C. RÉVISER LES PROCÉDURES D'AFFECTATION ET DE DÉROGATION

1. Redécouper et élargir les secteurs dans la concertation territoriale

Les déplacements de la mission ont convaincu ses membres qu'il ne fallait pas penser la réforme de la carte scolaire de la même façon en région parisienne, qui connaît des phénomènes de ségrégation urbaine très spécifiques, dans les grandes métropoles régionales, dans les agglomérations moyennes et en territoire rural. C'est pourquoi la contribution des collectivités territoriales est indispensable, des conseils généraux notamment puisque c'est à l'entrée en 6 e que se situe le noeud gordien de la sectorisation. L'application territoriale des politiques éducatives nécessite des échanges constants entre les collectivités et les services déconcentrés afin de progresser dans la rationalisation des implantations d'établissements, la définition des secteurs et l'élaboration de la carte des formations. La coordination entre les conseils généraux et les DASEN doit être renforcée tout particulièrement et l'on peut regretter à cet égard la récente concentration entre les mains du recteur des anciennes prérogatives des inspecteurs d'académie.

Pour réduire les inégalités entre territoires et entre établissements au sein d'un même département, votre rapporteure recommande un redécoupage des périmètres des secteurs de recrutement des collèges, après un examen fin de leur profil social et une analyse prospective des mutations démographiques et économiques attendues sur le territoire. Il faut viser autant que faire se peut un rapprochement de la composition sociologique de chaque secteur. L'échelon départemental est le plus pertinent et les conseils généraux doivent rester à la manoeuvre. Votre rapporteure tient d'ailleurs à saluer à nouveau l'esprit de responsabilité et d'innovation qui anime les conseils généraux, particulièrement ceux de Gironde, de Meurthe-et-Moselle et de l'Yonne, dont elle a pu mesurer les accomplissements lors de ses déplacements.

En outre, il pourrait être opportun dans certaines zones d'élargir les secteurs actuels et de laisser aux conseils généraux la possibilité de tailler des secteurs communs à plusieurs collèges. Le but est de permettre une différenciation fine de la carte scolaire selon les territoires, sous le contrôle des collectivités. C'est également un moyen de minimiser l'importance de la ségrégation urbaine dans la production des inégalités scolaires en s'appuyant sur le fait que des secteurs élargis ont toutes les chances d'être plus mixtes socialement que les secteurs actuels. Dans les nouveaux secteurs élargis, on pourra avoir un, deux ou plusieurs collèges, selon les zones et les décisions du conseil général. L'offre de formation devra alors être repensée au niveau du secteur élargi. Eventuellement, dans les agglomérations où se sont multipliés à l'excès les implantations de petits collèges, la sectorisation commune de plusieurs établissements pourraient préluder à leur fusion.

Un tel élargissement des secteurs pour englober plusieurs collèges n'aura pas de sens partout, y compris au sein d'un même département. C'est sans doute inutile en milieu rural ou impossible si les temps de trajets en voiture sont trop rallongés. Dans certaines zones urbaines, caractérisées par une grande densité de population et d'implantation d'établissements, l'élargissement des secteurs devra tenir compte des transports scolaires et urbains.

Dans les agglomérations moyennes où l'on compte deux ou trois collèges souvent en situation de concurrence larvée et proches géographiquement l'un de l'autre, votre rapporteure préconise l'adoption d' une sectorisation commune . Il conviendra alors de redéfinir dans ces nouveaux secteurs les modalités d'affectation des élèves, sous la responsabilité de l'éducation nationale conformément à l'alinéa 4 de l'article L. 213-1 du code de l'éducation. Les règles d'affectation au sein de collèges partageant le même secteur devront en tout état de cause favoriser fortement les boursiers et garantir le brassage des publics dans tous les établissements.

En région parisienne , il paraît important que les secteurs scolaires ne soient pas contraints systématiquement par les limites des communes ou de quartiers infra-municipaux. En outre, il faut tenir compte des effets de bord très importants qui aboutissent à des flux d'élèves entre départements et entre académies, au profit de Paris essentiellement. Votre rapporteure recommande un rapprochement des travaux des trois rectorats de Créteil, de Paris et de Versailles et l'accroissement des échanges de données entre eux afin de limiter les infractions à la réglementation. En outre, il pourrait être envisagé d'organiser une concertation entre les conseils généraux de la région , ainsi qu'avec le conseil de Paris , afin de définir des secteurs élargis qui puissent franchir les frontières des départements lorsque c'est pertinent.

L'élargissement et le partage entre plusieurs collèges des secteurs nécessitent de modifier marginalement le code de l'éducation. Il faut supprimer par décret la seconde phrase du deuxième alinéa de l'article D. 211-10 du code qui prévoit qu' « un secteur comporte un seul collège public, sauf exception due aux conditions géographiques ». Aucune disposition analogue ne contraint la délimitation des districts scolaires correspondant aux zones de desserte des lycées, dont il est juste précisé qu'ils regroupent plusieurs secteurs scolaires et garantissent une variété de formations suffisante pour assurer une orientation adéquate des élèves. Une modification législative ne paraît pas nécessaire dans la mesure où la formulation actuelle du deuxième alinéa de l'article L. 213-1, qui confie au conseil général l'arrêt pour chaque établissement de son secteur de recrutement, n'interdit pas que plusieurs collèges aient le même secteur de recrutement. Une précision pourrait être éventuellement apportée pour indiquer que le cas échéant, le secteur de recrutement peut être partagé par plusieurs collèges.

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