C. LES PERSPECTIVES OUVERTES PAR UN RENFORCEMENT DES LIENS ENTRE LE CONSEIL DE L'EUROPE ET L'UNION EUROPÉENNE
Créés peu ou prou à la même époque 30 ( * ) , le Conseil de l'Europe et l'Union européenne ont longtemps fonctionné de façon parallèle, selon des logiques différentes - l'Union européenne évoluant vers une intégration de plus en plus forte entre ses membres, dans des domaines de compétences sans cesse élargis, tandis que le Conseil de l'Europe demeurait une organisation intergouvernementale, axée sur la promotion et le respect des droits de l'homme dans une Europe élargie. Le périmètre de ces deux institutions est également différent : si tous les États de l'Union européenne sont membres du Conseil de l'Europe, ce dernier compte vingt États membres de plus, parmi lesquels figurent la Fédération de Russie, l'Ukraine, les États du Caucase et la Turquie.
En dépit de ces différences, des rapprochements se sont dessinés au cours des années récentes entre ces deux institutions. Vos rapporteurs ne peuvent que se féliciter à cet égard de l'implication plus forte de l'Union européenne dans le fonctionnement du mécanisme européen de défense des droits de l'homme en Europe, l'engagement de l'Union européenne dans de nombreux programmes mis en oeuvre par le Conseil de l'Europe leur paraissant de nature à renforcer l'efficacité globale de ce système, notamment dans les pays voisins de l'Union européenne.
1. La question de l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme
Le traité de Lisbonne, entré en vigueur le 1 er décembre 2009, a prévu dans son article 6§2 que « l'Union européenne adhère à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ». Cette stipulation est complétée par un protocole encadrant cette adhésion ainsi que par une déclaration qui rappelle la nécessité de préserver les spécificités de l'ordre juridique communautaire et appelle à un renforcement des relations entre la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) et la Cour européenne des droits de l'homme.
Du côté du Conseil de l'Europe, l'article 17 du Protocole n°14, entré en vigueur le 1 er juin 2010, prévoit la possibilité pour l'Union européenne d'adhérer à la Convention européenne des droits de l'homme.
A ce jour, cette adhésion n'a pas été formalisée, en raison des difficultés pratiques nombreuses qu'elle soulève (question de la préservation du monopole d'interprétation du droit communautaire par la CJUE, modalités de participation de l'Union européenne aux organes du Conseil de l'Europe, mise en place d'un mécanisme de codéfendeur, notamment), qui continuent de faire l'objet de négociations.
Il ne faut sans doute pas exagérer la portée d'une telle adhésion.
Depuis les années 1990, la CJUE fait régulièrement référence aux stipulations de la Convention européenne des droits de l'homme et à la jurisprudence de la Cour pour fonder son interprétation du droit communautaire lorsque se pose une question relative au respect des droits fondamentaux. De son côté, la Cour européenne des droits de l'homme est fréquemment invitée à se prononcer sur le droit de l'Union européenne tel qu'il est mis en oeuvre par les États membres. Dans l'arrêt Bosphorus du 30 juin 2005, elle a posé le principe de l'existence d'une présomption de protection, par l'ordre juridique communautaire, des droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme.
Toutefois, l'adhésion permettra à l'Union européenne d'être entendue dans les affaires examinées par la Cour européenne des droits de l'homme.
Elle offrira également une nouvelle possibilité de recours aux particuliers, qui pourront désormais - après avoir épuisé toutes les voies de recours nationales - saisir la Cour européenne des droits de l'homme d'une plainte pour violation supposée des droits fondamentaux par l'Union européenne (et non seulement par les États membres) - alors qu'aujourd'hui l'accès des particuliers à la Cour de justice de l'Union européenne est extrêmement restreint (article 263 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne).
* 30 Le Conseil de l'Europe est né du traité de Londres du 5 mai 1949, tandis que l'ancêtre de l'Union européenne, la Communauté européenne du charbon et de l'acier, a été créée par le traité de Paris du 18 avril 1951.