B. ASSURER LE MAINTIEN ET LE DÉVELOPPEMENT DES ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES EN ZONES DE MONTAGNE

Les conséquences de la crise de Covid-19 sur les finances des collectivités territoriales de montagne et les opérateurs économiques demeurent peu connues à ce jour, malgré certains chiffrages partiels. Au-delà, les caractéristiques de l'économie des territoires de montagne appellent à une action résolue de l'État pour préserver la vitalité économique de la montagne. Certaines activités, à l'image du pastoralisme , peuvent apparaître en danger de mort. Le rapporteur formule les propositions suivantes :

Proposition 6 : dresser un bilan économique et social des conséquences de l'épidémie de Covid-19 sur les territoires de montagne (finances des collectivités territoriales et des opérateurs économiques locaux), envisager un soutien spécifique pour la prochaine saison hivernale.

Domaines skiables de France a dressé un premier bilan de l'épidémie sur la fréquentation : « toutes les tailles de station souffrent de cette saison 2019/2020 mais les deux extrémités du spectre des stations sont celles qui souffrent le plus - pour des raisons nettement différentes : les plus grandes stations car ce sont elles qui ont payé le plus lourd tribut à la fin de saison anticipée (1 mois et demi de saison restait normalement à courir après le 15 mars), les plus petites stations car elles sont souvent souffert d'un manque de neige tout au long de la saison ».

Source : Domaines skiables de France.

Proposition 7 : préserver le pastoralisme face à la prédation des loups en favorisant l'installation des éleveurs, en créant des zones de protection renforcée (ZPR) dans lesquelles des loups peuvent être prélevés indépendamment du plafond de prélèvement en cas d'attaques, en reconnaissant voire en présumant l'état de nécessité 42 ( * ) lorsqu'un éleveur ou un berger abat un loup qui s'attaque à son troupeau, sous certaines conditions, en permettant aux maires de requérir la Brigade loups lors d'attaques répétées et en confiant la police des chiens de protection aux préfets.

Malgré certaines avancées, la situation sur le front de la colonisation des loups est loin d'être satisfaisante . Une proposition de résolution européenne (PPRE) visant à modifier le classement dont bénéficie le loup au sein de la Convention de Berne permet de réaffirmer la position du Sénat sur ce sujet 43 ( * ) , dans le prolongement du rapport d'information Politique du loup : défendre un pastoralisme au service de la biodiversité 44 ( * ) fait par le rapporteur en 2018 au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Cette initiative s'inscrit elle-même dans le prolongement de la résolution sur le pastoralisme, adoptée par le Sénat en application de l'article 34-1 de la Constitution le 2 octobre 2018 45 ( * ) .

Le rapporteur ne peut que réitérer le constat bien connu d'une distorsion injustifiée entre la surprotection des loups et l'affaiblissement de la protection du pastoralisme , dont les atouts ont pourtant été consacrés à plusieurs reprises depuis la loi du 3 janvier 1972 relative à la mise en valeur pastorale et sont aujourd'hui rappelés aux articles L. 113-1 et L. 113-2 et suivants du code rural et de la pêche maritime.

Un récent rapport CGEDD/CGAAER 46 ( * ) dresse un bilan contrasté de la politique du loup en France et en Europe . Il relève notamment que « la coexistence entre le loup et l'élevage en Europe apparaît de plus en plus comme un challenge » et que « la France détient de très loin les records du nombre de dommages (en valeur absolue ou rapportées au nombre de loups), du coût public de la protection et du montant des indemnisations de dommages ». Les auteurs du rapport insistent sur la nécessité, pour l'État, d'adopter une « c ommunication équilibrée, basée sur des informations solides et partagées » et de mettre en place une « gestion plus volontariste de la population lupine française ».

Si le plafond de prélèvement des loups a été rehaussé en 2019 et pour l'année 2020 47 ( * ) , afin de prendre en compte la forte augmentation du nombre de loups, tout n'est pas mis en oeuvre pour soutenir le pastoralisme et les éleveurs aux yeux du rapporteur. Une modification de l'article L. 415-3 du code de l'environnement devrait être envisagée , s'agissant du loup, pour réprimer les interdictions de détruire des espèces protégées « sauf en situation de nécessité, alors que les mesures de protection du troupeau ont été régulièrement mises en oeuvre et que l'attaque du ou des espèces concernées est actuelle et imminente ».

Proposition 8 : ne pas reproduire les erreurs commises pour le loup avec l'ours et décider un moratoire sur la réintroduction de nouveaux spécimens , améliorer la transparence de l'information sur la présence de l'ours et la communication, garantir une juste indemnisation des préjudices subis par les éleveurs et bergers.

En juin 2019, le ministère de la transition écologique et solidaire et le ministère de l'agriculture et de l'alimentation ont publié une feuille de route « pastoralisme et ours » qui s'inspire des mesures prévues dans le cadre du plan loup. Pour le rapporteur, un moratoire sur la réintroduction de nouveaux spécimens d'ours doit être décrété.

Proposition 9 : développer largement la « culture de la montagne », améliorer la connaissance de la montagne auprès des jeunes générations et soutenir le tourisme en zones de montagne.

Le rapporteur :

- propose d' instaurer un calendrier scolaire pluriannuel - sur 3 ans par exemple - pour assurer une meilleure prévisibilité aux professionnels et aux élus et développer les « ailes » de saison ( voir encadré ci-dessous ) ;

- appelle à améliorer l'attractivité des classes découvertes en mettant enfin en oeuvre l'article 16 de la Montagne 48 ( * ) et à diversifier les activités proposées aux enfants (montagne « blanche » et montagne « verte ») ;

- demande à l'État de mieux accompagner les enseignants sur les plans opérationnel et financier.

Malgré la volonté du législateur, un calendrier scolaire biannuel depuis 2017

Depuis la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 d'orientation sur l'éducation, l'article L. 521-1 du code de l'éducation dispose que le « calendrier scolaire national est arrêté par le ministre chargé de l'éducation pour une période de trois années ». Conformément aux dispositions de cet article, les calendriers scolaires étaient déterminés selon la règle d'un « triennal glissant ». L'arrêté de 2014 49 ( * ) avait par exemple fixé les calendriers scolaires pour les années 2015, 2016 et 2017, avant que l'arrêté de 2015 ne prévoie le calendrier scolaire pour 2018. C'est depuis 2017 50 ( * ) que la fixation des calendriers est devenue biannuelle, afin notamment de faciliter la mise en oeuvre des réformes du second degré.

Saisi par le Premier ministre sur le fondement de l'article 37 de la Constitution, le Conseil constitutionnel a considéré dans une décision du 11 juillet 2019 51 ( * ) que le caractère triennal des calendriers scolaires inscrit à l'article L. 521-1 du code de l'éducation relevait du domaine réglementaire. Conforté par cette décision, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a pu prendre le 26 juillet 2019 52 ( * ) un arrêté fixant un calendrier scolaire biannuel.

Proposition 10 : proroger jusqu'au 31 décembre 2021 la totalité des mesures en vigueur dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) pour l'ensemble des communes, y compris de montagne, bénéficiant actuellement du dispositif et faire aboutir les réflexions concernant la définition de la « nouvelle géographie prioritaire de la ruralité » annoncée par le précédent Premier ministre, en prévoyant un zonage et un soutien adaptés aux spécificités des territoires de montagne.

Cette proposition rejoint le travail des sénateurs Rémy Pointereau, Frédérique Espagnac et Bernard Delcros de 2020 sur l'avenir des ZRR 53 ( * ) .

Proposition 11 : soutenir la filière laitière en montagne .

Le rapporteur appelle l'État à saisir enfin la Commission européenne au sujet de l'article 61 de la loi de 2016 54 ( * ) et, dans le cas où le dispositif s'avèrerait effectivement incompatible avec le droit de l'Union européenne (aides d'État et fiscalité de l'énergie), à mettre en place rapidement un dispositif alternatif.


* 42 Article 122-7 du code pénal.

* 43 http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppr19-571.html .

* 44 Rapport n° 433 (2017-2018) de Cyril Pellevat, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

* 45 http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppr17-723.html .

* 46 CGEDD / CGAAER, Le loup et les activités d'élevage : comparaison européenne dans le cadre du plan national d'actions 2018-2023.

* 47 Arrêtés de juillet décembre 2019.

* 48 L'article 16 de la loi Montagne II dispose que « le ministre chargé des transports, en collaboration avec le ministre chargé de l'éducation nationale, sollicite la conclusion d'un accord avec les transporteurs nationaux destiné à assurer des conditions tarifaires spécifiques aux établissements scolaires organisant des voyages scolaires ». Ce travail n'a jamais été engagé par les ministères des transports et de l'éducation nationale.

* 49 Arrêté du 21 janvier 2014 fixant le calendrier scolaire des années 2014-2015, 2015-2016 et 2016-2017.

* 50 Arrêté du 17 juillet 2017 fixant le calendrier scolaire de l'année 2018-2019.

* 51 Décision n° 2019-278 du 11 juillet 2019 : « L'article L. 521-1 du code de l'éducation est de nature législative, à l'exception des mots « réparties en cinq périodes de travail, de durée comparable, séparées par quatre périodes de vacance des classes » figurant à sa première phrase, ainsi que des mots « par le ministre chargé de l'éducation pour une période de trois années » figurant à sa deuxième phrase, qui ont le caractère réglementaire ».

* 52 Arrêté du 26 juillet 2019 fixant le calendrier scolaire de l'année 2020-2021.

* 53 Voir le rapport d'information n° 41 (2019-2020) Sauver les zones de revitalisation : un enjeu pour 2020 , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et de la commission des finances.

* 54 Exonération de TICPE pour les véhicules utilisés dans le cadre de la collecte du lait en zones de montagne.

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