IV. DÉMOCRATIE LOCALE ET TRANSPARENCE DE LA GESTION LOCALE

La décentralisation est intrinsèquement liée à l'idéal démocratique en ce que, à l'inverse de la déconcentration qui est une simple modalité d'organisation administrative, elle implique la gestion des affaires locales par des conseils élus. Déconcentration et démocratie locale vont ainsi de pair, toutes deux appellent un effort permanent de dépassement de l'acquis, des arbitrages parfois complexes entre principes antagonistes, une tension vers la transparence.

A. LA DÉMOCRATIE LOCALE

1. Démocratie locale et démocratie participative

Dans le rapport « Trente ans de décentralisation : contribution à un bilan » adopté par votre délégation en juin 2011, votre rapporteur relevait la nécessité de faire vivre pleinement les politiques d'information, de consultation, de participation et d'orientation pour redonner du dynamisme à la société civique. Il estimait satisfaisants les textes existants dans ces domaines, concluant sur ce point : « il faut simplement les mettre en oeuvre. Dans mon rapport, je fais état d'analyses quantitatives et des différentes propositions qui ont été faites. Et je ne vois pas pourquoi il a fallu attendre une loi pour mettre en place des comités consultatifs dans les villes de plus de 80 000 habitants. »

Votre délégation ne peut que réaffirmer ce constat ainsi que la nécessité de tirer pleinement parti des outils existants dans le respect des principes de la démocratie représentative.

Faut-il aller plus loin ? À l'occasion des états généraux de la démocratie territoriale d'octobre 2012, Pierre-Yves Collombat, rapporteur de l'atelier 3 « approfondir la démocratie territoriale » a présenté de la façon la plus lapidaire le bilan en demi-teinte de la situation : « Élus locaux satisfaits d'être au service de leurs concitoyens - stop - Ulcérés des campagnes de dénigrement dont ils sont la cible - stop - Statut de l'élu absolument nécessaire - stop - Prévoir impérativement financement - stop - Reposer impérativement la question de la responsabilité administrative et pénale des élus locaux - stop. Développement de la démocratie participative souhaitable et en cours - stop - Mais ne pas oublier - stop - Que les élus sont élus, et sur un siège éjectable - stop - Que la vitalité de la démocratie, c'est d'abord celle des assemblées locales, ce qui pose la question d'une reconnaissance des minorités et de leur rôle - stop - Que beaucoup de nos concitoyens se tiennent à l'écart, même des formes institutionnelles de la démocratie participative, en inventer d'autres - stop définitif ! » .

Certains de ces chantiers ont été lancés.

2. Démocratie locale et statut de l'élu

Votre délégation s'est récemment saisie à plusieurs reprises de la problématique de la démocratie locale à travers le dossier du statut des élus : l'ouverture à tous de la possibilité d'accéder au mandat est un corolaire de la démocratie, ce qui implique l'existence d'un dispositif ad hoc . En témoignent plusieurs rapports faits au nom de votre délégation, notamment le rapport de Philippe Dallier et Jean-Claude Peyronnet « Faciliter l'exercice des mandats locaux : réflexions autour du statut de l'élu » , adopté en janvier 2012, ainsi que le rapport d'Antoine Lefèvre « La formation des responsables locaux : un enjeu pour nos territoires » , d'octobre 2012. Une proposition de loi visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat, cosignée par la présidente de votre délégation et par Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois a, par ailleurs, été adoptée par le Sénat à l'unanimité le 29 janvier dernier. Elle prévoit notamment :

- la fixation au taux maximal de l'indemnité allouée au maire dans les communes de moins de 3 500 habitants ;

- l'exclusion de la fraction représentative des frais d'emploi des indemnités de fonction perçues par les élus locaux des revenus pris en compte pour le versement d'une prestation sociale sous conditions de ressources ;

- l'abaissement de 20 000 à 10 000 habitants le seuil démographique des communes et communautés de communes dans lesquelles les adjoints au maire et les vice-présidents d'intercommunalité bénéficient du droit à suspension du contrat de travail ;

- le doublement de la durée de perception de l'allocation différentielle de fin de mandat ;

- l'institution d'un dispositif de validation de l'expérience acquise au titre d'une fonction élective locale pour la délivrance d'un titre universitaire ;

- l'instauration d'un plancher pour les dépenses de formation des élus votées par la collectivité à 3 % de l'enveloppe des indemnités de fonction.

La présidente de votre délégation en a ainsi présenté l'économie : « Le texte que nous examinons aujourd'hui constitue une synthèse des différents éléments mis en avant dans ces rapports et dans cette proposition de loi. Nous ne faisons rien de révolutionnaire, nous apportons seulement une pierre à l'édifice du statut de l'élu. Certains pensent que nous n'allons pas assez loin. J'aurais tendance à leur répondre : chi va piano va sano ... Ces critiques contiennent une question sous-jacente : la fonction d'élu est-elle un métier ? C'est là qu'est le noeud du problème. Il est clair que la proposition de loi n'opère pas de révolution dans la tradition française du bénévolat des élus locaux. Le principe du bénévolat est même inscrit dans le code général des collectivités territoriales. Plusieurs de nos collègues avaient d'ailleurs présenté des amendements pour supprimer la gratuité des fonctions d'élu local, dans la mesure où celles-ci peuvent être exercées dans de grandes collectivités territoriales. Je comprends bien cette demande. Le statut des élus locaux est pris en tenaille entre le principe du bénévolat et la nécessité où se trouvent certains élus d'être disponibles à plein temps pour exercer leur fonction. Cela étant, dans la structuration actuelle de notre pays, qui compte 36 000 communes, je ne vois pas comment on pourrait professionnaliser la fonction d'élu. En effet, 36 000 communes, cela signifie des centaines de milliers de conseillers municipaux travaillant bénévolement dans des communes de toutes tailles. C'est la raison pour laquelle, dans notre proposition de loi, nous avons écarté l'idée d'une carrière professionnelle de l'élu et conservé le principe du bénévolat. Je rappelle toutefois que ce principe n'exclut pas les indemnités de fonction, qui permettent de dédommager les élus. »

3. La désignation des délégués communautaires

Dans le rapport « Trente ans de décentralisation : contribution à un bilan » adopté par votre délégation en juin 2011, votre rapporteur notait : « Dans une partie de l'opinion, des critiques ont été exprimées sur le mode d'élection des conseillers délégués. Ils ne seraient « pas élus au suffrage universel ». Ils le sont, mais au suffrage universel indirect. La solution aujourd'hui retenue - élection par fléchage - constitue une bonne solution : rien ne serait plus néfaste à la coopération intercommunale que de voir siéger en son conseil une représentation communale adverse de la majorité du conseil municipal. La procédure retenue reste une voie moyenne et il n'est pas interdit d'imaginer un régime différent, plus intégré là où la coopération est plus avancée, correspondant à un véritable bassin de vie aux frontières internes moins affirmées. Mais, d'une manière générale, nous devons rechercher à faire correspondre légitimité et authenticité, légitimité politique et authenticité des compétences, des utilités, des moyens. »

Le principe du fléchage est retenu dans le cadre de la discussion, en cours, du projet de loi relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des délégués communautaires, et modifiant le calendrier électoral.

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