C. LES FACTEURS D'EXPLICATION ET LE CIBLAGE DES LEVIERS D'ACTION

Aucun des intervenants auditionnés par la délégation n'a tenté, en se référant à certaines thèses parfois défendues dans les années 1970, d'expliquer les orientations typiquement féminines et la ségrégation professionnelle comme des choix raisonnables, résultats de stratégies conscientes et rationnelles des femmes.

En revanche, il a été fait allusion à de nombreuses reprises, au cours des entretiens, à une certaine intériorisation de la domination masculine. Comme l'ont rappelé, lors de leur audition, à la fois les chercheurs du CEREQ et Mme Armelle Carminati, vice-présidente « Engagement et diversité » d'Accenture France, membre du bureau de la commission « Nouvelles générations » du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), l'expansion des scolarités féminines s'est accomplie dans un certain respect de l'ordre établi, sans entraîner de réel bouleversement ni dans le régime de la méritocratie, ni dans le mécanisme de l'hérédité sociale, ni même enfin dans les ségrégations sexuelles des différentes filières. Au final, certains sociologues comme Mme Marie Duru-Bellat concluent que « ce n'est pas la formation des filles qui peut être considérée comme le déterminant majeur de la division du travail que l'on observe, la causalité étant à lire plutôt dans l'autre sens, à savoir les filles adaptant leur investissement scolaire à ce qui les attend dans la vie professionnelle » 16 ( * ) .

Soucieuse de déterminer les leviers d'action les plus efficaces pour contrecarrer la ségrégation existante, la délégation a étudié avec attention les analyses que lui a présentées le CEREQ pour en dégager des recommandations opérationnelles .

1. Les « fondamentaux »

a) Le rapprochement entre l'éducation et l'économie ne doit pas prendre la forme d'une spécialisation excessive des filières d'enseignement

De façon générale, les chercheurs du CEREQ ont invité les pouvoirs publics à ne pas céder à une conception excessivement « adéquationniste » de la relation entre formation et emploi , en expliquant que les ajustements du système éducatif n'avaient que peu de chances de coïncider spontanément avec les évolutions observées ou attendues de l'offre d'emploi.

Cette remarque globale invite, d'une part, à ne pas méconnaître les avantages de l'orientation des jeunes filles vers les filières générales et, d'autre part, à préconiser, dans les filières professionnalisantes, le maintien d'un socle suffisant de connaissances de base pour éviter l'« enfermement » des élèves dans une spécialité.

* 16 Mme Marie Duru-Bellat, 1990, « L'École des filles. Quelle formation, pour quels rôles sociaux? » Paris, L'Harmattan

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