, il ne serait évidemment pas nécessaire d'ouvrir aujourd'hui 500 millions d'euros de crédits... Plus précisément, cette annulation portait sur des crédits ouverts en 2020 et non consommés : au lieu de les reporter sur le même programme, le Gouvernement les a reportés vers le programme 357, c'est-à-dire le fonds de solidarité. Le Gouvernement a fait de même avec 4,3 milliards d'euros de crédits non consommés sur le programme 360, qui finance des compensations à la sécurité sociale d'allégements de cotisations.

Je m'interroge sur la compatibilité de ces reports croisés avec l'article 15 de la LOLF qui prévoit que « les crédits de paiement disponibles sur un programme à la fin de l'année peuvent être reportés sur le même programme ou, à défaut, sur un programme poursuivant les mêmes objectifs ». Pour le dire en termes moins techniques, cela peut s'apparenter à un contournement de l'autorisation parlementaire, puisque celle-ci a été apportée de manière distincte pour chacun des dispositifs.

Mais il y a plus. Pour financer l'activité partielle instituée lors du premier confinement, qui relève comme je viens de le dire du programme 356 de la mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire », le Gouvernement a décidé d'utiliser des fonds non encore utilisés sur le programme 364 « Cohésion » de la mission « Plan de relance ». Ce programme contient une enveloppe de 4,4 milliards d'euros qui est en fait destinée à deux dispositifs nouveaux, à savoir l'activité partielle de longue durée (APLD) et l'activité partielle de droit commun (APDC). Ces deux nouveaux dispositifs ont été sous-utilisés jusqu'à présent car c'est en fait le dispositif de 2020, créé par le plan d'urgence, qui se poursuit. Là encore, je m'interroge sur cette pratique qui conduit à appliquer à un dispositif des crédits qui ont été votés pour un autre, même si les objectifs, cette fois, sont proches. Nous avions, lors de la loi de finances, déploré le rassemblement sous le label « Plan de relance » de dispositifs qui relevaient en fait du soutien d'urgence.

Ainsi, lorsqu'on examine les crédits réellement disponibles pour financer l'activité partielle, il faut additionner les 0,7 milliard d'euros du programme 356 déjà cités, les crédits issus du plan de relance et non encore consommés, soit 2 milliards d'euros environ, et encore la trésorerie de l'Agence de services et de paiement chargée de verser les aides, soit environ 1,5 milliard d'euros.

Le total est de 4,2 milliards d'euros, ce qui correspond à peu près aux besoins estimés par le Gouvernement jusqu'au mois de juillet, mais pas au-delà.

La demande d'ouverture de crédits, à hauteur de 500 millions d'euros, paraît donc nécessaire pour « sécuriser » les financements. Elle pourrait servir pour le financement de l'activité partielle proprement dite, mais aussi pour deux dispositifs annexes, à savoir une prime aux salariés précaires, dits « permittents », et une indemnisation des congés payés pour certains établissements. Ces deux dispositifs ont été rajoutés dans le périmètre du programme 356 par l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021 en nouvelle lecture.

L'urgence est plus grande s'agissant du fonds de solidarité. La situation est la suivante : les crédits en 2021 sont de 20,2 milliards d'euros, avec 5,6 milliards d'euros ouverts par la loi de finances pour 2021 et le reste provenant de crédits non consommés en 2020 sur le fonds de solidarité lui-même, mais aussi sur d'autres programmes comme je l'ai évoqué tout à l'heure.

Avec un rythme de dépenses qui a varié entre 2,2 et 4,2 milliards d'euros par mois depuis le début de l'année, les crédits actuellement encore disponibles sont de l'ordre de 6,9 milliards d'euros. Or l'administration prévoit une consommation de l'ordre de 5,9 milliards d'euros au mois de mai, estimation qui paraît assez raisonnable compte tenu du renforcement progressif de ce fonds au cours des derniers mois ; et la décroissance des besoins sera très progressive au cours de l'été.

La rupture de paiement risque donc de survenir rapidement au mois de juin et l'ouverture de crédits me paraît nécessaire et urgente pour continuer à soutenir les entreprises.

Un mot à présent sur les annulations de crédit. Elles portent sur le programme 358, créé pour permettre à l'État de prendre des participations financières dans des entreprises en difficulté. Ce programme n'a pourtant reçu aucune dotation en loi de finances pour 2021 : ses crédits proviennent intégralement d'un report massif de 11,7 milliards d'euros de crédits non consommés en 2020. Nous avons déjà critiqué alors le manque de sincérité de cette pratique, que nous ne pouvons que déplorer à nouveau aujourd'hui.

Le décret d'avance « gage » ses ouvertures sur des crédits ouverts il y a plus d'un an, par la deuxième loi de finances rectificative du 25 avril 2020. Ces crédits ne semblent ainsi avoir été maintenus au-delà de la fin de l'année, par un contournement des principes de sincérité et d'annualité budgétaires, que pour servir de compensation à l'ouverture de nouveaux crédits en 2021.

Pour autant, ces crédits paraissant disponibles aujourd'hui pour une annulation, il n'y a pas lieu de s'y opposer, d'autant qu'il restera encore 3,9 milliards d'euros sur ce programme après l'entrée en vigueur de ce décret d'avance. On ne peut toutefois pas exclure que le Gouvernement demande une nouvelle ouverture de crédits dans les mois à venir si des besoins se présentaient.

En conclusion, je vous proposerai de donner un avis favorable, non pas à la gestion budgétaire conduite par ce Gouvernement, mais aux dispositions de ce projet de décret d'avance. Les critères de régularité sont, à mon sens, respectés et les besoins sont réels et urgents, en particulier sur le fonds de solidarité.

Je déplore cependant que le Gouvernement ait eu recours à de tels expédients budgétaires pour retarder jusqu'au dernier moment la présentation d'une demande de crédits. Et je considère également, une nouvelle fois, qu'il aurait dû présenter, plus tôt dans l'année, un projet de loi de finances rectificative, ce qui aurait permis au Parlement d'en débattre pleinement et de l'autoriser formellement.

En tout état de cause, un collectif budgétaire sera évidemment nécessaire d'ici à l'été afin d'alimenter à nouveau le fonds de solidarité, mais aussi, par exemple, pour financer l'annonce faite par le Premier ministre d'une aide d'un milliard d'euros en faveur des agriculteurs touchés par un épisode de gel tardif, voire pour le programme 360 qui finance les compensations d'exonérations de charges sociales : sur ce dernier point, la Cour des comptes note, en effet, un manque de financement de l'ordre de 2 milliards d'euros au titre de 2020, alors que le programme n'a reçu aucun crédit en 2021 et que ses crédits non consommés, comme on l'a vu, ont été reportés vers le fonds de solidarité. Nous aurons donc l'occasion d'y revenir prochainement.

M. Jérôme Bascher . - Je tiens à féliciter le rapporteur général pour avoir tenté de nous expliquer cette mécanique infernale. Nous touchons là aux limites de la LOLF : ainsi, pour la première fois dans l'histoire, ce décret d'avance aggrave le déficit public car il gage des dépenses comptabilisées dans le solde maastrichtien sur une annulation de dépenses en capital qui, elles, ne sont pas comptabilisées dans le déficit public.

On constate que le Gouvernement a les mains liées : il n'est plus en mesure de financer des besoins réels, comme l'aide exceptionnelle pour les agriculteurs victimes du gel.

Même si l'on a le sentiment que le Gouvernement se moque du Parlement et qu'il utilise l'urgence sanitaire pour justifier l'embrouillamini général, je suivrai l'avis du rapporteur général, car il convient de financer les dépenses du fonds de solidarité qui s'élèvent à 4 milliards d'euros en moyenne chaque mois.

M. Vincent Éblé . - Je partage les propos de Jérôme Bascher. Avec ce projet de décret d'avance, le Gouvernement malmène le Parlement, en particulier les commissions des finances des deux assemblées.

Peut-être faudrait-il profiter de l'occasion qui nous est offerte par nos collègues députés Éric Woerth et Laurent Saint-Martin, avec leur projet de réviser certains aspects de la LOLF, pour tenter de poser quelques verrous, notamment au niveau de la programmation pluriannuelle des crédits, ce qui permettrait d'éviter ces dysfonctionnements répétitifs.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Ce projet de décret d'avance pose un problème de méthode et démontre un manque de respect à l'égard du Parlement. Le Gouvernement me semble éprouver des difficultés à dialoguer de manière sereine, apaisée et constructive avec les élus, quels qu'ils soient. Il est dommage qu'il ait choisi de repousser le plus possible la date de l'examen du prochain projet de loi de finances rectificative. Il faudra, à cette occasion, que le Sénat fasse clairement entendre sa voix.

M. Philippe Dallier . - Hier soir, aux inquiétudes qui se sont manifestées à propos de l'éventuelle dérive du déficit, le ministre Olivier Dussopt a répondu que les recettes fiscales de l'État seraient meilleures que ce que la loi de finances prévoit. S'il dit vrai, nous ne devrions pas assister à l'acrobatie budgétaire que constitue ce projet de décret d'avance.

M. Claude Raynal , président . - La réponse qui a été faite hier par le ministre Olivier Dussopt était aussi acrobatique que ce que nous constatons aujourd'hui sur la mécanique du décret d'avance. Si le gouvernement considère qu'il peut s'attendre à recevoir des recettes fiscales supplémentaires, il aurait pu les inscrire dans un collectif budgétaire.

La raison pour laquelle un projet de loi de finances rectificative n'a pas été déposé aujourd'hui a été clairement exprimée par le ministre hier : le gouvernement souhaite pouvoir « solder » la pandémie d'ici à l'été et accompagner cette séquence d'un discours positif. Nous verrons apparaître dans le prochain collectif budgétaire ce que nous aurions dû voir apparaître dès aujourd'hui, à savoir de nouvelles recettes budgétaires. Un deuxième plan de relance est par ailleurs évoqué. Cela semble être une volonté du président de la République même si cette perspective n'est peut-être pas entièrement partagée par Bercy à ce stade.

Le rapporteur général nous invite à prendre en compte, dans l'avis de la commission, la réalité très particulière de la période : le cycle économique n'est pas aussi clair qu'espéré, des ressauts de la pandémie viennent l'affecter et des coûts imprévus sont constatés. C'est une année que l'on essaiera d'oublier, à la fois sur le strict plan de la pandémie mais également pour revenir à des règles budgétaires plus orthodoxes. Au sujet du projet de révision de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) proposé par nos collègues députés Éric Woerth et Laurent Saint-Martin, que Vincent Éblé a évoqué, la situation actuelle illustre surtout les limites des règles budgétaires : nous voyons bien que lorsqu'une crise d'ampleur se présente, certains des verrous fixés sont levés par nécessité.

La commission donne acte de sa communication au rapporteur général et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information ; elle adopte l'avis sur le projet de décret d'avance.

L'avis est ainsi rédigé :

La commission des finances,

Vu les articles 13, 14 et 56 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances ;

Vu la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 ;

Vu le projet de décret d'avance notifié le 6 mai 2021, portant ouverture et annulation de 7,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, le rapport de motivation qui l'accompagne et les réponses du ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics au questionnaire du rapporteur général ;

Sur la régularité du projet de décret d'avance :

1. Constate que les ouvertures de crédits ont pour objet de permettre la poursuite du versement d'aides aux entreprises dans le cadre du programme 357 « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire », à hauteur de 6,7 milliards d'euros, et d'aides aux actifs et employeurs dans le cadre du programme 356 « Prise en charge du chômage partiel et financement des aides d'urgence aux employeurs et aux actifs précaires à la suite de la crise sanitaire », pour 500 millions d'euros, deux dispositifs mis en place à partir de mars 2020 en réponse aux conséquences économiques de la crise sanitaire ;

2. Observe que les ouvertures de crédits prévues par le présent projet de décret sont gagées par des annulations de même montant portant sur le programme consacré au renforcement des participations financières de l'État, lui aussi mis en place dans le cadre des mesures d'urgence ;

3. Note que les ouvertures de crédits prévues par le présent projet de décret, ainsi que les annulations de crédit, sont égales à 0,995 % des crédits de paiement ouverts par la loi de finances de l'année ; qu'elles n'excèdent donc pas le plafond de 1 % des crédits ouverts par la loi de finances de l'année et que les annulations n'excèdent pas le plafond de 1,5 % des crédits ouverts par les lois de finances afférentes à l'année en cours ;

4. Estime que l'urgence à ouvrir les crédits est avérée, aussi bien pour le financement de l'activité partielle et des autres dispositifs relevant du programme 356 que pour le fonds de solidarité pour les entreprises, en raison de la prolongation de la crise sanitaire et des conséquences pour l'activité économique des restrictions qui ont été mises en place depuis le mois de janvier ;

5. Constate que les conditions de régularité du recours au décret d'avance prévues par la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 précitée sont donc réunies ;

Sur les ouvertures prévues par le projet de décret d'avance :

6. Relève que l'ampleur exceptionnelle des ouvertures de crédits prévues par le présent projet de décret d'avance est inédite et atteint, à 35 millions d'euros près, la limite du montant autorisé par la loi organique relative aux lois de finances ;

7. Note que le Gouvernement se prive ainsi de toute possibilité, en cas de nouveaux besoins urgents en cours d'année, d'y répondre en prenant un nouveau décret d'avance, sauf cas de nécessité impérieuse d'intérêt national prévue par le dernier alinéa de l'article 13 de la loi organique ;

8. Constate que le faible niveau des crédits actuellement disponibles sur le programme 356, qui rend nécessaire l'ouverture de crédits supplémentaires, ne résulte pas directement des besoins nouveaux liés à la crise sanitaire et à l'application de mesures restrictives de circulation et d'activité, mais de l'annulation de crédits réalisée par le Gouvernement sur le même programme par un arrêté pris le 18 mars dernier ;

9. Estime que l'arrêté précité du 18 mars témoigne d'une surprenante imprévision du Gouvernement en matière budgétaire ;

10. S'interroge aussi sur la conformité de cet arrêté au regard du principe de spécialité budgétaire, en ce qu'il a reporté des crédits non consommés en 2020 depuis les programmes budgétaires relatifs, d'une part, au financement de l'activité partielle et, d'autre part, aux compensations des exonérations de cotisations, vers le programme budgétaire relatif au fonds de solidarité, alors que ces programmes ne poursuivent pas le même objectif, sauf à considérer que tous relèvent de mesures de soutien aux entreprises ;

11. Considère que le recours au décret d'avance pour ouvrir des crédits pour un montant aussi important devrait demeurer, comme le prévoit la loi organique relative aux lois de finances, une exception ;

12. Constate en outre que le présent projet de décret d'avance, bien que ses crédits ouverts atteignent quasiment les plafonds prévus par la loi organique relative aux lois de finances, ne suffira pas à satisfaire les besoins de crédits jusqu'à la fin de l'exercice, s'agissant notamment de la prolongation annoncée de certains dispositifs du plan d'urgence pour le reste de l'année 2021 et du soutien aux agriculteurs et viticulteurs touchés par un épisode de gel tardif ;

13. Regrette en conséquence que le Gouvernement n'ait pas présenté un projet de loi de finances rectificative plutôt qu'un projet de décret d'avance ;

Sur les annulations prévues par le projet de décret d'avance :

14. Constate que les crédits annulés ne portent pas sur des crédits ouverts en loi de finances initiale, mais sur des crédits non consommés de l'année 2020 relatifs au dispositif destiné à financer le renforcement des participations financières de l'État et qui avaient fait l'objet d'un report ;

15. Souligne que ce report de crédits, qui représentait 60 % des crédits initialement ouverts sur le programme budgétaire en 2020, a été réalisé par un arrêté pris avant même la promulgation de la loi de finances initiale pour 2021, qui en constituait pourtant le fondement juridique ;

16. Relève que les crédits concernés n'ont pas vocation à être utilisés prochainement et que les crédits disponibles sur ce dispositif seraient encore de 3,9 milliards d'euros, une fois prise en compte l'annulation prévue par le présent projet de décret ;

17. Déplore que finalement cette annulation, qui aurait dû être réalisée dès la quatrième loi de finances rectificative pour 2020, ne survienne à présent que pour compenser de nouvelles ouvertures de crédits ;

18. Émet, sous les réserves formulées précédemment, un avis favorable au présent projet de décret d'avance.

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