III. LA SOLUTION INTÉRIMAIRE POUR LE TRANSPORT AÉRIEN STRATÉGIQUE (SALIS)
Les Antonov An-124-100 russes et ukrainiens, capables de transporter des cargaisons hors gabarit, sont utilisés par l'OTAN comme solution intérimaire pour pallier les lacunes des moyens européens de transport aérien stratégique, en attendant la livraison des Airbus A400M. Ce projet a été baptisé SALIS ( Strategic Airlift Interim Solution ).
Outre l'Allemagne, pays pilote, quinze pays participent au consortium sur le transport aérien stratégique : Canada, Danemark, Espagne, France, Hongrie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Slovaquie, Slovénie, Suède et Turquie.
Cette initiative est le pendant d'une autre qui vise aussi à doter l'OTAN de capacités de transport aérien stratégique. Cette autre initiative est la Capacité de transport aérien stratégique (SAC), au titre de laquelle quinze pays membres de l'OTAN plus un pays partenaire ont ouvert des négociations contractuelles pour l'acquisition d'avions de transport Boeing C-17.
Le contrat, d'une durée de trois ans renouvelable, prévoit l'affrètement permanent de deux appareils Antonov An-124-100, de deux autres sur préavis de six jours, et de deux appareils supplémentaires sur préavis de neuf jours. Les pays concernés se sont engagés à utiliser les avions pour un minimum de 2.000 heures de vol par an.
La charge qu'un Antonov An-124-100 peut emporter va jusqu'à 120 tonnes. Dans le passé, l'OTAN a déjà utilisé ces appareils pour transporter des troupes à destination et en provenance de l'Afghanistan, pour acheminer les secours d'urgence aux victimes du tremblement de terre au Pakistan en octobre 2005, et pour acheminer par voie aérienne les troupes de maintien de la paix de l'Union africaine à destination et en provenance du Darfour.
Source : OTAN
IV. UNE SYNTHÈSE DES PRINCIPAUX RETARDS
A. TABLEAU D'ENSEMBLE
Synthèse des principaux retards du programme
A400M,
dont les rapporteurs ont eu connaissance
Retard constaté/
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Délai supplémentaire demandé pour les essais en vol et l'industrialisation |
Risque de retard |
Demande par l'industriel de report sine die |
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Demande de révision à la baisse des spécifications par l'industriel |
FMS (Thales) |
TRN, TM-LLF* (EADS) |
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Absence de telles demandes, à la connaissance des rapporteurs |
Banc d'essai volant (AMSL), moteur final (EPI), FADEC (EPI), DASS (EADS), cellule |
M-MMS (EADS), GADIRS (Sagem), LMC (RDE) |
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Impact sur le retard global du programme |
- 2 ans pour le standard initial (du fait du retard le plus important, celui du FADEC) - 4 ans pour le standard définitif (du fait du retard d'éléments de l'avionique) |
- 1 an pour la première livraison au standard initial - 2 ans pour la première livraison au standard définitif (sous réserve de franchissement d'un « seuil de maturité » 1 an après le 1 er vol) |
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Retard total prévisible à ce stade |
3 ans pour la première livraison au standard initial (+ quasiment pas de livraisons la 1 re année, contrairement à ce qui était initialement prévu) 4 ans pour la première livraison au standard définitif |
DASS ( Defense Aids Subsystems ) : système d'autoprotection de l'avion. EPI (Europrop International) : consortium de motoristes responsable du moteur de l'A400M (Snecma, Rolls-Royce, MTU, ITP). FADEC ( Full Automatic Digital Engine Control ) : système informatique (calculateurs et logiciels) contrôlant les moteurs. FMS ( Flight Management System ) : système d'aide à la gestion du vol. GADIRS ( GPS Air Data Inertial Reference System ) : système qui, en synthétisant les informations issues du GPS, des capteurs anémo-barométriques et des centrales à inertie, élabore la position de l'avion en trois dimensions. LMC ( Load Master Control ) : système de contrôle de la soute. M-MMS ( Military-Mission Management System ) : système informatique de gestion des missions militaires. TM-LLF ( Terrain masking low level flight ) : vol automatique en suivi de terrain. TRN ( Terrain-Reference Navigation System ) : système qui calcule la position géographique de l'avion en comparant sa hauteur réelle par rapport au sol à un fichier numérique de terrain, sans recourir au GPS.
* Le TM-LLF est une option qui n'a pas été demandée par la France.
Source : informations obtenues par les rapporteurs
B. LES DIFFÉRENTS RETARDS
1. Les retards passés concernent essentiellement le système propulsif
Si l'on synthétise les informations obtenues par les rapporteurs, la situation actuelle en matière de retards du système propulsif déjà constatés se présenterait de la façon indiquée par le graphique ci-après.
Schématiquement, la situation est la suivante :
- avant même l'apparition de retards sur le FADEC, AMSL a officiellement reconnu, en 2007, avoir un retard de 6 mois sur la cellule ;
- les essais sur banc volant ont commencé fin 2008, et non fin 2006 comme initialement prévu, à cause d'un retard du moteur (un peu plus d'an), puis de l'adaptation (7 mois supplémentaires) par AMSL du moteur au Lockheed C130 Hercules servant de banc d'essai volant ;
- ces retards sont aujourd'hui « masqués » par le retard sur le FADEC, de l'ordre de 2 ans, et qui, selon AMSL, masque également un retard sur le moteur final (plus d'1 an) ;
- EADS estime que la première livraison sera décalée non de 2 ans, comme le premier vol, mais de 3 ans, du fait de la nécessité de prolonger d'une année les essais en vol par rapport à ce qui était initialement prévu ;
- EADS propose que l'avion soit livré en deux standards, le second postérieur d'un an au premier, ce qui décalerait d'une année supplémentaire la livraison de l'avion avec ses pleines capacités.
2. La principale cause de retard des livraisons pourrait être l'avionique hors FADEC
Dans sa communication, EADS met l'accent sur la responsabilité du consortium de motoristes, EPI, et en particulier sur la société allemande MTU, chargée de la réalisation du logiciel du système de contrôle des moteurs, le FADEC.
Si l'on prend en compte non le retard du premier vol, mais celui des livraisons, la situation est plus complexe, comme le graphique ci-après permet de le mettre en évidence.
La nature du « seuil de maturité » devant être franchie en principe 1 an après le 1 er vol (sans que l'industriel accepte de s'engager à ce sujet), décalant d'une année l'industrialisation et la première livraison, est ambiguë.
Peut-être s'agit-il seulement de faire preuve de prudence, et de ne pas préjuger des résultats des essais en vol. A titre d'exemple, l'un des problèmes majeurs susceptibles de se manifester lors d'une campagne d'essais en vol est en effet l'apparition de phénomènes vibratoires sévères, qui ne peuvent être résolus que par une modification des formes aérodynamiques. Une telle modification, si elle se révélait nécessaire, prendrait naturellement du temps.
Il est cependant possible que ce retard supplémentaire découle de celui envisageable pour l'avionique du standard initial. Si tel était le cas, le retard du système propulsif ne serait qu'un des éléments ayant un impact sur la date de la première livraison.
Par ailleurs, la livraison du premier avion au standard définitif serait retardée de 4 ans, ce qui est le double du retard découlant du FADEC. Le retard du FADEC serait donc sans conséquence sur la date de la livraison au standard définitif.
Il faut préciser qu'à spécifications inchangées, le retard définitif résulterait nécessairement de l'avionique : compte tenu de l'impossibilité technique de satisfaire à court terme certaines spécifications, les autres retards seraient entièrement « masqués ».