TABLE RONDE DES ENSEIGNES
DE CENTRE-VILLE ET DE PROXIMITÉ (6 DÉCEMBRE 2017)

Le mercredi 6 décembre 2017, le groupe de travail, lors de la table ronde « des grandes enseignes de centre-ville et de proximité », a entendu : Régis Schultz, Président de Monoprix et représentant de l'Union du grand commerce de Centre-Ville ; Pierre Pelarrey, Directeur général du Printemps Haussmann ; Mélanie Pauli-Geysse, Responsable des affaires publiques du Groupe Printemps ; Virginie Grimault, Secrétaire général de la fédération de l'Épicerie et du Commerce de Proximité ; Gérard Dorey, Président de la Fédération de l'Épicerie et du Commerce de Proximité ; Claude Boulle, Président exécutif de l'Alliance du commerce ; Yohann Petiot, Directeur général de l'Alliance du commerce ; Guillaume Simonin, Responsable des affaires économiques de l'Alliance du commerce ; Olivier Bron, Directeur du réseau des Galeries Lafayette ; Florien Ingen-Housz, Directeur de la stratégie du groupe Fnac-Darty ; Claire Ponty, Responsable des affaires publiques du groupe Fnac-Darty.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Nous sommes heureux de vous accueillir pour cette table ronde consacrée aux enseignes de centre-ville et proximité, dans le cadre d'une réflexion sur la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs.

Cette table ronde est retransmise en direct sur le site Internet du Sénat. Je remercie les intervenants d'être présents parmi nous.

Je rappelle les contours et l'objectif de notre groupe de travail. Le groupe sénatorial pour la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs est composé de 18 sénateurs représentatifs de tous les groupes politiques, des six commissions permanentes concernées, et des délégations aux collectivités territoriales et aux entreprises.

Le constat est désormais clair et partagé par tous : trop de centres-villes et de centres-bourgs souffrent et se fragilisent. La fermeture des commerces est la partie visible de l'iceberg. Elle a permis de prendre conscience d'un problème qui dépasse le commerce, puisqu'il touche à l'habitat, aux équipements, aux infrastructures ou encore aux normes d'urbanisme.

L'enjeu pour l'avenir, à notre avis, n'est rien moins que la conception que nous avons de la ville et du lien social. Veut-on la pérennité de la ville à l'Européenne, avec un centre - lieu de vie sociale, citoyenne, culturelle, religieuse - en un mot, un lieu de vie collective et d'identité ?

C'est la question que nous devons nous poser.

La dévitalisation des centres-villes et centres-bourgs est en effet une problématique qui rencontre un écho grandissant dans les territoires. C'est pourquoi le Sénat, qui représente les territoires, s'est saisi du dossier. Cette institution a un rôle à jouer dans l'aménagement du territoire.

Je rappelle que nous avons publié un rapport d'étape sur la dévitalisation des centres-villes en juillet 2017.

Puisque le constat est établi, notre objectif est désormais de dégager des solutions, ce qui conduira à une proposition de loi, d'ici la troisième conférence des territoires je l'espère.

Les questions que nous allons vous poser aujourd'hui se ramènent au fond à une interrogation : que peuvent faire concrètement les pouvoirs publics et, en particulier, le législateur, pour aider le commerce de centre-ville à survivre et à retrouver le chemin du développement ?

Quelles solutions législatives vous semblent les meilleures ? Au contraire, faut-il moins légiférer et s'attacher à déterminer des solutions pragmatiques ?

Nous vous poserons un certain nombre de questions, parfois individuellement, parfois collectivement. Nos collègues, ici présents, s'exprimeront également sur ce sujet de la dévitalisation des centres-villes et centres-bourgs. Ils ont à coeur de partager leur expérience au sein de villes moyennes et de milieux ruraux et de recueillir vos points de vue respectifs.

Martial Bourquin débutera cette série de questions.

Martial Bourquin, rapporteur. - Entamons ce débat avec des questions franches. Je m'adresserai à M. Schultz. Vous avez tenu des propos très fermes dans la presse. Je vous cite : « La multiplication des ouvertures de centres commerciaux de périphérie est déconnectée de l'évolution de la consommation. (...) ils offrent aux enseignes un taux d'effort (...) divisé par deux par rapport au centre-ville. Ils contribuent au dépérissement des coeurs de ville, surtout dans les petites et moyennes communes, et donc à la destruction du lien social. »

Vous évoquiez dans la foulée l'idée de mettre en oeuvre un moratoire sur les implantations commerciales. Comment concevez-vous un tel dispositif ? Comment serait-il déclenché ? En tout état de cause, ce moratoire devrait respecter le droit constitutionnel et le droit européen.

Comme alternative, que penseriez-vous de la mise en place de seuils d'alerte, rapportant par exemple les surfaces commerciales au nombre d'habitants d'une aire donnée, puis de blocage en cas d'implantations trop nombreuses ? Il pourrait également s'agir d'autoriser les collectivités territoriales à mettre en place des moratoires locaux, en fonction de leur situation.

Ces propositions vous semblent-elles pertinentes ?

Monsieur Schultz, mes questions étaient directes, j'attends de votre part des réponses qui le seront tout autant.

Régis Schultz, Président de Monoprix et représentant de l'Union du grand commerce de Centre-Ville. - Mes propos ne m'ont pas valu que des amitiés. Je rappelle que Monoprix est présent uniquement dans les centres-villes. Très peu de nos enseignes sont situées en centre commercial et aucune ne l'est en périphérie. Ma réflexion provient de l'effritement de notre chiffre d'affaires dans certaines villes. À titre d'illustration, nous générons un chiffre d'affaires de 10 000 euros au mètre carré à Paris, 7 000 euros dans une grande ville de province et 3 000 - 4 000 euros dans une ville plus petite. Ces performances d'activité se retrouvent dans les résultats de profitabilité.

Monoprix est présent dans un grand nombre de petites villes, car l'enseigne y est historiquement propriétaire. Néanmoins, nous fermons ces magasins le jour où des travaux trop importants s'avèrent nécessaires, à l'image de mise aux normes des équipements de réfrigération ou d'incendies.

S'agissant du moratoire évoqué, il ne doit pas être généralisé, mais adapté aux situations locales, au regard de l'évolution de la population et du dynamisme commercial. Dans certaines zones, nous constatons une dévitalisation commerciale, qui doit être contenue afin de protéger le centre-ville. Dans d'autres zones, il est nécessaire de continuer à créer des surfaces pour suivre l'évolution de la population ou du territoire.

Aujourd'hui, un dispositif existe en France, mais il s'est vu dévoyé par une surtransposition de la directive européenne sur les services. Les critères économiques et la pression commerciale n'y sont plus pris en compte. De ce fait, l'autorisation d'exploitation commerciale se révèle quasi automatique. Pourtant, le dispositif précédent fonctionnait globalement de manière satisfaisante.

Comme à son habitude, le gouvernement français blâme l'Union européenne, alors que le critère économique figurait dans la directive européenne.

S'agissant des CDAC, il est nécessaire aujourd'hui de mieux intégrer l'échelon intercommunal, afin d'éviter une concurrence territoriale, mais également de remettre le critère économique au centre de la loi. En cas de surtension commerciale, les ouvertures de magasins doivent être interdites. Les moratoires doivent donc être locaux.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Je poserai une question qui s'adresse à chacun d'entre vous. Vos enseignes sont considérées comme des locomotives dans leurs secteurs respectifs. Quels éléments vous encouragent-ils, ou à l'inverse vous découragent, à vous installer en centre-ville ou en périphérie, ou encore à privilégier un centre-ville plutôt qu'un autre ?

Ma question suivante s'adresse plus particulièrement à la Fnac. Vous disposez d'implantations en centre-ville, comme à Bourges, mais également en périphérie proche, à l'image de Vannes. Quelles évolutions du cadre législatif et réglementaire seraient-elles susceptibles d'infléchir vos choix en faveur d'un centre-ville ? Je pense à la fiscalité, avec l'élargissement des ZFU, aux normes d'urbanisme ou encore aux parkings.

Florien Ingen-Housz, Directeur de la stratégie du groupe Fnac-Darty. - La Fnac est historiquement une enseigne de centre-ville, disposant de points de vente à taille élevée, de l'ordre de 2 000 à 2 500 m².

Stratégiquement, nous souhaitons maintenir ce modèle de développement en centre-ville. C'est pourquoi nous avons étendu notre présence à des centres de petites villes, en implantant des magasins de surfaces plus restreintes afin d'étendre ce modèle de centre-ville dans des villes plus petites.

L'accessibilité, liée à l'existence de parkings, constitue un point important pour la Fnac. C'est moins le cas pour nos enseignes Darty en raison de la typologie de produits, plus volumineux, qui sont souvent livrés à domicile.

Concernant les mécanismes de type ZFU, nous sommes ouverts au dialogue afin de pérenniser notre présence en centre-ville. Nous y tenons un rôle sociétal d'animation. Nous sommes confrontés à des réalités économiques telles que la pression sur le foncier et les difficultés d'accès.

Les incitations économiques à se rendre dans des centres commerciaux en périphérie sont aujourd'hui fortes. C'est pourquoi la Fnac a installé des enseignes en périphérie ces dernières années. Il s'agit d'une réponse stratégique à des contraintes, plus que d'un choix délibéré.

Globalement, nous croyons aux vertus des incitations plus que des mesures coercitives sur ce débat de l'animation des centres-villes. Nous venons d'annoncer l'ouverture de 200 nouvelles franchises Fnac et Darty, dont certaines d'entre elles seront en périphérie. Notre ambition est toutefois de poursuivre notre rôle d'animation des centres-villes, en prenant en compte les contraintes économiques existantes. Nos magasins présents en périphérie ne doivent donc pas être pénalisés fiscalement.

Martial Bourquin, rapporteur. - Mis à part la rentabilité, quels sont vos critères essentiels dans le choix de vous installer ou non en centre-ville ?

Florien Ingen-Housz, Directeur de la stratégie du groupe Fnac-Darty. - Notre stratégie historique établissait une limite naturelle à notre présence, sur une surface de 2 500 mètres carrés, dans des villes comptant au moins 50 000 ou 60 000 habitants. Cette politique représente l'ADN de la FNAC. Néanmoins, ces dernières années, nous avons eu tendance à nous implanter dans des villes plus petites, avec des surfaces parfois de 400 mètres carrés, mais également en périphérie. Les prix au mètre carré et l'implantation des enseignes environnantes ont guidé nos choix d'implantation. Il est important de se situer dans une zone de trafic.

Nous souhaiterions aujourd'hui renouer avec notre tropisme historique et jouer pleinement notre rôle d'animation sociétale en centre-ville.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Monsieur Bron, les Galeries Lafayette sont présentes dans des villes de taille plus importantes. Avez-vous un seuil démographique prédéfini ?

Olivier Bron, Directeur du réseau des Galeries Lafayette. - Le seuil des 50 000 habitants, évoqué précédemment, s'avère conforme à nos pratiques. Toutefois, nous sommes également présents dans des villes de taille plus restreinte, telle que Saintes, Libourne etc. Nos magasins réalisent ainsi de 3 à 100 millions d'euros de chiffre d'affaires. Par ailleurs, 90 % de nos magasins se trouvent en centre-ville.

J'attire votre attention sur le fait qu'un magasin est un animal très sensible. Les structures de coûts fixes représentent un enjeu majeur. Une différence de 5 % de chiffre d'affaires fait la différence entre un magasin rentable ou non. La notion de mètre carré est donc essentielle dans notre métier, car elle conditionne la rentabilité d'une enseigne.

Notre modèle de distribution s'est révélé prolifique par le passé, mais nous traversons actuellement une période compliquée. Ainsi, nous connaissons une baisse de nos marchés sur l'habillement au cours des dix dernières années. La multiplication des mètres carrés et le fort développement du e-commerce en sont à l'origine. Globalement, la productivité du mètre carré dans notre secteur a chuté de 25 à 30 %.

En centre-ville ou en périphérie, la multiplication des mètres carrés est une problématique majeure.

S'agissant de la fiscalité, les magasins situés en périphérie sont favorisés. Les Galeries Lafayette exploitent 33 magasins en centre-ville qui datent d'avant 1930. L'entretien de ces sites s'avère bien plus coûteux que des enseignes neuves en périphérie, notamment au regard de leur remise aux normes. À ce titre, les immeubles historiques du Groupe, qui font partie de l'architecture d'une ville, requièrent des investissements considérables.

L'activité de commerce nécessite de la sécurité, de l'accessibilité et de l'animation. L'implantation d'un magasin Galerie Lafayette, accompagnée de plusieurs millions d'euros d'investissements en marketing, ne suffit pas à la réussite du projet, même en tant que « locomotive ». L'existence d'un tissu commerçant environnant (restaurants etc.), d'un écosystème dynamique est nécessaire.

Une problématique de compétences se pose également. En périphérie, les centres commerciaux sont gérés par des professionnels, qui proposent des services spécifiques et des loyers bas. Qui s'occupe de la commercialisation des centres-villes aujourd'hui ? Elle est prise en charge par une multiplicité d'acteurs (propriétaires, élus) qui ne sont pas toujours compétents.

Au final, les différences avec la périphérie sont notables et il s'avère difficile d'implanter et de maintenir un magasin en centre-ville. Des changements fiscaux permettraient de réajuster les situations localement entre centre-ville et périphérie.

Régis Schultz, Président de Monoprix et représentant de l'Union du grand commerce de Centre-Ville. - J'approuve cette analyse. J'ajoute que l'ensemble des normes à respecter (circulation, incendie...) devient considérable dans le cas d'un bâtiment historique. Il s'avère alors difficile de réaliser de nouveaux aménagements.

Par exemple, nous fermerons un magasin, car il nous est demandé de refaire l'installation complète du froid, à hauteur de 1,5 million d'euros. Au regard de ses performances économiques, ces investissements n'auraient aucun sens.

Par ailleurs, nous devons installer des ascenseurs dans l'ensemble de nos magasins, ce qui coûte 150 000 euros pièce. Les normes nous contraignent également à élargir les allées, ce qui réduit la surface linéaire et le chiffre d'affaires. Tandis que les bâtiments de périphéries sont neufs et ainsi beaucoup plus flexibles pour s'adapter à ces normes.

In fine , la logique économique et la multiplication des normes incitent fortement à s'installer en périphérie. Il est intenable de rester en centre-ville actuellement.

S'agissant de la fiscalité, il faut également prendre en compte le déséquilibre entre ventes sur internet et en magasins. La fiscalité est basée sur des actifs et donc une taxe foncière. S'y ajoute la taxe sur la collecte des ordures, alors même que nous prenons en charge ces dernières dans nos magasins. Lorsque j'étais à la tête de Darty, j'avais calculé que nos ventes physiques étaient trois fois plus taxées que nos ventes dématérialisées.

Ce niveau de taxation augmente considérablement les coûts fixes et décourage les implantations en centre-ville. Une taxation variable, basée sur le chiffre d'affaires ou les bénéfices réalisés, aurait plus de sens. Les taxes foncières tuent le commerce et par extension le lien social des centres-villes, d'autant plus que les collectivités ont tendance à augmenter ces taxes. Il s'agit en effet de la seule variable sur laquelle elles peuvent s'appuyer pour augmenter leurs recettes.

Martial Bourquin, rapporteur. - L'établissement de zones franches au sein des centres-villes en difficulté vous paraît-il une piste pertinente ?

Olivier Bron, Directeur du réseau des Galeries Lafayette. - La moitié de notre parc de magasins se trouve dans des petites villes, dont certaines présentent des indicateurs économiques alarmants (taux de vacances, chômage, richesse produite...). Il est nécessaire de les redynamiser via une mobilisation de l'ensemble des acteurs. La réussite de chacun est conditionnée à la réussite de l'écosystème. À ce titre, cette piste de ZFU, prévue pour une durée déterminée me semble intéressante. J'insiste sur le fait que l'ensemble de l'écosystème du centre-ville doit bénéficier de ces aides.

Pierre Pelarrey, Directeur général du Printemps Haussmann. - J'approuve cette idée de zones franches. Je souligne que les premières années suivant l'implantation d'un magasin sont cruciales. Le temps que la profitabilité s'étoffe (dans les deux à trois premières années), les coûts fixes ne doivent pas peser trop lourdement dans l'exploitation. Ce sujet, qui détermine la survie du projet, est d'autant plus critique pour les petits commerces.

La qualité et la variété de l'écosystème sont également des données importantes. Les centres commerciaux disposent actuellement d'un avantage fonctionnel. L'avantage des centres-villes doit être « expérientiel », c'est-à-dire qu'il doit représenter un parcours pour les habitants et les clients. Dans ce cadre, l'activité touristique peut stimuler l'attractivité d'un coeur de ville, si l'activité culturelle est ouverte sur le centre-ville. Des ressources sont à exploiter sur cette thématique.

Dans un certain nombre de villes moyennes, il existe peu d'activité le week-end, même si ces communes disposent de ressources patrimoniales et culturelles. Pour les exploiter au mieux, il faut élargir leurs horaires d'ouverture et rendre possible l'ouverture dominicale. Les commerces doivent également bénéficier de l'ouverture le dimanche.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Monsieur Dorey, souhaitez-vous intervenir sur les thématiques qui viennent d'être évoquées ?

Gérard Dorey, Président de la fédération de l'Épicerie et du Commerce de Proximité. J'approuve bien entendu les actions qui visent à alléger les charges des commerces et à faciliter leurs installations. Le commerce proximité a vocation à se trouver dans les centres-villes. Un certain nombre de facteurs contribuent à sa réussite.

Le premier élément a trait à l'accessibilité. Les gens qui se rendent en centre-ville doivent pouvoir circuler et se garer. Les villes qui réussissent, à l'image de Rueil, mettent à disposition des parkings et les commerces vivent. Au sein de ces parkings figurent également des zones bleues, afin de faciliter le turnover . Les arrêts minute se révèlent également salutaires pour un certain nombre de commerçants, puisqu'ils contribuent à générer du flux.

Le deuxième élément tient au fait que le commerce de proximité est composé d'indépendants. Il est nécessaire de leur accorder la liberté d'ouvrir leur commerce selon l'amplitude horaire qui leur convient, sans légiférer sur ce sujet. Un commerce de proximité doit être ouvert quand il existe des clients. Par conséquent, l'ouverture dominicale doit être permise.

Un certain nombre de commerces parisiens, dont l'ouverture était tolérée le dimanche, ont vu se succéder récemment les contrôles de l'inspection du travail. Pour certains, il résulte de cette fermeture dominicale une perte de 10 % du chiffre d'affaires hebdomadaire. En outre, cette ouverture dominicale s'avérera positive pour l'emploi des étudiants.

En résumé, l'accessibilité et la liberté d'ouvrir son commerce constituent les éléments clefs pour pérenniser l'activité en centres-villes.

Les hyper et les supermarchés qui ouvrent le dimanche matin ont un impact considérable sur les petits commerces. Je connais un commerçant dans la zone de Vélizy, dont le chiffre d'affaires a baissé de 10 à 15 % le dimanche, suite à ce type d'ouverture. Il faut donner un espace de vie au commerce de proximité.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Merci pour votre intervention.

Régis Schultz, Président de Monoprix et représentant de l'Union du grand commerce de Centre-Ville. - J'ajoute que l'évolution de la fiscalité doit être identique pour tous les commerçants. Les aides ne doivent pas s'adresser uniquement aux nouvelles installations de commerce, au risque de créer des effets d'aubaine. La taxe foncière doit être abaissée ou indexée sur la performance économique. Dans le cas contraire, le commerce physique se meurt.

Martial Bourquin, rapporteur. - Notre rapport doit conduire à l'identification de leviers efficaces et à la mise en place d'un plan d'action. Si vous deviez retenir quatre ou cinq points fondamentaux, relevant du législateur ou du gouvernement, pour faciliter la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, quels seraient-ils ?

Le commerce est fondamental dans l'existence d'un centre-ville dynamique. Cependant, il faut également prendre en compte le départ des professions libérales, telles que les médecins, pour appréhender la profondeur de cette dévitalisation. Le centre-ville a un rôle sociétal, que n'a pas le centre commercial.

Vous avez déjà avancé quelques idées cohérentes. Ainsi, ne pas augmenter le nombre de mètres carrés commerçants dans des zones où la consommation stagne est une piste intéressante. Nos actions ne doivent pas être générales, mais s'inscrire dans des contextes locaux. Les CDAC devraient signaler les zones en difficulté aux services de l'État.

Pouvez-vous suggérer d'autres éléments de réflexion ?

Rémy Pointereau, rapporteur. - Monsieur Boulle, vous avez réalisé des propositions en termes de simplification, il me semble.

Claude Boulle, Président exécutif de l'Alliance du commerce. - Il ne peut exister de commerce sans commerçants. C'est pourquoi une ambitieuse politique d'aide doit être menée pour soutenir la création et le maintien de leur activité, quel que soit leur statut. Nous représentons traditionnellement les succursalistes du centre-ville plus que les indépendants, mais il ne peut exister une locomotive sans wagon.

Cette politique de soutien aux commerçants prendrait la forme de mesures fiscales ou d'aides à la formation, notamment sur la vente omnicanal.

Par ailleurs, pourquoi ne pas proposer des formations aux salariés dans le cadre d'un PSE afin de les sensibiliser aux métiers du commerce ? Nous devons mieux valoriser ce potentiel existant et l'orienter vers le centre-ville. En outre, la mise en place de ZFU doit s'inscrire dans une temporalité longue, pour donner une visibilité suffisamment importante aux investisseurs. En parallèle, des mesures d'exonérations fiscales temporaires ou définitives seraient bénéfiques.

La Tascom a explosé au cours des dix dernières années. En 2008, cette taxe atteignait 300 à 400 millions d'euros, contre 1,2 milliard d'euros cette année. Cette situation est paradoxale, puisque l'on taxe fortement l'outil de travail du commerçant sans améliorer les conditions de travail en centre-ville.

En face se tiennent des acteurs, à l'image d'Amazon, pouvant livrer 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Le jour où ces acteurs s'attaqueront à l'alimentaire, ce sera la mort des petits commerçants de centre-ville.

Nous souhaitons une régulation forte de la création de nouveaux mètres carrés commerciaux, au travers de l'établissement de seuils d'alerte ou d'un avis conforme du président d'agglomération ou de l'intercommunalité. Depuis 2008, la création de mètres carrés a été bien trop importante, il est nécessaire de réguler ce phénomène qui n'a pas été anticipé.

En outre, les différences d'aides sociales, selon les formes juridiques d'exploitation commerciale, doivent être résorbées. Par exemple, un affilié Leclerc peut actuellement bénéficier de l'aide à l'emploi, contrairement à un succursaliste disposant de 4 ou 5 salariés, mais rattaché à une société familiale de 500 personnes. C'est par le maintien d'un nombre suffisant de personnel en magasin qu'une relation de qualité se nouera avec le client.

De plus, il faudra trancher sur le sujet de la fermeture dominicale à 13 heures. Un grand nombre de Français souhaitent réaliser leur course à tout moment de la semaine. L'alimentaire est un motif de fréquentation du centre-ville et génère du flux.

Enfin, il apparaît vital de rééquilibrer la situation fiscale entre l'e-commerce (plus de 10 % du marché aujourd'hui) et le commerce physique. Lorsque je suis entré dans le commerce, neuf ans auparavant, Amazon réalisait 100 millions d'euros de chiffre d'affaires en France contre plus de 8 milliards d'euros aujourd'hui. Amazon représente le 7 e ou 8 e commerçant français de nos jours. Qu'en sera-t-il à l'avenir ? Sa productivité est colossale : Amazon dégage 1,3 million d'euros par salarié quand Carrefour atteint 300 à 350 000 euros par salarié. Un commerce d'habillement, à l'image de ceux que je représente, dégage 200 000 euros par salarié. Si de surcroît, ces pure players disposent d'avantages fiscaux, le combat est perdu d'avance. Je rappelle qu'Amazon ne paie que de très faibles montants d'impôt sur les sociétés et d'impôts locaux. Amazon paie des impôts locaux dans seulement 6 intercommunalités en France. Il existe également le problème de TVA non acquittée par un certain nombre de sites de commerce en ligne.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Je vous remercie pour votre intervention. Mme Grimault souhaitait rebondir sur le thème de l'alimentaire.

Virginie Grimault, Secrétaire général de la fédération de l'Epicerie et du Commerce de Proximité. - Nos adhérents sont des commerçants alimentaires de proximité sous enseigne, dont la surface de vente peut s'étendre jusqu'à 1 000 mètres carrés. Ils sont implantés en grande partie en centre-ville, mais peuvent également être présents dans des quartiers de nouvelles centralités. À ce titre, ils participent pleinement au lien social d'un quartier. Ainsi, nous sommes très méfiants vis-à-vis de l'approche, datée, consistant à opposer centre-ville et périphérie.

Le déséquilibre le plus prégnant concerne le commerce physique et le e-commerce au regard de la fiscalité. La taxation porte sur le magasin et donc l'outil de travail des commerçants. Renforcer l'attractivité des commerces requiert des investissements lourds. Le commerce physique est d'ailleurs un plus grand pourvoyeur d'emploi que les pure players du e-commerce. La mise en place d'aide au développement pour une partie trop restreinte des commerces ne sera pas efficace. La disparition du commerce physique dans son ensemble est en jeu.

Martial Bourquin, rapporteur. - Vous estimez que l'opposition entre centre-ville et périphérie est datée et que la véritable concurrence provient du e-commerce. Je partage votre avis sur le commerce dématérialisé, néanmoins je constate que les derniers projets CDAC développés en périphérie attirent à eux les commerces de centre-ville. L'ajout de galeries à une grande surface contribue à la disparition de petits commerces en centre-ville.

Virginie Grimault, Secrétaire général de la fédération de l'Epicerie et du Commerce de Proximité. - Vous avez évoqué précédemment le problème de la dévitalisation du commerce en centre-ville. Toutefois, n'est-ce pas plutôt une conséquence qu'une cause ? Aujourd'hui, 54 % des Français vivent en périphérie contre 37 % en 1962. De plus, la part des familles résidant au sein des métropoles est de 63 % à l'échelle nationale, mais seulement de 43 % à Paris, 45 % à Lyon et 40 % à Bordeaux. Le problème de logement en centre-ville est réel. Les petits commerces se sont installés en périphérie, car ils ont simplement suivi leurs clients.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Les causes sont multiples. Si les modes de consommation ont évolué, il n'en demeure pas moins que les ouvertures de surfaces commerciales se sont multipliées dans des zones connaissant pourtant un faible dynamisme commercial et démographique. L'Allemagne et les Pays-Bas ont réussi à redynamiser leur centre-ville en dépit de mode de consommation et de contraintes similaires aux nôtres.

Je transmets la parole à mes collègues qui souhaitent réagir. Nous commençons avec François Calvet.

François Calvet. - Je suis sénateur des Pyrénées-Orientales. La petite commune de Bourg-Madame, située près de la frontière avec l'Espagne, présente un centre-ville moribond, en voie de paupérisation. De l'autre côté de la frontière, la commune de Puigcerda (9 000 habitants), dispose d'un foisonnement de commerces en centre-ville, ainsi que d'un marché manifestant une animation considérable. Cette différence se retrouve entre les centres-villes de Perpignan, en France, et de Gérone, à proximité en Espagne. Ces villes comptent environ 100 000 habitants. Comment expliquer cette différence de dynamisme commercial ?

Rémy Pointereau, rapporteur. - Je transmets la parole à Nelly Tocqueville.

Nelly Tocqueville. - Nous sommes confrontés à une situation complexe. Je suis sénatrice de Seine-Maritime et maire d'une petite commune de 860 habitants près de Rouen. Un grand nombre de mes collègues élus se plaignent de la disparition des services, notamment médicaux, dans cette zone. La fermeture des commerces entraîne le départ des professions libérales ; l'inverse se produit souvent également.

Je souhaite connaître votre approche de l'accessibilité en centre-ville. Aujourd'hui, nous nous interrogeons sur les manières de limiter la présence des voitures en centre-ville, dans la métropole de Rouen, ce qui va à l'encontre de la multiplication des parkings et arrêts minute que vous suggériez précédemment. Nous privilégions les transports en commun pour développer l'accessibilité. Par ailleurs, le développement des centres commerciaux à l'extérieur des villes encourage le déplacement en voitures et donc les gaz à effet de serre.

Ne faudrait-il pas établir un dialogue entre les acteurs du commerce et les élus responsables de l'aménagement du territoire afin de développer une approche commune de l'accessibilité ?

Rémy Pointereau, rapporteur. - Je vous remercie pour votre intervention. Je transmets la parole à Mme de La Provôté.

Sonia De La Provôté. - Je suis sénatrice du Calvados. Vous avez expliqué que les commerces se sont installés en périphérie pour suivre les clients. La demande a donc créé l'offre.

Il faut avoir conscience que ce groupe de travail, et plus généralement la puissance publique, se donnent pour objectif vertueux de faire revenir les médecins et les services de proximité en centre-ville. Ce sujet sera prégnant et générera des opportunités.

Nous constatons actuellement un retour des consommateurs en centre-ville au détriment des centres commerciaux de la périphérie. S'agit-il d'une tendance durable selon vous ?

Rémy Pointereau, rapporteur. - Pourriez-vous répondre aux questions soulevées par les membres de ce groupe de travail ?

Olivier Bron, Directeur du réseau des Galeries Lafayette. - Le thème de l'accessibilité est lié à la duplication de l'offre entre périphérie et centre-ville. Si l'objet dont vous avez besoin est disponible près de chez vous, vous ne vous rendrez pas en périphérie. Si l'offre est identique, l'accessibilité représente le sujet clef. Il faut créer une logique de non-duplication de l'offre à l'échelle d'un territoire. Par exemple, le centre-ville pourrait accueillir l'offre culturelle et les commerces d'habillement, tandis que la périphérie proposerait les commerces liés au sport et à la maison. Les destinations sont distinguées en fonction du type de commerces.

Régis Schultz, Président de Monoprix et représentant de l'Union du grand commerce de Centre-Ville. - L'accessibilité constitue en effet un point clef. Aujourd'hui, il est long et coûteux de se rendre en centre-ville, à l'inverse de la périphérie, qui propose des parkings gratuits et des accès routiers directs. Le client fait le choix le plus simple. La contrainte environnementale n'est pas un critère de décision. Le commerce de centre-ville souffre de cette accessibilité réduite. Aux Pays-Bas, les parkings sont payants dans les centres commerciaux, et gratuits en centre-ville.

S'agissant de l'exemple de Perpignan, l'élément de sécurité me semble important pour les consommateurs en centre-ville.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Messieurs Petiot et Simonin, pourriez-vous répondre au problème d'accès en centre-ville soulevé précédemment par Nelly Tocqueville ?

Guillaume Simonin, Responsable des affaires économiques de l'Alliance du commerce. - Il s'agit d'une problématique complexe. À Paris, 60 % des foyers ne possèdent pas de véhicules. A l'inverse, en Province, le déplacement en véhicule reste la règle. Il en ressort que les politiques anti-voiture menées par les élus de Province, à l'image des politiques mises en place à Paris, nuisent gravement au commerce de centre-ville. Je constate toutefois que certains élus reviennent en arrière sur ce sujet depuis 2014.

À mon sens, il faudrait implémenter des systèmes de course rapide et des parkings relais en centre-ville.

Le phénomène est multifactoriel. Les services publics quittent également le centre-ville pour s'installer en périphérie. Il faut mettre un frein à ces évolutions, notamment en facilitant le retour des habitants et des familles en centre-ville via une offre de logement conséquente.

Cette stratégie urbaine s'élaborerait au niveau intercommunal et de l'agglomération.

Martial Bourquin, rapporteur. - Sur les questions de circulation, nous constatons que la mise en place de zones piétonnes par les maires de villes moyennes conduit à la disparition des commerces. Cette situation nécessite un dialogue permanent avec les maires.

Guillaume Simonin, Responsable des affaires économiques de l'Alliance du commerce. - Le maire ne doit pas prendre de décision en termes d'aménagement de circulation sans prendre en compte l'agglomération environnante.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Je transmets la parole aux autres membres de ce groupe de travail.

Christian Manable. - J'évoquerai l'exemple d'Amiens et de son agglomération de 180 000 habitants. Cette ville connaît actuellement une métamorphose sur les plans de la mobilité et de l'activité commerciale. Elle se fait d'abord, via la création d'un bus à haut niveau de services (BHNS), couplé à des parkings relais. Ensuite, la périphérie d'Amiens a connu récemment l'ouverture d'un entrepôt Amazon de 107 000 mètres carrés, tout comme d'un shopping promenade Frey, visant à installer la ville à la campagne. Un centre-ville a été reconstitué en périphérie d'Amiens avec des commerces, des zones piétonnes, des jardins, des parkings et même une crèche. Les effets sont néfastes sur le plan environnemental.

Cet exemple, qui doit être valable pour d'autres villes, illustre la difficulté des élus locaux à redynamiser le commerce de centre-ville.

Martine Berthet. - Une dépénalisation du stationnement sera effective le 1er janvier 2018 et devrait permettre une amélioration sur ce sujet de l'accessibilité.

L'aspect fiscal entre e-commerce et commerce traditionnel m'apparaît très important, comme mentionné précédemment.

En outre, l'idée que le centre-ville se doit d'être « expérientiel » me semble pertinente. Un travail d'aménagement urbain peut être réalisé par les élus en lien avec les habitants. Au niveau des différents types de commerce, existe-t-il des travaux en commun sur le sujet de l'animation ?

François Bonhomme. - Le point commun de toutes les interventions d'aujourd'hui consiste à réduire l'avantage comparatif de la périphérie par rapport au centre-ville. Les leviers qui s'offrent à nous sont réglementaires (CDAC), fonciers, fonctionnels et fiscaux. Je suis issu du sud-ouest, où j'ai constaté l'étiolement des centres-villes, à l'image de Villefranche-de-Rouergue (12 000 habitants). Par ailleurs, les centres-commerciaux reconstituent des centres-villes artificiels et se développent. Nous perdons la richesse sociale de nos centres-villes d'antan.

Nous devons adopter une approche multifactorielle, afin d'agir de manière profonde et durable si nous voulons inverser la tendance. Quels leviers vous semblent-ils les plus pertinents ?

Anne Chain-Larché. - Notre génération a vu naître les grandes surfaces, mais ne s'est pas montrée suffisamment exigeante à l'époque. Nous devons inverser la tendance. Je suis élue en Seine-et-Marne. Nos villes de 5 à 15 000 habitants ont vu leur centre se vider de leur substance. Par ailleurs, vos enseignes de qualité (Monoprix, Fnac, Darty, Galeries Lafayette) n'y sont pas présentes. Nos centres commerciaux s'avèrent de faible qualité.

Concrètement, comment écrire les choses dans la loi pour inverser la tendance ?

S'agissant des CDAC, pourrions-nous réfléchir à l'établissement d'un bouquet d'offre attractif en centre-ville ? Par ailleurs, nous devons également mettre en place des incitations fiscales fortes, afin de rétablir un équilibre entre centre-ville et périphérie.

Anne-Catherine Loisier. - Il me semble important également de confier l'aménagement et la commercialisation des centres-villes à de véritables professionnels.

En outre, vos enseignes physiques disposent aujourd'hui de site de e-commerce en parallèle. De ce fait, au lieu de nous opposer au e-commerce, ne devrions-nous pas, au contraire, le développer en complément d'un commerce sédentaire ? Ce nouvel outil permettrait au commerce de proximité de se développer.

Pierre Pelarrey, Directeur général du Printemps Haussmann. - En résumé, les atouts de la périphérie sont l'accessibilité, la praticité et les coûts d'installation. Pour autant, les centres commerciaux offrent une expérience pauvre pour le consommateur. Pour cette raison, des centres-villes factices sont en cours de déploiement. L'avantage concurrentiel du centre-ville, à savoir l'expérience qualitative qu'il propose, n'a pas été suffisamment mis en avant. Il s'agit d'une piste à explorer à l'avenir.

Florien Ingen-Housz, Directeur de la stratégie du groupe Fnac-Darty. - Je tâcherai de répondre globalement à l'ensemble des problématiques évoquées précédemment. Les centres-villes ne seront jamais aussi accessibles qu'un centre commercial, néanmoins ils doivent l'être suffisamment pour améliorer l'expérience du consommateur.

Actuellement, le e-commerce est en train de prendre l'avantage sur les centres commerciaux en matière de prix et de rapidité d'accès au produit. Il faut saisir cette opportunité pour recréer un avantage comparatif en faveur des centres-villes. Ce process doit intervenir rapidement, car les bailleurs professionnels, tels qu'Unibail ou Klépierre, développent à grande vitesse leurs projets, pour recréer la ville en dehors de la ville et améliorer l'expérience client dans les centres commerciaux. A l'instar des commerces de centre-ville, les centres commerciaux doivent faire face au recul de leur fréquentation provoqué par la croissance du e-commerce.

Au-delà de l'accessibilité, il s'agit donc de mettre l'accent sur « l'expérientiel » afin de redynamiser les centres-villes, en ce sens les commerçants doivent être accompagnés par des professionnels.

Gérard Dorey, Président de la fédération de l'Epicerie et du Commerce de Proximité. - L'animation commerciale, notamment en fin d'année, relève d'initiatives ponctuelles de commerçants. Elle se révèle insuffisamment structurée. À ce titre, certaines mairies ont pris des initiatives avec les managers de centre-ville. Il s'agit de professionnels du commerce susceptibles d'endosser un rôle moteur dans l'animation commerciale, sur les implantations et l'habitat du centre-ville, afin de restructurer ce dernier.

Régis Schultz, Président de Monoprix et représentant de l'Union du grand commerce de Centre-Ville. - La vente omnicanal représente une chance pour le commerce, à condition d'établir une fiscalité égalitaire entre commerce physique et virtuel. À mon sens, il s'agit d'une priorité aujourd'hui.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Avez-vous d'autres idées à suggérer ?

Pierre Pelarrey, Directeur général du Printemps Haussmann. - La richesse de l'écosystème d'une ville (commerces, services publics) détermine la qualité d'expérience du consommateur. Ce critère est essentiel dans nos choix d'implantations. Dans cette optique, nous souhaiterions l'établissement d'une base de données, qui explicite la constitution des centres-villes, afin d'en déterminer de manière précise le potentiel commercial.

Olivier Bron, Directeur du réseau des Galeries Lafayette. - Je partage cet avis. Cette base de données serait mise à disposition des enseignes et des collectivités locales. D'ailleurs, il s'avère crucial de fournir les indicateurs pertinents aux personnes adéquates. Cette figure du manager de centre-ville, sachant, expert, me semble incontournable pour adresser cette problématique de la revitalisation des centres-villes, en termes d'animation, de commercialité ou encore de collaboration entre les acteurs privés et publics.

Pierre Pelarrey, Directeur général du Printemps Haussmann. - Cette sensibilité au développement commercial constitue un bon point de départ concernant la revitalisation des centres-villes.

Martial Bourquin, rapporteur. - Je vous remercie pour la qualité de vos interventions et de vos propositions, dans le cadre de cette étude. Il existe un consensus sur le bilan. Nous devons dorénavant déterminer des solutions, car les centres-villes sont irremplaçables.

Le FISAC a représenté une mesure corrective, mais il s'est révélé insuffisant. Il faut désormais agir sur un plus grand nombre de domaines.

La question de l'urbanisme commercial me paraît essentielle. Il s'agit de revoir les règles d'ouverture des nouveaux commerces. Localement, les ouvertures doivent être empêchées, lorsque certains ratios sont atteints.

Il ne peut exister de centre-ville sans services, notamment médicaux. Les maires doivent jouer un rôle plus important avec le recours à un droit de préemption renforcé. Lorsque j'étais maire, j'ai créé des locaux commerciaux afin d'abaisser le prix du mètre carré.

Un rééquilibrage de la fiscalité entre périphérie et centre-ville est également nécessaire. L'extension des ZFU aux centres-villes en difficulté en constituerait un premier jalon.

Par ailleurs, le e-commerce ne doit pas être seulement laissé à Amazon. Les centres-villes pourraient créer leur plate-forme connectée, dans le but de faire connaître les promotions en cours dans ses boutiques. Les managers de centre-ville pourraient être en charge du dossier.

Mon impression est que la revitalisation du centre-ville relève d'une volonté politique.

Lorsque je me rends dans le centre de Fribourg, en Allemagne, de grandes surfaces s'y trouvent localisées dans des espaces précis, et stimulent le dynamisme commercial de la zone. Des études économiques complètes sont réalisées pour contrecarrer leurs effets potentiellement néfastes sur le commerce des centres-villes et travailler à l'instauration d'un équilibre bénéfique à tous.

Je vous remercie.

Rémy Pointereau, rapporteur. - S'agissant de l'urbanisme, l'intercommunalité a un rôle majeur à jouer, notamment par le biais des SEM. Des parkings ou des pépinières de locaux commerciaux pourraient être réalisés. Des avancées devraient également se produire dans le parc locatif. J'attends vos contributions écrites comprenant les trois ou quatre points essentiels de votre réflexion sur la revitalisation des centres-villes.

Gérard Dorey, Président de la fédération de l'Epicerie et du Commerce de Proximité. - Il me semble que la liberté d'ouvrir son commerce selon l'amplitude horaire désirée n'a pas été suffisamment évoquée. Considérez qu'il existe encore 20 départements en France, qui imposent la fermeture d'un jour par semaine. La première promesse d'un commerçant de proximité est d'être ouvert quand ses clients en ont besoin.

Martial Bourquin, rapporteur. - La situation évolue rapidement sur ce sujet de l'amplitude horaire, au niveau local.

Gérard Dorey, Président de la fédération de l'Epicerie et du Commerce de Proximité. - La loi Macron du 6 août 2015 a représenté un premier progrès. Toutefois, il existe encore cette obligation de fermeture à 13 heures le dimanche pour les commerces de détail alimentaire. L'appétence des consommateurs pour réaliser leurs courses le dimanche après-midi est pourtant bien réelle. Nous proposons que les commerces qui le souhaitent puissent ouvrir leur magasin à ce moment-là, sur la base d'un accord social, signé avec les syndicats, et définissant les modalités de compensation pour les salariés. Les sites de e-commerce sont ouverts en permanence. Les règles doivent être les mêmes pour tous les types de commerce afin de permettre une concurrence équitable.

Rémy Pointereau, rapporteur. - Je vous remercie.

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