C. L'ÉQUILIBRE VIE PRIVÉE - VIE PROFESSIONNELLE

La Commission a également présenté une proposition de directive relative à l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée 19 ( * ) . Le texte entend notamment faciliter le retour à l'emploi des mères à l'issue du congé maternité en incitant les pères à disposer d'un congé justement rémunéré. Le texte établit ainsi des normes minimales concernant le congé parental, le congé de paternité et le congé d'aidant :

- le congé de paternité d'au moins 10 jours est ainsi introduit au niveau européen ;

- le congé parental, d'une durée minimale de 4 mois, devient un droit individuel pour les pères et les mères, sans transfert possible à l'autre parent, afin d'inciter les pères à utiliser ce dispositif. Il est à prendre avant que l'enfant n'atteigne un âge déterminé, qui ne peut être supérieur à douze ans ;

- le congé d'aidant, qui permet d'apporter une aide ou des soins personnels en cas de maladie grave ou de dépendance d'un proche, doit a minima comprendre cinq jours par an et par travailleur.

Ces congés sont tous assortis d'une allocation d'un niveau au moins équivalent à celui d'une prestation-maladie. Les parents d'enfants âgés jusqu'à 12 ans ou les aidants peuvent également demander des formules de travail flexibles, qu'il s'agisse du lieu ou des horaires. Afin de tenir compte de la situation des petites et moyennes entreprises, les États membres peuvent limiter la durée de ces formules souples.

Une directive de 2010 avait déjà introduit le principe du congé parental d'au moins quatre mois en raison de la naissance ou de l'adoption d'un enfant dans le droit européen 20 ( * ) . Le texte n'imposait aucune règle concernant la rémunération durant le congé parental et renvoyait aux États et aux partenaires sociaux les modalités d'application. Il prévoyait une protection contre le licenciement ou un traitement moins favorable en raison de la prise d'un congé parental, sans en préciser les contours.

Le texte de 2010 prévoyait que l'âge de l'enfant concerné ne pouvait dépasser 8 ans. La Commission propose aujourd'hui 12 ans, soit plus du double de l'âge obligatoire de scolarité constaté de part et d'autre de l'Union européenne. Dans ces conditions, on peut s'interroger sur le sens même du congé parental. La Commission devrait présenter au Conseil une nouvelle proposition revenant sur cet âge maximal.

La question de la rémunération peut également apparaître délicate. La référence à une indemnité journalière peut sembler coûteuse pour un certain nombre d'États membres, à l'instar de la France. Les autorités françaises rappellent ainsi que le droit national propose une formule souple du congé parental pouvant aller jusqu'à 24 mois et que sa rémunération est envisagée de façon forfaitaire : 392 euros par mois en cas de cessation d'activité. L'indemnité journalière s'élève, quant à elle, à 43,80 euros, soit environ 1 100 euros mensuels. 477 000 familles ont bénéficié du dispositif du congé parental rémunéré en France en 2014 . L'application du dispositif pour le seul congé parental conduirait à une augmentation du coût annuel de celui-ci de 1,7 milliard d'euros.

Ce montant pourrait atteindre 2 milliards d'euros si l'on intègre les congés d'aidants. La loi française ne fixe pas en effet de rémunération pour ce type de congé. L'aidant peut être salarié si son proche est bénéficiaire d'une aide personnalisée d'autonomie ou de la prestation de compensation du handicap. 4,62 millions d'aidants sur les 11 millions sont ainsi rémunérés chaque année. L'octroi d'une indemnité journalière ne serait donc pas sans incidence, d'autant que, d'après le ministère des solidarités et de la santé, le nombre d'aidants est appelé à croître de près de 50 % d'ici 2020. Dans ces conditions, le projet proposé par la Commission européenne n'apparaît pas soutenable pour les finances publiques.

La Commission européenne semble avoir pris la mesure de cet écueil et devrait proposer un compromis, insistant notamment sur le caractère progressif des mesures envisagées sans remettre en cause l'objectif poursuivi. Elle rappelle ainsi que la mise à l'écart des femmes du marché de l'emploi en raison du mode actuel de prise du congé parental reste, in fine , plus coûteuse pour les finances publiques que la majoration envisagée des indemnités versées. On peut cependant s'interroger, au regard du montant qui serait effectivement versé si le projet de la Commission était adopté en l'état, sur le risque de trappe à inactivité qu'il comporte : le congé parental pourrait en effet s'avérer plus attractif que la reprise d'activité.


* 19 Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et aidants et abrogeant la directive 2010//18/UE du Conseil (COM(2017) 253 final).

* 20 Directive 2010/18 du Conseil du 8 mars 2010 portant application de l'accord-cadre révisé sur le congé parental conclu par BusinessEurope, l'UEAPME, la CEEP et la CES et abrogeant la directive 96/34/CE.

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