III. LA HAYE, SIÈGE D'EUROPOL ET D'EUROJUST
La délégation a aussi saisi l'opportunité de la mission à La Haye pour échanger avec les responsables des bureaux français d'Europol et d'Eurojust, toutes deux installées à La Haye 18 ( * ) .
A. LA MONTÉE EN PUISSANCE ET L'APPORT DES DEUX AGENCES
1. Des missions complémentaires
Eurojust facilite la coopération judiciaire entre les autorités des États membres selon trois procédures différentes.
Tout d'abord, au moyen des demandes d'enquêtes , les juges nationaux peuvent via Eurojust demander à des magistrats d'un autre État membre d'ouvrir un enquête, par exemple lorsque des malfaiteurs commettent des infractions dans plusieurs pays.
Ensuite, les équipes communes d'enquête permettent d'aller plus loin en créant un dossier commun aux magistrats des différents pays. Les demandes de telles enquêtes sont adressées par l'État demandeur au bureau national dont il dispose à Eurojust. L'avantage de ces équipes communes par rapport à la procédure classique des enquêtes internationales est de permettre suivre les développements de l'affaire sans nécessiter à chaque fois de nouvelle demande (selon une procédure d'ailleurs assez lourde).
Enfin, le dialogue entre les représentants des autorités judiciaires nationales au sein d'Eurojust permet aussi de coordonner les opérations (perquisitions, arrestations) entre les services de différents pays.
Europol s'apparente quant à elle davantage à une plateforme d'échange d'informations (par voie de « messages » sécurisés) entre les services de police, de gendarmerie et de douanes nationaux. En outre, l'agence met à disposition des États membres des expertises spécifiques sur des thématiques émergentes telles que la cybercriminalité et les cryptomonnaies.
Les représentants français dans les deux institutions ont rappelé l'importance de la coopération entre eux. Il n'est par exemple pas rare que le bureau français d'Eurojust attire l'attention de son équivalent d'Europol sur l'intérêt qu'il pourrait y avoir pour certains services de police à demander à leur magistrat enquêteur qu'une enquête commune soit ouverte sur telle ou telle affaire.
2. Des activités en forte croissance
Le nombre de dossiers d'enquêtes traités par Eurojust connaît une forte accélération de sa croissance (202 dossiers traités en 2002, contre 1804 en 2014 et 2550 en 2017). Le nombre d'enquêtes communes et de coordinations d'enquête a lui aussi fortement cru à compter de 2014, avec une moyenne de 16 équipes d'enquêtes communes mises en place par an entre 2015 et 2017 contre moins de 4 les années précédentes.
Quant au nombre des dossiers impliquant la France (400 dossiers en 2017), il a subi la même évolution.
La coopération policière réalisée à travers Europol n'a elle aussi cessé de croître, avec une accélération à la même période. Plus d'un million de messages ont été échangés en 2017, soit une augmentation significative par rapport à 2016 (16%) et plus du double du nombre d'échanges réalisés en 2013 (465 599).
Ces deux dernières années, la France a fortement augmenté son activité avec l'agence (avec un volume d'échanges en 2017 2,5 fois supérieur à 2015 et un taux d'initiative qui augmente de 20% par rapport à 2016). Notre pays est l'un des premiers contributeurs, derrière l'Allemagne.
Cette augmentation est liée à la fois à l'internationalisation croissante des dossiers de criminalité organisée, mais également à la montée en puissance de l'agence dans le soutien qu'elle apporte en matière de terrorisme et sur des secteurs de pointe comme la cybercriminalité ou le darknet .
* 18 On rappellera également la présence à La Haye de grandes institutions judiciaires et juridiques internationales : la Cour Permanente d'Arbitrage, la Cour Internationale de Justice (CIJ), le Tribunal Pénal International pour l'Ex-Yougoslavie (TPIY), les Tribunaux spéciaux pour le Liban (TSL) et pour la Sierra-Leone (TSSL) ; La Haye accueille aussi la Cour Pénale Internationale, inaugurée le 11 mars 2003, l'Académie de droit international, l'Institut pour l'internationalisation du droit, l'Institut Grotius, l'Institut Asser et l'Institut pour l'internationalisation du droit.