2. Une étape attendue et préparée par tous les acteurs politiques européens
Il est bien évident qu'un programme-cadre pluriannuel se prépare plusieurs mois, voire plusieurs années à l'avance. D'autant plus quand il infléchit fortement la politique qu'il sert. Cependant, il est frappant de constater le consensus dans lequel la proposition de la Commission européenne Horizon 2020 a été accueillie . Le projet de programme a en effet recueilli un avis majoritairement favorable au Conseil européen et également au Parlement européen, par les différents rapporteurs (un par proposition, soit sept rapporteurs). Beaucoup d'acteurs de la recherche, les représentants des organismes de recherche, des universités, mais aussi de l'industrie ont salué le nouveau programme. Bien entendu, il y aura des négociations, des points sont à améliorer et des compromis devront être trouvés. Néanmoins, l'unité dans laquelle a été accueilli le programme est un point non négligeable et mérite d'être signalée.
Or, ce consensus affiché trouve certainement son origine dans la co-préparation du programme par les différents acteurs institutionnels.
En premier lieu, le Conseil européen a lancé les grandes orientations de la stratégie Europe 2020 et fait du soutien à la recherche et à l'innovation une priorité . Une grande majorité de délégations au Conseil ont salué la qualité de la proposition de la Commission. Le 31 mai 2012, une orientation générale partielle a été adoptée sur les grands principes d' Horizon 2020 . Et cette entente semble pour l'instant se traduire également sur la part du budget qui y est consacrée dans les perspectives financières 2014-2020. Même les pays les moins favorables à la dépense publique européenne , comme le Royaume-Uni ou la Suède, soutiennent une enveloppe financière conséquente pour la recherche . Les oppositions que l'on trouve entre tenants de la Politique agricole commune et « amis de la cohésion » ne se retrouvent pas dans les débats sur la politique de recherche et d'innovation (même si les pays les moins avancés souhaiteraient introduire plus de cohésion dans cette politique). Espérons que lorsque les négociations budgétaires se durciront, tous s'en souviendront !
En second lieu, le travail du Parlement européen doit être souligné . Le député français Jean-Pierre Audy a, dans son rapport sur l'évaluation intermédiaire du 7 e PCRDT, dénoncé l'insuffisante coordination entre l'Union européenne, les États et les régions en matière de politique de recherche. Il a également été un des premiers à souligner le potentiel que recélait le lien entre la recherche, l'innovation et la commercialisation. La députée portugaise, Maria Graça Carvhalo a été à l'initiative d'une demande de simplification des programmes et à l'origine d'une résolution demandant un budget de 100 Md€ pour la recherche pour la période 2014-2020. Enfin, les différents rapporteurs du programme Horizon 2020 , qui représentent plusieurs sensibilités politiques au Parlement européen, se montrent aujourd'hui constructifs dans leurs premiers rapports d'initiative et ont souligné le travail fait en bonne intelligence avec la Commission européenne .
Car la Commission joue en ce domaine un rôle pilote prépondérant. L'adoption de son initiative phare « Une Union de l'innovation » le 6 octobre 2010 a marqué le début du processus de préparation d' Horizon 2020 .
Le Président Barroso est très attentif à l'Institut européen de technologie qu'il a contribué à mettre en place et soutient fortement son évolution comme pilier de la future politique de recherche et d'innovation. Il semblerait également qu'un consensus au sein de la Commission existe pour apporter un soutien massif aux politiques de recherche et d'innovation .
Les 10 propositions de la communication « Une Union pour l'innovation » 1. A une époque placée sous le signe des contraintes budgétaires, l'UE et les États membres doivent continuer d'investir dans l'éducation, la recherche et le développement (R&D), l'innovation et les technologies de l'information et des communications (TIC). Ces investissements devraient, dans la mesure du possible, non seulement échapper aux compressions budgétaires, mais être intensifiés ; 2. parallèlement, des réformes devraient être engagées pour optimiser les montants investis et résoudre le problème de la fragmentation. Il convient de mieux associer les systèmes de recherche et d'innovation européens et nationaux et d'améliorer leurs résultats ; 3. nos systèmes éducatifs doivent être modernisés à tous les niveaux. L'excellence doit plus que jamais être le mot d'ordre. Il convient d'augmenter le nombre d'universités de niveau international, d'améliorer le niveau de compétence et d'attirer les individus les plus talentueux des pays tiers ; 4. les chercheurs et les innovateurs doivent être en mesure de travailler et de coopérer sur l'ensemble du territoire de l'UE aussi aisément qu'à l'intérieur des frontières nationales. L'Espace européen de la recherche, qui doit être achevé d'ici quatre ans, mettra en place les structures nécessaires pour une véritable libre circulation de la connaissance ; 5. il y a lieu de simplifier l'accès aux programmes de l'UE et de renforcer leur effet de levier sur les investissements du secteur privé, avec le soutien de la Banque européenne d'investissement. Le rôle du Conseil européen de la recherche doit être accru. La contribution du programme-cadre doit être renforcée afin d'encourager le développement des petites et moyennes entreprises à forte croissance. Le Fonds européen de développement régional devrait être pleinement exploité afin de développer les capacités de recherche et d'innovation dans toute l'Europe, en se fondant sur des stratégies de spécialisation régionale intelligente ; 6. notre recherche doit nous permettre d'innover davantage. Il convient de renforcer la coopération entre le monde scientifique et les entreprises, d'éliminer les obstacles et de prévoir des mesures d'encouragement ; 7. les obstacles auxquels se heurtent encore les entrepreneurs désireux d'exploiter leurs « idées sur le marché » doivent être éliminés : l'accès au financement doit être amélioré, notamment pour les PME, les coûts des droits de propriété intellectuelle doivent être abordables, les règles et les objectifs doivent être plus intelligents et plus ambitieux, la mise en place de normes d'interopérabilité doit être accélérée et les budgets importants alloués aux marchés publics doivent être utilisés de manière stratégique. Dans l'immédiat, il conviendrait de dégager un accord sur le brevet européen avant la fin de l'année ; 8. il conviendrait de lancer des partenariats d'innovation européens afin d'accélérer la recherche, le développement et le déploiement des innovations sur le marché, le but étant de relever les principaux défis auxquels est confrontée la société, de mettre en commun les compétences et les ressources, et de stimuler la compétitivité des entreprises européennes, notamment dans le domaine du vieillissement en bonne santé ; 9. il convient de mieux exploiter nos atouts dans les domaines du design et de la créativité. Nous devons militer en faveur de l'innovation sociale. Nous devons favoriser une meilleure compréhension de l'innovation dans le secteur public, recenser les initiatives fructueuses et les faire connaître et définir des critères pour l'évaluation des progrès accomplis ; 10. nous devons mieux collaborer avec nos partenaires internationaux. Pour ce faire, nous devons leur donner accès à nos programmes de R&D tout en garantissant des conditions comparables à l'étranger, et l'UE doit également adopter un front commun pour protéger, le cas échéant, ses intérêts. |
Cependant, si le programme Horizon 2020 bénéficie d'un fort soutien politique, il convient de rester prudent . Les négociations sur le cadre financier pluriannuel, qui déterminera le budget de l'Union européenne pour la période 2014-2020 n'ont pas véritablement commencé. Il se pourrait que d'autres impératifs s'imposent à un programme pour la recherche et l'innovation ambitieux, moderne et séduisant. Sa force résidera dans sa capacité à montrer sa pertinence et à faire travailler ensemble les acteurs de la recherche et de l'innovation.