2. Une stricte condition de reprise d'activité préalable
Conformément à l'article L. 5133-8 du code du travail, la reprise d'activité doit être préalable au versement de l'aide . L'APRE a ainsi davantage vocation à accompagner ou faciliter la reprise d'une activité qu'à l'impulser directement. Le décret du 15 avril 2009 5 ( * ) a précisé que la reprise d'activité s'entendait de « la prise ou la reprise d'une activité professionnelle, que ce soit sous la forme d'un emploi , du suivi d'une formation ou de la création d'une entreprise ». En principe, la prescription de l'APRE doit intervenir au plus tard six mois après la date de la reprise d'activité ; des dérogations peuvent cependant être accordées lorsqu'un délai supplémentaire est nécessaire au référent pour apprécier la pertinence du projet professionnel du bénéficiaire.
Au-delà de la définition des trois cas possibles de reprise d'activité (emploi, formation, création d'entreprise), aucun critère n'est précisé à l'échelle nationale pour apprécier la reprise d'activité ; le Gouvernement a ainsi indiqué à votre rapporteur spécial, dans les réponses à son questionnaire, qu' il revient au règlement départemental de « préciser les éléments d'appréciation de la reprise d'activité et les documents justificatifs fournis », ce qui induit d'importantes disparités locales ( cf. infra ).
Au total, l'APRE n'est donc pas, au sens strict, une aide à la reprise d'activité. Comme l'ont souligné les responsables de Pôle emploi du Pas-de-Calais, « la reprise d'activité étant déjà réalisée, l'APRE est en réalité une aide au maintien dans le parcours d'insertion ». Or, ce critère se révèle souvent trop sévère, notamment pour certaines démarches où l'APRE peut être utile mais qui sont nécessairement en amont d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail : il s'agit, notamment, du financement d'un permis de conduire. Votre rapporteur spécial souhaite donc que, pour des types d'aides exhaustivement définis à l'échelle nationale, l'APRE puisse être engagée en amont de la reprise d'activité , sous réserve d'une appréciation par le référent de la réalité des démarches de recherche d'emploi.
3. Une prescription par le référent unique
L'article L. 5133-8 du code du travail précise que l'APRE est attribuée par l'organisme au sein duquel travaille le référent unique , à qui est donc confié un rôle majeur dans l'architecture du dispositif. Le référent unique, dont la mission, fixée par l'article L. 262-27 du code de l'action sociale et des familles, consiste à accompagner le parcours d'insertion des bénéficiaires du RSA, est soit un conseiller de Pôle Emploi, soit un travailleur social désigné par le Conseil général (généralement au sein de ses services, mais pas nécessairement). Toutefois, les services statistiques des ministères sociaux ne disposent aujourd'hui d'aucune statistique globale sur la proportion de bénéficiaires du RSA suivis par un référent unique ni, lorsque cela est le cas, sur l'organisme auquel ce référent unique appartient.
D'après les informations recueillies par votre rapporteur spécial lors de ses déplacements, l'organisme en charge du suivi du bénéficiaire du RSA est fonction du profil de ce dernier : plutôt Pôle Emploi pour les personnes proches de l'emploi, et plutôt les services sociaux du Conseil général pour les personnes présentant les difficultés sociales les plus importantes . Cette typologie sommaire n'exclut évidemment pas des particularités locales, ainsi qu'un suivi, selon les besoins, par les services d'un centre communal d'action sociale (CCAS) ou d'une association locale.
En tout état de cause, d'après les informations recueillies par votre rapporteur spécial, l'APRE est rarement sollicitée en tant que telle par un bénéficiaire du RSA . Même en cas de prescription, il n'est pas rare que les bénéficiaires ignorent le nom de l'aide dont ils bénéficient. Cette méconnaissance des bénéficiaires est d'ailleurs parfois entretenue par les prescripteurs, qui redoutent la transformation de l'APRE en une allocation de « guichet » : le sous-préfet du Pas-de-Calais en charge de la cohésion sociale a ainsi rappelé que « l'APRE n'est pas un droit, c'est un levier ».
Au total, comme le souligne le rapport de l'Agence nationale des solidarités actives (ANSA) de juin 2011, « l'APRE déconcentrée est mobilisée essentiellement suite à une proposition du référent et rarement suite à une sollicitation du bénéficiaire » 6 ( * ) . Étant donné les caractéristiques d'attribution de l'aide, il ne s'agit pas d'un problème en soi, pour autant que les référents uniques soient tous informés de la même manière sur l'existence de cette aide. Si, en revanche, l'information du référent est parcellaire et ressentie comme telle par le bénéficiaire du RSA, alors « les bénéficiaires ont le sentiment que le système d'information et d'obtention des aides disponibles est sans doute volontairement opaque », comme l'indique le rapport du Crédoc de novembre 2010 pour le comité d'évaluation du RSA. Lors de leur audition, les représentants du MNCP ont ainsi indiqué à votre rapporteur spécial que, d'après eux, la plupart des agents de Pôle emploi soit ignorent l'existence ou les modalités d'attribution de l'APRE, soit sont très difficiles d'accès pour les bénéficiaires du RSA en raison de leur charge de travail . Même s'il s'agit là d'un sentiment diffus dont il n'est pas possible de tirer des conclusions générales, les responsables de Pôle emploi ont confirmé à votre rapporteur spécial qu'il n'y avait quasiment jamais eu de dépliant permettant d'exposer le dispositif. Ce caractère confidentiel a sans doute joué en faveur de la suppression de l'enveloppe nationale confiée à Pôle emploi au début de l'année 2013.
Au total, il semble donc nécessaire de mettre en place une campagne d'information active, à l'échelle nationale, afin d'assurer une mobilisation de tous les référents des principaux organismes prescripteurs ou impliqués dans l'action sociale (Conseils généraux, Pôle emploi, CAF, MSA, CCAS) en matière d'attribution de l'APRE .
Proposition n° 4 : mettre en place une campagne d'information sur l'attribution de l'APRE à destination des référents uniques des principaux organismes prescripteurs (Conseils généraux, Pôle emploi, CAF, MSA et CCAS). |
* 5 Décret n° 2009-404 du 15 avril 2009 relatif au revenu de solidarité active.
* 6 « L'Aide personnalisée de retour à l'emploi : premiers bilans et analyse de pratiques locales », ANSA, juin 2011.