2. Des services de l'Etat rénovés
L'adaptation des services de l'Etat aux mutations ci-dessus décrites s'est inscrite dans le cadre du regroupement, dans un même ministère, des secteurs de l'environnement, de l'énergie, des transports et de l'aménagement, auxquels est encore venu s'ajouter celui de la mer. Cette fusion s'est traduite par la restructuration des directions d'administration centrale et des programmes budgétaires qui en découlent, ainsi que la restructuration des services territoriaux avec la création, au niveau régional, des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), regroupement de la direction régionale de l'équipement (DRE), de la direction régionale de l'environnement (DIREN) et de la de la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE), et, au niveau départemental, de directions départementales interministérielles (DDI), et en particulier de directions départementales des territoires (DDT).
La mise en oeuvre de la RGPP, qui dicte le retrait de l'ingénierie concurrentielle, pour les services du ministère de l'équipement ou de l'agriculture qui exerçaient antérieurement des missions dans ces champs, se traduit également par la réorientation des personnels vers de nouvelles missions, liées à la mise en oeuvre des mesures décidées dans le cadre du processus du Grenelle de l'environnement.
Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les personnels de l'Etat doivent faire face à un certain manque de visibilité sur l'évolution de leur mission, d'une part, et sur le format dans lequel elle sera exercée dans les prochaines années, d'autre part.
L'attachement de ces personnels à leur mission de service public et leur compétence ne font pas de doute, mais face aux incertitudes, certains choisissent de réorienter leur carrière, délaissant les champs de l'ingénierie publique, même dans sa nouvelle version axée sur le Grenelle de l'environnement. Votre rapporteur note que les personnels d'encadrement pourraient ainsi manquer à moyen terme, à tel point que la poursuite de l'exercice des missions de service public pourrait être mise en cause . De plus, le non-remplacement quasi systématique des personnels réorientant leur carrière se traduit pour les collectivités territoriales par l'arrêt des chantiers en cours dans de nombreux départements, et par la méconnaissance des missions encore exercées par les DDT .
Là encore, le manque de visibilité et de prévisibilité est un handicap majeur pour les collectivités territoriales qui ne savent pas dans quels domaines les services de l'Etat sont encore présents, pour combien de temps et dans quelles conditions.
Nombreux sont les témoignages des élus locaux sur le désengagement des services de l'Etat. Dès 2009, la réforme des services extérieurs a pris des contours contraignants en termes d'effectifs. Les DDAF ou DDE s'étaient engagées à finir les chantiers commencés, notamment en termes d'aide à la maîtrise d'ouvrage. Il apparaît aujourd'hui que les DDAF, regroupées avec les DDE au sein des directions départementales des territoires, ne disposent plus dans certains départements que d'un seul ingénieur, qui ne semble pas en capacité de mener à bien tous les chantiers engagés. Votre rapporteur a reçu témoignage d'opérations interrompues .
De même, selon une enquête de l'Association des maires de France (AMF), plus de 60 % des communes faisaient état, lors du 92 e congrès des maires de France, tenu en novembre 2009, d'un arrêt des prises de commandes de la part des services extérieurs de l'Etat 33 ( * ) , alors que l'arrêt de l'intervention de l'Etat en matière d'ingénierie publique dans le domaine concurrentiel n'est prévu que pour la fin de l'année 2011. 95 % des maires interrogés estiment que l'ingénierie est nécessaire à la réussite d'un projet. Par ailleurs, seulement 60 % des communes font état d'une information de la part des services de l'Etat sur la nouvelle donne en matière d'ingénierie.
Le défaut de communication est caractérisé. L'Etat qui a pourtant préparé cette mutation de longue date n'est visiblement pas parvenu à associer pleinement ses partenaires premiers : ses personnels et les collectivités territoriales. Votre rapporteur estime que des actions d'information de ces deux publics doivent être mises en oeuvre dans les meilleurs délais, et sont indispensables . Ceci est d'autant plus nécessaire que lors de son déplacement à la direction départementale des territoires du Loiret, à Orléans, le 26 mai dernier 34 ( * ) , votre rapporteur a pu constater que la réforme des services de l'Etat pouvait être menée de façon intelligente, en préservant une réelle ingénierie publique étatique au service des territoires , comme en témoignent les extraits suivants de la présentation préparée à l'attention de votre rapporteur.
Recommandation de votre rapporteur : Votre rapporteur souhaiterait que toutes les DDT puissent présenter leur plan de redéploiement des capacités d'ingénierie publique de façon systématique à leurs personnels et aux collectivités territoriales concernées . Il lui paraîtrait également utile que ces plans soient harmonisés , en tenant compte de la spécificité des territoires, afin que l'unité de l'ingénierie publique qui a fait sa force soit préservée. |
* 33 Selon le numéro de décembre 2009 de Maires de France, l'AMF avait interrogé les communes de moins de 10 000 habitants sur l'impact de la réorganisation des DDE et DDAF. Sur 900 réponses, représentant 70 départements, l'enquête fait déjà apparaître un arrêt des prises de commandes d'ingénierie par les services de l'Etat pour 60 % des communes en moyenne (80 % pour la Loire, moins de 40 % dans le Lot et le Loiret).
* 34 La liste des personnes auditionnées par votre rapporteur, ainsi que le programme de ses déplacements figurent en annexe.