SYNTHÈSE
OBSERVATIONS DE LA MISSION SÉNATORIALE SUR SON
DÉPLACEMENT
L a mission s'est s'attachée à analyser de façon précise comment l'Italie parvient à relever le défi de l'exportation et de la compétitivité industrielle en s'appuyant majoritairement sur des micro-entreprises. Tout en rappelant les difficultés politiques, financières et économiques de l'Italie, plusieurs instituts d'études économiques comme le Xerfi ont rappelé, en mars 2013, que les régions industrielles du Nord, sont le lieu de bonnes pratiques dont la France pourrait s'inspirer . L'idée n'est pas nouvelle puisque, dans les années 1990, le district italien - qui se définit comme une concentration géographique de PMI travaillant en réseau autour d'un produit, d'un métier ou d'une technologie - était un concept très prisé des spécialistes du développement local. La Datar avait alors favorisé le développement de "systèmes productifs localisés " (SPL) conçus comme la traduction française des districts à l'italienne, par exemple en Haute-Savoie, dans le Puy-de-Dôme ou en Haute-Vienne. Aujourd'hui, dans un contexte économique nouveau , caractérisé, en France, par un seuil d'endettement public élevé et un déficit extérieur qui limitent les possibilités de relance budgétaire, ce sont les performances industrielles de l'Italie qui justifient un réexamen des facteurs de son succès. Globalement, alors que le commerce extérieur de la France était déficitaire de 67 milliards d'euros en 2012, l'Italie, dont la dépendance énergétique est plus forte que la nôtre, a enregistré un excédent de 11 milliards d'euros en 2012 (qui succède à un déficit de 26 milliards en 2011). De façon encore plus frappante, l' excédent manufacturier de l'Italie atteint 94 milliards d'euros alors que la France est déficitaire de 37 milliards d'euros. Plusieurs explications s'imposent de façon immédiate : l'Italie compte presque deux fois plus d'entreprises exportatrices qu'en France (205 382 contre 117 106) et la robotisation de son industrie est environ deux fois plus avancée (62 300 unités en Italie contre 34 500 en France). Globalement, la réussite de l'industrie italienne se caractérise par une montée en gamme de ses produits dont les débouchés, en particulier dans le secteur du luxe, sont assez faiblement sensibles aux effets de taux de change et aux prix. Les difficultés de l'exercice Les diverses publication de notre représentation économique dans ce pays signalaient, avec réalisme, la difficulté de ces investigations à travers la « mosaïque italienne » en rappelant : - d'une part, que l'Italie est un pays complexe, fragmenté, et parfois difficilement « lisible » : il n'est pas facile d'y trouver des informations fiables et pertinentes pour en tirer une synthèse ou un modèle exemplaire ; - et, d'autre part, que les positions commerciales sont souvent établies de longue date et difficiles à bousculer, avec un poids non négligeable du politique dans les affaires. Nos conseillers du commerce extérieur recommandent aux entrepreneurs français de bien mesurer la différence constatée dans le fonctionnement du monde économique de nos deux pays : l'Italie est un pays décentralisé et peu homogène où les relations personnelles et les multiples réseaux jouent un rôle déterminant, ce qui nécessite, plus qu'en France, l'implication personnelle de tous les dirigeants pour nouer des relations individuelles indispensables. En Italie, ces relations de confiance, souvent fondées sur un lien familial, permettent à chaque petite entreprise d'agir non pas en tant qu'entité individuelle mais en tant que composante solidaire d'un ensemble économique. Les conclusions de la mission sénatoriale. Au cours d'un déplacement de deux jours brefs mais intensifs, la mission sénatoriale a pu tirer plusieurs enseignements utiles de l'observation de quelques mécanismes de l'économie du Nord de l'Italie. Pour l'essentiel, les parlementaires ont constaté que l'aspect « organisationnel », sur lequel se sont concentrés de très nombreux travaux analysant la nature et les métamorphoses des districts industriels, n'était pas le seul facteur digne d'intérêt. En effet, sur le terrain, la passion pour le design appliquée à l'industrie apparait bien comme le moteur principal d'un cercle vertueux qui entretient à la fois la montée en gamme des produits italiens et l'enthousiasme des entrepreneurs pour la « beauté du geste » artisanal ou industriel. Sur ce second point, on peut signaler que les travaux et investigations sur le rôle moteur du design sont très peu nombreux et se demander si notre système scolaire, universitaire et économique s'attache suffisamment à stimuler l'interaction entre l'esthétique et la production alors même que les choix des consommateurs du monde entier se portent massivement sur les produits - y compris de haute technologie - les plus élégants. |
I. LES DISTRICTS INDUSTRIELS DU NORD DE L'ITALIE : UNE PERFORMANCE À L'EXPORTATION COMPARABLE À CELLE DE L'ALLEMAGNE AVEC UNE ORGANISATION TRÈS DIFFERENTE.
A. LA MISSION SÉNATORIALE S'EST CONCENTRÉE SUR UNE RÉGION SPÉCIFIQUE : LA LOMBARDIE
a) Frappée par la crise, la Lombardie reste structurellement la région la plus solide d'Italie au plan économique.
Région la plus riche d'Italie et au deuxième rang en Europe derrière l'Île de France, la Lombardie, qui rassemble 16 % de la population du pays, représente à elle seule un cinquième du PIB italien.
La région lombarde a été sévèrement frappée par la crise économique mondiale : le PIB a subi en 2009 un recul de 6,2 %, contre 5,5 % au niveau national, et n'a pas retrouvé depuis son niveau d'avant-crise. La structure même de son économie explique ces évolutions, la Lombardie se caractérisant par sa forte ouverture internationale et par une spécialisation dans les activités industrielles qui représentent 30,4 % de la valeur ajoutée créée dans la région
Si les tensions sur le marché du travail ont provoqué un doublement du taux de chômage, passé de 3,2 % de la population active en 2007 à 7,1 % l'an dernier, la région demeure l'une de celles où son niveau demeure le plus bas (10,7 % au plan national).
b) La Lombardie a résisté à la désindustrialisation
L'agriculture a été la base du développement économique de la région. Elle a connu un processus de mécanisation et de restructuration et se concentre principalement sur la production de céréales (maïs, soja, froment), légumes, fruits (poires et melons) et de vin. La production de fourrage est très développée et utilisée dans le cadre de l'élevage bovin et porcin.
L'industrie est dominée par des petites et moyennes entreprises familiales, souvent sous-traitantes de l'industrie allemande, et par la présence de plusieurs grandes entreprises. Elle est florissante dans de nombreux secteurs, en particulier ceux de la mécanique, l'électronique, la métallurgie, le textile, la chimie, la pétrochimie, la pharmacie, l'agroalimentaire, le mobilier et les chaussures. Milan et sa province comprennent près de 40 % des entreprises industrielles lombardes. La part de l'industrie dans l'emploi est largement supérieure à la moyenne italienne (36,2 % des actifs contre 29,9 %).
Dans le secteur tertiaire, le commerce et la finance sont les principaux moteurs de l'activité. Milan est le siège de la bourse italienne, l'une des places financières majeures en Europe, et le siège des principales banques italiennes. La foire de Milan est par ailleurs le plus grand espace d'exposition d'Europe. Les activités bancaires, de transports, de communication et de services aux entreprises ont une place importante. Le tourisme a également un poids significatif, notamment en matière de tourisme d'affaires. Le tertiaire reste le secteur le plus important dans l'économie lombarde, tout comme dans le reste de l'Italie.
Fortement atteinte par les effets de la crise mondiale du fait de la structure même de son économie, la Lombardie demeure toutefois le moteur économique de l'Italie et présente des résultats bien supérieurs à la moyenne italienne en termes d'activité. Sa faiblesse réside néanmoins dans un moindre investissement dans les nouvelles technologies, en comparaison avec certaines régions européennes.
Les autorités locales rencontrées par la mission sénatoriale, et en particulier la ville de Milan, misent sur l'organisation de l'exposition universelle de 2015 pour relancer le dynamisme de la région.
c) L'ouverture internationale de la Lombardie
Très tournée vers l'international, cette région assure près du tiers des échanges du pays, et sa capitale, Milan, siège de nombreuses entreprises privées et de la Bourse italienne, est la véritable capitale économique et financière de l'Italie.
La Lombardie exporte à 55 % en Europe et la France est le deuxième client de la région (11,6 % du total des exportations), après l'Allemagne (14,3 %). La Lombardie est par ailleurs l'une des quatre régions du groupe de coopération interrégionale « quatre moteurs pour l'Europe » avec le Bade-Wurtemberg, la Catalogne et Rhône-Alpes.
Les principaux secteurs d'exportations, composées à 98 % de produits manufacturés, sont les machines (20 % des ventes), les produits de la métallurgie (18 %), la chimie-pharmacie (14 %), les équipements électroniques et électriques (12 %) et les moyens de transport (7 %). Les produits traditionnels du « made in Italy », le textile-habillement et les chaussures, représentent 10 % des ventes, tandis que les produits agricoles et des industries agroalimentaires atteignent 4,7 %.
Le premier poste d'importations est constitué de la chimie-pharmacie (22 %), des équipements électroniques et électriques (19 %), avant la métallurgie (12 %) et les produits pétroliers (7 %).