3. Une intensité concurrentielle variable mais une concentration inéluctable
Les données publiques et estimations sur les parts de marché (en termes de mises ou de PBJ) et le bilan établi par l'ARJEL font apparaître des niveaux variables d'intensité concurrentielle selon les secteurs. Elle est ainsi :
- forte pour le poker , avec une majorité d'opérateurs mono-activité et une assez grande atomicité puisque trois opérateurs détiennent une part de marché supérieure à 10 % (Betclic, Winamax et PokerStars) ;
- assez forte pour les paris sportifs , dont le marché est marqué par la « guerre des cotes » et la volatilité des TRJ, mais voit se constituer progressivement un oligopole dominé par quatre acteurs disposant d'une part de marché supérieure à 10 % (Betclic, Bwin, le PMU et la FdJ) ;
- et faible dans les paris hippiques , dont le marché est largement dominé par le PMU.
Ce paysage concurrentiel n'est pas figé et le caractère fortement déficitaire des activités en ligne ne peut qu'accélérer un mouvement de concentration qui avait été anticipé , au moins pour les paris sportifs. On peut ainsi mentionner, après le retrait du marché de TF1 64 ( * ) et Canal Plus début 2011, le rapprochement par fusion-absorption entre les opérateurs Bwin France 65 ( * ) et Sajoo (filiale du groupe Amaury), annoncé fin juillet 2011 66 ( * ) . Il est probable que l' « écrémage » du marché s'amplifiera en 2012, avec le rachat ou l'arrêt des petits opérateurs qui n'auront pas su se différencier par une stratégie de niche.
A l'instar d'activités telles que la téléphonie mobile, les sites de rencontres sur Internet ou les plates-formes d'échanges de titres financiers, le secteur des jeux en ligne est fondamentalement soumis à un « effet de réseau » : l'utilité individuelle des participants (en l'espèce, l'espérance de gain des joueurs ou parieurs) est une fonction croissante de leur nombre 67 ( * ) . La « liquidité » du site, c'est-à-dire le nombre de joueurs et le volume comme la rapidité des transactions, est ainsi au coeur du modèle économique des jeux en ligne, au demeurant assez proche de celui des marchés boursiers.
Le modèle économique des jeux en ligne est également tributaire de la structure de ses coûts . On considère généralement que ce secteur comporte des coûts fixes élevés et des coûts marginaux faibles, de sorte que le coût moyen peut baisser rapidement. De même, le coût d'acquisition d'un client tend à croître avec le temps , malgré la relative « infidélité » des joueurs : il est moins onéreux de conquérir un débutant par la publicité que de « débaucher » après coup un joueur qui a pris ses habitudes sur d'autres sites.
Ces caractéristiques confortent la recherche rapide de la notoriété maximale et de la taille critique, et partant, la concentration, ce qui contribue à faire des jeux en ligne un quasi « oligopole naturel » .
* 64 Qui a annoncé en janvier 2011 son intention de céder sa filiale Eurosportbet.
* 65 Bwin avait déjà fusionné avec Party Gaming durant l'été 2010.
* 66 Bwin France devrait devenir Bwin Party France d'ici à la fin de l'année 2011, et Sajoo a arrêté son programme d'affiliation le 1 er septembre.
* 67 Ainsi les parieurs hippiques ou sportifs ont un intérêt à ce que la masse commune (pour le pari mutuel) ou le nombre de parieurs sur un événement soit élevé. De même dans le poker, l'attractivité d'un site est liée à l'équilibre entre joueurs débutants et expérimentés et à la capacité à changer aisément de table le cas échéant, donc au nombre de joueurs.