B. COMPTE RENDU DE LA RÉUNION DU 5 DÉCEMBRE 2018, SUITE AU DÉPLACEMENT À CAEN LE 29 NOVEMBRE 2018
Mme Élisabeth Lamure , Présidente de la délégation sénatoriale aux entreprises . - Chers collègues, je me suis rendue à Caen jeudi 29 novembre, accompagnée de Mmes Patricia Morhet-Richaud et Agnès Canayer, venue en voisine, aux finales nationales des « Olympiades des métiers » désormais mondialement connus comme « WorldSkills » mais dont le grand public ignore souvent l'existence. Notre collègue Olivier Cadic, également présent, était à l'initiative de ce déplacement : il avait assisté, un peu par hasard, à la finale de l'édition précédente à Abu Dhabi, en octobre 2017. Notre collègue nous ayant témoigné son enthousiasme à son retour, nous avions reçu au Sénat les médaillés à l'occasion de la journée des entreprises en mars 2018, rendant ainsi hommage à leur performance. La France avait alors remporté 27 médailles dont d'or. Les médaillés et le président de WorldSkills France ont pu témoigner de ce succès, ce qui n'a pas manqué de ravir les chefs d'entreprises présents, agréablement étonnés face à l'engagement de ces jeunes dans leur métier.
Durant trois jours, 657 candidats représentant les 15 régions de France et d'outre-mer ont tenté, lors de ces finales nationales, d'intégrer l'équipe de France des Métiers qui participera à la compétition internationale WorldSkills à Kazan, en Russie, fin août 2019.
Cette compétition, soutenue par la région Normandie, dont le président, M. Hervé Morin, a salué la délégation, s'est déroulée sur 40 000 m², aménagés en salons de coiffure, en laboratoires de pâtisserie, en ateliers automobile ou mécanique. Elle a rassemblé un public de 70 000 visiteurs, principalement des classes de lycéens et de collégiens. Étaient en compétition 57 métiers différents de sept filières : industrie, BTP, automobile, alimentation, végétal, service, communication et numérique.
Cette compétition existe depuis 1950 et la France y participe depuis 1953. Plus grand concours des métiers au monde, les Olympiades des métiers sont organisées tous les deux ans sous l'égide de l'association WorldSkills International. Elles permettent à de jeunes professionnels de moins de 23 ans venus du monde entier, champions nationaux dans leur métier, de se mesurer lors d'une compétition internationale organisée sur un même site.
Les compétiteurs, que nous avons pu voir à l'oeuvre, doivent réaliser des ouvrages qui concentrent les difficultés techniques de chaque métier, dans des conditions très proches de la vie réelle des entreprises. Le respect des délais et des coûts, l'utilisation optimale du matériel et des matériaux, la sécurité... sont autant de contraintes à respecter, conformément aux exigences du monde économique actuel. Ainsi, les paramètres sont modifiés au dernier moment afin de juger des capacités d'adaptation des candidats, comme dans la vie réelle lorsque les demandes des clients changent au dernier moment.
Jeunesse, partage, efforts, engagement, fair-play, excellence, ouverture d'esprit et respect des diversités culturelles, sont les valeurs affichées, pour cette compétition, par son président français, M. Michel Guisembert.
Pour les jeunes que nous avons croisés, c'est un challenge professionnel comparable à un entraînement sportif pour les jeux olympiques. Le médaillé d'or 2017 en coiffure nous expliquait qu'en plus des 35 heures hebdomadaires qu'il effectuait dans son salon, il avait consacré 30 heures par semaine de préparation, pendant 18 mois, avec un entraînement physique et mental comparable à celui d'un sportif de haut niveau. « On ne vit que pour la compétition pendant cette période », nous a-t-il confié. Nous ne pouvons qu'être élogieux face à la détermination et l'investissement de ce jeune homme d'une vingtaine d'années.
Mais au-delà de la compétition, WorldSkills France poursuit surtout un objectif qui trouve une résonance singulière dans le contexte économique actuel : promouvoir les filières professionnelles auprès des jeunes et défendre les compétences professionnelles françaises à l'étranger.
La finale mondiale est aussi une occasion unique pour comparer les compétences et les savoir-faire internationaux. Pendant quatre jours, près de 1 300 candidats issus de 77 pays mesurent leur savoir-faire et donnent le meilleur d'eux-mêmes pour tenter de monter sur la plus haute marche du podium.
La finale nationale donne au grand public une vision vivante et dynamique des métiers d'aujourd'hui et de demain, comme « intégrateur robotique », « mécatronique » ou encore « câblage des réseaux très haut débit ». Elle permet également de présenter les innovations technologiques des filières industrielles, dépoussiérant ainsi l'image traditionnelle du secteur secondaire.
Pour les entreprises qui apportent leur soutien logistique, car il faut dans certains métiers énormément d'outillage pour la compétition, cela constitue une vitrine très valorisante. Nous avons ainsi rencontré les dirigeants du groupe Legrand, établi à Limoges, leader mondial des infrastructures électriques et numériques, pour les bâtiments tertiaires, résidentiels et industriels. La filière électrique a besoin de tisser des liens étroits avec le monde de l'enseignement pour promouvoir le génie électrique et numérique, notamment pour favoriser la montée en compétence des acteurs de la filière. Ces olympiades participent d'une manière attractive et stimulante à une meilleure information des jeunes en orientation et de leurs familles sur la diversité des chemins menant à la réussite.
Une implication accrue des grandes entreprises française sera d'autant plus nécessaire que le Président de la République a annoncé, le 14 mars dernier, la candidature de la France pour organiser la 47 ème édition de la finale mondiale des Olympiades des métiers en 2023 à Lyon. Notre challenger le plus sérieux est le Japon, mais Osaka organise déjà une exposition universelle en 2025.
Pour cette édition, le début officiel du processus de sélection se fera fin 2018, la constitution du dossier de candidature et la visite de validation se feront courant juillet 2019 et le vote des 79 pays membres se fera en août 2019 à Kazan (Russie). Notre réseau diplomatique est entièrement mobilisé sur cet objectif.
Pour soutenir la candidature française, notre délégation a offert un dîner, mardi soir, à la délégation européenne de cette organisation, en présence de plusieurs de nos collègues mais également du conseiller social du président de la République, M. Pierre-André Imbert, ce qui montre l'intérêt porté au plus niveau de l'État pour cet évènement. Nous en reparlons également lors de la prochaine journée des entreprises du Sénat, le 28 mars 2019. Nous essayerons d'y accueillir les compétiteurs une nouvelle fois pour promouvoir au mieux la compétition, qui, si tout se passe pour le mieux, se déroulera à Lyon en 2023. Notre déplacement nous a permis de dresser des perspectives quant à l'apprentissage, aux formations et aux métiers : je ne peux donc que vous encourager à parler de ces Olympiades des métiers, ce qui serait bénéfique pour les entreprises et pour les jeunes.
Mme Agnès Canayer . - Cette visite à Caen a été un très beau moment de découverte que nous avons partagé. En tant que membre de la Délégation aux entreprises et investie auprès des missions locales, j'ai trouvé réjouissant d'apprécier l'excellence des participants, encadrés par un staff bienveillant ayant la volonté de transmettre son savoir-faire.
Par ailleurs, cet évènement représente une aubaine pour les jeunes de nos territoires, qui peuvent découvrir des métiers et mieux s'orienter. Pour les jeunes que nous accueillons dans les missions locales, souvent en difficulté, cela représente une formidable opportunité.
J'encourage la poursuite de cette réflexion sur l'apprentissage à la formation en vous proposant de nous déplacer à Rotterdam pour découvrir le « Leerpark », un campus dédié à l'apprentissage investi par les entreprises qui mettent en place les conditions de réussite pour que les jeunes y étudient.
Mme Élisabeth Lamure . - Je remercie Mme Canayer pour ses propos. Il serait, en effet, envisageable que nous nous y rendions étant donné la proximité du lieu.
Mme Patricia Morhet-Richaud . - Je remercie à mon tour Mme Lamure pour le compte-rendu de cette belle journée qui a su mettre en valeur l'apprentissage en France et même au-delà, la suite de cette compétition étant les finales européenne et mondiale. L'opportunité d'organiser les finales mondiales en France est considérable car cela permettra à notre pays, nos régions et nos territoires de promouvoir l'apprentissage.
Mme Élisabeth Lamure . - J'ajouterai qu'au-delà de l'apprentissage, il s'agit de valoriser les savoirs et les métiers liés à la compétition. De plus, on peut souligner que Worldskills France, composé de 10 permanents, rassemble également 6 000 bénévoles, ce qui est encourageant à une époque où l'on pourrait penser que le bénévolat disparaît.
Mme Annick Billon . - Permettez-moi de faire un parallèle avec « l'Outil en main », une association bénévole présente dans nos territoires et qui aurait besoin d'un accompagnement. Des professionnels passionnés y font découvrir leur métier à travers des ateliers. L'antenne de mon département était en difficulté à ses débuts mais elle a pu bénéficier d'un local, ce qui a eu pour effet d'y amener de nombreux jeunes qui ont découvert des métiers dont ils n'avaient même pas connaissance. Soutenue uniquement par les collectivités locales, cette initiative encore peu connue mérite que nous communiquions davantage à son sujet au plan national.
Mme Élisabeth Lamure . - Je vous remercie pour votre attention.