B. UNE VISION À TRACER À MOYEN TERME POUR RETROUVER UNE RELATION FRANCO-IRANIENNE DENSE
En dépit des nombreux et clairs signaux du changement de statut international de l'Iran que, dans les domaines de la diplomatie et du commerce, la signature de l'accord de Vienne a engendrés en quelques mois, on ne doit sans doute pas s'attendre à voir très rapidement se concrétiser les conséquences pratiques susceptibles de résulter de ce changement. Ainsi, comme le présent rapport l'a souligné à plusieurs reprises, il faudra attendre le début de l'année 2016 pour que les sanctions internationales soient levées, sous la réserve des conclusions du rapport de l'AIEA attendu en décembre prochain 27 ( * ) , et donc pour assister à une reprise des échanges économiques de l'Iran véritablement possible enfin. Du reste, même si les investisseurs reviennent alors en masse dans le pays, la nécessaire réorganisation de l'économie de celui-ci ne pourra être que progressive, eu égard à l'ampleur de la tâche 28 ( * ) . De même, il est peu probable que le régime iranien infléchisse de beaucoup, à court terme, sa politique régionale, et notamment les alliances qui la constituent, par exemple en Syrie, alors qu'il se trouve soumis à des forces politiques internes que l'accord du 14 juillet 2015 n'a pas fondamentalement modifiée ; ces dernières, à brève échéance, ne paraissent pouvoir connaître une transformation, peut-être, qu'en fonction du résultat des élections législatives prévues dans le pays au mois de mars 2016 29 ( * ) .
Cette situation de transition entre la crise nucléaire et le retour à une potentielle "normalité" iranienne est riche de possibles développements - y compris en termes d'évolution de la société et du régime iranien, pour l'heure incertaine. Elle doit être mise à profit, par la diplomatie française, pour retisser avec Téhéran les liens et la confiance qui permettront à notre pays d'entretenir un dialogue politique bilatéral utile et des partenariats, tant économiques que culturels, fructueux . La vision d'un tel projet reste à définir.
Aux yeux des membres du groupe de travail de votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, l'enjeu, en particulier, est de rétablir une qualité des relations franco-iraniennes qui permette d'éviter tout déséquilibre dans nos alliances au Proche et Moyen-Orient , notamment entre monde sunnite et monde chiite. Tout en se félicitant de la qualité actuelle, remarquable, de la coopération politique et militaire française mise en oeuvre avec l'Égypte, l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, le groupe de travail estime en effet essentiel de ne pas négliger les leviers majeurs d'influence, dans la région, dont la restauration d'une relation franco-iranienne dense serait la clé.
La coopération dans la gestion des crises ou le redémarrage des investissements sur place n'implique d'ailleurs en rien d'acquiescer aux principes défendus par la République islamique, ni de se rallier à la vision du monde que s'est forgée celle-ci. Au contraire, il s'agit pour la France, non seulement de défendre ses intérêts stratégiques et économiques, mais aussi de faire rayonner sa culture, en tirant les bénéfices de la bonne image dont elle jouit auprès des Iraniens, et ses valeurs, en poursuivant avec le régime de Téhéran un échange, le cas échéant, critique - tout particulièrement sur la question des droits de l'Homme.
Les projets que, suivant les préconisations du présent rapport, la prochaine « feuille de route » franco-iranienne, ci-dessus mentionnée, devrait comporter, seront autant de vecteurs de notre influence. La France paraît en effet avoir un rôle à jouer, auquel elle doit se préparer, dans l'accompagnement des mouvements plus ou moins lents qui sont aujourd'hui en gestation en Iran - ouverture de l'économie, essor d'une société plus libre -, dans lesquels le groupe de travail, pour conclure, tient à marquer sa confiance.
* 27 Cf. supra , chapitre I er .
* 28 Cf. supra , chapitre II.
* 29 Cf. supra , ibid .