2. Des insuffisances inquiétantes
a) Une industrie européenne dont le poids reste marginal par rapport à ses concurrents asiatiques et américains
Le poids global de l'industrie européenne reste marginal par rapport à ses concurrents asiatiques et américains. Ainsi, 41,3 % du marché des ventes de semiconducteurs sont détenus par des entreprises américaines, 44,6 % par des entreprises asiatiques et seulement 14,1 % par des entreprises européennes.
Le poids des fabricants de semiconducteurs
Source : IC Insights 2007
Par ailleurs, aucune société européenne n'a une taille critique suffisante pour poursuivre seule son développement technologique. Ainsi, STMicroelectronics et Infineon ont rejoint l'alliance IBM pour partager les coûts de développement des technologies CMOS tandis que NXP a renoncé à la course à la miniaturisation, préférant se concentrer sur les applications « More than Moore ». On peut donc s'interroger si à moyen terme, des entreprises européennes continueront à investir dans la voie « More Moore ».
L a spécialisation de l'industrie européenne des semiconducteurs dans le « More than Moore » se justifie dans la mesure où cette voie de recherche est plus adaptée à ses capacités financières et que les applications qui devraient en résulter sont très prometteuses.
Néanmoins, on peut s'interroger sur le danger qui consisterait à renoncer à la course à la miniaturisation dans la mesure où les entreprises qui iront jusqu'au bout de la « roadmap » bénéficieront alors d'un avantage technologique décisif qu'elles pourront ensuite mettre au service des applications « More than Moore ».
b) La compétitivité des entreprises européennes remise en cause par un dollar faible
Le quasi doublement du prix de l'euro face au dollar depuis 2002 (passé de 0,81 $/€ à 1,56 $/€ en mai 2008) affecte fortement la compétitivité des sites français et européens.
En effet, le dollar constitue la monnaie de référence retenue pour la cotation des produits microélectroniques, y compris en Europe. Par conséquent, la différence entre les revenus perçus en dollars et les coûts en euros est immédiatement affectée par les évolutions du taux de change.
A moyen terme, la poursuite de la baisse du dollar menace le maintien en Europe non seulement des capacités de production, mais également des centres de recherche.
- Les sites de production
Afin de rester compétitives, les entreprises surveillent en permanence les écarts de prix entre les différents sites mondiaux. Or, la hausse de l'euro influence le coût des amortissements (45 % des coûts de production), des salaires (10 %), de l'énergie et des taxes. Ainsi, l'écart de coûts se creuse entre l'Europe et les autres pays (Asie et Etats-Unis), sans qu'il puisse être compensé complètement par des gains de productivité.
Selon les informations obtenues par votre rapporteur, entre le 1 er janvier 2006 et le 1 er janvier 2008, la hausse des coûts liée aux effets de changes est évaluée à 23 %.
Par ailleurs, la surévaluation durable de l'euro par rapport au dollar entraîne le blocage de décisions d'investissements nécessaires à la modernisation et au renouvellement des sites de production en Europe. Les responsables des sites français d'Atmel et de Freescale, deux entreprises américaines, ont ainsi fait part à votre rapporteur de leur inquiétude quant à la pérennité à moyen terme de ces unités de production si la parité entre l'euro et le dollar restait aussi défavorable pour la compétitivité des entreprises implantées sur le territoire national.
- Les centres de recherche et développement
Ils sont également pénalisés puisqu'ils subissent un renchérissement relatif de leurs coûts exprimés en dollars depuis 2 ans sans que leurs performances n'augmentent dans les mêmes proportions.
Actuellement, les conditions sont réunies pour qu'un cercle vicieux se mette en place, l'insuffisance des investissements productifs et des dépenses en R&D d'aujourd'hui entraînant une perte de compétitivité pour demain, et donc une diminution des richesses et des emplois pour notre pays.