C. DANS CE CONTEXTE, UNE GRANDE VIGILANCE S'IMPOSE CONCERNANT LE RYTHME DE DÉPLOIEMENT DU PLAN DE RELANCE
Face à ce risque, il est impératif que la montée en charge du plan de relance français soit aussi rapide que possible .
En effet, la commission des finances du Sénat avait déploré l'an dernier le caractère tardif du plan de relance , dont près de la moitié des mesures porteront leurs effets après 2021 5 ( * ) .
De ce point de vue, si le ministre de l'économie Bruno Le Maire s'est félicité début mars du fait que 26 milliards d'euros ont déjà été engagés dans le cadre du plan de relance 6 ( * ) , ce chiffre doit être fortement relativisé .
D'une part, cette estimation inclut 10 milliards d'euros au titre de la baisse des impôts de production qui, en raison de son caractère permanent et non ciblé, ne constitue pas à proprement parler une mesure de relance économique - même si elle peut être approuvée pour d'autres raisons. En outre, l'effet retour de la mesure sur le rendement de l'impôt sur les sociétés en limite le coût à 8,6 milliards d'euros.
D'autre part, sur les 26 milliards d'euros, les 11 milliards d'euros annoncés comme déployés dès 2020 sont surévalués . En effet, la Cour des comptes identifie pour sa part seulement 4,8 milliards d'euros de crédits consommés au titre du plan de relance en 2020 7 ( * ) , dont 4,3 milliards d'euros par l'État et 500 millions d'euros par les administrations de sécurité sociale. La principale différence tient aux 4 milliards d'euros versés à la SNCF. La SNCF ayant reversé immédiatement cette somme au budget de l'État par fonds de concours, elle ne sera donc en réalité consommée que très progressivement, entre 2021 et 2023. En comptabilité nationale, l'effet du plan de relance sur le déficit public en 2020 est encore plus limité et s'élève à 1,8 milliard d'euros seulement 8 ( * ) .
S'il est encore trop tôt pour trancher le débat sur l'opportunité de renforcer le plan de relance, alors que l'économie reste bridée par les contraintes sanitaires, la mise en oeuvre rapide des mesures déjà décidées doit donc concentrer toutes les énergies .
À cet égard, le retard pris par certains pays voisins dans la ratification de la décision européenne relative au système des ressources propres de l'Union européenne, qui constitue le support juridique de l'autorisation exceptionnelle d'emprunt liée à l'instrument de relance européen, ne doit en aucun cas servir de prétexte pour retarder la mise en oeuvre du plan national . En effet, l'attente des financements européens ne saurait bloquer la France dans la poursuite du déploiement de ces actions en faveur de la relance à court terme.
Alors que la France emprunte toujours à un taux proche de zéro à 10 ans et que la Banque centrale européenne (BCE) devrait absorber l'ensemble du surcroît d'émissions lié à la crise en 2021, il est tout à fait possible de financer le plan de relance au niveau national sans attendre les financements européens , qui viendront dans un second temps réduire les besoins d'émissions.
Si le projet de programme de stabilité 2021 ne porte pas d'évolution de la stratégie économique du Gouvernement à court terme, il est en revanche l'occasion pour ce dernier de préciser ses intentions en matière de redressement des comptes publics à moyen terme .
* 5 Rapport général n° 138 (2020-2021) de Jean-François Husson relatif au projet de loi de finances pour 2021 (tome 1), fait au nom de la commission des finances et déposé le 19 novembre 2020, p. 32 et suivantes.
* 6 Déclaration du ministre de l'économie, des finances et de la relance, sur la territorialisation de France Relance et l'état des lieux du déploiement du plan de relance dans les territoires, faite à Paris le 1 er mars 2021.
* 7 Cour des comptes, « Le budget de l'État en 2020 », avril 2021, p. 109.
* 8 Projet de programme de stabilité pour 2021, p. 21.