ANNEXE 1 COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES À LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT
SYNTHESE
• Missions et positionnement de l'Agence : des partages de tâches à préciser
L'ADEME résulte de la fusion, effective en 1993, de trois établissements publics dont elle a repris les missions. Nonobstant son statut d'établissement public industriel et commercial (EPIC), l'Agence a une activité commerciale concurrentielle marginale.
La signature avec l'Etat d'un contrat de plan en 1995, puis du contrat suivant (2000-2006) a permis de préciser les missions de l'Agence et les objectifs que lui assigne l'Etat. Depuis le contrat d'objectifs 2007-2010, l'activité de l'ADEME est structurée par une matrice qui croise quatre « métiers » (connaître, convaincre et mobiliser, conseiller, aider à réaliser) et l'ensemble de ses domaines d'intervention (déchets et sols, énergie, air et bruit, actions transversales). Le décret n° 2009-603 du 28 mai 2009 qui a modifié l'article R. 131-2 du code de l'environnement a replacé les missions de l'Agence dans le cadre de la politique définie par le gouvernement « notamment de lutte contre le changement climatique et d'adaptation aux conséquences de ce changement ».
Mais l'ADEME est un établissement polymorphe. A certains égards, l'Agence apparaît comme une extension de l'administration centrale et du Commissariat général au développement durable. Par ailleurs, si elle exerce un leadership en matière de déchets, l'ADEME intervient conjointement avec d'autres entités publiques dans les autres domaines de sa compétence. Du fait du positionnement de l'Agence et du spectre large de ses missions, le partage des tâches dans certains secteurs n'apparaît pas toujours clairement, non plus qu'avec l'administration centrale.
• Des ressources en évolution, un rythme d'engagement soutenable
L'ADEME dont le financement a été modifié quatre fois entre 1998 et 2008 dispose de quatre types de ressources pour conduire ses actions : des subventions versées par le budget général, des taxes affectées, des recettes attribuées par des tiers (Union européenne dans le cadre du FEDER, Agence Nationale de la Recherche...) et, plus marginalement, des ressources propres. La part de l'Etat dans ce financement reste prépondérante et ses choix dans l'arbitrage entre taxes et subventions traduisent une grande volatilité. Ce n'est qu'à partir de 2007 que l'ADEME, après avoir connu une crise de crédits de paiement au début des années 2000, a retrouvé une situation budgétaire mieux équilibrée.
Le budget triennal 2011-2013, dont le schéma a été présenté au Parlement début juillet, prévoit une nouvelle programmation des interventions de l'ADEME dans le cadre du Grenelle, cohérente avec celle de ses financements budgétaires (subventions pour charges de service public et affectation de taxes) ; le rythme des engagements a été revu pour garantir la soutenabilité budgétaire de l'Agence.
• Des progrès à réaliser en matière de ressources humaines et d'immobilier
Au 31 décembre 2009, les effectifs présents (dont 46% sont affectés dans les directions régionales) s'élevaient à 1032 personnes (929 sur postes budgétaires, 28 mis à disposition et 75 CDD), soit une augmentation de 8,5% par rapport au 31 décembre 2008 et de 12% par rapport à fin 2007. Cette évolution s'inscrit dans l'augmentation du plafond des emplois permanents de l'établissement, qui s'établit à 878 ETPT en 2009 contre 833 auparavant ; il est saturé à plus de 98% pour l'année 2009 (863,5 ETPT permanents). Ceci manifeste une réelle tension sur les effectifs, comme l'illustre également le dépassement du plafond des emplois temporaires. Le recours à la sous-traitance et à l'intérim, bien que limité, s'accroît significativement. Un renforcement du plafond d'emploi est envisagé dans le cadre du budget triennal, dont les modalités de « gage » sur le schéma d'emploi du ministère sont en cours d'arbitrage. L'Agence fait partie des opérateurs sur lesquels le ministère a choisi de ne pas faire porter l'effort de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux.
L'ADEME doit améliorer la présentation des emplois afin que celle-ci reflète mieux la « force de travail », et anticiper les départs en retraite dans un contexte de contrainte forte sur les effectifs. La recherche de mobilité externe et la démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) méritent également d'être développées en raison de l'enjeu que constituent pour l'Agence le maintien de ses capacités d'expertise et le vieillissement relatif de ses effectifs.
Alors que l'établissement est sous tension, il est regrettable que l'ADEME ne soit pas dotée d'outils flexibles, individuels (primes) ou collectifs (de type intéressement), lui permettant d'associer ses personnels à l'atteinte des objectifs qui lui sont fixés. Pour rester en phase avec les démarches actuellement en cours dans l'ensemble du secteur public, l'Agence devrait examiner la possibilité de mettre en place en son sein des dispositifs de valorisation des performances individuelles et/ou collectives de ses agents. Cette évolution paraît d'autant plus facile et opportune à mettre en oeuvre que le statut d'EPIC dont elle est dotée permet à l'Agence d'échapper aux rigidités statutaires de la fonction publique.
Le siège de l'ADEME est dispersé entre Paris, Angers et Valbonne. Cette situation, liée à l'histoire de l'établissement, est un facteur de surcoûts, de lourdeur, voire de dysfonctionnements. Or le Schéma pluriannuel de stratégie immobilière que l'Agence a remis à sa tutelle et à France Domaine en juillet 2010 ne prévoit pas de réduire le nombre de « sites centraux ».
L'activité de l'ADEME est retracée et suivie en interne au moyen de 67 indicateurs. En tant qu'« opérateur de l'Etat », elle est par ailleurs décrite dans la fiche opérateur de l'établissement actuellement annexée au programme 181. L'Agence est disposée à faire évoluer le contenu de ce document, en lien avec le responsable du programme concerné. Le rapport annuel de performance fait l'objet d'une synthèse annuelle conformément à la convention de gestion MEEDDM-ADEME du 20 janvier 2009 ; cette synthèse pourrait utilement constituer la base d'une nouvelle rédaction de la fiche opérateur figurant au RAP et annexée au programme 181. Chaque unité de gestion produit annuellement un projet de service qui décrit son activité, mais sans lien chiffré avec le contrat d'objectifs. Les indicateurs ne servent pas non plus explicitement de référence dans l'évaluation de l'encadrement, ni a fortiori dans la rémunération. L'ensemble de la démarche de performance de l'Agence peut encore progresser.
• Des modes d'intervention à adapter à l'évolution des priorités de l'Agence
L'ADEME contribue à l'orientation et à l'animation de la recherche, mais n'en fait pas en propre. Elle s'insère dans un environnement institutionnel en forte évolution. La gouvernance de la recherche pourrait être revue, à l'occasion de l'installation du nouveau conseil scientifique, en conférant à ce dernier un rôle de conseil et d'expertise sur la cohérence de la politique suivie et en améliorant son information par la rédaction d'un rapport annuel sur les activités de recherche. Cela contribuerait également à s'assurer que le positionnement de l'Agence dans les domaines et les champs de la recherche qu'elle couvre est correctement articulé avec celui des autres financeurs.
S'agissant de l'aide à la réalisation, l'ADEME, outre quelques grands équipements (unités d'incinération d'ordures ménagères, réseaux de chaleur, etc.), finance en région une multitude de petits projets sur un grand nombre de thématiques. Confrontée à la nécessité d'optimiser ses ressources tout en poursuivant des objectifs ambitieux, l'Agence ne pourra pas durablement financer de petits projets qualifiés d'exemplaires si elle ne s'assure pas de leur impact local et de leur exemplarité à plus grande échelle. Il conviendrait de remettre de l'ordre dans la terminologie, de clarifier les concepts et d'améliorer l'exploitation de ce qui est financé par l'Agence à partir d'une typologie plus claire, en explicitant les suites possibles et en structurant les enseignements à en tirer.
L'ADEME a diversifié ses modes de soutien au début des années 2000, en cherchant à faciliter l'accès des entreprises, et en particulier des PME, au crédit bancaire ou aux fonds d'investissement, pour réussir l'intégration des politiques environnementales dans leurs décisions d'investissement. Les résultats de ces tentatives de diversification des modes d'intervention sont décevants. Dans le cadre du Grand emprunt, une partie des concours de l'Agence prendra la forme d'avances remboursables et de prises de participations. Elle devra tirer les enseignements de ses expériences passées parfois décevantes.
Un premier bilan de l'utilisation des fonds Grenelle fait apparaître que l'ADEME a su s'adapter, dans des délais rapides, à une montée en puissance des politiques publiques dont elle est le principal opérateur. Toutefois, en faisant de l'Agence l'opérateur de la transition environnementale, l'Etat lui assigne une mission extrêmement ambitieuse : être le vecteur du changement d'un modèle de société. Pour y faire face avec des ressources limitées, même si elles ont fortement crû, l'Agence doit reconsidérer ses modes d'intervention. L'exercice de hiérarchisation et de sélection rigoureuse auquel le Grenelle invite l'établissement et ses directions régionales reste en partie à faire.
• La gestion des investissements d'avenir : un cadre dérogatoire appelant une clarification de la responsabilité des divers acteurs
Les décisions relatives à l'emprunt national ont conduit à affecter à l'ADEME 2,85 Mds€ pour la gestion de quatre actions, faisant de l'Agence l'un des principaux opérateurs pour les investissements d'avenir. Face à ces enjeux, celle-ci va devoir mobiliser son expertise scientifique, technique et financière, ainsi que le savoir-faire qu'elle a acquis.
Une gouvernance ad hoc a été mise en place, destinée à assurer à l'Etat un droit de regard en dernier ressort sur le choix des investissements. Les modalités de gestion des programmes d'investissement d'avenir confiés à l'Agence, nonobstant toute disposition contraire de ses statuts, soulèvent un certain nombre d'interrogations sérieuses au regard des principes du droit budgétaire ou de difficultés pratiques, qu'il s'agisse des compétences de l'autorité délibérante de l'établissement ou encore des responsabilités respectives de l'ordonnateur principal, du responsable du programme et du président de l'établissement.
Les questions posées par le dispositif des investissements d'avenir intéressent, au-delà de l'ADEME, tous les opérateurs qui y sont associés en tant que gestionnaires. La Cour se propose de les réexaminer dans un cadre plus large.
Le présent rapport sur l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) répond à une demande d'enquête de la commission des finances du Sénat sur le fondement de l'article 58-2 de la LOLF. La procédure a été menée de façon contradictoire. Cette enquête a été menée conjointement à un contrôle de cet établissement par la Cour effectué en application de l'article L. 133-1 du code des juridictions financières et portant sur la période 2004-2008. Ce contrôle, en application de l'article 135-3 du même code, donnera lieu à un rapport particulier qui sera adressé aux commissions des finances du Parlement. Pendant la période sous revue, l'Agence a joué un rôle majeur dans la préparation, la conduite et le suivi des réflexions afférentes au Grenelle Environnement. Entre 2008 et 2009, le budget d'intervention de l'ADEME en autorisations d'engagement (hors fonds démonstrateur de recherche) est passé de 340 à 670 millions d'euros (M€) ; cette progression résulte principalement des « fonds Grenelle » confiés à l'Agence (319 M€ en autorisations d'engagement), mais également pour 20 M€ des crédits du Plan de relance. S'il porte, par définition, sur des exercices passés, le contrôle de la Cour s'est efforcé d'ouvrir la réflexion sur les perspectives de l'Agence devenue un opérateur de la « transition environnementale », ce qui constitue un défi pour son organisation et ses modes d'intervention. |
PARTIE I : MISSIONS ET RESSOURCES FINANCIERES
I. MISSIONS ET POSITIONNEMENT DE L'ADEME
A. MISSIONS ET MODES D'INTERVENTION
L'ADEME résulte de la fusion, effective en 1993, de trois établissements publics préexistants : l'Agence nationale pour la récupération et l'élimination des déchets (ANRED), dont le siège était à Angers, l'Agence pour la qualité de l'air et l'Agence française pour la maîtrise de l'énergie (AFME), elle-même issue de la fusion de l'Agence pour les économies d'énergie et du Commissariat à l'énergie solaire dont le siège était à Valbonne (Alpes-Maritimes).
L'ADEME a repris les missions exercées par ces établissements (art. 1er, loi n° 90-1130 du 19 décembre 1990 portant création de l'ADEME). Puis ces missions ont été progressivement confortées et élargies par le législateur. L'ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de l'environnement a abrogé les dispositions de la loi du 19 décembre 1990 et les a insérées, sans les modifier, dans le nouveau code, aux articles L. 131-3 à L. 131-7. A l'inverse, la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 portant loi de finances rectificative pour 2003 a transféré aux aéroports la gestion du dispositif d'indemnisation des riverains des aéroports.
La signature avec l'Etat d'un premier contrat de plan en 1995, puis du contrat de plan suivant (2000-2006) a représenté un effort pour préciser les missions de l'Agence et les objectifs que lui assigne l'Etat. Pour autant, les missions demeuraient relativement floues, et fluctuantes au gré des évolutions législatives, dans un contexte marqué par l'apparition de nouveaux opérateurs, comme dans le domaine santé-environnement avec l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) créée en 2002, ou bien encore l'Agence nationale de la recherche (ANR) créée en 2005. Lors du précédent contrôle de la Cour, l'ADEME indiquait vouloir conforter sa place d'interlocuteur naturel et de partenaire de référence du grand public, des entreprises, des collectivités territoriales et de l'Etat sur les politiques environnementales.
L'article L. 131-3 du code de l'environnement dispose, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2004-637 du 1er juillet 2004, que l'ADEME « exerce des actions, notamment d'orientation et d'animation de la recherche, de prestations de services, d'information et d'incitation dans chacun des domaines suivants : la prévention et la lutte contre la pollution de l'air ; la limitation de la production de déchets, leur élimination, leur récupération et leur valorisation, la protection des sols et la remise en état des sites pollués ; le réaménagement et la surveillance d'une installation de stockage de déchets ultimes autorisée après le 14 juillet 1992, lorsque ces opérations sont rendues nécessaires du fait d'une défaillance ou d'une insuffisance des garanties de l'exploitant ; la réalisation d'économies d'énergie et de matières premières et le développement des énergies renouvelables, notamment d'origine végétale ; le développement des technologies propres et économes ; la lutte contre les nuisances sonores ».
Cette définition n'a pas été modifiée pendant la période sous revue. En revanche, le décret n° 2009-603 du 28 mai 2009 a modifié l'article R. 131-2 du code de l'environnement pour replacer les missions de l'ADEME dans le cadre de la politique définie par le gouvernement « notamment de lutte contre le changement climatique et d'adaptation aux conséquences de ce changement ».
Depuis le contrat d'objectifs 2007-2010, l'activité de l'ADEME est structurée par une matrice qui croise quatre « métiers » (connaître / convaincre et mobiliser / conseiller / aider à réaliser) et quatre domaines d'intervention (déchets et sols, énergie, air et bruit, actions transversales). L'aide à la réalisation, autrement dit le versement de subventions, est l'activité de l'ADEME la mieux connue du grand public. Si elle représente 70 % de son budget, elle n'emploie que le tiers environ de ses effectifs.
B. VOCATION ET POSITIONNEMENT DE L'AGENCE
1. Un établissement polymorphe aux multiples interactions
L'ADEME expertise, participe à l'activité normative et à la normalisation, conçoit des instruments de politique publique, communique pour l'ensemble du Grenelle. A certains égards, elle constitue une extension de la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), de la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) et du Commissariat général au développement durable (CGDD). Cela est manifeste dans les effectifs respectifs de l'Etat central et du siège de l'Agence.
Elle dispose d'un réseau territorial à l'échelle nationale, contracte avec les collectivités, a une liaison renforcée avec les préfets ; 46 % des effectifs de l'Agence étaient affectés en région en 2008.
L'Agence est un « opérateur de l'Etat », mais avec plusieurs missions : elle anime la recherche comme l'ANR, distribue des aides publiques comme l'Agence de services et de paiement mais avec une expertise technique à l'appui, comme les agences de l'eau ; elle est prestataire de services et de conseils aux entreprises et aux particuliers comme l'Agence nationale de l'habitat, ou encore maître d'ouvrage (pour les sites pollués orphelins) comme l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs.
L'ADEME exerce un leadership clair en matière de déchets ; elle a d'ailleurs été principalement une agence du déchet jusqu'en 2002. Dans les autres domaines de son intervention, elle opère conjointement avec d'autres entités publiques. Cette situation crée des interactions, donc des risques de redondances, de frottement, de coûts de transaction, de coordination. Le partage des tâches dans certains secteurs, comme celui de l' « observation » en cours de structuration au sein du MEEDDM, n'apparaît pas clairement.
La proximité de l'Agence avec l'administration centrale explique, pour partie, que l'ADEME se soit vu confier, par exemple, la gestion de certains « fonds Grenelle ». C'est le cas notamment de la communication sur le Grenelle (près de 80 M€ sur trois ans). C'est également le cas du plan « bruit », bien que ses contributions repartent principalement vers l'Etat, via des fonds de concours. Les parlementaires se trouvent ainsi privés de contrôle sur des dépenses qui auraient trouvé leur place dans le budget général, d'autant plus que le financement par l'Etat des activités de l'ADEME prend de plus en plus la forme d'affectation de recettes fiscales.
Parce que la mission de l'Agence n'apparaît pas toujours clairement, le partage des tâches dans certains secteurs reste flou. Par exemple, les associations agréées de surveillance de la qualité de l'air sont subventionnées par l'ADEME pour leurs investissements, mais par les nouvelles directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) pour leur fonctionnement. De même, l'Agence peut avoir la tentation de se positionner sur des sujets émergents en rapport avec son champ d'intervention, mais dans lesquels son rôle resterait à définir. C'est particulièrement le cas de la précarité énergétique où l'ADEME peut certes alimenter les réflexions grâce à son expertise sur les économies d'énergie, mais où les leviers de l'action préventive relèvent de l'ANAH, et ceux de l'action curative des fonds de solidarité pour le logement (FSL) financés par les départements.
L'ADEME considère, pour sa part, que la diversité de ses missions et modes d'intervention n'est pas un inconvénient mais un avantage, et même une nécessité pour mener à bien les tâches qui lui ont été confiées dans le domaine de l'environnement. Quant à la concentration des fonds Grenelle entre les mains d'un opérateur, elle permet, selon le ministère, d'accélérer la réalisation de certains aspects du Grenelle.
2. Les tentatives de clarification de la vocation de l'ADEME
Dans la révision générale des politiques publiques, le concept d'ADEME « précurseur » a été mis en avant, mais la mesure 146 a finalement été formulée de façon à la fois plus large et plus ambiguë : « évolution du rôle de l'ADEME comme opérateur de la transition environnementale » (RGPP, premier rapport d'étape, décembre 2008). Le risque existait, avec cette dernière formulation, que l'Agence se transforme en gestionnaire de processus de masse (ex : financement à grande échelle des projets chaleur sur tout le territoire pour une longue période), plutôt qu'en levier du changement via des actions pilotes et du conseil. Au demeurant, l'ADEME n'intervient pas dans tout le champ couvert par le Grenelle : elle est ainsi absente dans le domaine de la biodiversité.
Le nouveau contrat d'objectifs 2009-2012, signé en janvier 2009 entre l'Etat et l'Agence, confirme l'évolution de l'ADEME comme un des opérateurs majeurs de la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, en renforçant ses missions d'animation, d'expertise et de financement pour la recherche et l'innovation dans les domaines de l'environnement, de l'énergie et du développement durable (RGPP, second rapport d'étape, mai 2009).
L'ADEME présente deux particularités :
- la transversalité : l'ADEME intervenant dans plusieurs domaines, et dans le cadre, depuis 2009, de la lutte contre le changement climatique, sa plus-value doit principalement résider dans sa capacité à limiter les cloisonnements en son sein et entre acteurs publics, pour faciliter le traitement des questions transversales (ex : la ville ou la consommation durables). Il s'agit de mettre des outils à la disposition des bénéficiaires qui leur permettent d'appréhender le développement durable dans tous ses aspects grâce à l'expertise proposée par un guichet unique. De ce point de vue, la plus-value de l'ADEME tend à s'améliorer, notamment avec la réforme de son organisation en 2010. Toutefois, le concept de transversalité ne suffit pas à lui seul à caractériser l'ADEME : le Commissariat général au développement durable (CGDD) a été créé en juillet 2008, pour partie pour répondre au même besoin et, lorsque dans le cadre des investissements d'avenir des crédits ont été alloués à une action « transport et urbanisme durables », ce n'est pas à l'ADEME que la gestion du fonds d'un milliard d'euros a été confiée, mais à la Caisse des dépôts et consignations.
- l'innovation et l'anticipation : l'Etat a fait le choix de doter l'ADEME de moyens humains et financiers lui permettant de bâtir, entretenir et exploiter une expertise de haut niveau dans ses domaines d'intervention. Pour la Cour, le bon emploi de ces ressources publiques exige que l'ADEME évite de se faire gestionnaire de processus de masse sur des modes d'intervention balisés et/ou répétitifs, et qu'elle cherche au contraire à faire émerger des solutions inédites et innovantes, pour en assurer la diffusion. La capacité de l'ADEME à capitaliser sur ces expériences et à externaliser a contrario ses tâches chronophages constitue un critère essentiel de son évaluation. Des progrès restent à faire en la matière.
II. LES RESSOURCES FINANCIERES DE L'ADEME
A. TYPOLOGIE DES RESSOURCES
L'ADEME dispose de quatre types de ressources pour conduire ses actions : des subventions versées par le budget général, des taxes affectées, des recettes attribuées par des tiers (Union européenne dans le cadre du FEDER, ANR etc...) et, plus marginalement, des ressources propres. Toutefois, la part de l'Etat dans ce financement reste prépondérante, et ses choix dans l'arbitrage entre taxes et subventions traduisent une grande volatilité. Le point d'arrivée 2010 est un financement majoritaire de l'ADEME par la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), avec plusieurs composantes, et des subventions de l'Etat plus faibles que par le passé.
1. Les ressources budgétaires : subventions du budget général et taxes affectées
- de 1991 à 1998, un financement mixte : l'Agence a été financée par des dotations budgétaires et par le produit de cinq taxes fiscales et parafiscales qu'elle collectait. Ce mode de financement présente l'avantage de permettre des projections de recettes, et la maîtrise du produit.
- de 1999 à 2005, un financement purement budgétaire : en 1999, la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) s'est substituée aux cinq taxes antérieures, sans alimenter pour autant le budget de l'Agence, qui s'est alors vu affecter des dotations budgétaires provenant des trois ministères de tutelle (écologie, énergie, recherche). En 2005, l'ADEME est préfigurateur de la mise en place de la LOLF. Les crédits, sous forme de subventions pour charge de service public, sont ventilés entre quatre programmes LOLF : 181 écologie, 189 recherche dans le domaine de l'écologie et des risques, 134 énergie et matières premières, 188 recherche dans le domaine de l'énergie.
- en 2006, un appoint de recettes fiscales : une part du financement provient de l'affectation du produit de la taxe sur les véhicules les plus polluants (dite taxe « carte grise », 6,1 M€ en AE et en CP) et du produit de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN: 183,05 M€ en AE et 186,68 M€ en CP), soit pour cet exercice un total de 189,2 M€ en AE et 192,8 M€ en CP.
- en 2007, un appoint supplémentaire de recettes fiscales : le produit de la nouvelle taxe sur la consommation du charbon, de la houille et des lignites (dite « taxe charbon ») vient s'ajouter à ceux de la taxe « carte grise » et de TICGN. Les produits de ces taxes deviennent majoritaires, pour un total de 237,6 M€ en AE et 241,4 M€ en CP. Ce mode de financement présente des difficultés dans les deux cas : les recettes ne sont pas perçues par l'ADEME qui, de ce fait, éprouve des incertitudes en matière de prévision de recettes. 11
- en 2008, une forfaitisation des taxes affectées : compte tenu de la complexité administrative induite par la gestion de plusieurs taxes, le financement sur taxes, stabilisé à 242 M€, est entièrement porté sur les recettes de TGAP bien que celle-ci, en tant que fiscalité écologique, n'ait théoriquement pas à couvrir des besoins pérennes. Ce financement prend la forme d'un montant forfaitaire inscrit en LFI (article 266 sexies du code des douanes). La LFI 2008 prévoyait, pour stabiliser et sécuriser le financement de l'ADEME, le remplacement des quatre taxes de 2007 par une fraction (fixe) de la TGAP. Par suite d'une erreur, la TICGN versée pendant le 1er trimestre 2008 s'est substituée aux crédits budgétaires qui n'ont pas été versés.
- en 2009, un nouvel appoint de taxes affectées : les modalités de financement des actions engagées dans le cadre du Grenelle Environnement passent par un renforcement et une extension des différentes composantes de la TGAP. Dans la continuité des modes de financement mis en place à partir de 2005, la part de TGAP attribuée à l'ADEME en LFI est augmentée de 121 M€ sur la dotation forfaitaire qui passe à 363 M€ et est majorée par le produit des nouvelles TGAP mises en place sur les installations d'incinération des ordures ménagères et sur les installations produisant des poussières. Le montant cumulé de ces deux nouvelles composantes pour 2009 était estimé à 65 M€. L'ADEME reçoit, en outre, des subventions pour charges de service public au titre de trois programmes du budget général : 174 énergie et après-mines (pas d'affectation dans la notification, mais sert à couvrir le fonctionnement courant), 181 prévention des risques (la notification ventile entre fonctionnement et intervention), 190 recherche dans le domaine de l'énergie, de la pollution et des risques (la notification ventile entre fonctionnement et intervention).
Il est apparu logique de financer les actions de l'Agence pour le Grenelle de l'environnement à partir de la TGAP (principe du pollueur-payeur). Ce mode de financement vertueux permet, selon la direction du budget, d'assurer une meilleure visibilité du financement des actions en faveur de l'environnement qui s'inscrivent souvent dans le cadre d'objectifs de moyen terme.
2. Recettes affectées par des tiers
Ces recettes répondent aux critères suivants : une convention fixe les obligations réciproques entre l'ADEME et le bailleur de fonds, l'Agence produit un relevé de dépenses effectuées dans le cadre de l'opération, les sommes éventuellement non employées doivent être reversées au bailleur de fonds. Cette catégorie recouvre en particulier le FEDER, les crédits ANR et le fonds démonstrateur de recherche mis en place en juillet 2008.
- fonds démonstrateur de recherche : 375 M€ AE et 214 M€ CP sur 2009-2012 ; l'ADEME y contribue elle-même à hauteur de 75 M€. Le fonds repose sur des appels à manifestation d'intérêt (AMI) auprès des industriels.
- programmes de l'ANR : de 2005 à 2009, l'ANR a confié à l'ADEME, en tant qu'unité support, la gestion de crédits qu'elle mobilisait sur des thématiques entrant dans les missions de l'Agence. Aucune nouvelle délégation n'est prévue pour 2010, mais la coordination et la gestion des programmes engagés restent assurées par l'ADEME.
La comptabilisation de ces fonds est sans impact sur le résultat, mais elle gonfle le bas de bilan : à la signature, le montant de la recette attendue est inscrit en produit à recevoir (compte 4684) et en charge à payer (compte 4682). Les dépenses effectuées par l'établissement diminuent les charges à payer et donnent lieu à la constatation d'un produit équivalent au compte de résultat. Il y a équilibre par principe à long terme. Les produits à recevoir par exercice sont supérieurs aux charges à payer et sont versés antérieurement aux paiements effectifs réalisés par l'ADEME. Ils ont permis, durant la période sous revue, d'alimenter la trésorerie de l'établissement dans des proportions importantes.
- plan véhicules propres et économes (VPE) : une dotation de 40 M€ a été versée en 2005 - constatée en produit d'exploitation au moment du versement et inscrite en réserve spéciale au bilan - avec des CP mobilisés au fur et à mesure de l'avancement des programmes engagés. Les moyens attribués à l'Agence, dans le cadre des actions de recherche qu'elle pilote, ont été renforcés en 2004 et 2005 par le versement d'une dotation de 40 M€ (en AE et en CP), versée sur les fonds du compte d'affectation spéciale financé par le produit des privatisations. Cette dotation est dédiée au programme « véhicules propres et économes » annoncé en 2003 par le Premier ministre, dont la mise en oeuvre a été confiée à l'ADEME. Les fonds ont été entièrement engagés en AE et donneront lieu à des dépenses jusqu'en 2010 au moins. Dans cette attente, les CP non utilisés sont mis en réserve par l'Agence : ils sont mobilisés au rythme de l'avancement des programmes engagés.
3. Ressources propres
Il s'agit de montants très limités (3,48 M€ en 2008, soit moins de 1% des produits d'exploitation) qui abondent surtout le budget de fonctionnement. La souplesse de gestion liée au statut d'EPIC, particulièrement pour percevoir et gérer des recettes selon des modalités plus souples qu'un EPA, justifie, selon l'ADEME, le maintien de sa qualité d'EPIC conférée par la loi. Le niveau de ressources propres extrêmement faible conduit toutefois à douter de la pertinence de la qualification légale en EPIC de l'Agence.
B. EVOLUTION DES MONTANTS
1. La crise de CP du début des années 2000
A la faveur d'un financement par taxes affectées, l'ADEME avait accumulé jusqu'en 1998 des excédents d'AP et surtout de CP. Leur résorption s'est opérée dans le cadre du passage à un financement exclusivement budgétaire. Il appartenait à l'Etat de moduler ses dotations d'AP et de CP pour tenir compte de cette situation, mais la transition a été manifestement mal négociée. Les dotations ont été durablement inférieures aux besoins, comme le reflète le tableau suivant.
A compter de 2003, commence une réduction significative du niveau d'autorisation d'engagement et des crédits de paiement. Le principe de l'équilibre entre les AE et les CP est mis en place par les tutelles mais, compte tenu des engagements antérieurs, le niveau des dotations ne permet alors pas de couvrir la totalité des besoins de mandatements.
Source : ADEME
L'objectif de tarir les excédents de CP dont disposait l'ADEME a été atteint fin 2003. Néanmoins le niveau de CP inscrits en LFI est demeuré très faible : 71 M€ en 2004, puis 32 M€ en 2005. Pour aider l'Agence à honorer ses paiements, le ministère de l'écologie a alors mis en place, en complément des dotations budgétaires, un fonds de concours de 135 M€ en crédits de paiement, abondé par un prélèvement sur le fonds de roulement des agences de l'eau. La Cour a déjà eu l'occasion de critiquer ce procédé, qui a déstabilisé la gestion de plusieurs agences et détourné du secteur de l'eau des recettes dont la collecte repose pourtant sur le principe dit de « l'eau paye l'eau ».
En 2004, les moyens disponibles pour engager de nouveaux projets ont été inférieurs de 50 % à ce qu'ils avaient été en moyenne sur la période 2000-2002, obligeant l'Agence à reporter sur 2005 le financement de certaines opérations, et à en annuler d'autres. En 2005, l'Agence a peiné à honorer ses engagements vis-à-vis des organismes publics et des entreprises privées jugées financièrement les moins fragiles. Cette situation s'est poursuivie et une note sur la situation budgétaire de l'ADEME du 20 juin 2007 relève encore que « le décalage entre les besoins et les dotations effectives en crédits de paiement impose à l'ADEME de retarder le règlement de certaines échéances contractuelles devenue exigibles, parfois sur près d'une année. Pour éviter de pénaliser ses créanciers les plus fragiles, comme les PME, l'agence a mis en place un système de priorités de paiement ».
Cette situation concernait le budget d'intervention, mais aussi le budget de fonctionnement, resté en déséquilibre structurel pendant plusieurs exercices, faute de consolidation budgétaire en loi de finances des emplois supplémentaires attribués en 2001 au titre du MEDD pour mettre en oeuvre les politiques de lutte contre le changement climatique (100 postes au titre de la LFR 2000 et 20 au titre de la LFI 2001) : sur les 120 emplois attribués, seule une faible part a pu être financée par une progression des dotations budgétaires et le défaut de couverture a, un temps, représenté 105 postes.
L'impact sur le pilotage de l'Agence a été majeur : gel de postes, réduction des charges de fonctionnement, objectif de doublement entre 2003 et 2010 des ressources externes (par exemple, celles générées par la formation), pour atteindre 10 % du budget de fonctionnement. Ce n'est qu'à partir de 2007 que l'ADEME a retrouvé une situation budgétaire mieux équilibrée grâce à l'apport du financement par taxes affectées : fin 2007, il n'existait plus d'échéances de paiement certifiées et non mandatées par manque de crédits. Cette quasi-crise financière n'en a pas moins fortement marqué les esprits.
2. La soutenabilité budgétaire de l'établissement public
Dans le cadre de la mise en oeuvre du Grenelle de l'Environnement, la tutelle a prévu un programme d'interventions qui dote l'Agence de 1,7 Md€ d'AE et de 862 M€ de CP supplémentaires pour la période 2009-2011. Mais l'établissement n'a pas été consulté au cours de l'élaboration de ce plan, de sorte que celui-ci n'a pas été bâti à partir des clés de consommation de CP utilisées dans sa modélisation financière. A la lecture de cette programmation prévisionnelle, l'ADEME apparaît n'avoir de visibilité que jusqu'en 2011, puisque l'article L. 131-5-1 du code de l'environnement ne détermine que pour les années 2009-20111 1 ( * ) la quote-part du produit de la TGAP qui lui est affectée. Le rythme des engagements prévu pour 2009-2011 renvoie au-delà de 2011 la consommation de près de la moitié des CP.
L'annexe financière du contrat d'objectifs 2009-2012 n'a fait l'objet d'aucune validation interministérielle. La direction du budget n'a pas visé le plan de financement précité ; elle a précisé à la Cour n'avoir pu approuver une telle programmation qui nécessitait d'être mise en cohérence avec la contrainte budgétaire globale de l'Etat. Cette nécessaire mise en cohérence explique, selon elle, les réserves exprimées lors du vote de l'EPRD 2010 par l'administrateur représentant le ministre du budget, qui a fait savoir que les AE devraient être révisées par décision modificative après les arbitrages budgétaires pour la période 2011-2013.
L'ADEME a indiqué à la Cour que les discussions et arbitrages en cours sur le PLF triennal 2011-2013 ont conduit à revoir la trajectoire des engagements dans une logique de soutenabilité au regard des ressources, en étroite concertation avec les tutelles et notamment la direction du budget. Selon l'Agence, cet ajustement ne remet pas en cause les engagements du Grenelle (avec un niveau d'AE sur cinq ans de 2,3 Md€ comparé au 1,7 Md€ initialement programmés) et, au contraire, les pérennise au-delà de 2011 et jusqu'en 2013. Par ailleurs, le budget de base de l'Agence sera légèrement diminué avec un niveau d'intervention qui devrait être revu sur la période 2011-2013 à hauteur de 195 M€ (à comparer aux 225 M€ de l'exercice 2010).
Le MEEDDM a confirmé à la Cour que le nouveau budget triennal 2011-2013, dont le schéma global a été présenté au Parlement début juillet, prévoit une nouvelle programmation des interventions de l'ADEME dans le cadre du Grenelle, qui est cohérente avec celle de ses financements budgétaires (subventions pour charges de service public et affectation de taxes) et dont le rythme des engagements budgétaires a été revu pour garantir la soutenabilité budgétaire de l'Agence.
Ainsi, il apparaît, à la date de rédaction de ce rapport, que le projet de loi de finances pour 2011 et le projet de loi de programmation pour les finances publiques qui seront prochainement soumis à l'approbation du Conseil des ministres puis transmis au Parlement permettront de garantir la soutenabilité financière de l'ADEME. Le PLF 2011 devrait comporter en effet un article déterminant la quote-part de TGAP affectée à l'ADEME jusqu'en 2013. Le budget triennal prévoirait, en outre, les subventions à l'Agence pour la période 2011-2013. Le volume de ces recettes de l'établissement public a été calculé, selon la direction du budget, afin de financer les besoins de l'ADEME évalués sur la base des clés d'AE/CP de l'établissement et en cohérence avec les AE du Grenelle arbitrées par le Premier ministre dans la procédure budgétaire pour la période 2011-2013. Les AE figurant dans l'EPRD de l'établissement pour 2010 devraient être ajustées par une prochaine décision modificative au budget de l'établissement afin d'être mises en cohérence avec les arbitrages du budget triennal 2011-2013.
3. Une nouvelle augmentation des moyens de l'Agence via le Grand emprunt
La loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 (LFR 2010) détermine le montant global des investissements d'avenir financés par le Grand emprunt et leur ventilation. L'ADEME y est mentionnée :
- pour 1,6 Md€ (1,35 Md€ sur les énergies renouvelables et décarbonées, 250 M€ sur le secteur de l'économie circulaire), au titre des démonstrateurs et plateformes technologiques en énergies renouvelables et décarbonées et chimie verte, sous forme de subventions (un tiers) et d'avances remboursables (deux tiers).
- pour 1 Md€, au titre du développement des véhicules du futur, sous forme de financement de programmes de R & D et d'industrialisation - y compris pour des secteurs dans lesquels l'ADEME ne dispose d'aucun historique comme le développement de la recherche en matière de construction ferroviaire et de construction navale.
- pour 250 M€, au titre du soutien à la recherche en matière de réseaux électriques intelligents, « smart grids ».
Les formes de l'intervention publique et de sa gouvernance dans ce cadre ont été définies, notamment avec la publication au Journal Officiel du 8 août 2010 de deux conventions conclues entre l'Etat et l'Agence (sur la gestion des crédits confiés à l'ADEME au titre des investissements d'avenir, v. infra Partie V).
L'annexe du PLFR indique que l'Agence, dont les moyens se trouveront accrus de 2,85 Mds€, recourra à des avances remboursables, voire à des prises de participation. Ses expériences passées sur ces sujets devraient l'inciter, en toute hypothèse, à faire preuve de la plus grande rigueur dans le suivi des conventions (v. infra Partie III, § II).
La répartition des crédits du Grand emprunt montre que la vocation de l'ADEME n'est toujours pas claire, puisque certains sujets, sur lesquels son expérience aurait pu justifier qu'elle intervienne, ont été dévolus à d'autres entités : c'est le cas, on l'a vu plus haut, pour la ville et le transport durables.
PARTIE II :
ORGANISATION ET PILOTAGE
Des ajustements ont été opérés au cours de la période récente, en particulier sous l'effet du décret n° 2009-603 du 28 mai 2009 qui modifie l'organisation et le fonctionnement de l'ADEME. Le changement d'échelle qui résulte pour l'Agence de la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement et des programmes d'investissements d'avenir peut difficilement s'imaginer à structures constantes. Pour ces derniers, une organisation spécifique va être mise en place, reposant sur la création d'une « direction des investissements d'avenir » (DIA).
I. L'ORGANISATION
A. LA GOUVERNANCE
Le conseil d'administration de l'ADEME comporte 26 membres (art. R. 131-4 du code). La période sous revue a été marquée par la modification de la représentation de l'Etat, dans le sens d'un renforcement de la présence du MEEDDM. Le représentant du ministre de la santé quitte le conseil, remplacé par un second représentant du ministre chargé de l'environnement. Le délégué interministériel au développement durable est membre de droit du nouveau conseil, le secrétaire général du ministère est désigné commissaire du Gouvernement (art. R. 131-11 du code) en remplacement du directeur général de la prévention des risques, dans un souci de transversalité. Dans son précédent rapport, la Cour regrettait que « les tutelles ne contribuent pas à faire prévaloir une approche transversale entre les différentes missions de l'agence, ce dont celle-ci a pourtant bien besoin ». Sur ce point, un progrès est noté.
L'article R. 131-6 du code de l'environnement confère au président du conseil d'administration, nommé par décret et choisi parmi ses membres, de très larges fonctions exécutives. Le décret du 28 mai 2009 a prévu la possibilité pour le président de déléguer une partie de ses pouvoirs à un ou plusieurs directeurs généraux délégués. Cette possibilité a été utilisée pour la désignation récente d'un directeur général délégué, investi d'un rôle de synthèse, qui renforce l'équipe de direction.
B. LES SERVICES DU SIEGE
Dans l'organigramme en vigueur depuis le 1er janvier 2004, les services étaient regroupés autour de quatre directions exécutives. Au 1er janvier 2010, l'organisation est désormais structurée autour de quatre grands pôles (stratégie, recherche et international ; programmes ; territoires ; soutien) et d'une fonction (communication). Le secrétariat général intervient en appui de l'ensemble des directions. Un des enjeux de cette réforme consiste à mettre en oeuvre la transversalité entre les différents pôles. Si chacun des pôles se voit assigner des responsabilités distinctes, il est néanmoins appelé, dans ses domaines de compétence, à intervenir sur l'ensemble du champ des activités et des domaines de l'agence. Chacun des pôles ne peut donc conduire les missions qui lui sont confiées sans s'appuyer sur les autres. Cette transversalité se traduit notamment dans l'organisation proposée par la création de lieux de synthèse et de coordination sur des thématiques qui touchent à l'ensemble des domaines d'actions (service climat, service agriculture et forêts, service organisations et formes urbaines) ou le renforcement des capacités d'échanges et de circulation de l'information entre le pôle « territoires » et les autres directions avec notamment le service de l'animation régionale, des réseaux et des outils. Il est prévu que la capacité à mettre en oeuvre cette transversalité entre directions et services constitue un critère de l'évaluation de l'encadrement supérieur.
Héritage des trois agences qui lui préexistaient, le siège de l'ADEME est éclaté entre Paris, Angers et Valbonne et, jusqu'en 2009, le siège d'Angers était lui-même dispersé entre quatre sites. Cette situation est un facteur de surcoûts, de lourdeur, voire de dysfonctionnements d'autant qu'à l'exception de deux directions (la direction financière à Angers et la direction exécutive de l'action territoriale à Paris), toutes les autres sont réparties sur deux ou sur les trois implantations du siège. L'Agence s'accommode d'une partie des conséquences pratiques de cette dispersion grâce à l'utilisation intensive de la visioconférence, mais elle doit supporter les coûts fixes des trois sites. Cette dispersion demeure un facteur de cloisonnement entre les équipes. Si l'ADEME fait valoir que s'engager plus loin conduirait à un risque de déperdition d'expertise dans la période actuelle très tendue, il est regrettable que le Schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) qu'elle a remis à sa tutelle et à France Domaine en juillet 2010 ne prévoit pas de réduire le nombre de « sites centraux », expression figurant dans la plaquette de présentation de l'Agence en 2010.
C. L'ADEME EN REGION
L'ADEME dispose de 22 directions régionales en métropole et 4 outre-mer, dont les effectifs oscillaient en 2009 entre une dizaine et une trentaine d'agents, représentant 46 % de l'effectif total. Dans son précédent rapport, la Cour constatait des écarts d'activité entre les « délégations régionales » et posait la question du maintien des plus petites délégations. L'Agence fait valoir leur ancrage sur le terrain et leur proximité avec les différents acteurs locaux. Le CGEDD a préconisé en 2009 la création de directions interrégionales, sur des périmètres plus vastes, pour faciliter les synergies entre experts techniques de l'ADEME par effet de masse critique, en renforçant des équipes locales très morcelées. Lors de la réorganisation interne de l'Agence intervenue le 1er janvier 2010, l'ADEME a préféré la création de trois directions de l'action régionale (DAR zones « Nord et Est », « Ouest » et « Sud-Outre-Mer ») à l'échelon central, chacune ayant la responsabilité hiérarchique de 8 à 10 directeurs régionaux. Sur les sujets demandant une expertise ne pouvant être répartie dans les 26 régions, la constitution de pôles de compétences interrégionaux demeure une option d'organisation.
Sous la responsabilité du directeur exécutif « action territoriale », chaque directeur régional est chargé de mettre en oeuvre la politique de l'Agence aux niveaux local, départemental et régional. Les sujets prioritaires déclinés en région sont suivis par la direction exécutive centrale au moyen d'un tableau de bord dynamique. Quel que soit le projet concerné (« agenda 21 », charte de territoire ou plan climat), l'ADEME peut accompagner les collectivités territoriales sur les volets de ces projets locaux traitant de l'environnement, de l'énergie et du climat. Dans ce cadre, l'Agence propose notamment aux collectivités la mise en oeuvre d'un contrat d'objectif territorial (COT). En Nord-Pas-de-Calais, l'Etat, l'ADEME et la Région ont créé au début des années 2000 un GIP développement durable, appelé Centre ressources du développement durable (CERDD), dont la fonction est de diffuser les opérations exemplaires auprès des différents secteurs et maîtres d'ouvrage.
Jusqu'en 2008, 90 % des aides versées localement par l'ADEME s'inscrivaient dans le cadre de contractualisations avec les collectivités locales, principalement les régions dans le cadre des contrats de plan Etat-Région (CPER), et plus marginalement les départements (déchets et cofinancement des Espaces Info Energie). L'Agence y voit à juste titre un moyen de coordonner l'action publique dans le domaine du développement durable et de mobiliser à cette fin davantage de moyens. Le contrat d'objectifs 2009-2012 comporte sur ce point un indicateur « effet de levier des aides contractualisées avec les régions et les départements » dont la cible est d'être supérieur ou égal à un sur la durée du contrat - en d'autres termes, l'ADEME cherche à faire en sorte que ses partenaires contribuent au moins à hauteur de ce qu'elle apporte elle-même. En 2009, l'effet de levier était de 1,3 pour les régions.
Cette contractualisation apparaît comme une bonne pratique, sous deux réserves. D'une part, chaque région présente des spécificités, tant dans les modes de gestion que dans les stratégies poursuivies ; il en résulte des différences sensibles dans les modes d'action et les résultats qui supposent de la part du siège une présence vigilante pour éviter de trop grandes distorsions, sans pour autant rigidifier ou standardiser le système à l'excès. Le nouvel organigramme répond mieux que le précédent à cette préoccupation, avec le renforcement de la direction exécutive « action territoriale ». D'autre part, les fonds Grenelle ne font l'objet d'aucune contractualisation. L'ADEME finance seule les grands projets structurants du fonds chaleur ou du fonds déchets. Nombre de régions s'interrogent sur leur positionnement et leur contribution dans ce nouveau contexte.
L'ADEME, établissement public de l'Etat, a longtemps eu la réputation de fonctionner de façon très autonome vis-à-vis des services déconcentrés voire, par l'investissement des directions régionales dans les CPER, d'être plus proche des conseils régionaux que de l'Etat. Le décret du 28 mai 2009 a introduit sur ce point des modifications importantes. La principale concerne les préfets, qui sont désormais « les délégués régionaux de l'ADEME pour ce qui est de son action dans la région » (art. R. 131-16, code de l'environnement). Il s'agit de l'application à l'ADEME d'une mesure RGPP qui concerne certes d'autres établissements mais dont aucun ne dispose de services régionaux.
Ce nouveau rôle du préfet, sans incidence sur le fonctionnement financier de l'Agence en région, se traduit essentiellement par trois dispositions : la présidence des commissions régionales des aides (CRA) par le préfet de région, avec une suppléance exercée par le directeur régional de l'Agence ; la présidence d'un comité régional d'orientation (CRO), dont la composition est élargie aux présidents du conseil régional et des conseils généraux ; la co-signature des conventions de programme passées avec les collectivités territoriales de taille significative. Pour tenir compte du nouveau rôle confié au préfet de région et afin de clarifier les termes utilisés, les « délégations régionales » sont devenues des « directions régionales » et les délégués des directeurs régionaux, sans que cela modifie ni leurs missions actuelles, ni leurs attributions. En 2009, le président de l'Agence a adressé deux courriers aux préfets de région pour expliciter le cadre de leurs nouvelles missions, clarifier leurs rôles et proposer des modalités de collaboration entre délégués et directeurs régionaux.
Après une phase d'apprentissage, directeurs régionaux de l'ADEME et DREAL apprennent à fonctionner de façon complémentaire. Ainsi en Nord-Pas-de-Calais, à l'initiative du préfet de région, des fiches « qui fait quoi » ont été validées en mars 2010 pour préciser les relations DREAL/direction régionale ADEME sur onze thèmes d'action en matière de développement durable. Après plus d'un an de mise en oeuvre, des comités régionaux d'orientation (CRO) restent à formaliser comme en Languedoc-Roussillon où seule la commission régionale des aides a fait l'objet d'un arrêté préfectoral du 24 septembre 2009.
Pour résoudre des difficultés ponctuelles d'articulation entre l'Etat et l'ADEME, la solution institutionnelle a donc été préférée au pragmatisme des consignes qui auraient pu être données en ce sens aux délégations régionales de l'Agence. Or cette solution repose sur une notion inédite de « délégué régional » d'un établissement public qui introduit de la confusion et peut être facteur de tension lorsqu'elle est mal comprise. Dans une des trois directions visitées par les rapporteurs, le préfet s'est fondé sur ces nouvelles dispositions pour revendiquer un contrôle plus étroit sur l'activité de l'Agence et s'est heurté au directeur régional comme à la direction nationale. Cette situation de conflit tend à montrer que le décret rend sans doute plus fluides les relations là où elles étaient déjà bonnes, mais qu'il échoue pour l'instant à le faire là où elles sont plus délicates.
II. LE PILOTAGE DE L'AGENCE
A. LE PILOTAGE STRATEGIQUE
1. Les tentatives de clarification des attentes de l'Etat et de l'articulation des acteurs
La période sous revue se caractérise par les tentatives de clarification des attentes de l'Etat et de l'articulation des acteurs. L'ADEME est engagée dans une démarche de contrats d'objectifs avec l'Etat, mais qui ne comporte pas de volet sur les moyens, à tout le moins pas de volet financier qui soit accepté et signé par la direction du budget, ce qui contribue à l'instabilité budgétaire qui affecte l'établissement.
Le contrat 2007-2010, signé fin 2006, a structuré l'action de l'Agence en quatre activités et quatre domaines. Il explicitait la nécessité de renforcer ses activités d'expertise / recherche de l'optimisation de ses soutiens financiers. Il est rapidement devenu caduc, sous l'effet du Grenelle de l'environnement, de la RGPP dans sa préconisation première de développer le rôle de précurseur de l'Agence et de modifier les dispositions réglementaires la concernant. Il a donc fait l'objet d'un ajustement volontairement bref. Le contrat 2009-2012 retient « 25 indicateurs clés de suivi », complété par « 37 indicateurs de dialogue de gestion » pour les besoins du pilotage de l'établissement. Il met en oeuvre un dispositif de reporting applicable à l'ensemble des opérateurs : un rapport annuel de performance (de fait, un bilan annuel du contrat d'objectifs), présenté avec les comptes financiers et le rapport de gestion au vote du conseil d'administration (équivalent du RAP pour le budget général).
Le décret du 28 mai 2009 prévoit que le contrat d'objectifs (COB) peut être décliné par une convention de gestion avec chacun des ministères de tutelle. Une telle convention a été signée avec le MEEDDM, mais pas avec le ministère chargé de la recherche. Cette convention ne se confond pas avec le contrat d'objectifs : ce dernier définit les objectifs fixés par l'Etat - tous ministères de tutelle confondus - et en annexe les moyens destinés à permettre leur réalisation. La convention est destinée à mieux articuler au jour le jour les interventions des services de l'agence et celles du MEEDDM, à préciser les modalités d'exercice de la tutelle au niveau central comme au niveau déconcentré à un moment où les structures du ministère étaient en recomposition.
L'ADEME est sous la tutelle du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer (MEEDDM) et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche (MESR). Cet établissement ne relève cependant que très partiellement de la mission interministérielle Recherche et Enseignement supérieur (MIRES) et ne bénéficie d'aucune subvention pour charge de service public émanant du MESR, ce qui explique qu'il n'y ait pas de convention de gestion globale entre le MESR et l'ADEME. Le ministère participe au financement du fonds démonstrateur dans le cadre d'une convention particulière avec l'ADEME. Ce fonds fait l'objet d'un budget spécifique et d'une comptabilité séparée de celle de l'Agence.
C'est souligner l'importance du rôle de chef de file qui incombe de ce fait au MEEDDM en matière de pilotage stratégique. Afin de mieux maîtriser la dépense publique, des règles nouvelles de gouvernance vont s'appliquer aux opérateurs de l'Etat. Ces règles reposent sur une tutelle unique, un meilleur pilotage stratégique et l'adoption de règles de gestion communes et des engagements de la part de l'Etat comme des opérateurs. Tel est l'objet de la circulaire du Premier ministre n° 5454/SG du 26 mars 2010. Le MEEDDM entend réaffirmer sa position de tutelle sur le sujet du pilotage de l'innovation, notamment à l'occasion de la préparation du prochain contrat d'objectifs (à partir de l'été 2011) et dans le cadre du suivi des « investissements d'avenir ».
2. L'empilement des démarches de performance
L'activité de l'ADEME est retracée et suivie à travers 67 indicateurs : 25 au titre du contrat d'objectifs 2009-2012, dont trois sont également repris dans le cadre de la RGPP et un dans le RAP de mission budgétaire de rattachement, 37 complémentaires au titre du contrôle de gestion, dont trois sont repris dans le RAP, et 5 de l'ancien COB ont été conservés pour être repris dans le RAP. Sur ces 67 indicateurs, la moitié environ sont identifiés comme de véritables indicateurs de performance, mesurant l'efficacité socio-économique, l'efficience ou la qualité du service qu'elle rend (ex : nombre annuel de tep renouvelables aidées dans le cadre du fonds chaleur, effet de levier public/privé des aides à la recherche). L'autre moitié représente des indicateurs d'activité ou de moyens (ex : nombre annuel d'aides à la décision, montant total annuel des aides à la concrétisation de projets). Dans son dialogue de gestion, l'ADEME imagine mal réduire le nombre de ses indicateurs.
Les indicateurs figurant dans les RAP ont pour objet de rendre
compte de l'exécution des programmes et de l'action de leurs
responsables devant le Parlement, et non de l'activité des
opérateurs qui concourent aux programmes correspondants. A cet
égard, force est de constater que les
indicateurs retracés dans les RAP 2 ( * ) ne sont ni révélateurs des enjeux de son activité, ni en rapport avec la part déterminante de l'Etat dans son financement. Par comparaison, l'activité et les résultats des agences de l'eau, placées sous la tutelle du même ministère et qui versent également des subventions à des maîtres d'ouvrage, font l'objet d'une annexe « jaune » du PLF sensiblement plus détaillée, qui inclut les résultats consolidés des COB de chacune d'elle. Les RAP fournissent certes des bilans plus littéraux de son activité, mais sans atteindre le degré de détail du rapport de performance examiné par le conseil d'administration, ou du bilan du COB transmis chaque année au MEEDDM.
Une amélioration de l'information sur la performance de l'opérateur est souhaitable. L'activité de l'Agence est décrite dans la fiche opérateur de l'établissement actuellement annexée au programme 181. L'ADEME est disposée à faire évoluer le contenu de ce document, en lien avec le responsable du programme concerné. Le rapport annuel de performance fait l'objet d'une synthèse annuelle conformément à la convention de gestion MEEDDM-ADEME du 20 janvier 2009 ; cette synthèse pourrait constituer la base d'une nouvelle rédaction de la fiche opérateur figurant au RAP et annexée au programme 181.
En outre, l'ensemble de la démarche de performance de l'ADEME peut, selon la Cour, encore progresser. Chaque unité de gestion produit chaque année un projet de service qui cadre son activité, mais sans lien chiffré avec le COB. Les indicateurs ne servent pas non plus explicitement de référence dans l'évaluation de l'encadrement, ni a fortiori dans la rémunération (v. infra).
B. LE PILOTAGE BUDGETAIRE ET FINANCIER
1. Une utilisation limitée des souplesses de la nouvelle gestion publique
Les budgets des opérateurs peuvent être depuis 2007 présentés et votés par le conseil d'administration en quatre enveloppes fongibles en gestion (personnel, fonctionnement, intervention le cas échéant et investissement). L'unité de spécialité des crédits n'est plus le compte à deux chiffres mais l'enveloppe. C'est également à ce niveau que s'apprécie le caractère limitatif des crédits. Seuls les mouvements entre enveloppes doivent faire l'objet d'une décision modificative. L'ADEME applique la nouvelle présentation budgétaire et a la possibilité d'user de la fongibilité. En réalité, elle continue de recourir aussi à l'ancienne présentation en fonctionnement / interventions, qui correspond à la période antérieure à 2006 où l'Agence était financée sur les dotations du titre IV pour ses crédits de fonctionnement et sur les subventions du titre VI pour ses crédits d'intervention.
Cette pratique renvoie à deux stratégies différentes : sur le fonctionnement, une volonté de maîtrise (l'Agence suit chaque année un indicateur de coût moyen - budget de fonctionnement d'un ETPT de l'établissement - pour éviter qu'une dérive ne s'installe) ; sur les interventions, un objectif de maximisation de l'emploi des crédits.
Elle n'opère pas de mouvements entre les deux budgets sans en référer au conseil d'administration, même si cela ne relève pas formellement d'une décision modificative de l'EPRD. Plus encore, chacune de ces deux enveloppes est aussi ventilée par grands domaines d'intervention, pour constituer des sous-enveloppes.
L'Agence n'applique pas de fongibilité du fonctionnement vers l'intervention et s'interdit d'en faire de l'intervention vers le fonctionnement.
S'agissant du fléchage des ressources, une note de la direction du budget du 10 octobre 2007 soulignait que « la gestion de dispositifs d'intervention multiples par un opérateur tel que l'ADEME, recevant des financements de diverses sources, ne trouve sa pleine légitimité que dans la mesure où l'établissement conserve une certaine flexibilité dans l'utilisation de ses ressources. L'ADEME doit donc rester libre d'affecter les ressources financières dont elle dispose à la couverture de ses engagements en fonction des besoins identifiés ».
En région, l'Agence a cherché à concilier la logique de responsabilisation et celle de sécurité budgétaire. Les directions régionales ne disposent à leur niveau d'aucune possibilité de fongibilité entre ces deux enveloppes dont l'exécution est d'ailleurs retracée dans deux systèmes d'information différents ; c'est un choix de sécurisation. Pour la re-ventilation entre domaines d'intervention, le directeur régional doit demander l'autorisation du siège avec une validation en comité de direction. La pratique renvoie aussi à un manque de responsabilisation dans la déclinaison de la démarche de performance : les directions régionales sont pilotées budgétairement par la DEAT qui contrôle les transferts à l'intérieur des budgets d'intervention, même si une grande flexibilité est possible. La DEAT veille au respect de certaines consignes internes ou provenant des tutelles (sanctuarisation des budgets de certains domaines, séparation des budgets liés à certains fonds Grenelle etc.).
2. Le suivi de la capacité de l'ADEME à consommer ses crédits
Dans la circulaire sur les budgets des opérateurs, il est prévu un compte de résultat et un tableau de financement prévisionnels. Si l'ADEME fournit une présentation de ce type dans son EPRD, le pilotage budgétaire reste ce qu'il était avant la LOLF.
Chaque EPRD est présenté en AE et CP. Les AE constituent un budget de programme, les CP les crédits budgétaires à proprement parler. Les AE sont consommées par des engagements comptables (EC), qui correspondent à l'ancienne notion de réservation de crédits, lorsqu'un projet est retenu, avant son passage en comitologie. S'engage alors la période de finalisation du dossier jusqu'à la signature définitive du contrat (marché, convention d'aide etc.) qui constitue l'engagement juridique (EJ). Les CP sont consommés par les mandatements pris en charge par l'agent comptable, y compris les opérations de fin d'exercice de type « charges à payer », c'est-à-dire des EJ pour lesquels le service est fait mais la facture pas encore reçue.
Le système d'information financière de l'établissement est suffisamment robuste pour permettre l'édition mensuelle de tableaux de bord pour chaque unité de gestion, et en agrégation pour les besoins du pilotage budgétaire.
Les indicateurs clés sont les taux de consommation des EC et des EJ. Le taux de consommation des EC est proche de 100 % en fin d'année, ce qui ne reflète pas nécessairement une performance de l'établissement. Le taux de consommation des EJ, en revanche, dépend du nombre de dossiers présentés à la comitologie et juridiquement formalisés par une convention ou une décision unilatérale. Il permet d'apprécier la capacité de l'ADEME à porter des projets à maturité.
De ce point de vue, sa performance peut être améliorée. Chaque année, l'EPRD de l'exercice est abondé en DM 1 par des reports d'engagements comptables massifs représentant jusqu'au quart du budget d'intervention.
L'Agence déclare suivre avec attention la consommation des reports d'engagements comptables ou « REC » en début d'exercice (qui découlent mécaniquement de l'écart entre engagement comptable et engagement juridique). Selon le MEEDDM, il ne s'agit pas d'incapacité de la part de l'Agence mais du décalage naturel entre la décision de contracter avec des tiers et le déroulement toujours long des projets d'investissement de recherche ou de prototype.
3. Les modes de prise en compte de la pluri-annualité
Il n'y a pas de budgétisation pluriannuelle sur laquelle le conseil d'administration ait à se prononcer, contrairement aux agences de l'eau, établissement ayant une fonction proche (la distribution d'aides publiques) dans le même secteur ministériel. Il s'agit d'un facteur de faiblesse car un horizon annuel est inadapté. La différence tient fondamentalement à l'incertitude qui s'attache au financement. Cela ne signifie pas pour autant qu'il n'existe pas de pilotage pluriannuel : à la demande de la direction du budget et du contrôleur financier, a été mis en place un outil de reporting des consommations de CP sur la période 2010-2013.
Les opérateurs, dont certaines opérations d'investissement ou d'intervention revêtent un caractère pluriannuel, doivent également faire voter par le conseil d'administration une annexe comportant trois tableaux : le coût total et les modalités de financement des opérations pluriannuelles (qui fait apparaître le montant des AE inscrites au budget de l'Etat) ; le suivi des AE ouvertes dans le budget de l'Etat et l'échéancier des CP associés ; la programmation des engagements juridiques et l'échéancier des paiements associés.
L'outil de modélisation a été approuvé par le CGEFI et la direction du budget pour le contrôle de la soutenabilité des AE proposées par l'ADEME à son conseil d'administration. Il est utilisé en interne depuis 2009 avec la mise en place du Grenelle et une budgétisation en AE bien supérieure aux CP mis à disposition l'an passé ; il était convenu en fin d'année dernière de l'enrichir et de l'utiliser comme base de contrôle par le CGEFI de la soutenabilité des hypothèses de programmation.
Le seul élément réellement tangible dans la programmation est la fixation des montants de TGAP qui lui seront affectés jusqu'en 2011, dont l'Agence peut déduire une chronique de CP.
L'enjeu clé, dans le cadre de la construction du budget triennal, est de proportionner les AE inscrites en regard des CP actuels, principalement issus de taxes. L'Agence a donc conçu un simple modèle sous Excel, permettant, à partir de clés de consommation de CP, de calculer ce qu'elle peut se permettre de consommer en AE. S'agissant de la prise en compte des abandons d'opérations, l'Agence connaît le taux de perte en ligne et en tient compte dans la détermination de l'enveloppe d'AE disponibles pour l'exercice.
Si l'ADEME ne dispose pas formellement d'une budgétisation pluriannuelle de ses engagements, les lois de programmation triennale des finances publiques lui ont permis, depuis l'exercice 2009, de sécuriser la programmation pluriannuelle et de lever les incertitudes sur le financement de l'Agence au-delà des exercices en cours.
C. L'AUDIT ET LE CONTROLE
Le tableau de suivi des recommandations de la Cour donne l'exemple d'une bonne pratique de l'audit interne de l'ADEME. Le dossier DIAGADEME illustre les suites données par l'établissement au précédent contrôle de la Cour qui portait sur les exercices 1996 à 2003. Le rapport avait en effet relevé le déficit d'évaluation, d'exploitation et de suivi du dispositif d'aide à la décision. L'Agence a donc mis en chantier un outil informatique de suivi des prestataires qui réalisent les études d'aide à la décision et de capitalisation de ces études.
Le contrôle financier s'est structuré à la fin de la période sous revue avec l'arrêté du 31 mai 2010 fixant les modalités spéciales d'exercice du contrôle économique et financier de l'Etat sur l'Agence. Plusieurs articles du texte renvoient à des modalités d'application. Un protocole annexe, signé le 1er juillet 2010 par l'Agence et le contrôleur général économique et financier, a eu pour objet d'en préciser le contenu.
Par ailleurs, le diagnostic qualité gestion d'un dossier (DQGD) a pour objet de vérifier l'efficacité et la maîtrise de la gestion des dossiers de l'Agence dans les unités de gestion déconcentrées et non déconcentrées, de renforcer la cohérence de ses actions et le partage de bonnes pratiques, et de contribuer ainsi à dynamiser l'animation et le travail en réseau dans les domaines administratif, budgétaire et juridique. Le dispositif est animé par le secrétariat général en collaboration avec les directeurs et en particulier avec la direction de l'action régionale (DAR) pour les directions régionales. Le contrôle est réalisé par une équipe de deux personnes, l'une issue d'une unité de gestion et l'autre des services du secrétariat général ou de la DAR avec le soutien d'un membre de l'inspection générale. Cette dernière apporte son soutien à ce diagnostic et veille à sa cohérence avec les principes des contrôles de conformité de l'Agence. Les actions correctives feront l'objet d'une vérification par le coordinateur national. La Cour prend acte qu'il est envisagé d'effectuer 5 à 6 diagnostics d'unité de gestion par an, y compris des unités de gestion non déconcentrées en direction régionale et dans les services centraux.
PARTIE III : MODES D'INTERVENTION
I. LA CONNAISSANCE
Les crédits d'intervention consacrés en 2009 à l'activité « connaître » s'élèvent à 223 M€ hors programmes ANR. L'activité a mobilisé 191 ETPT, soit un quart des moyens financiers et humains de l'établissement. L'activité comprend trois volets d'intervention : « recherche et innovation », l'« observation » et les « études » (prospective, évaluation, analyse). La sous-activité « recherche » représente 83% des financements de l'activité « connaître » en 2009.
A. LA RECHERCHE
1. La mission et le positionnement de l'Agence
Le statut de l'ADEME lui donne une grande latitude en matière de R&D. Depuis le précédent rapport de la Cour, l'établissement semble avoir progressé dans la définition des priorités stratégiques de recherche. Le document d'orientation de la recherche 2007-2012 présenté au conseil d'administration a explicité les enjeux des activités de recherche de l'Agence, le contenu de 10 programmes jugés prioritaires et leurs moyens estimatifs.
Le système d'aide R&D adopté fin 2007 définit les quatre étapes de la recherche que l'Agence finance et les problématiques dans lesquelles doivent s'inscrire les recherches. Mais il n'établit pas de critères d'octroi de l'aide et s'appuie, pour préciser son champ d'intervention, sur les 10 fiches des programmes prioritaires. Les critères de sélection des projets sont identifiés au sein de chacun des programmes et figurent dans les appels à projet ou appels à manifestation d'intérêt. Cette organisation induit un spectre des recherches possibles particulièrement vaste ce qui a justifié, dès l'origine, un besoin d'évaluation.
Le contrat d'objectifs couvrant la période 2009-2012 centre quant à lui les activités de R&D sur la mise en oeuvre du fonds démonstrateur, sans renoncer aux orientations antérieures.
La gouvernance de la recherche à l'ADEME mérite d'être améliorée. Chaque dispositif de financement de la recherche (les aides à la recherche hors fonds démonstrateur, les aides du fonds démonstrateur, les aides sur crédits ANR, les bourses de doctorants, prochainement les investissements d'avenir) dispose d'instances de pilotage et de décision propres. Dans une telle architecture, seuls les membres du conseil scientifique peuvent disposer d'une vision et d'expertise d'ensemble sur les différentes activités menées en matière de recherche. Or, le conseil scientifique de l'ADEME n'apparaît pas jouer pleinement son rôle, ainsi que le notait la mission d'inspection menée par le CGEDD en 2007-2008.
La lecture des comptes-rendus postérieurs à cette inspection ne permet pas de conclure à une évolution des pratiques, même si l'Agence souligne la qualité des échanges et des apports du conseil scientifique à la conduite de la politique de la recherche. En outre, contrairement aux dispositions du code de l'environnement et à la recommandation du CGEDD, n'ont pas été soumis au conseil scientifique de « rapports annuels sur les recherches achevées, les programmes en cours et l'état des connaissances scientifiques et techniques », ni le rapport d'activité de l'établissement. Enfin, l'Agence n'a plus de conseil scientifique en exercice depuis septembre 2009, ce qui est particulièrement pénalisant dans une période où les activités de recherche de l'établissement sont au coeur des nouveaux dispositifs Grenelle et Grand emprunt.
L'ADEME fait valoir que les échanges entre les experts scientifiques et l'Agence ne se limitent pas aux réunions du conseil scientifique et se poursuivent malgré l'absence de ce dernier depuis septembre 2009. Le MEEDDM, de son côté, a reconnu l'intérêt de disposer d'un « reporting » à travers la rédaction d'un rapport annuel sur les activités de recherche de l'Agence, ainsi que l'importance d'installer rapidement un nouveau conseil scientifique « avec un rôle réel d'expertise et de conseil sur la cohérence de la politique de recherche de l'Agence ». La Cour considère que l'existence d'un rapport annuel des activités de recherche serait de nature à rendre plus lisibles les activités de l'Agence en la matière et de s'assurer qu'il n'y a pas de redondance avec les travaux des autres agences.
En effet, son positionnement en termes de domaines d'intervention, de types de recherche, de publics ciblés présente des risques de chevauchement avec d'autres acteurs. En termes de domaines, l'exemple des transports montre les difficultés à définir le périmètre d'intervention de l'établissement sur certaines questions. En termes de champ de recherche, la question se pose de l'articulation avec l'ANR. L'Agence indique qu'une concertation étroite a été réalisée avec cette dernière et que l'élaboration de sa stratégie de recherche a pris en compte le positionnement de celle-ci, davantage orientée sur la recherche fondamentale en amont de l'intervention de l'ADEME. La sélection des projets par l'ANR se fait dans une logique d'excellence reposant sur la qualité scientifique des projets alors que l'ADEME privilégie les perspectives de débouchés industriels. Mais ce partage n'est pas toujours aussi facile à réaliser dans les faits. A ce jour, la coordination passe essentiellement par la présence dans les groupes d'experts des feuilles de route animées par l'ADEME de représentants de l'ANR, et vice-versa, par la participation de l'ADEME aux comités de programme énergie et environnement de l'ANR. Bien qu'intéressante, cette organisation ne garantit pas l'absence de superposition des actions de l'ANR et de l'ADEME d'autant que cette dernière estime nécessaire de développer des travaux de recherche exploratoire.
En termes de publics, l'articulation entre OSEO et l'ADEME ne permet pas non plus de garantir l'absence de redondance. L'Agence indique qu'OSEO ne disposant pas de programmation de ses activités de recherche, elle est sollicitée au coup par coup pour apporter une expertise technique sur un dossier entrant dans son champ de compétence, le plus souvent au niveau des directions régionales. Depuis 2009, pour faire suite aux recommandations du comité stratégique sur les éco-industries piloté conjointement par les ministères chargés du développement durable et de l'industrie, un appel à projet de R&D sur les écotechnologies est lancé conjointement par la DGCIS, OSEO et l'ADEME et coordonné avec celui de l'ANR sur le même thème. 27
Ainsi, la coordination de ces acteurs du financement de la recherche semble être assurée par des dispositifs ponctuels (présence dans des groupes de travail, appel d'offres au cas par cas) sans garantie, en amont et de manière permanente, d'une cohérence d'ensemble. Ce manque de coordination des acteurs de la programmation de la recherche dans le domaine de l'environnement a d'ailleurs été souligné dans le cadre des travaux de la Stratégie nationale de recherche et d'innovation 2009 (SNRI).
Le Ministère de la recherche (DGRI) estime que la création des alliances Allenvi et Ancre va favoriser et renforcer les partenariats et les synergies entre les acteurs de la recherche en liaison avec les feuilles de route stratégiques élaborés sous la responsabilité de l'ADEME, ainsi qu'avec les programmes de l'ANR. Les alliances seront force de proposition pour que soit définie une programmation à soumettre aux deux agences de financement, l'ANR et l'ADEME, sans redondance. La Cour en prend acte pour l'avenir.
Par ailleurs, l'Agence s'insère dans un environnement institutionnel de la recherche en forte évolution. Or, s'agissant de l'échelon régional et du niveau européen, l'ADEME estime devoir préciser et optimiser son action. Il est, en effet, difficile de mesurer l'importance de l'investissement réalisé auprès de ces deux types d'acteur et d'en dégager les retombées.
Il semble donc nécessaire que la gouvernance de la recherche soit revue, à l'occasion de l'installation du nouveau conseil scientifique, en conférant à ce dernier un vrai rôle de conseil et d'expertise sur la cohérence de la politique de recherche dans son ensemble et en améliorant son information par la rédaction d'un rapport annuel sur les activités de recherche ; cela contribuerait également à s'assurer que le positionnement de l'ADEME dans les domaines et les champs de la recherche qu'elle couvre soit correctement articulé avec les autres financeurs et leurs publics respectifs.
2. Les moyens
Les engagements juridiques de la sous-activité « recherche et innovation » ont été multipliés par 4,5 entre 2004 et 2009 sous l'effet du fonds démonstrateur pour la recherche (5,2 si on prend en compte les crédits ANR). Ils s'élèvent à 215 M€ en 2009 (dont fonds démonstrateur 116,2 M€ et ANR 31,5 M€) contre 41 M€ en 2004. Entre 2008 et 2009, le budget est passé de 87 à 215 M€.
L'ADEME ne possède pas de moyens pour exécuter en propre la recherche. En outre, la direction exécutive « stratégie, recherche, international » (DESRI), comprenant 71 agents au printemps 2010, s'appuie largement sur les effectifs des autres directions de l'établissement pour conduire ses activités. A contrario, certains de ses personnels contribuent à temps partiel à d'autres activités.
Les effectifs dédiés à cette activité de recherche dans son ensemble sont quasiment constants entre 2008 et 2009 contre une multiplication des crédits par 2,5, ce qui tend à prouver que l'ADEME a su améliorer son organisation pour absorber l'activité fonds démonstrateur. Néanmoins, le retard pris sur certains dossiers (les chantiers d'évaluation, la réflexion stratégique en matière d'observation notamment) laisse à penser que la volonté d'afficher un fort taux d'engagement a primé sur la poursuite de certains travaux pourtant importants.
Dans la perspective des investissements d'avenir, l'ADEME a sollicité le recrutement de 25 ETP supplémentaires dont 12 destinés à la direction exécutive « stratégie, recherche, international ». S'il apparaît difficile de remplir cette nouvelle mission sans ajuster les 28 effectifs de l'établissement en la matière, l'Agence devra toutefois rechercher également les pistes internes de redéploiement.
3. Les actions menées
Elles se situent à deux niveaux :
- l'animation de la recherche : la pratique des feuilles de routes stratégiques constitue une réelle avancée en termes de lisibilité et de traduction concrète de l'activité d'animation de la communauté scientifique. Mais les autres activités du volet animation mériteraient de faire l'objet d'un cadre plus clair. Il conviendrait que soient précisés le contenu des activités d'animation de la recherche (notamment au plan international et européen), leurs objectifs et les moyens qui leur sont alloués, que la DESRI s'assure du bon dimensionnement de ses équipes (notamment sur les actions internationales), et envisage la possibilité de redéploiement.
- le financement de la recherche : le montant des aides allouées en 2009 (cf. les différents dispositifs précités) représente 180 M€ pour un coût total d'opérations de 472 M€.
Concernant la rédaction des thèses, la Cour constate une diminution des travaux financés de 20% depuis 2004, de 32% depuis 2002. Corrélativement, la part des thèses cofinancées progresse de 10 points entre les périodes 1997/2003 (74%) et 2004/2009 (84%). Malgré ce souci d'une meilleure sélectivité des bourses, le nombre de thèses soutenues dans le délai de 3 ans a faiblement progressé. L'ADEME indique que le constat portant sur les délais de soutenance ne pourra être dressé que dans les prochaines années, s'agissant du pourcentage de soutenances au-delà de 5 ans.
En termes de domaines, les aides sont largement orientées sur les questions relatives à l'énergie. Le dispositif du fonds démonstrateur conduit à ce que l'énergie conserve en 2009 une place financièrement prédominante : 82% des engagements juridiques pour 42% du nombre des contrats. L'ADEME indique que, conformément aux conclusions du Grenelle, elle renforcera les budgets consacrés à la recherche et développement sur les déchets et sur les sites et sols pollués, en mettant l'accent sur l'évaluation des impacts sanitaires et environnementaux, la caractérisation des pollutions et sur les sols. Elle accentuera également les actions de recherche en matière de bruit ou bien encore, dans le cadre des investissements d'avenir, en matière d'« économie circulaire » (cf. convention Etat-ADEME, publiée au J.O. du 8 août 2010). Par ailleurs, près de la moitié des bourses attribuées en 2009 concerne l'énergie, suivie des éco-technologies, de l'impact sur l'air, de l'impact déchet et de la socio-économie.
Le COB 2009-2012 comporte cinq indicateurs qui concernent la recherche (dont quatre pour le fonds démonstrateur). Quatre ont atteint leur cible en 2009. L'indicateur non atteint concerne l'effet de levier public/privé des aides à la recherche dont la cible est d'au moins deux, et dont le résultat en 2009 est de 1,78 hors fonds démonstrateur (contre 0,97 en 2008) et 1,66 pour le fonds démonstrateur. Le bilan 2009 est satisfaisant au regard des objectifs du COB et révèle une forte mobilisation des équipes de l'ADEME. Cette forte mobilisation s'est faite dans un contexte très centralisé de l'activité recherche dont seulement 3,5% des crédits sont contractualisés au plan territorial en 2009. Le groupe transversal « recherche en région » récemment créé devra donc veiller à ce que cette centralisation de la gestion des crédits ne soit pas en contradiction avec l'ambition de l'ADEME de promouvoir l'éco-innovation à destination des PME et d'appuyer les initiatives régionales.
B. L'OBSERVATION
Le COB 2009-2012 exprime la nécessité de « construire et partager des dispositifs d'information fiables, notamment sur l'évolution des filières » pour faciliter la prise de décision et la mesure des impacts des décisions prises. Cette activité est ancienne à l'ADEME. La cartographie des observatoires établie par l'Agence recense 10 observatoires gérés en direct par elle ou en projet et 10 en délégation ou en partenariat. La montée en puissance des politiques « climat-énergie », filières déchets, pollution de l'air, et les réflexions du Grenelle induisent un fort besoin d'informations et sont à l'origine de nouveaux projets d'observatoires. Cette activité fait l'objet d'un suivi analytique depuis le COB 2007. En trois ans, les crédits consommés sont passés de 8,8 M€ (2007) à 14,7 M€ (2009) soit +67%. Cette activité a donc des moyens financiers relativement modestes à l'échelle du budget de l'Agence, mais en valeur absolue et en tendance elle est significative.
L'ADEME avait amorcé en 2008 une réflexion stratégique et une programmation 2008-2010 de l'activité « observation ». Cette démarche n'a pas été poursuivie faute de disponibilité. En découle un recensement non achevé et non stabilisé. En conséquence, la sous-activité « observation » est organisée de manière assez disparate selon les secteurs. En ce qui concerne les déchets et la surveillance de la qualité de l'air, des systèmes d'information intégrés ont été mis en place par l'Agence, respectivement SINOE et SIQA. La même philosophie préside au développement d'un système d'information sur les énergies renouvelables. Au contraire, dans le domaine de l'énergie, l'Agence recense à ce jour 14 outils différents, dont 9 sur les questions d'efficacité énergétique. Le rôle de l'ADEME est très variable selon les dispositifs sans qu'une logique d'ensemble apparaisse (maîtrise d'ouvrage, maîtrise d'oeuvre déléguée, animation d'observatoires régionaux...). A ce titre, l'articulation entre l'outil national et les outils régionaux reste perfectible même dans le cas de SINOE puisque certains observatoires régionaux des déchets demeurent. Le domaine des transports offre un autre exemple de multiplication des observatoires régionaux.
Le CGDD qui devrait jouer un rôle de coordination ne semble pas avoir à ce jour rempli cette fonction. Or, selon la convention de gestion, il définit, réalise ou coordonne les actions nationales d'observation, et il crée en tant que de besoin des observatoires thématiques régionaux réunissant tous les acteurs publics concernés.
L'ADEME indique qu'un groupe de projet transversal a été lancé en 2010 chargé de proposer d'ici la fin de l'année des orientations stratégiques ainsi que des modalités de suivi et de reporting de cette activité.
Il importe de transformer cette collection d'outils en un système d'observation organisé, constitué de sous-ensembles complémentaires, cohérents et communiquant entre eux. L'exercice en cours devra permettre de préciser la définition et le périmètre des outils d'observation retenus, les pans de cette activité justifiant une intervention directe de l'ADEME, les moyens à y consacrer et les pistes d'externalisation.
La Cour prend acte que dans le cadre des futurs schémas régionaux climat-air-énergie, des actions sont engagées pour renforcer les activités d'observation régionale de façon à répondre aux nouveaux enjeux, ou bien encore que l'établissement de partenariats avec l'ADEME et ses directions régionales sera recherché par le ministère sur les thématiques de l'air et des déchets, tant pour l'accès à l'information que pour la valorisation des données.
C. L'EVALUATION
L'évaluation du système d'aide à la décision (2003) a montré que l'effet d'aubaine était réduit pour les aides à la décision. Ainsi « pour plus d'un bénéficiaire sur deux, l'étude [d'aide à la décision] n'aurait pas été mise en place si elle n'avait pas été subventionnée par l'ADEME. Ainsi, dans plus de la moitié des cas, la mise en place de l'étude a été déclenchée par la subvention. Pour les pré-diagnostics, la subvention a enclenché la mise en oeuvre de l'étude dans plus de 2/3 des cas » L'évaluation souligne par ailleurs que la réalisation d'études a un effet d'entraînement important pour le passage à l'acte et la réalisation d'investissement de performance environnementale et énergétique. Ainsi « près de 2/3 des études d'aide à la décision donnent lieu à un passage à l'acte total ou partiel ». L'évaluation estime aussi qu'au-delà de l'octroi de subventions pour la mise en place d'études, les bénéficiaires attendent que « l'ADEME mette à profit sa vision transversale et son impartialité pour les conseiller dans les différentes étapes du dispositif : depuis le choix du bureau d'étude jusqu'à la mise en oeuvre des recommandations ». Le risque d'effet d'aubaine entre l'aide à la décision et le passage à l'acte peut donc être limité par la très forte implication de l'ADEME auprès du bénéficiaire.
L'évaluation sur les déterminants d'achat de chauffe-eau solaires individuels (CESI) a constaté que les principales conditions d'acquisition pour acquérir un tel équipement étaient d'ordre économique (bénéficier de subventions plus élevées, trouver des prix plus abordables). La segmentation de la population a permis de montrer que seuls les "convaincus de l'écologie" (3% de la population interrogée) étaient peu sensibles à l'aide financière à l'acquisition de CESI et auraient de toute façon fait l'acquisition. L'effet d'aubaine apparaît donc très limité.
II. L'AIDE A LA REALISATION
L'article L. 131-6 du code de l'environnement dispose que « l'agence peut attribuer des subventions et consentir des avances remboursables ». L'article R. 131-3 III précise : « elle peut attribuer des subventions et consentir des avances remboursables aux personnes publiques et privées ainsi que prendre des participations financières se rapportant à son objet ».
A. LES MECANISMES DE DISTRIBUTION DES AIDES
1. Les subventions
L'article R.131-9-II 2° du code de l'environnement dispose : « Le conseil d'administration [de l'ADEME] fixe [également] les modalités et critères d'attribution des concours financiers de l'agence pour chaque type d'opération. ». Les modalités et critères d'attribution sont donc inscrits dans des systèmes d'aides, soumis au conseil d'administration sous forme de délibérations. A ce jour, quatorze sont en vigueur. Des règles de portée générale ont présidé à leur conception.
Les listes de projets financés montrent qu'à l'exception de quelques grands équipements (unités d'incinération d'ordures ménagères, réseaux de chaleur etc...), dont la part va d'ailleurs aller croissant avec les fonds Grenelle, l'ADEME finance en région une multitude de petits projets portant sur un grand nombre de thématiques pour lesquelles les besoins sont virtuellement infinis (des HLM en haute qualité environnementale, des plans de déplacement d'entreprises, des achats de véhicules électriques, des analyses d'éclairage public etc.), sans que l'ADEME paraisse particulièrement proactive (exemple du plan de déplacements d'entreprise « PDE » : l'Agence ne se donne pas d'objectif chiffré ex ante, ne cible pas les entreprises pour lesquelles un PDE pourrait avoir un effet d'entraînement plus fort que pour d'autres, ou situées dans une zone où le plan a plus de sens qu'ailleurs). Ce financement n'a de sens que si ces petites opérations créent des précédents et visent un effet de contagion. Pour que cet objectif soit atteint, il faudrait que l'ADEME soit capable de faire remonter ce qui est réellement innovant pour le faire connaître à d'autres et/ou pour le transformer en outil méthodologique, de généraliser ce qui a fait ses preuves à petite échelle en le faisant financer et relayer par d'autres.
Dans les faits, cependant, l'Agence ne paraît pas avoir encore suffisamment consolidé cette partie de son activité qui consiste à diffuser les opérations exemplaires, des bonnes pratiques ou, plus encore, des modes de fonctionnement ou de coopération qui ont localement fait leur preuve. Le suivi des opérations pilotes et de relais des actions de l'ADEME est un sujet pour la direction exécutive Action territoriale qui doit percevoir l'effet de levier des actions que l'Agence finance, dans la région d'abord, et au niveau national ensuite. A cet égard, il faut changer des comportements à grande échelle : en quoi le financement en région de quelques dizaines de PDE, de véhicules électriques, de changements de process industriels qui nuisent moins à l'air peut-il avoir un effet macroéconomique ? L'engouement récent pour les politiques environnementales a permis une démultiplication de projets de plus grande envergure que par le passé. L'introduction de critères vise à améliorer le ciblage et la sélection des opérations soutenues, et leur efficacité.
Il y a lieu de remettre de l'ordre dans la terminologie, de clarifier les concepts et d'améliorer l'exploitation de ce qui est financé par l'ADEME à partir d'une typologie plus claire, en explicitant les suites possibles et en structurant les enseignements à en tirer.
2. Les immobilisations financières
Historiquement, outre les subventions, l'ADEME accordait des avances remboursables et, depuis le début des années 80, proposait des mécanismes de garantie contre le risque géologique. Elle a diversifié ses modes de soutien au début des années 2000, en cherchant à faciliter l'accès des entreprises, et en particulier des PME, au crédit bancaire ou aux fonds d'investissement, pour réussir l'intégration des politiques environnementales dans leurs décisions d'investissement. Les résultats de ces tentatives de diversification des modes d'intervention sont décevants. Dans le cadre du Grand emprunt, une partie des concours de l'ADEME prendront la forme d'avances remboursables et de prises de participations. L'Agence devra tirer les enseignements de ses expériences passées.
Les avances remboursables
L'ADEME, et avant elle les agences fusionnées pour la créer, ont accordé des avances remboursables qui se voulaient une modalité de financement proche d'une notion de participation aux risques. Ces aides n'étaient remboursables qu'en cas de succès des technologies ou dispositifs soutenus. La période sous revue a été marquée par un apurement massif de ces opérations, par leur transformation en subventions, faute de pouvoir espérer un retour de la part des bénéficiaires.
Sur le fond, l'impact financier est à double lecture. Le taux de retour serait plutôt plus élevé que ceux d'autres établissements qui pratiquent aussi des avances remboursables - 45 ou 58 % selon l'indicateur retenu. Mais, si une partie des transformations d'avances en subventions ont une explication classique (ex : échec technique, procédure collective), certaines traduisent une faiblesse de l'ADEME soit dans la rédaction des conventions (ex : interprétation divergente des clauses de délai), soit dans le suivi des dossiers (ex : déchéance quadriennale).
Fonds géothermie
Créé en 1982, ce fonds est le plus ancien des instruments financiers auxquels l'ADEME est partie, prenant la suite de l'AFME. Il devait s'éteindre en 2013, avec la fin de la garantie offerte au dernier projet validé en 1988. Le renchérissement des énergies fossiles a redonné de la pertinence au dispositif. En 2006, il a été réaménagé avec la création d'un fonds pour les opérations nouvelles dit « fonds de garantie géothermie » prévoyant la réintroduction d'une garantie de court terme, la possibilité d'une participation financière des régions et un ajustement des cotisations de court terme aux risques encourus. L'ADEME a apporté à ce nouveau fonds 2 M€ fin 2006 et 1,08 M€ en 2007, qui s'ajoutent à la dotation historique de 8 M€ du fonds long terme historique.
A la clôture 2008, la valeur brute de la participation de l'ADEME dans les fonds géothermie s'élevait à 11,08 M€, mais sa valeur nette à seulement 2,12 M€. Le coût des sinistres est en effet très élevé et, bien que le fonds soit financé pratiquement à parts égales par l'Agence, les cotisants et les produits financiers, le total des ressources (22,5 M€ en 2006) suffit à peine à couvrir les dépenses induites par les sinistres (20,7 M€ en 2006). L'ADEME intervient donc à fonds perdus dans la garantie de la géothermie. Le fonds créé en 2006 a de nouveau été abondé en 2009 à hauteur de 6,46 M€ pour couvrir les besoins d'ici 2015, pour tenir compte de l'augmentation du nombre d'opérations induite par le fonds chaleur et par la hausse de certains coûts (extension de la géothermie dans des régions mal connues, augmentation du coût unitaire des forages etc.). L'accompagnement de la géothermie devrait coûter à l'ADEME près de 9 M€ entre 2007 et 2015 au titre de la garantie, sans préjudice des subventions qu'elle accorde par ailleurs aux mêmes maîtres d'ouvrage. L'abondement décidé en 2009 a eu pour effet de modifier l'équilibre de financement du fonds et la répartition par tiers entre l'ADEME, les produits financiers et les cotisants.
Le Fonds d'Investissements de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (FIDEME)
Créé en 2000 mais opérationnel depuis 2003, le FIDEME est un fonds d'investissement qui associe capitaux publics et privés, destiné à promouvoir et à faciliter le financement de projets dans les secteurs de la maîtrise de l'énergie et la valorisation des déchets, en France métropolitaine et dans les DOM-TOM. Il est géré par une filiale de la Caisse des dépôts. Il intervient en quasi-capital par la souscription à des obligations émises par des sociétés développant des projets éligibles au fonds. Les projets financés doivent utiliser des technologies connues et éprouvées, et non des innovations technologiques, dans les secteurs des énergies renouvelables, du recyclage et de la valorisation des déchets et des équipementiers desdits secteurs, qui sont des PME au sens communautaire du terme.
Par construction, pour attirer des financeurs additionnels, le dispositif est particulièrement favorable aux investisseurs : ils sortent du fonds avant l'ADEME, leurs apports sont rémunérés (alors que l'Agence n'est rémunérée par un boni de liquidation qu'après le remboursement des fonds privés) et ils ne couvrent d'éventuels sinistres qu'au-delà de la capacité d'absorption de l'ADEME (en cas de sinistre, l'Agence n'est remboursée qu'après les autres créanciers). Le fonds disposait initialement de 45 M€, dont 15 M€ apportés par l'ADEME. Fin 2008, il détenait 22 participations, sans défaut jusqu'alors.
Sur le plan opérationnel, le fonds n'a pratiquement financé que des projets dans l'éolien, alors que les prévisions initiales prévoyaient une participation plus diversifiée : 80 % dans les énergies renouvelables, 10 % dans le recyclage et la valorisation des déchets et 10 % pour les équipementiers. La consultation de l'ADEME était une étape du processus de sélection des investissements, mais elle ne pouvait imposer ses choix à la société gestionnaire. Elle a donc échoué à diversifier l'emploi du fonds, ce qui paraît regrettable puisqu'elle en est le bonificateur. Sur le plan financier, l'opération est coûteuse pour l'ADEME, car à la clôture 2008, sa participation de 15 M€ faisait l'objet d'une provision pour dépréciation de 8,25 M€. Les dernières estimations du montant pouvant revenir à l'Agence à la clôture du fonds étaient de 6,6 M€, auxquels il convient d'ajouter la plus-value réalisée en 2008 sur une cession de bons de souscription d'actions, soit 3,5 M€. L'ADEME récupérerait ainsi 66 % de l'investissement initial, ce qui serait certes plus favorable que son estimation initiale de 50 %, mais paraît décevant si l'on considère que ses fonds ont eu pour objet de financer des entreprises d'un secteur en forte croissance.
L'ADEME a refusé en 2006 un projet d'augmentation du capital de 30 M€, qui n'aurait été souscrite que par des investisseurs privés, diluant par là même sa participation. Elle a considéré que la maturité industrielle et financière du secteur ne justifiait plus, compte tenu des tarifs publics de rachat de l'électricité éolienne, un soutien public complémentaire.
Le FIDEME a joué un rôle important dans le développement de la filière éolienne, mais pour l'ADEME, l'opération n'est pas pleinement satisfaisante : le fonctionnement du fonds s'est révélé particulièrement lourd, l'Agence n'a pu y faire valoir ses priorités malgré son rôle clé dans la bonification du système et son coût net total est élevé alors que les investisseurs privés y ont trouvé tout leur intérêt. Même si l'ADEME fait valoir que le FIDEME est un instrument financier atypique, l'opération aura eu, en toute hypothèse, un rôle pédagogique important dans la perspective des investissements d'avenir. L'Agence est appelée à prendre des participations, et elle pourra le faire principalement sous trois formes, soit directement, soit par l'intermédiaire d'une filiale, soit par un fonds de placement du type FIDEME. L'expérience acquise devrait plutôt conduire à écarter cette dernière solution.
Le Fonds de Garantie des Investisseurs de Maîtrise de l'Energie (FOGIME)
Créé en 2001 à l'initiative de la BDPME, via sa filiale d'assurance-crédit SOFARIS (aujourd'hui OSEO garantie), et de l'ADEME, le FOGIME offre une garantie financière en appui du crédit bancaire au bénéfice de certaines PME désireuses de réaliser des investissements de maîtrise de l'énergie. L'intervention de l'Agence permet de disposer d'une garantie renforcée de 30 % (70 % contre 40 % pour le cadre du Fonds national de garantie du développement des PME que le FOGIME complète). La valeur brute et nette de la participation de l'Agence dans le FOGIME atteignait 4,62 M€. L'absence de provision résulte de ce que la situation nette du fonds est supérieure à la dotation initiale. Elle reflète l'échec relatif du fonds.
En effet, de 2001 à 2009, le FOGIME n'a apporté que 61 concours financiers, et le solde de trésorerie dépassait 10,7 M€ en 2009. L'ADEME a identifié les raisons de cette sous-utilisation : une commission trop élevée pendant deux ans, la passivité de SOFARIS pendant cinq ans, un champ d'intervention trop restreint, une fermeture du fonds aux PME de moins de trois ans et une procédure d'éligibilité trop lourde. En outre, l'ADEME aurait longtemps été privée de visibilité sur la situation du fonds. Aux dires de l'Agence, la passivité du gestionnaire du fonds - SOFARIS, puis OSEO Garantie - l'a contrainte à relancer son partenaire pour obtenir des reportings ; ce fut un obstacle majeur à la dynamisation de cet instrument par l'Agence.
Pour sa part, OSEO Garantie fait valoir qu'en 2007, un audit du FOGIME a révélé qu'en raison d'une procédure contractuelle d'instruction des dossiers longue et complexe, le dispositif était sous-utilisé, et que des propositions ont été faites à l'Agence à l'occasion du Comité de gestion du FOGIME du 21 mars 2007. A l'occasion des Comités de gestion des 1er avril 2008, 8 juillet 2009, et 14 octobre 2009 ces propositions ont été renouvelées à l'ADEME, en y ajoutant une ouverture du FOGIME aux investissements consacrés aux projets de Développement Durable, aux investissements des entreprises « Eco-Innovantes » et aux travaux de réhabilitation des bâtiments tertiaires.
Après avoir envisagé son réaménagement en 2009, l'ADEME a finalement décidé en janvier 2010 - au terme de presque trois ans de discussions - de mettre fin au fonds et de le gérer en mode extinctif à compter de 2010. Cette décision paraît positive en ce qu'elle tire les conséquences de l'existence de dispositifs poursuivant les mêmes objectifs, mais elle clôt également plusieurs années de passivité de l'Agence qui n'a pas suffisamment cherché à dynamiser un de ses instruments d'intervention.
3. La gouvernance des aides
Le système a été mis en place à la création de l'ADEME et régulièrement modifié. La réforme de 2009 a apporté des modifications importantes au dispositif antérieur. Le nouveau dispositif répond à certaines critiques passées de la Cour, dont le nombre trop élevé de commissions nationales des aides, facteur de cloisonnement. La Cour avait également relevé certains défauts dont la solution ne passait pas par une modification des textes : réponses insuffisantes aux demandes d'information des membres des CNA, débat insuffisant sur les orientations stratégiques de l'ADEME par secteur et inexistence des rapports annuels sur leur état d'avancement et leurs résultats.
Conformément aux articles 107 et 108 du Traité de l'Union Européenne, les aides aux entreprises sont soumises à la réglementation communautaire de la concurrence en matière d'aides d'Etat. Parmi les systèmes d'aides de l'ADEME, certains ont fait l'objet de notification à la Commission européenne en vue de se conformer à la réglementation communautaire relative aux aides d'Etat ; d'autres, basés sur le RGEC ou le régime-cadre X63/2008, n'ont pas nécessité de notification.
4. Les coûts de gestion des aides
Depuis 2008, l'ADEME mesure la ventilation de l'ensemble des ETPT entre les différents sous-domaines et sous-activités définis dans son contrat d'objectifs. Il est désormais possible de connaître le temps passé par l'Agence sur les activités d'octroi des aides (à la décision, à l'investissement, à la R & D), tant pour l'instruction que pour la gestion. Les processus de distribution des aides de l'ADEME occupent donc moins du quart de ses effectifs ce qui paraît révéler une productivité élevée, d'autant plus d'ailleurs que les règles à appliquer sont complexes. Toutefois, au sein de ce bloc, les aides à la décision représentent une part excessive, peu en rapport avec le niveau de qualification qu'elles requièrent. Cela conforte les observations faites par ailleurs sur le besoin de reconsidérer les aides à la décision dans une logique de productivité.
B. LES RISQUES ASSOCIÉS A LA DISTRIBUTION D'AIDES ET LEUR TRAITEMENT
1. Les risques du point de vue de l'ADEME
Le risque de fonctionnement en « mode guichet »
Ce risque se concrétiserait si l'Agence finançait indifféremment tous les projets qui se présentent, indépendamment de leur qualité intrinsèque, de leur impact environnemental, même sans besoin de financement avéré du maître d'ouvrage. C'est le cas pour certains dispositifs d'aide encore en vigueur. L'ADEME finance, par exemple, l'achat de véhicules électriques par des collectivités territoriales, sur une base forfaitaire, sans analyse du besoin de financement. Elle a ainsi accordé, en 2009, 6000 € à la commune de Perols (Hérault, 8500 habitants), pour l'achat de deux véhicules GNV et d'un véhicule électrique, ou 2000 € à la commune de Neuve Chapelle (Pas-de-Calais, 1358 habitants), pour l'achat d'un véhicule électrique. Ces subventions représentent entre 10 et 15 % du tarif public de ces gammes de véhicules, ce qui fait douter de leur effet d'entraînement sur la décision d'achat, d'autant que dans certains dossiers consultés par la Cour, l'achat était déjà réalisé lorsque la subvention a été demandée. Le dispositif d'aide ne prévoit pas de ciblage en fonction de la taille de la commune, de l'usage du véhicule, du besoin réel de financement. Ses objectifs n'apparaissent pas clairement, entre la structuration de la filière qui supposerait des moyens très importants, l'aide aux communes les moins à même de financer elles-mêmes leur achat qui supposerait un ciblage des petites communes (a contrario, subvention de 3000 € pour la commune de Denain (Nord, 20 400 habitants), pour un seul véhicule), la constitution d'une flotte qui supposerait, par exemple, de conditionner la subvention au fait que la commune finance elle-même plusieurs véhicules.
D'une façon générale cependant, et depuis plusieurs années, l'ADEME cherche à passer de ce mode « guichet » à un mode « projet », dans lequel elle est à la fois plus directive et plus sélective. Il faut y voir un impact des recommandations sur l'usage des aides d'Etat pour la protection de l'environnement, car les aides de l'Agence sont conçues pour ne financer que des actions qui permettent d'atteindre une performance environnementale ou énergétique supérieure aux normes communautaires. Le montant de l'aide doit en particulier être limité au minimum nécessaire pour obtenir la protection de l'environnement recherchée. Les coûts éligibles pour l'aide sont donc fondés sur la notion de coût supplémentaire nécessaire pour atteindre les objectifs fixés en matière d'environnement. Les coûts admissibles des aides à l'environnement sont généralement calculés en fonction du niveau d'économie d'énergie ou de protection de l'environnement par rapport au niveau requis par les normes communautaires. L'application de ces critères dans les dispositifs d'aide contribue à limiter sensiblement les effets d'aubaine puisque le niveau d'intervention de l'ADEME dépend de la performance recherchée par le porteur de projet.
Dans le fonds Chaleur, l'aide dépend de la chaleur produite par l'installation subventionnée. Cette aide doit permettre à la chaleur renouvelable d'être vendue à un prix inférieur d'au moins 5 % à celui de la chaleur produite à partir d'énergie conventionnelle, ce qui est supposé déclencher des projets performants sur le plan énergétique Le MEEDDM précise que, dans le cadre du fonds Chaleur, des seuils minimaux visent à mettre l'accent sur des projets de taille plus importante que ceux soutenus jusque là par l'ADEME..
Le nouveau système d'aide déchets prévoit des objectifs de résultats pour les programmes locaux de prévention en fonction desquels est calculée une aide forfaitaire maximale selon un barème par tranches dégressives.
Par ailleurs l'Agence met en place (ou est partenaire) de nombreux appels à projets qui permettent de sélectionner les projets les plus innovants suivant des critères définis au sein de comité réunissant les experts du secteur. La mise en concurrence opérée entre les porteurs de projets contribue ainsi à réduire les effets d'aubaine en permettant de retenir les projets les plus pertinents d'un point de vue environnemental avec le minimum d'aide possible. Dans le cadre des politiques conjointes avec les conseils régionaux (CPER), l'ADEME et ses partenaires ont souvent recours aux appels à projet pour faire émerger et sélectionner des dossiers sur la base de critères exigeants.
Le risque de financer des projets immatures ou trop fragiles
L'article 8 des règles générales de distribution et de règlement des aides permet à l'ADEME de retirer unilatéralement le bénéfice d'une aide, en cas de manquement du bénéficiaire à ses obligations, ou de non-respect de la durée d'exécution d'une opération.
- les projets qui avortent et ne vont pas à leur terme : au regard du volume des aides de l'Agence, les montants en cause restent modestes, même s'ils ont plus que doublé en 2009. Si la décision de retrait est avérée, l'aide versée demeure acquise au bénéficiaire, dès lors que les dépenses effectuées ont été justifiées et la décision ou la convention est soldée en l'état. Si les dépenses ne peuvent être totalement justifiées, un titre de recettes est alors adressé au bénéficiaire pour reversement du trop perçu.
Projets n'allant pas à leur terme
2007 |
2008 |
2009 |
|
Nombre d'ordres de reversement et de titres de recettes |
82 |
53 |
99 |
Montants concernés (K€) |
477,8 |
340,8 |
795,5 |
Source : ADEME
- les projets qui sont retardés : dans le cas où il est prévisible que l'opération n'aboutisse pas dans les délais prévus initialement, l'ADEME, en accord avec le bénéficiaire, établit un avenant pour modifier la durée du contrat. Le tableau ci-dessous présente, pour chaque année d'engagement juridique, le nombre d'avenants de prolongation établis rapporté au nombre de contrats de l'année. En moyenne, le nombre d'avenants de prolongation représente 8 % des contrats engagés juridiquement pendant une année. Il est en constante diminution depuis 2005, pour atteindre 1,3 % des engagements juridiques au titre de l'exercice 2009.
Projets retardés
Situation au 16 mars 2010 |
exercice engagement juridique 2004 |
exercice engagement juridique 2005 |
exercice engagement juridique 2006 |
exercice engagement juridique 2007 |
exercice engagement juridique 2008 |
exercice engagement juridique 2009 |
||||||
Nbre |
% |
Nbre |
% |
Nbre |
% |
Nbre |
% |
Nbre |
% |
Nbre |
% |
|
nbre d'avenant de prolongation |
1170 |
8 |
1334 |
12,2 |
1210 |
9,5 |
1016 |
8,8 |
730 |
5,6 |
185 |
1,3 |
nbre contrats engagés juridiquement |
14 546 |
10 965 |
12 700 |
11 547 |
12 938 |
14 283 |
Source : ADEME
Le risque d'inefficacité, faute de contrôle
A l'appui de sa demande, le bénéficiaire doit fournir des données précises telles que la puissance prévisionnelle de l'installation en kW (chaufferies biomasse, générateurs photovoltaïques), le tonnage de déchets valorisé prévisionnel (ex : équipements de gestion biologique des déchets, optimisation d'installation existantes de traitement des déchets, équipements de valorisation des déchets, déchèteries...), les tonnes équivalent CO² évitées (ex. : opérations de méthanisation, opérations d'efficacité énergétique dans le bâtiment, opérations d'efficacité énergétique en industrie et agriculture...). La consolidation de ces données permet, en outre, de produire les résultats des indicateurs du contrat d'objectifs entre l'Etat et l'Agence et ceux des rapports annuels de performance des programmes du budget de l'Etat qui concernent l'Agence.
L'ADEME effectue, au moment du versement de l'aide, un contrôle systématique de réalisation de l'opération et de l'effectivité de la dépense par l'application des dispositions de l'article 6.3 des règles générales, les bénéficiaires d'aides étant payés (à l'exception du versement d'une éventuelle avance à notification) sur présentation d'un état récapitulatif des dépenses certifié sincère, accompagné des pièces justificatives et de documents de synthèse (rapport des études financées ou bilan d'opération à rendre par le bénéficiaire).
En outre, l'Agence procède à des visites sur place, les ingénieurs responsables des dossiers pouvant vérifier l'effectivité des réalisations. De plus, certaines directions régionales font appel à des prestataires pour évaluer le bon fonctionnement des installations aidées. Dans le cadre de la gestion des fonds FEDER, les contrôles sur place par les ingénieurs de l'Agence sont systématisés, 20% des opérations devant faire l'objet d'une telle visite.
Au-delà de ces contrôles, l'ADEME a fait évoluer ses dispositifs d'aide dans le cadre des opérations Grenelle, pour mettre en oeuvre des contrats de résultats intégrant une composante de suivi sur quelques années des opérations aidées dans le cadre du Fonds chaleur et du Fonds déchets.
Enfin, une démarche d'externalisation d'une partie significative de ces contrôles est en cours au sein de l'Agence afin de mettre en place un dispositif permettant d'augmenter le nombre de contrôles, de systématiser et d'harmoniser les pratiques de vérification. Le nouveau dispositif a pour objectif d'assurer un échantillonnage tenant compte des risques encourus et d'augmenter la traçabilité et la consolidation des résultats obtenus. Un premier exercice harmonisé de visites sur place est prévu à l'automne 2010.
Le risque éthique
La distribution d'aides publiques, à plus forte raison dans le contexte de la forte croissance des moyens de l'ADEME, crée un risque éthique à deux égards : pour les administrateurs et les membres des commissions des aides, un risque de conflit d'intérêt ; pour les agents de l'Agence, le risque d'une trop grande proximité avec les demandeurs, susceptible a minima de nuire à leur neutralité, et au pire de générer de la fraude.
Les personnalités qualifiées siégeant dans les organes décisionnels (conseil d'administration) et délibératifs (commissions nationales des aides, commissions régionales des aides) peuvent être exposées au risque pénal de prise illégale d'intérêts lorsqu'elles interviennent dans le processus d'attribution d'aides à tous « organismes tiers » dont elles sont les représentants ou dans lesquels elles ont des intérêts. Afin de prévenir ces risques, le conseil d'administration a institué en 2001 une commission de transparence, chargée de vérifier si les personnes morales de droit privé dans lesquelles les administrateurs seraient associés, gérants, administrateurs, directeurs généraux, membres du directoire ou du conseil de surveillance, ou actionnaires disposant de plus de 10 % de droits de vote, ont passé des contrats avec l'ADEME. Le mécanisme a été renforcé en 2003 et 2006. Depuis 2005, des règles du même ordre sont applicables au sein des commissions régionales et nationales des aides.
En ce qui concerne ses agents, l'Agence a édicté en 2008 des recommandations pour éviter tout risque potentiel de conflit d'intérêts et de prise illégale d'intérêts. Ainsi, tout agent qui aurait un intérêt dans une association sollicitant une aide financière de l'ADEME ou étant susceptible de passer un marché avec l'Agence doit en informer son chef de service. Il s'attachera ensuite, en lien avec son responsable hiérarchique, à ne participer à aucune instance informelle, consultative ou décisionnelle intervenant tant au plan de l'élaboration de l'accord contractuel qu'à celui de sa formalisation et de son exécution. Pour prévenir le manquement à la neutralité, la fraude et la collusion, la « base de tiers » permet de vérifier qu'il n'y a pas « d'abonnés ». Les débats de chaque CNA ne sont pas publics. Les membres de ces commissions sont tenus à un devoir général de confidentialité.
2. Les risques du point de vue des bénéficiaires
La complexité née de la multiplication des dispositifs d'intervention
Les services de l'ADEME appliquent 14 délibérations différentes sur les régimes d'aide, mais chacune se subdivise en plusieurs interventions possibles. Le moteur de recherche du portail de l'Agence fait apparaître, en réponse à une requête sur l'ensemble des aides accessibles, tous types d'aides, tous secteurs et tous thèmes confondus, 86 réponses pour les entreprises et 93 pour les collectivités locales. Ce dispositif paraît difficile à comprendre pour les bénéficiaires et difficile à gérer pour les services de l'ADEME, d'autant que chaque aide doit aussi être ventilée, pour les besoins de la comptabilité analytique, dans une des catégories de la nomenclature LISA qui comporte près de 2250 lignes.
Pour traiter ce risque, l'ADEME publie des supports de présentation de son offre, par grandes catégories de bénéficiaires, et apporte des réponses personnalisées à ceux qui la sollicitent. Une amélioration possible résiderait également dans des tentatives de rationalisation des dispositifs d'intervention, mais la diversité des champs et des modes d'intervention de l'Agence ne s'y prête guère. Cette situation renvoie aux constats faits au début du présent rapport, sur le flou qui entoure la vocation de l'ADEME et sur sa volonté, compréhensible mais facteur de lourdeurs et de complexités, d'intervenir « tous azimuts » y compris dans des secteurs qui ne constituent pas son coeur de cible (agriculture, transport, etc...).
La complexité née de la juxtaposition de financeurs publics
Les domaines d'intervention de l'Agence sont aussi ceux des collectivités locales (régions et, dans une moindre mesure, départements) et de l'Union Européenne principalement à travers le FEDER. Le risque existe que les demandeurs se perdent dans les circuits administratifs.
La réponse de l'ADEME réside dans la mise en oeuvre de politiques conjointes avec les conseils régionaux et l'Etat dans chaque région, incluant la gestion de fonds FEDER. Elle permet de proposer aux maîtres d'ouvrages un guichet unique, une instruction partagée (le plus souvent réalisée par l'Agence pour le compte des partenaires) et un dispositif de soutien coordonné (bouclage et clarté du plan de financement des maîtres d'ouvrage et des soutiens publics associés au moment des prises de décisions).
Les délais d'instruction et de paiement
L'ADEME ne suit aucune donnée sur les délais d'instruction, c'est-à-dire sur le temps qui sépare le dépôt de la demande de subvention de la décision d'octroi ou de refus. Elle ne suit et ne pilote, depuis 2005, que les délais qui séparent l'engagement comptable de l'engagement juridique, autrement dit le temps écoulé entre la fin de l'instruction technique du dossier et la notification au bénéficiaire, qui englobe la comitologie, le temps de rédaction du support juridique et sa signature. Les services ne sont mis en tension que sur une phase relativement tardive du processus, car ce pilotage obéit davantage à une logique budgétaire qu'à une logique de satisfaction des usagers, ce qui, selon la Cour, devrait être corrigé.
Sur les délais qu'elle suit, néanmoins, les résultats de l'ADEME traduisent une amélioration de la performance : le délai moyen qui sépare l'engagement comptable de l'engagement juridique, tout en restant relativement élevé, diminue depuis 2007 (51 jours fin 2007, 46,8 jours fin 2009) malgré l'augmentation de 10 % du nombre de dossiers liés aux fonds Grenelle. De même, le stock de contrats en engagement comptable non engagés juridiquement depuis plus de six mois, suivi mensuellement dans le tableau de bord du comité de direction (CODIR) et qui fait l'objet de relance de la part du siège, est passé de 149 en 2007 à 33 en 2009.
S'agissant des délais de paiement, l'article 6.3 des règles générales d'attribution et de versement des aides impose à l'ADEME de mandater les aides dans un délai de 45 jours à compter de la réception des justificatifs. Le CODIR suit mensuellement depuis janvier 2008 un indicateur de délai entre la date de certification du service fait et le paiement. Stabilisé entre 15 et 18 jours en 2008 et début 2009, l'indicateur a crû progressivement entre mai 2009 et janvier 2010, pour atteindre 30 jours. Selon l'Agence, ce glissement serait principalement lié à une réorganisation dans les systèmes d'information de l'ADEME et à l'ouverture d'une semaine d'inventaire complémentaire en janvier pour la certification des échéances devenues exigibles pendant les congés de fin d'année. Ces deux opérations auraient retardé d'environ deux semaines l'ouverture des budgets et donc le mandatement.
Par ailleurs, le volume d'échéances certifiées mais non encore mandatées est suivi chaque mois dans le tableau de bord du CODIR. Pour l'ensemble de l'Agence, le niveau d'étiage de cet agrégat se situe aux alentours de 5 M€. Lorsque cette valeur commence à augmenter, les listes des dossiers concernés sont diffusées par le siège aux unités de gestion concernées, afin de faire le nécessaire pour mandater rapidement. Enfin, depuis début septembre 2009, le volume de mandats transmis à l'agence comptable mais non encore pris en charge figure dans les courbes hebdomadaires d'engagement et de mandatement produites pour le CODIR. Ce montant s'est jusqu'à présent situé entre un minimum de 14 M€ (début septembre 2009 et fin février 2010) et un maximum de 50 M€ (mi-décembre 2009).
Suivi de la satisfaction des bénéficiaires
L'ADEME n'a mis en place aucun dispositif systématique et formalisé de suivi de la satisfaction des bénéficiaires sur les processus de distribution des aides. Ce type de dispositif pourrait faire partie, plus généralement, d'une démarche de certification qualité de ces processus, qui trouveraient leur justification dans leur caractère massif et dans l'intérêt d'une démarche de progrès continu. Il est regrettable qu'aucune initiative n'ait été prise en ce sens, et qu'aucune certification ne soit envisagée à l'avenir.
III. LES AUTRES INTERVENTIONS
A. COMMUNICATION ET FORMATION (= CONVAINCRE ET MOBILISER)
Les actions de « communication et formation » s'élèvent à 72,7 M€ en interventions en 2010, pour 19,6 M€ de fonctionnement et 205 ETPT, essentiellement au siège (seulement 4,2 M€ sont contractualisés en 2009).
L'ADEME réalise des actions d'information et des campagnes de communication de grande ampleur pour faire évoluer les mentalités, les comportements, et les actes d'achat et d'investissement. Elle assure la mise en oeuvre opérationnelle de la communication globale pour la mutation environnementale de la société. L'indicateur clé de l'activité est le suivi de l'évolution de la sensibilisation du public et du passage à l'acte par un baromètre annuel de l'opinion. De ce point de vue, la performance est plutôt supérieure pour les campagnes de l'agence que pour les campagnes d'intérêt général ou gouvernementales.
Les dispositifs permettant de répondre aux questionnements suscités par les campagnes sont principalement les « espaces info énergie » (EIE), au nombre de 230 sur le territoire, soit 400 personnes environ, dont l'ADEME prend pour partie en charge les coûts de fonctionnement, et plus indirectement le site internet (12 millions de consultations par an). L'indicateur clé est le nombre de demandes d'informations traitées dans l'année : 1,7 million 41
en 2009, en augmentation (téléphone azur, site internet, EIE). L'enjeu est à la fois quantitatif et qualitatif pour l'Agence : comment répondre à un nombre croissant d'interrogations sans faire exploser les coûts des EIE ? Comment s'assurer que la qualité des réponses est suffisante ?
B. CONSEIL ET EXPERTISE (=CONSEILLER)
Le conseil et l'expertise représentent 21,4 M€ en interventions en 2010, pour 19,9 M€ de fonctionnement et 208,9 ETPT. Cette activité de restitution des savoirs acquis recouvre :
- l'expertise au service de l'Etat (30 % des ETP de l'activité) : elle est suivie par un indicateur « nombre d'ETP mobilisés pour l'expertise auprès de l'Etat ». En 2009, le résultat est de 75 pour une cible de 55, car l'ADEME a été fortement sollicitée par l'Etat pour travailler sur la taxe carbone, la révision des barèmes de bonus-malus automobile, le Grand emprunt etc. En d'autres termes, l'Etat absorbe pour ses besoins propres une ressource humaine financée par des taxes affectées, ce qui conforte le constat déjà fait d'une Agence support de la débudgétisation des activités de l'Etat, et en particulier de son administration centrale. L'ADEME est d'ailleurs demandeuse d'une rationalisation des sollicitations de l'Etat.
- l'élaboration d'outils et de méthodes (guides, publications, colloques - 23 % des ETP) : c'est l'un des moyens de diffuser les enseignements tirés des expériences pilotes évoquées plus haut.
- la diffusion directe et par des relais de conseils de qualité (près de 50 % des ETP de l'activité, y compris l'animation des EIE). Le conseil direct concerne l'aide apportée aux maîtres d'ouvrage dans les phases amont du montage de leurs opérations, le conseil indirect concerne le soutien, l'animation et la professionnalisation de réseaux d'acteurs professionnels pour démultiplier son offre. Les ressources de l'ADEME ne lui permettront pas de jouer seule ce rôle à proportion de ce qu'exigerait la transition environnementale ; la question des relais et des réseaux est donc fondamentale et mérite que l'ADEME y prête une meilleure attention.
Ces réseaux sont de nature diverse : réseaux d'experts, d'utilisateurs d'outils de l'agence, d'échange sur des thématiques particulières (ex : réseau friches industrielles), d'acteurs internationaux etc. Dans son rapport de performance 2009, l'ADEME avance les chiffres de 360 réseaux d'acteurs.
Un tableau de recensement de ces réseaux a été fourni à la Cour dans le dossier d'examen des projets de service de deux directions régionales. Il fait apparaître :
- une densité très variable d'une région à l'autre ;
- l'absence fréquente de certains réseaux avec lesquels l'ADEME a pourtant conclu des accords cadres nationaux : conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement (CAUE) ; coopératives d'utilisation du matériel agricole (CUMA) ; chambres de commerce et d'industrie etc.) ;
- l'absence fréquente de réseaux qui paraissent pourtant relever naturellement de l'initiative des directions régionales (ex : Comptacoûts sur les déchets, Qualit'EnR sur les énergies renouvelables) ;
- une absence de certains réseaux dans des régions importantes : aucun réseau bois énergie dans de grandes régions productrices (Aquitaine, Franche-Comté, Limousin), aucun réseau sur l'énergie solaire dans les DOM ;
- la mise sur le même plan de réseaux très différents dans leur contenu comme dans la capacité de l'ADEME à les animer : réseau des prestataires (ex : artisans du BTP), d'organismes de conseil (ex : CAUE, EIE, CTI), de techniciens (ex : correspondants déchets), de prescripteurs (ex : agences d'urbanisme).
Au total, il ressort la même impression que sur les projets pilotes : hétérogénéité selon les régions, peu de pilotage, sentiment que l'ADEME se greffe sur des initiatives locales sans définition de priorités par le siège, chaque région mettant sous le vocable « réseaux » des groupes qui peuvent être très différents. Pour démultiplier son action, l'Agence gagnerait à être, non pas plus présente dans les réseaux, mais mieux présente : laisser vivre ceux qui se développent sans elle, activer ceux qui ont des difficultés si leur plus-value le justifie.
PARTIE IV : IMPACT DU « GRENELLE »
I. UN PREMIER BILAN DE L'UTILISATION DES FONDS « GRENELLE »
A. LE FONDS DEMONSTRATEUR DE RECHERCHE
L'ADEME assure le pilotage technique, administratif et financier du fonds mis en place en 2008 dont l'objet est de valider en grandeur réelle les technologies émergentes en amont de la phase de déploiement industriel et commercial. Doté de 375 M€ sur la période 2009-2012 (214 M€ en crédits de paiement), il vise plus spécifiquement le captage et le stockage de CO², l'énergie solaire, les biocarburants de 2ème génération, le stockage et la gestion de l'énergie, les véhicules hybrides et électriques, les énergies marines et les bâtiments à énergie positive.
L'ADEME est chargée de rédiger, pour chacune des filières, des « feuilles de route » stratégiques, scientifiques et techniques, de préparer et de lancer auprès des industriels des appels à manifestation d'intérêt (AMI), enfin de sélectionner des projets qu'elle accompagnera financièrement. Depuis juillet 2008, l'ADEME a publié 6 AMI sur les véhicules décarbonés (2 appels), les biocarburants de 2ème génération, le captage et stockage du carbone, l'intégration des énergies renouvelables aux réseaux énergétiques et réseaux intelligents et énergies marines. Trois appels à manifestation d'intérêt ont été instruits, donnant lieu à des aides (pour un montant de 116 M€ d'engagements juridiques), les trois autres AMI ayant été lancés courant 2009. Alstom, EDF, GDF, Suez et Armines se sont associés pour la réalisation d'un premier démonstrateur de captage du CO² (projet Pil-Ansu). Pour les véhicules décarbonés, les consortiums porteurs de projet associent de grandes entreprises telles que Michelin, Renault, PSA, Valéo, EDF ainsi que des PME innovantes.
Par ailleurs, l'ADEME et les groupes d'experts nationaux qu'elle pilote préparent des feuilles de route stratégiques sur six autres thématiques : solaire photovoltaïque ; solaire thermodynamique ; stockage de l'énergie ; mobilités urbaines ; bâtiments et îlots à énergie positive, et biocarburants avancés. Ces feuilles de route pourront servir de base à de futurs AMI initiés soit dans le cadre du fonds démonstrateur, soit dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir confiés à l'Agence.
Les crédits du fonds démonstrateur
Appels à manifestation d'intérêt (en M€) |
Autorisations d'engagement |
||
2009 |
2010 |
2011 |
|
Véhicule 1 |
57 |
||
Véhicule 2 |
22 |
||
Biocarburants |
50 |
||
Captage stockage CO² |
38 |
67 |
|
Energies marines |
8 |
12 |
|
Réseaux |
20 |
||
Solaire |
15 |
8 |
|
Mobilité |
18 |
7 |
|
Bâtiment |
25 |
||
Sous-Total annuel |
175 |
160 |
40 |
Total
|
375 |
Source : EPRD 2010
La mise en oeuvre du programme des investissements d'avenir va conduire à faire évoluer la nature, la répartition et le financement des crédits tels que décrits dans le tableau présenté.
B. LE FONDS CHALEUR
En application de l'article 19 de la loi Grenelle I, le fonds Chaleur est destiné à soutenir le développement de la chaleur produite à partir de sources renouvelables dans les secteurs de l'habitat collectif, du tertiaire et de l'industrie. L'objectif correspond à 25 % des 20 Mtep supplémentaires nécessaires pour que les énergies renouvelables représentent 23 % de la consommation finale d'énergie en 2020.
Ce fonds vise à apporter aux entreprises et aux collectivités des aides financières qui doivent permettre d'assurer une rentabilité normale aux projets de valorisation thermique d'énergies renouvelables. Les énergies concernées sont la biomasse sylvicole ou agricole, y compris le biogaz, l'énergie solaire thermique, la géothermie valorisée directement ou par l'intermédiaire de pompes à chaleur et la chaleur de récupération via les réseaux de chaleur.
Le lancement du fonds a donné des résultats très encourageants. Un premier appel à projets Biomasse Chaleur Industrie Agriculture (BCIA) a permis de retenir 32 projets représentant une production de chaleur de 148 000 tep. Un second appel à projets national sera lancé. Dans les autres segments, la croissance sera particulièrement forte sur les réseaux de chaleur alimentés par la biomasse ou par la géothermie, avec de nombreux projets déjà identifiés. Dans les régions les plus touchées par la tempête « Klaus », le 2 janvier 2009 (Aquitaine et Midi-Pyrénées), six projets d'approvisionnement issu de bois chablis ont été retenus, permettant de valoriser le bois abattu par la tempête.
C. SITES POLLUES (20 M€ EN CP)
L'ADEME est chargée, pour le compte des pouvoirs publics, de la maîtrise d'ouvrage des travaux rendus nécessaires pour la mise en sécurité des sites pollués lorsque le responsable est reconnu économiquement défaillant, afin de placer ces sites dans un état tel qu'ils ne portent pas atteinte à l'environnement et à la santé humaine.
Pour tous les sites à responsables défaillants dont le traitement dépasse le cadre d'une année, une évaluation pluriannuelle devrait être faite afin d'informer les administrateurs et les tutelles de l'ADEME sur les engagements financiers que représente la maîtrise d'ouvrage sur les sites à responsable défaillant. L'exemple des anciennes mines d'or du Châtelet à Budelière (Creuse) montre l'intérêt pour l'Agence de mieux connaître à l'avance le montant de ses engagements financiers. En dépit des améliorations annoncées à la suite du précédent contrôle de la Cour, l'observation alors formulée conserve une part d'actualité.
L'action que l'ADEME développe au titre du « Grenelle » consiste à intensifier les programmes d'actions correspondants. L'Agence incite également à la réhabilitation de friches industrielles. Cet axe d'intervention a été renforcé, en 2009, dans le cadre du Plan de relance, afin d'accélérer la reconquête des friches ayant accueilli des activités polluantes et de rendre ainsi possibles les projets d'aménagement urbain entravés par ces pollutions.
D. POINTS NOIRS BRUIT (30 M€ EN CP)
L'ADEME a été chargée, dans le cadre du Grenelle, de mettre en place un plan pour la résorption des points noirs du bruit (PNB) des infrastructures de transports terrestres, en articulation avec les actions du MEEDDM. Le plan bruit est en priorité axé sur les points noirs du réseau routier départemental et des agglomérations, sur le réseau ferroviaire, ainsi que sur les réseaux nationaux. Il s'agit d'opérations de traitement à la source sur les infrastructures, complétées, le cas échéant, par des traitements acoustiques des façades des bâtiments exposés. Elles font l'objet d'une contractualisation de l'ADEME avec les maîtres d'ouvrages de ces opérations. La résorption des points noirs bruit s'accompagne également de la création d'observatoires du bruit, en synergie avec des observatoires existants pour d'autres sujets.
L'ADEME concourt, par ailleurs, à résorber les PNB du réseau routier national non délégué et sous maîtrise d'ouvrage de l'État. Elle abonde ainsi deux fonds de concours du MEEDDM : au titre du programme 181 pour le soutien au traitement de façades et au titre du programme 203 pour les travaux sur les infrastructures routières.
E. COMMUNICATION (33 M€ EN CP)
Par ses actions de communication, l'ADEME valorise la démarche du Grenelle et les décisions gouvernementales pour susciter l'adhésion des Français aux choix majeurs faits par l'Etat et inciter à la nécessaire mutation des comportements dans tous les domaines et pour chaque acteur socio-économiques (entreprises, collectivités, associations, administrations).
Dans ce contexte, l'ADEME poursuit la campagne institutionnelle Grenelle lancée en 2009 « Entrons dans le monde d'après » ainsi que les campagnes thématiques à vocation « passage à l'acte » : maîtrise de l'énergie, réduction des déchets... L'ADEME accentue le dispositif de réponses au public avec notamment le renforcement du réseau d'information de proximité des Espaces Info-Energie (EIE), l'optimisation de son site internet, la contribution aux actions d'éducation à l'environnement, la présence sur les principaux salons grand public et la promotion des principales mesures du Grenelle comme le prêt à taux zéro.
Pour mobiliser les professionnels, l'ADEME poursuit la promotion des fonds Grenelle qui lui sont confiés. Elle organise la promotion de son offre en direction des entreprises et des collectivités, participe aux principaux salons professionnels, organise des colloques techniques sur ses thématiques et démultiplie enfin ses actions de formation.
F. PLAN DECHETS (83 M€ EN CP)
La réalisation des engagements du Grenelle dans le domaine des déchets suppose des efforts importants des acteurs locaux (collectivités territoriales et entreprises, mais aussi grand public) pour réduire à la source la production des déchets et améliorer leur recyclage et leur valorisation.
Le plan de soutien de l'ADEME à cette politique est articulé autour des axes suivants :
- la prévention, avec notamment le soutien aux plans et programmes locaux de prévention mis en oeuvre par les collectivités territoriales, au compostage domestique, aux investissements de type "recyclerie", à la mise en place d'une tarification incitative du service déchets auprès des particuliers et au développement de l'éco-conception au sein des entreprises ;
- le développement des filières de responsabilité élargie des producteurs (REP), en contribuant à la création de nouvelles filières (déchets dangereux diffus, mobilier,...) et à l'amélioration des performances et de la régulation par l'État des filières existantes ;
- le recyclage des déchets ménagers, industriels et du BTP, avec des soutiens aux investissements publics et privés ;
- la valorisation des déchets organiques, avec des aides aux opérations de compostage ou méthanisation ;
- le développement d'actions d'accompagnement et de structuration allant de la recherche (nouvelles technologies, amélioration des connaissances notamment quant aux impacts,...) à la sensibilisation du grand public (poursuite de la campagne « Réduisons vite nos déchets, ça déborde! »), en passant par le renforcement des dispositifs locaux et nationaux d'observation.
II. CROISSANCE ET EVOLUTION DE L'ACTIVITE
En faisant de l'ADEME l'opérateur de la transition environnementale, l'Etat lui assigne une mission extrêmement ambitieuse : être le vecteur du changement d'un modèle de société. Pour y faire face avec des ressources limitées, même si elles ont fortement crû, l'Agence doit reconsidérer ses modes d'intervention.
A. L'EXEMPLE DES AIDES
L'ADEME suit, au titre du volume de son activité, l'indicateur du nombre de contrats d'intervention faisant l'objet d'un engagement juridique dans l'année. Ainsi, 14 618 contrats ont été engagés en 2009, dont 1 530 sur crédits Grenelle, soit une hausse de 10 % par rapport à 2008. L'impact du Grenelle sur la gestion est donc pour l'instant resté contenu, grâce à l'augmentation du montant moyen des contrats engagés juridiquement (multiplié par 2,3 entre 2008 et 2009 : de 23 K€ à 52 K€), mais il vient se greffer sur un volume d'aides déjà très important.
L'ambiguïté de cet indicateur tient au fait que ces contrats recouvrent indifféremment des aides proprement dites et des dépenses de fonctionnement rattachées au budget d'intervention, en particulier pour les activités « convaincre et mobiliser » (achats d'encarts publicitaires, locations de salles pour l'organisation de formations, etc.), qui représentent environ le tiers du nombre total de contrats. Cette assimilation prive de pertinence le ratio, pourtant calculé par l'ADEME, du montant moyen des contrats engagés, tiré vers le bas par la masse de petits achats.
Si ne sont retenues que les aides proprement dites qui nécessitent une instruction, le total est de 7158 contrats en 2009, soit environ 50 dossiers par ETP et par an en matière d'aides à la concrétisation, contre environ 10 dossiers par ETP et par an en matière de recherche. Cet écart tient à la lourdeur de l'instruction et du suivi en matière de recherche, dans le cadre d'appels à projet.
L'analyse fait apparaître l'importance numérique essentielle des aides à la décision. Selon l'ADEME, du fait de l'emploi du dispositif « d'opérations groupées », le nombre de contrats élaborés par l'Agence est réduit, tout en démultipliant le nombre d'aides délivrées, ce qui permettrait de préserver les ressources d'expertise.
Une partie de ces contrats est peu exigeante en termes d'investissement des instructeurs. Les pré-diagnostics représentent ainsi des dossiers très standards, basés pour la majorité sur des cahiers des charges prédéfinis par l'ADEME qui sont imposés aux bureaux d'étude pour que l'action soit éligible au système d'aide, et qui, de ce fait, mobilisent peu les ingénieurs. Au contraire, les diagnostics ou études de projets impliquent un accompagnement plus important. Il n'en est pas moins étonnant que l'Agence consacre encore une part importante de ses ressources d'expertise, et dans une moindre mesure de ses ressources financières, à un mode d'intervention qui, tout en jouant un rôle dans le passage à l'acte, se justifie de moins en moins dans un contexte où les préoccupations du développement durable se sont largement diffusées chez les maîtres d'ouvrage, et où les ressources d'ingénierie ne manquent pas sur le marché.
B. L'EXEMPLE DES FORMATIONS
L'ADEME est conçue comme un centre de ressources et d'expertises, et elle exerce à ce titre une importante activité de formation, qui se développe rapidement. Dans ce cadre, elle opère à la fois comme concepteur de modules et de supports, en amont, et comme gestionnaire de stages. En revanche, les agents de l'Agence n'interviennent que très rarement en tant que formateurs. La transition environnementale va créer des besoins de formation que l'ADEME estime très importants, sans les avoir encore chiffrés. Elle a déjà enregistré un pic d'inscriptions dans les formations qu'elle organise sur le Bilan carbone ® au premier semestre 2010. Cette formation avait d'ailleurs fait l'objet d'une évaluation en 2008 qui mettait déjà clairement en relief le risque d'engorgement.
Le catalogue des formations de l'ADEME recense, en 2010, près de 50 modules pour lesquels plusieurs sessions peuvent être prévues. Or, ce sont les agents de l'Agence qui gèrent ces stages. Il en résulte une charge matérielle importante de suivi des inscriptions, de collecte des droits d'inscription, de gestion matérielle des stages etc. Pour l'ADEME, à ressources et organisation constantes, il en résulte deux risques : l'impossibilité de répondre à une demande croissante sur les stages qu'elle organise elle-même et l'incapacité de contribuer, en amont, au contenu de formations dispensées par d'autres sur des sujets clés qui relèvent de son expertise (dans le secteur du bâtiment, en particulier).
C. LES REPONSES APPORTEES PAR L'AGENCE
L'ADEME s'est attachée à prendre des mesures pour contenir le coût des processus de distribution des aides et tenter de recentrer l'emploi de ses ressources sur des tâches réellement prioritaires, mais des marges de progression importantes subsistent encore.
L'Agence poursuit, en premier lieu, l'objectif de simplifier et davantage automatiser la gestion des aides, notamment par un raccourcissement du circuit de la dépense, un allègement des contrôles a priori et la mise à disposition d'un outil informatique qui génère les conventions à partir des données de base saisies par les instructeurs. L'Agence en attend des avantages en termes de productivité, sans effet significatif dans l'immédiat. 48
L'ADEME s'interroge, en deuxième lieu, sur la possibilité d'adapter ses modalités de gestion à son volume d'activités, par exemple en externalisant des dossiers standards et de petite taille, ou en renvoyant vers le marché l'exercice de certaines de ses missions. Les réflexions sont en cours, en particulier dans le secteur de la formation, mais elles n'avaient pas encore abouti à la clôture de l'instruction. L'Agence souhaite réaliser elle-même un nombre plus réduit de formations, lorsque le sujet reste mouvant ou pour rôder des formations sur des sujets émergents. Ce recentrage aurait pour corollaire, par ordre croissant d'ambition, un recours plus important à la sous-traitance, l'octroi de licences de diffusions de modules par ses soins, voire la création d'une filiale à l'actif de laquelle figureraient les droits sur ces modules. Le comité d'entreprise du 6 octobre 2009 a examiné sans conclure l'éventualité d'un montage qui permettrait à l'ADEME de conserver le contrôle des formations « Bilan carbone » tout en étant délivrée d'une charge sans rapport avec son expertise. Il pourrait s'agir d'une filialisation, permettant de valoriser la marque, ou d'une labellisation de bureaux d'étude. La décision reste à prendre sur ce point, et la réflexion pourrait d'ailleurs être étendue à d'autres outils déposés par l'Agence et pour lesquels elle assure également des formations : AEU ® (approche environnementale de l'urbanisme) ou Comptacoût ® (outil de gestion analytique des coûts du service public d'élimination des déchets). Au total, si l'objectif de productivité et d'efficacité est clair, les modalités d'une externalisation pour l'atteindre restent à préciser.
En troisième lieu, partant du constat que l'ADEME ne pourra pas satisfaire toutes les demandes ni s'investir utilement avec la même intensité dans tous ses domaines d'intervention, la direction cherche à renforcer l'affirmation de priorités nationales en les articulant avec des priorités régionales. Cet exercice de mise en cohérence est d'autant plus difficile que les priorités locales sont pour partie contractualisées avec les régions dans les CPER. Cet exercice n'est naturellement pas inconnu à l'ADEME qui fonctionne avec des contrats d'objectifs depuis plusieurs années, mais il ne revêtait jusqu'à présent ni la même importance ni la même urgence. Il tolérait facilement une certaine dispersion. En 2009 encore, la direction régionale de Nord-Pas-de-Calais avait retenu 32 projets phares ...
Pour le siège, le dernier dispositif en date repose sur l'élaboration de notes d'orientation des directions exécutives, sur la déclinaison de ces notes dans les feuilles de route des directions (fin mars 2010) et sur l'écriture des projets de service des unités de gestion (fin avril 2010), avec une définition éclairante de la notion de priorité : « une priorité est une action dont la non-réalisation a un impact grave sur la stratégie de l'agence et sur son image et son positionnement vis-à-vis de ses partenaires ». Toutefois, l'exercice se révèle difficile : les notes d'orientation des trois directions exécutives pour 2010 font apparaître respectivement neuf priorités pour la DESRI (recherche et international), huit pour la DEP (direction exécutive programmes) et six pour la DEAT (direction exécutive action territoriale), la plupart comportant d'ailleurs plusieurs items. Il appartient désormais aux directions régionales de définir leur propres priorités à partir de cet ensemble, tout en tenant compte des spécificités locales.
Pour les directions régionales, une note de cadrage du 5 mars 2010 définit neuf priorités pour 2010, dont certaines très larges (« mettre en oeuvre les fonds Grenelle », « mettre en oeuvre des objectifs de qualité de gestion »), souvent subdivisées et sans hiérarchisation entre elles. L'ensemble reste donc relativement peu prescriptif.
Dans ce type de démarche, l'enjeu consiste moins à définir ce qui est prioritaire qu'à expliciter ce qui ne l'est pas et peut passer au second plan, voire être supprimé, car cela suppose une prise de responsabilité qui peut faire hésiter les acteurs locaux s'ils ne disposent pas de consignes du siège, et/ou conduire à des choix sensiblement différents selon les territoires. De ce point de vue, la note du 12 mars 2010 de la direction est positive en ce qu'elle demande de faire figurer dans les projets de service pour 2010 « les activités pour lesquelles l'action de l'agence est suspendue, repoussée ou arrêtée ». A la clôture du contrôle, ces projets de service n'étaient pas disponibles pour permettre la vérification de cette consigne.
Il ressort de la réponse de l'ADEME à une question sur ce point précis que l'exercice de hiérarchisation et de sélection rigoureuse auquel le Grenelle invite l'établissement reste à faire : « Il s'agit le plus souvent d'une mise en exergue des actions prioritaires qui conduit à considérer les autres actions non précisées comme des actions secondaires ou en creux ». Or, s'il peut paraître légitime de laisser une marge d'appréciation aux directions régionales sur ces sujets et de les responsabiliser dans leurs choix, la direction de l'Agence gagnerait à les sécuriser en explicitant les thèmes ou les modes d'intervention considérés comme secondaires.
En septembre 2010, il apparaît que le prochain budget triennal prévoit une stabilisation des ressources de l'Agence pour la partie Grenelle. Sur les marges de progression en termes d'externalisation, l'ADEME confirme qu'elle poursuit une politique active d'externalisation de certaines activités ; cette orientation est toutefois à articuler avec celle relative à la maîtrise des frais de sous-traitance (v. gestion de l'Agence). Le MEEDDM indique que le nouveau budget triennal 2011-2013 comporte une mesure de rationalisation de la gestion du Grenelle et de celle des investissements d'avenir : la clôture du fonds démonstrateur du Grenelle en fonction des projets financés dans le cadre de l'emprunt national.
PARTIE V : GESTION DE L'AGENCE
I. LES RESSOURCES HUMAINES
En tant qu'EPIC, l'Agence recrute ses collaborateurs par des contrats de droit privé. L'établissement ne relevant d'aucune convention collective de branche, les relations de travail sont régies par la convention de travail ADEME du 15 octobre 1993 et par les accords d'entreprise. Bien que le régime de travail des agents relève du Code du travail, la convention est fortement imprégnée par le droit de la fonction publique. Elle comprend une classification des emplois en 10 classes de poste (ou échelles) en fonction du niveau de compétences requis, du degré d'autonomie, des responsabilités mises en jeu, ainsi qu'une grille indiciaire comprenant pour chaque échelon un indice minimum et un indice maximum.
A. LES EFFECTIFS
Au 31 décembre 2009, les effectifs présents s'élevaient à 1032 personnes (929 sur postes budgétaires, 28 mis à disposition et 75 CDD 3 ( * ) ), soit une augmentation de 8,5% par rapport au 31 décembre 2008 et de 12% par rapport à fin 2007. Cette évolution s'inscrit dans l'augmentation du plafond des emplois permanents de l'établissement, qui s'établit à 878 ETPT en 2009 contre 833 auparavant 4 ( * ) ; il est saturé à hauteur de plus de 98% pour l'année 2009 (863,5 ETPT permanents). Ceci manifeste une réelle tension sur les effectifs, comme l'illustre également le dépassement du plafond des emplois temporaires (29,7 ETPT pour un plafond de 25 ETPT 5 ( * ) ), tensions accrues par le fait que les emplois devant être occupés par des agents permanents mis à disposition par le MEEDDM en 2009 n'ont pas été pourvus en totalité. Le recours à la sous-traitance et à l'intérim, bien que limité (équivalant respectivement à 6,77 et 9,51 ETP), s'accroît significativement (+19 et +38% durant la période sous revue).
S'agissant de la tension sur les effectifs et de la capacité de l'ADEME à assurer les engagements pris, le MEEDDM fait valoir les arbitrages réalisés dans le cadre du budget triennal. L'Agence bénéficiera de 32 emplois supplémentaires en 2011 par rapport à ceux prévus en LFI 2010. 25 emplois seront supprimés en 2014, la gestion des investissements d'avenir représentant une charge de travail temporaire. 7 sont gagés sur le plafond d'emplois du MEEDDM. L'ADEME fait en effet partie des opérateurs sur lesquels le ministère a choisi de ne pas faire porter l'effort de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, ce ratio étant consolidé au niveau du schéma d'emploi du MEEDDM.
Les personnels rattachés à l'ADEME se répartissent en 17 « catégories » différentes, selon leur mode de prise en charge par l'Agence (recrutement direct, détachés ou mis à disposition), leur type de contrat (CDI, CDD, VCAT 6 ( * ) , alternance, insertion professionnelle, doctorants boursiers), l'origine des ressources, le motif du CDD (ATA, remplacements...), le plafond d'emplois en question (permanents ou temporaires). Cette présentation manifeste un souci louable de transparence tant vis-à-vis des tutelles que du contrôleur financier ou des représentants du personnel au comité d'entreprise, mais rend délicate l'appréhension de sa véritable « force de travail ». Ainsi, la présentation retenue par l'Agence dans son rapport de performance du COB 2008 pour mettre en regard les crédits d'intervention, de fonctionnement et les effectifs par domaine d'activité se limite-t-elle au périmètre CDI, détachés et CDD en remplacement de CDI absents et non rémunérés ou remboursés (soit 819,4 ETPT). Cette présentation est discutable car d'autres catégories de personnel contribuent directement à la « production » de l'ADEME, qu'il s'agisse de postes permanents (CDI sur ressources externes, agents en CIF remplacés), ou temporaires (MAD de l'Agence, CDD pour accroissement temporaire d'activité, CDD sur ressources externes et VCAT notamment). Addition faite de ces catégories, le chiffre aurait atteint, en 2008, 871,9 ETPT (soit 6,5% de plus). Il conviendrait donc que l'Agence améliore la présentation des emplois afin que celle-ci reflète mieux la « force de travail ».
En 2009, les effectifs de l'ADEME étaient constitués à 82% (contre 74 % en 1999) par des cadres administratifs ou techniques, aux profils variés : ingénieurs d'étude, ingénieurs d'affaires, économistes, experts techniques, animateurs de secteur ou de réseau professionnels. Au cours de la période sous revue, on constate une hausse significative des cadres de niveau III (+ 45%) et une baisse des cadres de niveau I (-22%), qui s'expliquent par deux facteurs : d'une part, la requalification des fonctions supports administratives et, d'autre part, une qualification croissante des fonctions techniques constituant le coeur de métier de l'Agence.
Les services du siège, répartis sur les sites d'Angers, de Paris et de Valbonne représentaient 53% des effectifs au 31 décembre 2009. Durant la période sous revue, les trois sites ont connu une évolution contrastée, liée à la réorganisation de l'établissement et au regroupement des locaux de son siège angevin. Les effectifs d'Angers ont crû de 24% (272 personnes), ceux de Valbonne de 10% (89 personnes), alors que ceux de Paris ont diminué de 3% (144 personnes). Si le regroupement de l'ensemble des personnels basés à Angers dans un seul lieu a constitué une avancée notable, la dispersion géographique des services du siège demeure un handicap (v. supra partie II).
Par ailleurs, les directions régionales ont connu des renforts importants en fin de période avec une progression des ETP de 38 unités entre le 31 décembre 2008 et le 31 décembre 2009 (soit +9%).
La mobilité interne des agents est faible (environ 5% par an), particulièrement lorsqu'elle implique un changement de résidence administrative (1,7%). Dans les directions régionales, certains responsables restent en poste dans la même région pendant plus de 15 ans. Une clause de mobilité a été introduite dans les contrats de travail de l'ADEME depuis seulement 2005, dont les effets devraient se faire sentir à partir de 2010.
L'âge moyen s'établit à 43,5 ans fin 2009 contre 41,3 ans fin 2003. 13% des agents ont 56 ans ou plus, 29% plus de 51 ans et l'ADEME estime entre 8 et 10% le nombre des agents qui quitteront l'Agence à horizon de 5 prochaines années, ce qui suppose que l'Agence anticipe au mieux les départs en retraite dans un contexte de contrainte forte sur les effectifs.
B. LES REMUNERATIONS
Le total des charges de personnel s'élevait en 2009 à 69,6 M€. Elles ont augmenté de 23,18 % entre 2004 et 2009 (23,42 % pour les seules rémunérations), alors que les effectifs ont progressé de 15 %.
La grille des rémunérations de l'ADEME est fondée sur une borne minimale et une borne maximale pour chaque échelle et chaque échelon, ce qui la rend difficilement comparable aux échelonnements indiciaires des corps d'ingénieurs de l'Etat. Néanmoins, la Cour constate que globalement, à ancienneté équivalente, les bornes basses sont nettement inférieures à la rémunération de corps équivalents de fonctionnaires et que la borne haute est conforme ou légèrement supérieure à cette même rémunération de référence. Ces écarts sont à nuancer si l'on tient compte du fait que près de 80 % des effectifs de l'ADEME exercent en province et que l'Agence dispose d'un régime d'oeuvres sociales.
Une étude réalisée en 2005 7 ( * ) a mis en évidence que les rémunérations des agents de l'ADEME étaient en moyenne inférieures de 7% à la moyenne des rémunérations des six EPIC de l'étude. Un plan de rattrapage pluriannuel 2006/2009 destiné à porter le salaire d'ensemble des catégories de personnel de l'Agence à un niveau de 95 % au moins par rapport à la moyenne des EPIC a été mis en oeuvre. Il a concerné 561 bénéficiaires (soit 69 % de l'effectif présent au 1er janvier 2006) et s'est traduit par l'octroi de 5 à 27 points par agent selon les catégories (soit, annuellement, entre 921 et 4975 € par agent). Même s'il a été présenté comme une mesure individuelle, ce plan a consisté à réduire les écarts de rémunération par catégories de personnels de manière automatique. Au-delà des efforts consentis dans le cadre du plan, la revalorisation du point ADEME a été plus forte (+6,2 % entre 2004 et 2009) que celle de la fonction publique (+5,2 %).
Bien que la possibilité d'un régime indemnitaire soit ouverte par la convention de travail, il n'existe pas de primes, à l'exception de l'indemnité d'éloignement destinée aux salariés de l'ADEME exerçant leur activité hors de métropole, de la gratification au titre de la médaille de vermeil du travail, et d'une allocation de départ à la retraite, calculée en fonction de l'ancienneté. Ainsi la rémunération des personnels de l'ADEME est-elle constituée du salaire de base égal à l'indice attribué à chaque salarié en fonction de sa position dans la grille hiérarchique multiplié par la valeur du point de base. Un autre facteur de rigidité est constitué par l'avancement automatique à l'ancienneté, qui est accordé tous les deux ans à chaque salarié. Les augmentations générales et l'avancement automatique à l'ancienneté représentent une part importante des augmentations de salaire (plus des deux tiers de l'augmentation de la RMPP).
Les seuls moyens de récompenser un agent méritant, qui accepte un changement de fonction ou une mobilité géographique, résident :
- soit dans l'attribution d'une augmentation individuelle. Cette augmentation se traduit par un changement de l'indice, dans la limite de l'indice maximal fixé pour l'échelon et l'échelle en question, sans modification de l'échelle ni de l'échelon. Si la marge de manoeuvre entre la borne minimale et la borne maximale de chaque échelon est significative (de 17 à 36 % de l'indice minimal), en pratique le nombre de points attribué est encadré par l'ADEME (de 5 à 20 points selon la catégorie de poste). En 2008 et 2009, 19 % des agents ont bénéficié d'une mesure individuelle d'augmentation.
- soit dans l'octroi d'une promotion pour changement ou évolution de fonction, qui se traduit par un changement d'échelle et d'échelon. En 2009, 4 % des agents ont bénéficié d'une promotion.
Or, ces deux moyens présentent l'inconvénient d'avoir un effet pérenne, ce qui en limite de fait l'usage. Alors que l'établissement est sous tension, il est regrettable que l'ADEME ne soit pas dotée d'outils flexibles, permettant d'inciter à la mobilité et de récompenser la performance (de type prime), et associant le personnel à l'atteinte des objectifs et orientations stratégiques de l'établissement (dispositif inspiré de l'intéressement).
L'Agence reconnaît cette limite de son système de rémunération et indique travailler sur cette question. L'accord salarial 2010 et les réflexions de l'Agence pour 2011 semblent amorcer une évolution en ce sens.
Le MEEDDM reconnaît que, pour rester en phase avec les démarches actuellement en cours dans l'ensemble du secteur public, l'ADEME devra examiner la possibilité de mettre en place en son sein des dispositifs de valorisation des performances individuelles ou collectives de ses agents.
Cette évolution paraît d'autant plus facile et opportune à mettre en oeuvre que le statut d'EPIC dont elle est dotée permet à l'Agence d'échapper aux rigidités statutaires de la fonction publique.
C. LE MAINTIEN DU NIVEAU D'EXPERTISE
Les quatre « métiers » de l'ADEME exigent que ses personnels conjuguent, dans des proportions variables selon les types de poste, un niveau d'expertise et une capacité d'animation et de mobilisation des partenaires et des acteurs du changement environnemental.
La convention de travail prévoit que le budget minimum alloué à la formation professionnelle est de 2,1% de la masse salariale de l'année en cours, soit 0,5% de plus que le minimum légal, le plan de formation pluriannuel représentant 90% du budget global. En 2008 et 2009, les dépenses au titre de la formation professionnelle s'élevaient à 4,66% de la masse salariale (soit plus de 2 M€ pour 2009), près de trois fois le minimum légal. Plus de 66% du personnel a bénéficié d'une formation en 2009 (81% en 2008), taux importants s'expliquant par le fait qu'une grande partie des agents doivent être formés aux évolutions des logiciels internes.
Le nombre moyen de jours de formation par salarié (hors boursiers) et par an est de 3,6 jours en moyenne sur 2004-2009. Néanmoins, ces formations sont essentiellement centrées sur des aspects méthodologiques ou des compétences transversales (77 % des jours de formation du plan 2010 concernent les thèmes analyse économique et financière, qualité-évaluation, marketing, efficacité personnelle, outils informatiques, management), et peu sur un contenu technique.
La démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) est récente à l'ADEME. Des négociations ont été engagées avec les organisations syndicales en décembre 2007 sur quatre thèmes (l'information du comité d'entreprise sur la stratégie, l'expertise, les perspectives d'évolution professionnelle et la mobilité professionnelle, et la gestion des séniors). Après un an de suspension des négociations, seul le volet de l'emploi des séniors a fait l'objet d'un accord, signé le 20 janvier 2010.
Les besoins d'approfondissement de la démarche GPEC sont particulièrement forts dans un organisme de taille somme toute moyenne, qui offre moins de perspectives d'évolution de carrière que des administrations, organismes de recherche ou laboratoires et entreprises privées. Ce besoin d'une GPEC attractive est renforcé par le fait que les niveaux de rémunération se trouvent dans les fourchettes basses et le personnel vieillissant, alors que certains des profils doivent maintenir un haut niveau d'expertise et de savoir-faire. C'est particulièrement le cas dans les directions techniques du siège, pour des agents amenés à instruire des dossiers dans des domaines techniques en forte évolution. A ce titre, il est dommage que les possibilités de détachement et de mise à disposition que prévoit la convention de travail ADEME ne soient pas utilisées, et que la charte de mobilité inter EPIC signée par l'Agence reste à ce jour lettre morte. La direction des ressources humaines réfléchit à la structuration d'une filière « expertise », offrant des postes de débouché de classe J à des profils d'experts dans des domaines identifiés comme prioritaires par l'établissement.
La recherche de mobilité externe et la démarche GPEC méritent d'être développées en raison de l'enjeu que constituent pour l'ADEME le maintien de ses capacités d'expertise, et le vieillissement relatif de ses effectifs.
II. LES MARCHES
A. LE DOSSIER DU SIEGE
La relocalisation d'une partie du personnel parisien à Angers et à Valbonne et le projet de construction d'un nouveau siège à Angers résultent de la décision prise en 1991 par le Gouvernement dans le cadre de la politique de délocalisation d'établissements publics de l'Etat en région. Le double processus de relocalisation-construction a été engagé en 1995. Dix ans plus tard, la Cour estimait que « le bilan [était] décevant » : un éclatement des personnels du siège avec une relocalisation limitée, un programme ambitieux et mal évalué pour le bâtiment d'Angers prévu pour regrouper les personnels angevins (projet abandonné en 2003 après l'arrivée de la nouvelle présidente), et un bilan coûteux résultant de la mauvaise gestion de ce dossier entre 1995 et 2003.
Après plus de 15 ans d'avatars divers, la relocalisation du siège social s'est concrétisée par l'acquisition des terrains et bâtiments du Plateau du Grésillé à Angers, la réalisation des travaux de réhabilitation, une vague de déménagements, et l'engagement de la construction de l'extension : achat en décembre 2005, installation des équipes en avril 2007 après les travaux de réhabilitation, lancement du marché pour la réalisation de l'extension en mars 2007, installation dans ces derniers locaux en avril 2009.
Mais des coûts inutiles ont dû être soldés en 2006 : indemnisation de maîtres d'oeuvre ou de bureaux d'études ainsi que de l'entreprise qui devait mettre en oeuvre le projet dit du Front de Maine, perte des subventions de la Ville d'Angers et pénalisation de 10% lors de la revente du terrain d'assiette de ce dernier projet.
L'ADEME souligne que le dénouement de ce chantier est intervenu dans des conditions de délais et d'économie qui « sont venues en grande partie compenser les errements antérieurs et font qu'au final la gestion globale de ce dossier apparaît largement maîtrisée sur le plan des dépenses publiques » :
- le coût global du projet (16 M€), recouvrant à la fois les travaux d'extension et de réhabilitation (et les honoraires associés), a pu être limité dans le cadre d'appels d'offres qui ont permis une véritable compétition technique et économique ;
- l'économie réalisée par rapport au projet antérieur est d'environ 20 M€ ; compte tenu de la structure financière du projet précédent qui recourait au dispositif de l'autorisation d'occupation temporaire 8 ( * ) , ce gain résulte de l'analyse comparée sur 30 ans (durée de l'AOT) des coûts d'investissement, d'exploitation et de maintenance ;
- la charge d'amortissement budgétaire du projet du Grésillé supportée par le budget de fonctionnement de l'Agence sera de l'ordre de 240 K€ annuels à comparer aux charges de loyer des différentes implantations angevines antérieures qui étaient, en 2006, de 595 K€. Pour mémoire, le coût des loyers dans le projet précédent était supérieur à 1 M€ ;
- enfin, la cession du site de la place Lafayette (dont l'ADEME était propriétaire) s'est faite dans d'excellentes conditions économiques et sensiblement au-dessus du montant évalué par les Domaines.
Au global, les charges et les produits du projet (cessions d'actifs, contentieux, honoraires...) se soldent, au niveau de la section de fonctionnement, par un résultat positif d'un peu plus d'un million d'euros.
B. LES ACHATS
Les achats de l'ADEME entrent dans le champ de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés public et du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005. L'Agence est dotée d'une commission consultative des marchés, chargée d'émettre un avis préalable à la passation des contrats et marchés d'un montant supérieur à 90 000 € HT, et d'un règlement interne des marchés (RIMA) précisant la procédure applicable en fonction des différents seuils.
Afin d'optimiser sa fonction achat tout en prenant en compte l'organisation territoriale et la diversité des missions de l'Agence, et pour répondre à la critique de la Cour des comptes, le RIMA entré en vigueur en 2007 distingue l'achat, conçu comme centralisé pour optimiser cette fonction au niveau de l'établissement dans son entier, de la commande, décentralisée au plus près des besoins. Il introduit les notions de délégué du pouvoir adjudicateur, habilité à contracter, et de personne responsable des commandes, autorisée à signer les bons de commande.
Le précédent rapport de la Cour soulignait le nombre élevé de personnes responsables des marchés (57 « PRM »), source de risques potentiels et de difficulté pour la centralisation des achats. La centralisation du pouvoir adjudicateur (un seul désormais) et la création de délégués constituent une amélioration. En outre, l'Agence prend en compte les critiques et recommandations de la commission des marchés et s'inscrit dans une démarche d'amélioration permanente de ses pratiques.
Néanmoins, les résultats en termes de centralisation des achats demeurent perfectibles. L'ADEME est confrontée à la conciliation de priorités qui peuvent se révéler contradictoires : réactivité, diversité des besoins locaux, mutualisation.
Les pratiques analysées portent sur les procédures inférieures à 90 K€, essentiellement sur les marchés liés à la communication. Alors qu'au cours de la période sous revue, le service communication a passé chaque année un marché pour l'insertion de l'ADEME dans les pages jaunes pour un montant total de 611,5K€ HT, plusieurs directions régionales ont également conclu des marchés ou lettres d'achat avec ce prestataire ayant le même objet, pour un montant total de 183,2K€, soit près de 30% du total des marchés « centraux » du service de communication.
Par ailleurs, l'une des activités importantes de l'ADEME est de concevoir et diffuser des outils d'information (notamment dépliants, rapports, documents divers) mais les prestations d'impression de ces supports sont éclatées en un nombre important de marchés et lettres d'achats. Au total, 3 383 K€ TTC (2 827 K€ HT) de prestations d'impression et d'édition de support de communication ont été achetés entre 2004 et 2008, sans qu'aucun marché supérieur à 90 K€ n'ait été formalisé.
Il convient, enfin, de signaler le cas des prestations acquises hors de toute procédure d'appel d'offres alors que le montant annuel est supérieur à 90 K€. Il s'agit notamment des assurances souscrites par l'Agence mais également des dépenses des directions régionales en matière d'hébergement et transports, de carburant et de machines à affranchir.
L'organisation en place ne permet pas de garantir un recensement exhaustif des marchés passés pour le fonctionnement. Le pilotage de la fonction achat partagé entre différents services du siège conduit à l'absence de computation des seuils dans certains domaines de dépenses. Un pilotage plus centralisé devrait permettre de détecter les dépenses dont la globalisation dépasse les 90 K€ et d'être ainsi en mesure d'appliquer les procédures adaptées et notamment le passage devant la commission des marchés.
L'Agence a indiqué dans son dernier rapport présenté à la commission des marchés que la centralisation des achats sur le fonctionnement allait se poursuivre en privilégiant l'assurance automobile, les fournitures et d'autres secteurs présentant un avantage en termes de procédure et de coût en recherchant à s'adosser à d'autres opérateurs comme les marchés interministériels, le groupement de commandes, la centrale d'achats.
Un des importants marchés d'impression, celui des guides d'information grand public (4 millions d'exemplaires par an dans une collection regroupant 36 titres environ), a pu être globalisé au sein d'un marché triennal. Ce marché atteint un montant annuel maximum de 400 000 €, tout comme le magazine "ADEME et Vous" dont l'appel d'offres a été reconduit sur une période de 4 ans à compter de mars 2010.
Dans une démarche de progrès, l'Agence précise que l'analyse de l'expression des besoins se poursuivra dans l'optique d'adhérer aussi souvent que possible aux marchés ouverts par l'Etat aux opérateurs. Cette orientation, initiée dans le cadre de la RGPP, laisse espérer des tarifs plus intéressants dans le cadre de la mutualisation avec l'Etat. L'ADEME s'est d'ores et déjà rapprochée du Service des Achats de l'Etat pour déterminer les segments d'achat qui pourraient intégrer cette démarche.
III. LES COMPTES
L'organisation comptable a permis de faire face à l'augmentation d'activité et le suivi des régies d'avances et de recettes a été renforcé. Les comptes financiers et documents comptables produits à la Cour sont de bonne facture et le rapport d'analyse des comptes relativement complet. La mise en place du protocole de modernisation comptable a permis des améliorations dans de nombreux domaines. Toutefois, la complexité de certains systèmes de recettes ou de paiements de l'ADEME comme les aides remboursables nécessiterait des explications plus précises sur leur mode de comptabilisation. L'information relative aux participations financières serait à développer. L'Agence fait l'objet, en parallèle du contrôle de la Cour, d'un audit DGFiP-CGEFI sur la qualité de ses comptes.
Les produits de l'Agence, essentiellement composés de subventions, ont été peu à peu remplacés par diverses taxes. La nature même de ces nouveaux produits engendre des difficultés de gestion de ses recettes par l'Agence. L'encaissement des taxes s'effectue par d'autres autorités publiques, lors du dépôt d'une déclaration aux bureaux des douanes pour la TICGN et à la délivrance des certificats d'immatriculation par les régies des préfectures pour les véhicules polluants. Ce mode de perception indirecte limite la mise en place de perspectives de court terme pour l'ADEME car celle-ci n'a pas d'emprise sur les flux mensuels reversés ni sur le volume des restitutions de TICGN suite à des exonérations accordées aux entreprises. La mise en place d'une taxe unique améliorera sans doute la situation mais ne résoudra pas le problème des flux mensuels perçus qui sont difficiles à estimer.
La part des charges de l'ADEME correspondant à ses activités régaliennes a sensiblement diminué durant la période sous revue, passant de 65 % du total des charges en 2004 à 50 % en 2009, alors que parallèlement les charges de fonctionnement ont augmenté de 37 % et les charges de personnel de 13,7 %. Cette situation a provoqué un déficit d'exploitation en 2004, 2005 et 2006. Les charges ont, entre 2008 et 2009, augmenté à un rythme beaucoup plus faible que les produits d'exploitation permettant un retour à l'équilibre et un bénéfice d'exploitation de 83,6 M€. Des baisses de charges d'exploitation pourraient être envisagées, notamment dans les domaines de la sous-traitance ou des déplacements.
Il convient, à l'avenir, de suivre avec attention la répartition des fonds du Grenelle de l'environnement entre financement de projets et financement des structures de l'ADEME.
Le bilan offre aujourd'hui une image plus fidèle des actifs de l'établissement grâce au protocole de modernisation de la comptabilité. L'essentiel des actifs de l'établissement se compose des produits à recevoir inscrits dans l'actif circulant. Le niveau de l'actif immobilisé est en phase avec les missions de l'ADEME qui est une agence de services et n'a pas vocation à créer ou développer des actifs immobilisés. La situation d'endettement de l'établissement est saine, tant au regard des dettes bancaires, quasi inexistantes, que des dettes fournisseurs et personnel.
Bien qu'équilibrée depuis 2007 et très confortable en 2009, la situation financière de l'Agence reste fragile et particulière. En effet, l'ADEME, malgré son statut d'EPIC, n'a pas vocation à exercer une activité commerciale rentable, source de revenus pérennes. Un fonds de roulement croissant ainsi qu'un besoin en fonds de roulement négatif ont permis à l'ADEME de constituer une trésorerie confortable qui, placée, rapporte à l'établissement. La situation financière est saine au regard des dépenses de l'établissement et du faible niveau d'investissement.
IV. LA GESTION DES FONDS CONFIES A L'ADEME AU TITRE DES INVESTISSEMENTS D'AVENIR
Les décisions relatives à l'emprunt national, annoncées par le Président de la République le 14 décembre 2009, ont conduit à affecter à l'Agence 2,85 Mrds€ pour la gestion de quatre actions. Ce faisant, le Grand Emprunt fait de l'ADEME l'un des principaux opérateurs pour les investissements d'avenir.
Aux termes de l'article 8 de la loi de finances rectificative du 9 mars 2010, pour chaque action du programme d'investissements, les conditions de gestion et d'utilisation des fonds doivent, préalablement à tout versement, faire l'objet d'une convention entre l'Etat et chacun des organismes gestionnaires. Cette convention précise notamment l'organisation comptable, en particulier la création d'un ou plusieurs comptes particuliers, et les modalités d'un suivi comptable propre ainsi que de l'information préalable de l'Etat sur les paiements envisagés.
Au titre de l'action « démonstrateurs énergies renouvelables et chimie verte », la convention Etat-ADEME publiée au Journal officiel le 8 août 2010 affecte 450 M€ au versement de subventions et 900 M€ à des interventions sous forme de prêts, avances remboursables et prises de participation. Au titre de l'action « économie circulaire », la convention Etat-ADEME publiée le même jour affecte 83,5 M€ au versement de subventions et 166,5 M€ à des interventions sous forme de prêts, avances remboursables et prises de participation.
La convention signée entre l'Etat et l'ADEME sur les énergies décarbonées, à titre d'exemple, prévoit que « Les fonds, dont la gestion est confiée à l'entité, ayant vocation à être redistribués dans le cadre d'appels à manifestation d'intérêt, sous forme de subventions, sont comptabilisés en comptes de tiers et de trésorerie, dans les comptes de l'entité lors de la notification de leur versement par l'État (...). L'entité prend toutes les dispositions nécessaires pour suivre individuellement la gestion des fonds qui lui sont confiés dans le cadre de la présente convention, notamment en créant les subdivisions de comptes nécessaires et en organisant un suivi analytique dédié. En particulier, elle crée, dans les comptes de classe 5, les subdivisions nécessaires pour suivre les mouvements de trésorerie afférents aux crédits dont la gestion lui est confiée par l'État afin d'assurer le respect des obligations d'information posées au III de l'article 8 de la loi de finances rectificative pour 2010 ».
Un problème de complexité d'enregistrement comptable se pose avec des situations différentes selon la forme des fonds distribués (subventions, prêts, avances remboursables) et de suivi de ces fonds. L'ADEME a saisi la direction générale des finances publiques (DGFiP) en sollicitant la diffusion d'une circulaire relative à la gestion comptable des programmes d'investissement d'avenir, sans quoi il n'est pas sûr que l'Agence parvienne à gérer et suivre avec un niveau correct de sécurité juridique ces fonds (provisions, reprises ...). Un schéma comptable pour chaque type de fonds versés est en cours de validation par la direction du budget et la DGFiP.
S'agissant des subventions, les fonds sont comptabilisés en comptes de tiers et de trésorerie dans les comptes de l'ADEME. Les opérations, bien qu'engagées et ordonnancées par le président du conseil d'administration de l'Agence, sont autorisées par le commissaire général à l'investissement. Elles ne sont en conséquence pas incluses dans le budget de l'ADEME.
Les autres interventions sont comptabilisées à une subdivision du compte 167 « emprunts et dettes assortis de conditions particulières » au passif du bilan de l'ADEME. Lorsque les fonds sont affectés aux bénéficiaires finaux, les droits correspondant aux prêts, avances remboursables et prises de participation sont inscrits à l'actif du bilan de l'Agence dans des subdivisions du compte 276 « Autres immobilisations financières ». Ces opérations, bien qu'engagées et ordonnancées par le président du conseil d'administration de l'ADEME, sont autorisées par le commissaire général à l'investissement. Elles ne sont en conséquence pas incluses dans le budget de l'Agence. Les comptes 167 et 276 utilisés dans le cadre des dépenses d'avenir sont des comptes non budgétaires.
Les clauses des conventions prévues par la loi de finances rectificative précitée s'imposent aux textes statutaires des opérateurs et aux modalités de gestion qui leur sont habituelles 9 ( * ) .
Ainsi, une gouvernance ad hoc est mise en place, destinée à assurer à l'Etat un droit de regard en dernier ressort sur le choix des investissements. Les opérations au titre du « Grand Emprunt » sont à présenter au Conseil d'administration qui les « valide » dans un document distinct du budget de l'entité. L'opérateur est compétent pour l'engagement juridique des dépenses d'investissements d'avenir à destination des bénéficiaires finaux et pour la tenue de la comptabilité liée à l'utilisation de ces crédits, bien que les dépenses ne relèvent pas du périmètre budgétaire de l'opérateur.
Un tel dispositif apparaît dérogatoire, pour garantir à la fois une étanchéité avec le budget de l'Etat et la bonne utilisation des fonds. Il méconnaît cependant des principes de finances publiques et soulève un certain nombre de difficultés d'ordre pratique, notamment :
- l'absence d'outil de prévision et de programmation (ce qui est une des finalités d'un budget) et un suivi extrabudgétaire spécifique avec tous les risques inhérents à ce type de dispositif ;
- l'absence de comptabilité des engagements assise sur l'exécution d'un budget ;
- le rôle volontairement réduit du conseil d'administration de l'opérateur ;
- la difficulté d'identifier le rôle d'ordonnateur pour des opérations qui s'apparentent plus à des opérations de caisse.
Le responsable d'un établissement public ne saurait être l'ordonnateur secondaire d'un ordonnateur principal de l'Etat. Etat et établissement public sont en effet deux personnes morales distinctes. La question de la responsabilité personnelle sur la comptabilité des fonds concernés au sein des comptes de l'opérateur se trouve ainsi posée. Les difficultés concernent la responsabilité de l'ordonnateur principal et celle du responsable du programme, les compétences du conseil d'administration et la limitation singulière des contrôles à la charge du comptable. L'ADEME a elle-même interrogé la tutelle sur les questions posées par le dispositif des investissements d'avenir. Le MEEDDM partage ces interrogations. Dans l'attente d'une réponse des ministères de tutelle, l'Agence a pris des dispositions pour assurer le suivi des opérations aussi bien dans sa comptabilité générale que dans ses comptabilités de gestion et d'engagement et procéder à l'adaptation de son informatique de gestion.
Face aux enjeux, l'ADEME va devoir mobiliser son expertise scientifique, technique et financière, ainsi que le savoir-faire qu'elle a acquis avec la gestion du fonds « démonstrateur de recherche ».
Les questions posées par le dispositif des investissements d'avenir intéressent, au-delà de l'ADEME, tous les opérateurs qui y sont associés en tant que gestionnaires (ANR, ...). Aussi, la Cour se propose de les réexaminer dans un cadre plus large, en particulier celui de l'examen de l'exécution des lois de finances 2010.
* 1 Outre les nouvelles TGAP « poussières » et « incinération », une quote-part du produit total de la TGAP, à concurrence de 363 M€ en 2009, 445 M€ en 2010 et 441 M€ en 2011.
* 2 Il s'agit principalement des indicateurs suivants : sur le programme n° 181 « prévention des risques » : coût moyen de réhabilitation des décharges subventionnées par l'ADEME ; sur le programme n° 174 « énergie et après-mines » : efficience du fonds chaleur renouvelable de l'ADEME (en euros par tep économisée, filière par filière) ; sur le programme n° 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de l'aménagement durable » : effet d'entraînement des crédits incitatifs. L'ADEME alimente par ailleurs d'autres indicateurs LOLF, sans qu'ils reflètent sa performance propre (ex. : taux de recyclage des déchets d'emballage ménager).
* 3 Non compris les contrats d'insertion, contrats en alternance et doctorants boursiers.
* 4 Cette augmentation est consécutive au Grenelle qui a relevé le plafond d'emplois de l'ADEME de 45 CDI en 2009 (tous réalisés), 10 en 2010 et qui prévoit 40 postes de fonctionnaires mis à disposition par le MEEDDM (23 arrivées effectives en 2009).
* 5 3% du plafond des emplois permanents établi à 83 ETPT jusqu'en 2008. Sur la base de 878, il atteindrait le chiffre de 26,3.
* 6 VCAT : volontaires civils à l'aide technique.
* 7 Etude réalisée dans six EPIC : BRGM, INERIS, IFREMER, CIRAD, CEMAGREF, ADEME.
* 8 L'AOT consiste à confier le terrain à un investisseur privé, à la suite d'une procédure de mise en concurrence. En contrepartie, le bénéficiaire construit, puis met à la disposition du maître d'ouvrage un immeuble, dont il est dans un premier temps locataire (pendant une période 25 à 30 ans). A l'issue de cette période, ce dernier récupère l'immeuble en pleine propriété, ainsi que terrain.
* 9 Article 8, LFR : « La gestion des fonds versés à partir des programmes créés par la présente loi de finances rectificative peut être confiée, dans les conditions prévues par le présent article et nonobstant toute disposition contraire de leurs statuts (...) ».