E. ÉCHANGES AVEC LA SALLE
Mme Tam TRAN HUY
Je vous propose de passer aux échanges avec la salle.
M. Olivier PEYRAH, directeur général d'Afnor
Nous fabriquons des normes volontaires. Je souhaite souligner le bien-fondé de tout ce que les trois sénateurs ont pu dire. Une spécialité française consiste à ne pas se battre au niveau européen au moment où la bataille se livre et à considérer que des modifications pourront être opérées par la suite, en France. Les autres pays de l'Union disposent ainsi d'un marché européen quand, en France, le marché est hétérogène. C'est un désavantage supplémentaire pour nos entreprises. En ce qui nous concerne, quand une norme est validée au niveau européen, nous la reprenons intégralement. Nous sommes obligés de retirer de la collection nationale toute norme contradictoire. Il est donc important de se battre au niveau européen d'emblée avec des fonctionnaires qui parlent anglais. Il faut ensuite accepter de n'appliquer que la règle commune.
M. Philippe FOURRIER, cofondateur de l'agence Ilago
Je dirige une agence de communication dans les Côtes-d'Armor. Nous vivons dans un pays formidable pour entreprendre mais certains changements devraient être opérés. Je vous donnerai deux exemples.
La médecine de travail coûte très cher pour une entreprise de service telle que la nôtre, pour un service très faible en retour. Je suis prêt à payer pour tous les salariés une visite annuelle chez un médecin généraliste. Je suis sûr que le service sera de même niveau, voire meilleur, et vraiment moins coûteux pour l'entreprise.
Par ailleurs, nous subissons une véritable concurrence de la part des autoentrepreneurs alors que nous payons des salariés ainsi que des charges sociales. Je serais ravi de pouvoir travailler avec vous sur le sujet.
M. Olivier CADIC
La médecine du travail n'existe pas au Royaume-Uni. Celle-ci relève de la responsabilité individuelle des entrepreneurs et des salariés. Il revient à l'entrepreneur d'organiser les conditions de travail et d'évaluer la santé de ses employés.
La concurrence des autoentrepreneurs met en lumière toute la difficulté du système français. J'ai présenté l'année dernière un rapport pour la Délégation aux entreprises qui s'intitulait « Pour une France libre d'entreprendre ». Le rapport proposait une simplification du statut des entreprises. La société d'autoentrepreneur est inspirée du sole trader , l'entreprise individuelle anglaise. Des dérives se produisent. Il serait judicieux d'envisager un jour de créer un statut d'entreprise très simple que tout le monde puisse comprendre.
Mme Élisabeth LAMURE
Vous avez compris qu'Olivier Cadic est un grand libéral. Nous aborderons peut-être le sujet de la médecine du travail cette après-midi dans le cadre du bien être en entreprise. Je voulais demander à Olivier Cadic si les Anglais étaient plus souvent malades que les Français.
M. Olivier CADIC
Je ne dispose pas des statistiques mais il serait intéressant de les regarder.
Michel VASPART, sénateur des Côtes-d'Armor
La surtransposition est un véritable sujet. Nous nous heurtons parfois aux ministères qui nous indiquent que l'Europe ne peut accepter une mesure proposée. Je me suis rendu lundi à Strasbourg, au Parlement, afin de rencontrer un commissaire européen. Non seulement il n'existe pas de blocage mais j'ai en outre découvert l'enthousiasme du commissaire sur ma proposition relative au sujet de la gestion des sédiments de la Rance. Il s'agit quelque part d'une forme de surtransposition. En définitive, le problème ne se pose pas au niveau européen mais au niveau des ministères français. Quand ce type de problème se présente, je vous invite à vous rendre aux bureaux de l'Union européenne, ce sont souvent davantage nos hauts fonctionnaires des ministères français qui posent problème.
Didier SALWA, directeur général de CIIB
Je voudrais revenir sur le rapport d'Olivier Cadic, « Pour une France libre d'entreprendre ». La lutte contre les surtranspositions semble évidente pour que les entreprises françaises se trouvent à égalité avec celles des autres pays.
Vous avez évoqué dans votre rapport une initiative que le CIIB porte depuis une trentaine d'années, visant à orienter l'épargne de proximité vers le capital des PME. Nous sommes en train de développer une démarche de ce type pour une fonderie aluminium en difficulté du Tréport. Nous procédons à une opération d'appel public à l'épargne en bonne et due forme, étant agréés par Euronext depuis trente ans pour réaliser ce type d'opérations. Nous nous intéressons aux petites et moyennes entreprises. Ces initiatives vont dans le sens de l'emploi. Chaque sénateur connaît des PME qui pourraient être plus performantes, davantage créatrices d'emplois. Or, les chefs d'entreprise ignorent le mécanisme de l'appel public à l'épargne alors que cet outil pourrait opérer une réelle différence pour de nombreuses PME françaises avec leurs concurrents étrangers. Il serait judicieux de diriger l'épargne vers les PME plutôt que vers les entreprises du CAC 40.
M. Olivier CADIC
Le rapport mentionne plusieurs initiatives de ce type. Il existe aussi des outils permettant d'aider les entreprises en difficulté à se relancer. Le financement des entreprises est un point clé. Quand j'ai créé ma société, à 20 ans, j'ai déposé mon capital social, 20 000 francs, en numéraire. Je me souviens que le banquier m'a dit alors : « J'espère que vous n'êtes pas là pour me demander de l'argent ». Cet appel aux capitaux constitue un véritable enjeu. Je salue les initiatives telles que la vôtre.
Mme Tam TRAN HUY
Je vous remercie d'avoir assisté à cette matinée consacrée aux immersions et aux fruits des échanges de terrain entre les sénateurs et les entreprises.