B. LA NÉGOCIATION DES DROITS AUDIOVISUELS ET LES RÈGLES APPLICABLES À LEUR RÉPARTITION
Le décret « Melandri »détermine :
- les titulaires des droits audiovisuels ;
- le régime du « droit de chronique » ;
- les modalités de commercialisation conjointe des droits ;
- la répartition des revenus entre les participants au championnat national de la ligue.
1. Titulaires des droits et entités organisatrices
Aux termes de l'article 4 du décret législatif n° 9 du 9 janvier 2008 précité qui régit, outre le fait d'en être titulaire, les conditions de la commercialisation des droits audiovisuels sportifs et la répartition des ressources y afférentes, « l'exercice des droits audiovisuels relatifs aux événements sportifs [lequel] relève de l'organisateur de la compétition », à savoir la ligue en charge de l'organisation de la compétition ( Serie A ou Serie B ).
2. « Droits de chronique »
L'article 5 du décret législatif reconnaît aux opérateurs du secteur de la communication (operatori della communicazione) un « droit de chronique » qui ne peut porter préjudice ni à l'exploitation normale des droits audiovisuels par les entités qui en disposent ni aux intérêts de l'organisateur de la compétition ou de l'événement sportif.
Les chaînes de télévision peuvent cependant, dans le cadre du journal télévisé, transmettre des images importantes (salienti) pour rendre compte de l'actualité, pour une durée maximale de 8 minutes par journée de championnat, de 4 minutes par jour calendaire et de 3 minutes par match, après un laps de temps qui ne peut être inférieur à trois heures à compter de la fin de celui-ci et dans les 48 heures suivant celle-ci.
L'autorité indépendante de régulation du secteur des communications (Autorità per le garanzie nelle comunicazioni) est chargée d'établir un règlement relatif aux limites temporelles et à l'exercice du « droit de chronique » et de veiller à son application.
3. Modalités de commercialisation
L'organisateur de la compétition est tenu de déterminer des « lignes directrices » (linee guida) pour la commercialisation des droits audiovisuels, lesquelles précisent l'offre et l'attribution de ces droits, les critères applicables à la constitution de « paquets » de compétitions afin de garantir l'égalité des candidats dans la procédure d'attribution. Ces lignes directrices sont approuvées, pour chaque compétition, par la majorité des deux-tiers des sociétés sportives qui y participent. Quant aux « paquets », ils doivent être équilibrés quant à leur contenu afin de garantir la présence, dans chacun d'entre eux, de matchs de « grand intérêt » (elevato interesse) pour les spectateurs.
Le contenu de ces lignes directrices est soumis à l'autorité indépendante du secteur des communications et à l'autorité indépendante chargée de la concurrence.
L'article 7 du même décret prévoit que l'organisateur de la compétition propose les droits audiovisuels à tous les opérateurs du secteur des communications au moyen de procédures compétitives distinctes relatives au marché national, en tenant compte des spécificités du marché international et du secteur radiophonique.
La durée des contrats de licence est de trois ans.
L'organisateur de la compétition peut désigner, après mise en concurrence, un intermédiaire auquel il concède les droits relatifs à une compétition.
a) La répartition des revenus
On distinguera les dispositions initiales du décret « Melandri » des modifications apportées, s'agissant de la répartition de certains des revenus, par le décret-loi n° 193 du 22 octobre 2016, converti en loi, avec modifications, par la loi n° 225 du 1 er décembre 2016.
• Les dispositions initiales du décret « Melandri »
Les articles 21 à 26 du décret législatif traitent de la répartition des droits en :
- prévoyant la création d'une entité spécifique chargée de celle-ci ;
- et en déterminant les modalités de répartition des droits de retransmission selon des coefficients qu'il établit.
Une entité spécifique, la « Fondazione per la mutualità generale negli sport professionistici a squadre »
Le texte initial prévoyait la création d'une entité dénommée Fondation pour la mutualité générale dans les sports collectifs professionnels (Fondazione per la mutualità generale negli sport professionistici a squadre) qui recevait au moins 4 % des ressources tirées de la vente des droits afin de favoriser le développement du secteur de la jeunesse, des sociétés professionnelles, des investissements destinés à améliorer la sûreté, les infrastructures, les équipements sportifs et le financement d'au moins deux projets par an destinés à soutenir d'autres disciplines sportives que le football.
En pratique, l'activité de cette fondation qui a distribué des fonds à compter de 2013, a fait l'objet de vives critiques 33 ( * ) . Elle ne semblait plus en état de fonctionner à l'automne 2016.
Valorisation et aide à l'activité de catégories autres que la Serie A
Le texte prévoyait que 6 % des ressources tirées du championnat de football de Serie A étaient destinées à valoriser et aider l'activité des autres catégories d'équipes de football.
Comme on le verra infra , le décret-législatif n° 193 du 22 octobre 2016 a supprimé cette fondation et modifié le régime d'attribution des aides aux activités des catégories autres que la Serie A .
La répartition du reste des droits de retransmission
Le texte établissait une distinction entre :
- le régime initial qu'il avait spécialement institué pour la première année d'application, d'une part ;
- et le régime de droit commun applicable depuis lors.
Pour la première année d'application du dispositif (rappelons que le texte initial datait du début 2008) était prévu le versement du solde des droits s'effectuerait à raison de :
- 40 % à répartir à parts égales entre les participants de chaque compétition ;
- 30 % à répartir en fonction des résultats sportifs ;
- et 30 % à raison du « bassin » de population dans lequel ces compétitions intervenaient (bacino di utenza) .
Depuis lors , les règles de répartition sont déterminées par l'assemblée des entités qui participent à la compétition, à la majorité des trois-quarts de ses membres (article 25, dernier alinéa).
L'article 12 du statut de la FIGC précise en effet :
- d'une part que, sous réserve du respect des dispositions légales, les ligues concluent, dans le respect des intérêts de toutes leurs composantes, des accords relatifs aux compétitions pour la cession centralisée des droits d'image et de diffusion radiotélévisée et par d'autres moyens de communication ainsi que de mise à disposition du public ;
- et d'autre part que les ressources tirées des équipes nationales sont destinées au budget fédéral qui doit prévoir des projets tenant au développement économique du football national, spécialement du football des jeunes (calcio giovanile) .
Selon la presse, la clé de répartition a été fixée, le 26 février 2016, par la majorité (18 sur 20) des membres de l'assemblée de la ligue de Serie A à raison de :
- 40 % à répartir à parts égales entre les participants conformément aux dispositions du décret législatif « Melandri » ;
- 30 % en fonction du « bassin » de population dans lequel les compétitions intervenaient afin de prendre en compte le nombre de supporters concernés sur la base de deux indicateurs, à savoir une étude sur les supporters pour 25 %, d'une part, et, d'autre part, la population de la commune où joue l'équipe, à raison de 5 % ;
- 30 % en fonction des résultats à raison de 10 % liés à l'historique des résultats du club depuis la saison 1946-1947, 15 % résultant des cinq saisons précédentes et 5 % correspondant aux résultats de la saison en cours 34 ( * ) .
Pour la saison 2014-2015, le montant des droits de retransmission télévisuelle aurait atteint 1 091 millions d'euros (pour 87 équipes sur 102) dont 1 031,9 millions d'euros pour l'équivalent de la ligue 1 ou Serie A (+ 4,5 % par rapport à la saison précédente) et 59 millions d'euros pour l'homologue de la ligue 2 ou Serie B 35 ( * ) .
Selon une autre estimation concernant la saison en cours, les 1 169 millions tirés de l'ensemble des droits de retransmission se répartissaient entre :
- 50,4 millions destinés aux commissions d'INFRONT, l'intermédiaire chargé de la gestion des droits ;
- 60 millions de « parachute » destinés aux trois équipes reléguées de Serie A en Serie B à l'issue de la saison ;
- environ 10 % pour les dépenses de la Fondazione per la mutualità generale et les prix de la Coppa Italia ;
- et enfin 924,3 millions d'euros à répartir entre les clubs de Serie A .
Les deux clubs les mieux dotés étaient, sur cette base, la Juventus (103,1 millions d'euros) et le Milan AC (80,3 millions) et les deux derniers Carpi et Frosinone (22 millions d'euros chacun) 36 ( * ) .
On notera qu'une proposition de loi n° 3 834 37 ( * ) déposée le 17 mai 2016, notamment signée de la responsable nationale pour le sport et le bien être ( welfare ) du Partito democratico (PD), le parti du Président du conseil des ministres Matteo Renzi tendait à :
- supprimer la Fondazione per la mutualità generale ;
- prévoir le versement de 9 % des ressources tirées de la diffusion des matchs de Serie A aux organisateurs des compétitions des catégories plus modeste à raison de :
-- 5 % pour la Serie B ;
-- 3 % pour la catégorie professionnelle suivante ;
-- et 1 % pour la catégorie des amateurs (dilettanti) .
Ces sommes étaient destinées à assurer :
- le développement des secteurs « jeunesse » des sociétés sportives des sports professionnels en équipe ;
- le soutien aux investissements en matière de sécurité, y compris des infrastructures, des équipements sportifs privés ou gérés par des sociétés privées ;
- et la couverture intégrale des dépenses occasionnelles relatives aux forces de police déployées dans les équipements sportifs où ont lieu les matchs.
La fédération italienne de football aurait été chargée de veiller à la bonne utilisation de ces sommes.
La même proposition de loi prévoyait, de surcroît, le versement d'une fraction des ressources tirées de la diffusion des matchs du championnat de Serie A de :
- 0,5 % à l'autorité nationale anti-corruption afin qu'elle l'utilise pour des actions de suivi, contrôle et répression des paris illicites ;
- 0,5 % à la fédération nationale italienne de football, pour qu'elle l'utilise exclusivement pour la formation des licenciés des sociétés professionnelles afin de diffuser l'éthique, les valeurs et les principes du sport et de prévenir les phénomènes illicites, notamment les paris illicites ;
- du montant nécessaire pour payer les dépenses relatives au service des forces de police dans les compétitions de la Serie A .
• La suppression de la fondation et la modification des aides aux catégories autres que la Serie A
En vertu du décret-loi n° 193 du 22 octobre 2016, les articles 21 et 22, du décret « Melandri » modifié déterminent désormais le régime de répartition des revenus tirés des droits audiovisuels.
Ce décret a, tout d'abord, supprimé la Fondazione per la mutualità generale negli sport professionistici a squadre .
Il a confié à l'organisateur des compétitions de Serie A la mission de réserver 10 % des revenus financiers tirés de « tous les contrats signés pour la commercialisation des droits de retransmission, exclusivement pour » :
- le développement des secteurs « jeunes » des sociétés de football ;
- la formation et l'utilisation des « joueurs convocables pour les équipes nationales de jeunes, masculines et féminines » ;
- et pour le soutien des investissements en équipements sportifs et des centres fédéraux territoriaux des activités « jeunes » de la fédération italienne de football.
Cette quote-part de 10 % est destinée à la fédération italienne de football qui en fixe les critères et les modalités de versement, conformément aux principes précités, sur la base des comptes rendus certifiés par les entités susceptibles d'en bénéficier.
Ces fonds sont utilisés à raison de :
- 6 % pour la ligue de Serie B ;
- 2 % pour la Lega Pro ;
- 1 % pour la ligue nationale amateurs ;
- et 1 % pour la fédération italienne de football.
Cette fédération présente chaque année au ministre chargé des sports un rapport sur son activité en la matière.
Les dispositions initiales du décret « Melandri » concernant la répartition du reste des droits de retransmission demeurent inchangées (voir supra ).
* 33 Voir par exemple celles présentées dans l'article de Marco Mensurati « Lo scandalo Fondazione, quel bancomat segreto usato per acquistare il consenso nel calcio » du 4 mars 2015 sur le site www.repubblica.it.
* 34 Site www.goal.com , 11 mars 2016.
* 35 Données agrégées par l'association AREL dans son document annuel Report calcio 2016 , non paginé.
* 36 Chiffres tirés du site www.goal.com , la recherche n'ayant pas permis de trouver ces éléments sur le site de la Lega di Serie A . Le site www.tifosoblianciato.it relève du reste que la Lega di Serie A ne rend pas publiques les données officielles.
* 37 Camera dei deputati, XVII legislatura, proposta di legge n° 3 834, d'iniziativa dei deputati Bonaccorsi et al.