IV. PROPOSITIONS COMPLÉMENTAIRES DU RAPPORTEUR PHILIPPE ADNOT
A. RENDRE SYMPA PLUS AUTOMATIQUE
Afin de contribuer le plus pleinement possible au débat, les deux commissions sont convenues de publier, dans le présent rapport d'information, deux propositions relevant du seul rapporteur Philippe Adnot. Elles ont en effet considéré que, quel que soit le jugement que l'on porte sur les mesures devant être mises en oeuvre, certaines questions méritent d'être posées.
1. Inscrire dans la loi les principales caractéristiques de SYMPA, en prévoyant un redéploiement annuel minimum ?
Le rapporteur Philippe Adnot considère qu'une des principales faiblesses de SYMPA est de ne pas avoir de valeur législative.
La répartition des moyens entre universités est de fait le résultat de négociations permanentes entre le MESR et les universités. Or, le rapport de forces entre le premier et les secondes n'est pas forcément favorable au premier.
Par ailleurs, l'expérience acquise depuis 2009 laisse craindre que les gouvernements successifs aient tendance, en période de croissance forte des crédits, à « saupoudrer » des moyens supplémentaires sur l'ensemble des universités (comme en 2009 et en 2010) et, en période de stagnation, voire de diminution, des crédits, à ne réaliser aucun redéploiement, pour ne mécontenter personne et ne pas déstabiliser les universités les mieux dotées (comme de 2011 à 2012). Certes, sur les 1 000 emplois créés en 2013 dans l'enseignement supérieur, 980 ont concerné les universités, dont 810 dans le champ de SYMPA. Cependant, comme on l'a indiqué, la réduction du « besoin » de redéploiements a été nettement inférieure, un emploi créé dans les universités sous-dotées ne réduisant le besoin de redéploiements que de 0,5 emploi 103 ( * ) .
La correction des inégalités est en effet un enjeu de long terme. Dans un scénario « maximaliste » où l'on souhaiterait redéployer la totalité des 5 000 emplois indiqués par SYMPA, les départs à la retraite ne permettraient d'en redéployer qu'environ 500 par an, de sorte que les redéploiements prendraient dix ans. Or, les gouvernements successifs tendent, par nature, à avoir un horizon plus rapproché. De ce point de vue, le rapporteur Philippe Adnot juge nécessaire de fixer clairement dans la loi le principe d'une correction annuelle minimale.
En outre, une stabilisation des modalités de répartition du financement des universités par le MESR présenterait l'intérêt de donner à ces dernières une visibilité à moyen terme sur leurs ressources, et donc de donner au volet « performance » de SYMPA un rôle plus incitatif.
Enfin, un texte législatif définirait de manière relativement précise les principes de SYMPA, dont le mécanisme ne devrait donc plus être « reconstitué » plus ou moins difficilement à partir de sources diverses et souvent contradictoires.
Dans ces conditions, le rapporteur Philippe Adnot estime qu'il serait utile d'inscrire dans la loi les principes de SYMPA, comme dans le cas de la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) attribuée par l'État aux collectivités territoriales. Le principe d'un effort de rééquilibrage annuel minimal y serait inscrit.
A titre d'illustration, l'encadré ci-après indique une rédaction possible de disposition « élevant » SYMPA au niveau législatif 104 ( * ) , et y intégrant la masse salariale (selon des modalités pour lesquelles il est renvoyé à un décret). Ce texte est certainement perfectible (en particulier en ce qui concerne les modalités d'intégration de la masse salariale à SYMPA). Il a pour objet de susciter un débat.
Il retient le scénario B2 indiqué ci-avant : aucune université ne doit être en dessous de 90 % des moyens globaux prévus par SYMPA, ce qui implique de redéployer environ 50 millions d'euros au profit de 13 universités. Il est donc loin de constituer un scénario « maximaliste ».
Les principaux éléments de la rédaction proposée sont explicités ci-après.
Proposition, par le rapporteur Philippe Adnot, de
rédaction
Dans le code de l'éducation, après l'article L. 854-1, est inséré un chapitre V ainsi rédigé : Chapitre V : subvention pour charges de service public attribuée aux universités Article L. 855-1. - I. - A. - L'ensemble des financements courants perçus par les universités en provenance d'un programme de la mission « Recherche et enseignement supérieur » dont le responsable est le ministre chargé de la recherche, à l'exception de ceux provenant de l'agence mentionnée à l'article L. 329-1 du code de la recherche, constituent la dotation nationale pour charges de service public des universités. La dotation nationale pour charges de service public réunit les crédits de paiement concernés prévus par les programmes précités et tendant à attribuer aux universités : 1° des subventions qui ne sont pas libres d'emploi ; 2° la dotation nationale à la performance et à l'activité, constituée : a) de crédits hors masse salariale des emplois de titulaires ; b) des crédits de masse salariale calculés sur la base des plafonds d'emplois de titulaires. 3° les crédits hors masse salariale autres que ceux visés aux 1° et 2° ; 4° les crédits de masse salariale autres que ceux visés aux 1° et 2°. Le total des crédits autres que ceux visés au 2° ne peut excéder [20] % 105 ( * ) des crédits de paiement de la dotation nationale pour charges de service public. B. - Le total des plafonds d'emplois de titulaires attribués conformément au II ne peut être inférieur à 90 % de ceux attribués aux universités. II. - La part de la dotation nationale pour charges de service public perçue par chaque université constitue sa subvention pour charges de service public. Les A, B et C déterminent une dotation théorique. Les crédits attribués au titre des A et C le sont en tant que crédits de masse salariale. Ceux attribués au titre du B peuvent l'être en tant que crédits de masse salariale ou de fonctionnement. A. - 1. - La dotation à la performance et à l'activité perçue par chaque université comprend une première part, déterminée en fonction des plafonds d'emplois de titulaires visé au B du I, selon des modalités fixées par décret. Au niveau de l'ensemble des universités, la dotation par emploi de titulaire attribuée au titre de la dotation à la performance et à l'activité ne peut être inférieure au coût moyen d'un emploi de titulaire constaté la dernière année pour laquelle cette donnée est connue. 2. - Les plafonds d'emplois de titulaires sont répartis en six composantes : a) les plafonds d'emplois relatifs à l'enseignement et attribués en fonction de l'activité, au niveau licence ; b) les plafonds d'emplois relatifs à l'enseignement et attribués en fonction de l'activité, au niveau master ; c) les plafonds d'emplois relatifs à l'enseignement et attribués en fonction de la performance, au niveau licence ; d) les plafonds d'emplois relatifs à l'enseignement et attribués en fonction de la performance, au niveau master ; e) les plafonds d'emplois relatifs à la recherche et attribués en fonction de l'activité ; f) les plafonds d'emplois relatifs à la recherche et attribués en fonction de la performance. Le nombre d'emplois de chacune de ces composantes est fixé par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur. Les plafonds d'emplois sont attribués à chaque université de manière globale. Le nombre d'emplois attribué à chaque université au titre de chacune de ces composantes est égal au produit du nombre d'emplois de la composante par la part de l'université dans l'activité ou la performance nationale. Cette part est calculée en fonction d'indicateurs et selon des modalités fixées par décret. B. - La dotation à la performance et à l'activité perçue par chaque université comprend une seconde part, correspondant au solde après prise en compte de la première part, et de la compensation prévue au C. La seconde part est constituée de cinq sous-composantes : 1° les crédits de paiement finançant l'enseignement et attribués en fonction de l'activité, au niveau licence ; 2° les crédits de paiement finançant l'enseignement et attribués en fonction de l'activité, au niveau master ; 3° les crédits de paiement finançant l'enseignement et attribués en fonction de la performance, au niveau licence ; 4° les crédits de paiement finançant l'enseignement et attribués en fonction de la performance, au niveau master ; 5° les crédits de paiement finançant la recherche et attribués en fonction de la performance. Le montant de chacune des sous-composantes est fixé par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur. La dotation à la performance et à l'activité perçue par chaque université au titre des 1° à 5° est égale au produit de la sous-composante par la part de l'université dans l'activité ou la performance nationale. Cette part est calculée en fonction d'indicateurs et selon des modalités fixées par décret. C. Une compensation pour sous-dotation d'emplois de titulaires est attribuée aux universités dont le plafond d'emplois est inférieur à celui résultant du 2 du A du présent II. Cette compensation est égale : 1° pour les premiers 10 % d'emplois de titulaires manquants, au produit du nombre d'emplois de titulaires manquants et de [50 %] du coût moyen d'un emploi de titulaire constaté la dernière année pour laquelle cette donnée est connue ; 2° pour les autres emplois de titulaires manquants, au produit du nombre d'emplois de titulaires manquants et du coût moyen d'un emploi de titulaire constaté la dernière année pour laquelle cette donnée est connue. D. - 1. - Dans le cas des universités dont, une année donnée, la dotation à la performance et à l'activité a été inférieure à 90 % de la dotation théorique, les crédits de paiement atteignent l'année suivante 100 % de leur niveau théorique, dans le respect d'un plafond d'augmentation de 25 %. Un arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur peut fixer un taux égal au plus à 25 %, s'appliquant aux universités dont les crédits se situent entre 90 % de leur dotation théorique et un seuil qu'il détermine. 2. - Pour chaque université, ni la dotation à la performance et à l'activité, ni le plafond d'emplois visé au 1 du A du présent II, ne peuvent connaître, d'une année sur l'autre, une évolution inférieure à un taux fixé, pour chaque année, par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur. Ce taux est fixé de manière à ne pas empêcher l'augmentation prévue par le 1 du présent D. 3. - La dotation nationale à la performance et à l'activité, diminuée des prélèvements résultant des 1 et 2, est répartie entre les universités dont la dotation à la performance et à l'activité perçue l'année précédente est inférieure à son montant théorique. Cette répartition se fait au prorata de l'écart constaté pour chaque université. 4. - Pour chaque université, la dotation à la performance et à l'activité et le plafond d'emplois visé au 2 du A ne peuvent augmenter de plus de 25 % d'une année sur l'autre. III. - Au plus tard lors du dépôt du projet de loi de finances de l'année, le Gouvernement publie un rapport indiquant, au moins pour les cinq dernières années révolues, l'année en cours et l'année suivante : A. - Le montant de chacune des composantes de la dotation nationale visées aux 1° à 4° du I. B. - Dans le cas de la dotation nationale à la performance et à l'activité : 1° le nombre d'emplois de chacune des composantes visées au 2 du A du II et le montant de chacune des sous-composantes visées au B du II ; 2° les indicateurs et les modalités retenus pour répartir les moyens correspondant à chacune de ces composantes et sous-composantes entre universités ; 3° la valeur de chacun de ces indicateurs, au niveau de l'ensemble des universités. C. - Le plafond d'emplois attribué aux universités indépendamment du II. D. - Pour chaque université : 1° le plafond d'emplois attribué indépendamment du II ; 2° les crédits de paiement attribués au titre du 1° du I ; 3° les crédits de paiement attribués au titre du 3° du I ; 4° les crédits de paiement attribués au titre du 4° du I. 5° dans le cas de la dotation à la performance et à l'activité : a) la dotation théorique en emplois et en crédits ; b) la dotation en emplois et en crédits effectivement attribuée. IV. - La notification à chaque université, par l'État, de sa subvention pour charges de service public, fait clairement apparaître : 1° les montants de chaque composante visée aux 1° à 4° du I ; 2° les crédits attribués au titre de la dotation à la performance et à l'activité, en distinguant ceux attribués au titre de l'activité et ceux attribués au titre de la performance. V. - Les décrets et arrêtés prévus par le présent article sont pris après consultation du conseil prévu par l'article L. 232-1 106 ( * ) . VI. Le dernier alinéa de l'article L. 719-4 du code de l'éducation est supprimé 107 ( * ) . VII. Les I à V entrent en vigueur à compter du 1 er janvier 2014. |
* 103 Un emploi transféré des universités sur-dotées vers les universités sous-dotées réduit l'écart entre les deux groupes d'universités de deux emplois.
* 104 Cette mesure ne pourrait figurer en loi de finances. En particulier, elle n'a pas d'impact sur le niveau des dépenses de l'État (dont elle se contente d'indiquer la répartition).
* 105 Ce taux doit permettre une revalorisation du contrat pluriannuel, qui ne correspond actuellement qu'à 0,6 % des crédits totaux.
* 106 Il s'agit du CNESER.
* 107 Il s'agit d'une disposition de coordination avec l'instauration de la MIRES en 2005. En effet, le dernier alinéa de l'article L. 719-4 du code de l'éducation (que le projet de loi relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche, actuellement en cours de discussion, ne prévoit pas de modifier) prévoit que « les crédits de fonctionnement qui ne sont pas inclus dans le budget civil de recherche sont attribués sous forme d'une dotation globale ». Le « budget civil de la recherche » est l'ex- budget civil de recherche et de développement (BCRD), fusionné en 2005 avec le budget coordonné de l'enseignement supérieur (BCES) pour constituer la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Le BCRD ayant donc disparu, cette disposition n'a plus de signification, et doit donc être supprimée.