2. Une coopération compliquée par la dichotomie entre représentant de l'État et président de la collectivité
M. Stéphane Artano, président du conseil territorial, a précisé qu'il convenait de veiller au respect du statut, l'État manifestant parfois la tentation d'empiéter sur les prérogatives du conseil territorial en matière de développement économique. A cet égard, il a souligné que l'État cherchait parfois à s'immiscer dans les relations de coopération décentralisée.
Il apparaît que la collectivité d'outre-mer n'a pas pu prendre toute sa place en matière de coopération régionale en raison de l'omniprésence de l'État. Or, celui-ci doit nécessairement accompagner la collectivité dans ses démarches, mais ne saurait se substituer à elle, car elle seule détient les compétences relatives au développement économique de l'archipel.
Les domaines dans lesquels la coopération entre Saint-Pierre-et-Miquelon et les provinces atlantiques du Canada rencontre le plus de succès sont ceux de la police et de la sécurité, de la santé et de l'éducation.
Les services de l'ambassade de France à Ottawa ont ainsi expliqué à vos rapporteurs que la coopération en matière pénale permettait de traiter près de 200 affaires par an, essentiellement des affaires de trafic de stupéfiants à bord des bateaux effectuant la liaison entre l'archipel et le Canada.
Les actions de coopération policière, douanière et en matière de sauvetage en mer paraissent reposer sur des fondements juridiques suffisants, sans accord intergouvernemental spécifique. Saint-Pierre-et-Miquelon n'a adressé que quatre demandes d'entraide judiciaire au Canada depuis 2004.
En matière civile, la coopération constituerait une solution intéressante pour assurer le placement des mineurs en danger non en métropole ce qui entraîne un éloignement et des coûts plus importants, mais au Nouveau-Brunswick ou à Terre-Neuve.
Le nombre d'enfants à placer ne dépasse pas une quinzaine et la justice ordonne trois à quatre nouvelles mesures de ce type chaque année à Saint-Pierre-et-Miquelon. En outre, aucune famille d'accueil n'était agréée à Saint-Pierre-et-Miquelon en juin 2010, mais une famille résidant dans l'archipel pourrait prochainement recevoir un agrément.
Cependant, les compétences en matière de protection de l'enfance relèvent au Canada des provinces. Aussi le Canada invite-t-il la France à conclure une entente avec les provinces concernées. Le dossier progresse donc lentement, les services du ministère des affaires étrangères ayant d'abord estimé que les dispositions de notre Constitution relatives aux traités obligeaient la France à signer un accord intergouvernemental avant d'envisager la conclusion d'ententes avec les provinces. La négociation d'accords entre Saint-Pierre-et-Miquelon et chacune de ces provinces semblait donc suspendue à cette condition, jusqu'à ce que récemment il apparaisse possible d'envisager la signature d'un accord entre la France et une province du Canada.
La coopération scientifique et universitaire revêt une importance particulière pour Saint-Pierre-et-Miquelon, qui ne dispose d'aucun établissement d'enseignement supérieur. Cette coopération fonctionne avec efficacité, les étudiants originaires de l'archipel pouvant étudier à l'université de Moncton dans les mêmes conditions que les étudiants du Nouveau-Brunswick. Ces étudiants peuvent également bénéficier d'une bourse du conseil territorial Par ailleurs, des travaux de recherche sont engagés par l'université de Mémorial (Terre-Neuve), notamment sur les premières implantations de pêcheurs morutiers français. Les universités de Metz et de Laval (Québec) ont en outre des projets de recherche sur la forêt boréale de Miquelon-Langlade.