II.- L'APPLICATION DES DISPOSITIONS RELATIVES
AUX COMMUNES ET ZONES TOURISTIQUES

La question des communes touristiques avait tenu une grande place dans le débat parlementaire, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. La longueur des débats sur cette question résultait de l'inquiétude suscitée par l'extension des dérogations au repos dominical dans ces communes, inquiétude fondée en partie par la confusion entre la nature touristique au sens du code du travail (qui seule emporte des conséquences en matière de législation du travail) et la nature touristique au sens du code du tourisme (4 ( * )) .

A. LA LOI A ÉLARGI LES POSSIBILITÉS DE DÉROGER AU REPOS DOMINICAL DANS LES COMMUNES ET ZONES TOURISTIQUES

1. L'article L. 3132-25 du code du travail

Dans les « communes d'intérêt touristique ou thermales et les zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente », tous les établissements de vente au détail autres que les commerces alimentaires (5 ( * )) , peuvent désormais, de droit (sans avoir besoin d'une autorisation administrative visant l'établissement concerné), et toute l'année, donner le repos hebdomadaire par roulement, à tout ou partie du personnel.

Les deux restrictions préexistantes, liées pour l'une à la référence aux seuls établissements mettant à disposition du public des biens et des services « destinés à faciliter son accueil ou ses activités de détente ou de loisirs d'ordre sportif, récréatif ou culturel » , pour l'autre à l'applicabilité de ce régime « pendant la ou les périodes d'activités touristiques » , sont donc supprimées. Dès lors, la nécessité d'une autorisation administrative par établissement, au cas par cas, l'est également.

Il revient au préfet d'établir la liste des communes et le périmètre des zones concernées, sur proposition du maire (et non plus, comme avant la loi, du conseil municipal), et ce, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel, dans l'ensemble des communes y compris à Paris.

En outre, la décision préfectorale de classement n'intervient qu'après avis du comité départemental du tourisme, des syndicats d'employeurs et de salariés intéressés, ainsi que des communautés de communes, des communautés d'agglomération et des communautés urbaines, lorsqu'elles existent.

2. La décision du Conseil constitutionnel

Dans sa décision du 6 août 2009, le Conseil constitutionnel a rappelé que l'extension de la dérogation à tous les commerces situés dans ces communes et zones a pour but de mettre fin aux difficultés d'application du critère définissant les établissements concernés qui prévalait jusque là ; l'extension de cette dérogation à l'ensemble de l'année vise à prendre en compte l'évolution des modes de vie et de loisirs ; enfin, la transformation de cette dérogation en une dérogation de droit ne fait que tirer les conséquences de cette double modification. Pour l'ensemble de ces raisons, le Conseil a déclaré ce dispositif conforme aux exigences constitutionnelles résultant des 10 ème et 11 ème alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 (considérant 8 de la décision) , garantissant respectivement le développement de l'individu et de la famille et le droit au repos.

La loi n'impose pas de contreparties particulières pour les salariés privés du repos dominical (contrairement à ce qui prévaut dans les périmètres d'usage de consommation exceptionnel - cf. infra ), mais elle prévoit que les organisations professionnelles ou l'employeur, d'une part, et les organisations syndicales représentatives, d'autre part, doivent engager des négociations en vue de la signature d'un accord relatif à ces contreparties, lorsque la branche ou l'entreprise n'est pas déjà couverte par un tel accord.

Dans la décision précitée, le Conseil constitutionnel a estimé que la différence de traitement entre les salariés, selon qu'ils travaillent dans le cadre de telles dérogations de droit, pour lesquelles, compte tenu de la nature de leur activité, ils ne bénéficient que de garanties conventionnelles, ou dans le cadre de dérogations individuelles et temporaires telles qu'elles prévalent notamment dans les périmètres d'usage de consommation exceptionnel, pour lesquelles, compte tenu de leur caractère exceptionnel, les salariés bénéficient de garanties légales, est en rapport direct avec l'objet de la loi et donc conforme à la Constitution (considérant 20) .

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel, s'il a reconnu que la ville de Paris, soumise à un régime particulier en raison de sa qualité de siège des pouvoirs publics, constitue à elle seule une catégorie de collectivités territoriales, a estimé qu'au regard de l'objet de l'article L. 3132-25 sur les communes et zones touristiques, aucune différence de situation ne justifie que le pouvoir de proposition, qui appartenait dans la législation antérieure au conseil de Paris, soit confiée au préfet et non au maire de Paris, comme dans l'ensemble des autres communes, y compris Lyon et Marseille. C'est pourquoi il revient au maire, y compris à Paris, de proposer le classement en commune ou en zone touristique (considérant 23 de la décision) (6 ( * )) .


* (4) C'est pour cette raison qu'à l'initiative de M. Patrick Ollier, alors président de la commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale, la terminologie a été changée dans le code du travail, passant de la notion de « commune touristique » à celle de « commune d'intérêt touristique ».

* (5) Cette précision résulte de la rédaction du nouvel article L. 3132-25-5 du code du travail.

* (6) Pour ce faire, le Conseil constitutionnel a agi de manière inhabituelle : tout en déclarant la disposition confiant, à Paris, le pouvoir de proposition au préfet contraire à la Constitution, il a choisi de la modifier formellement en corrigeant le renvoi au code du travail qui y figure afin de viser le maire, quelle que soit la commune concernée.

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