B. QUELLE RÉPONSE FRANÇAISE AUX NOUVEAUX ENJEUX ?

Au cours de ses premiers travaux, menés en 2006, votre rapporteur spécial avait formulé 11 propositions de nature à accroître les performances françaises en matière de respect du droit communautaire de l'environnement . L'ensemble des éléments de contexte qui viennent d'être rappelés conduisent à penser qu'une mise en oeuvre efficace de ces recommandations demeure prioritaire.

1. Une administration davantage mobilisée que par le passé

Selon le Secrétariat général des affaires européennes, « les départements ministériels ont désormais bien intégré les contraintes communautaires, le rapport présenté par Mme Keller en 2006 puis en 2007 y a notamment contribué. Dès lors, les modifications annoncées dans la pratique de la Commission ne devraient pas se traduire par une hausse substantielle des précontentieux communautaires, ni des risques financiers encourus » 47 ( * ) .

De fait, les développements qui suivent indiquent que le respect du droit communautaire constitue une exigence de mieux en mieux identifiée par le gouvernement et son administration.

a) Mieux transposer

Ainsi que votre rapporteur spécial l'a souligné, les statistiques indiquent une amélioration des performances françaises en matière de transposition 48 ( * ) . Il y a lieu de constater que plusieurs des recommandations formulées par l'étude du Conseil d'Etat « Pour une meilleure insertion des normes communautaires dans le droit national » (2007) trouvent un début de mise en oeuvre, à travers la généralisation progressive des tableaux de concordance 49 ( * ) et le perfectionnement de la base « transpositions » tenue par le SGAE.

Par ailleurs, la fréquence des réunions de groupe à haut niveau sur la transposition a récemment été doublée (de 2 à 4 réunions annuelles en mars, juin, septembre et décembre). Ces réunions, ajoutées aux « réunions transposition » organisées par le SGAE, ont en particulier permis de sensibiliser les différents départements ministériels au resserrement des contraintes qui pourraient résulter de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne.

Le SGAE fait, en outre, valoir une présence accrue lors des réunions interministérielles et réunions de travail soulevant d'importants enjeux communautaires, ainsi que lors des débats parlementaires entourant l'adoption de textes de transposition.

b) Des procédures d'infraction mieux suivies

En matière de gestion des procédures d'infraction, le principal outil demeure la circulaire du Premier ministre du 19 février 2007 sur la gestion des procédures d'infraction et prévention du contentieux liés à l'application du droit communautaire 50 ( * ) .

Une réunion tenue le 18 avril 2008 a dressé un premier bilan d'application de cette circulaire. Le compte rendu de cette réunion fait état d'une « amélioration de la transmission de l'information du SGAE vers les correspondants précontentieux lors des différentes étapes de la procédure d'infraction, notamment dès le stade de la demande d'information ».

Enfin, le SGAE se dote actuellement d'une base de données « infractions » renseignée par les différents secteurs du secrétariat général, et dont le secteur juridique pourrait extraire toutes les informations nécessaires au suivi des procédures en cours (référence des affaires, griefs, délais, étape de la procédure atteinte...).

2. Le MEEDDAT : un outil plus efficace pour appliquer le droit communautaire de l'environnement

Votre rapporteur spécial s'est également interrogé sur les conséquences qu'aurait la création d'un grand ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire (MEEDDAT) sur l'efficacité de la France en matière de transposition, d'application et de suivi des procédures liées au droit communautaire de l'environnement.

a) Les bénéfices attendus de la réorganisation de l'administration centrale

Il apparaît, en premier lieu, que la réorganisation en cours de l'administration centrale du ministère prévoit de regrouper au sein du secrétariat général l'ensemble des services transversaux dont font, en particulier, partie la direction des affaires européennes et internationales ainsi que la direction des affaires juridiques.

Cette réforme, qui s'inscrit dans le cadre de la revue générale des politiques publiques (RGPP), a notamment pour objectif d'améliorer le dispositif de suivi à la fois des textes en cours de négociation et des conditions de leur transposition en droit français .

S'agissant de la direction des affaires juridiques , le projet de décret prévoit notamment qu'elle soit « associée à la préparation et à l'élaboration des textes communautaires et internationaux, coordonne les travaux de transposition des directives et en assure le suivi . » La direction des affaires européennes et internationales serait, pour sa part, chargée de « la coordination générale des affaires européennes et internationales du ministère » et en particulier de coordonner « les positions du ministère dans les instances chargées d'élaborer la position de la France sur les questions européennes et internationales ».

Selon les représentants du MEEDDAT, cette nouvelle organisation permettra au secrétaire général du ministère et, par son intermédiaire, au ministre d'Etat « de disposer d'une information complète sur les textes en cours de négociation et sur l'avancement des travaux de transposition. Elle constitue un changement significatif par rapport à l'organisation précédente dans laquelle les fonctions juridiques et internationales étaient éparpillées au sein de chaque direction ou direction générale. » Le MEEDDAT fait également valoir qu'un point hebdomadaire sur l'état de transposition des directives communautaires est réalisé, « afin de pouvoir alerter le ministre d'Etat, son cabinet ainsi que l'ensemble des directions générales sur les dérapages qui nécessitent des actions correctrices ».

b) Une montée en puissance des études d'impact

Au cours de ses précédents travaux, votre rapporteur spécial avait insisté sur la nécessité de développer des outils de nature à produire des études d'impact approfondies de la législation communautaire en préparation, études d'impact non seulement juridique, mais aussi macroéconomique et budgétaire .

Ces outils semblent d'autant plus indispensables que, sous réserve de son entrée en vigueur, le traité de Lisbonne aurait pour conséquence l'extension à de nouvelles matières de la procédure d'adoption à la majorité qualifiée , ce qui devrait raccourcir les délais d'adoption de la législation communautaire et diminuer d'autant le temps disponible pour permettre aux Etats membres d'évaluer les conséquences pratiques des mesures adoptées .

Aux côtés des études d'impact juridique, ils sont également la condition d'une bonne anticipation des échéances fixées par les textes communautaires, échéances moins lointaines qu'il n'y paraît lorsque l'on considère l'ampleur des dispositifs à mettre en oeuvre pour se conformer aux objectifs fixés par certaines directives 51 ( * ) .

A ce titre, les services du MEEDDAT annoncent une systématisation progressive de l'évaluation au regard du développement durable , c'est-à-dire prenant en compte les impacts économiques et budgétaires, sociaux et environnementaux des projets et politiques publiques 52 ( * ) , en articulation avec les démarches et calendriers européens. En termes d'organisation administrative, cette évolution s'est traduite par la création d'un Commissariat général au développement durable chargé d'« évaluer l'ensemble des politiques publiques du ministère en termes de développement durable, de cordonner la réflexion économique du ministère et de préparer les choix stratégiques ».

S'agissant plus particulièrement de la préparation de la législation communautaire environnementale, le ministère fait état de plusieurs travaux complémentaires aux études d'impact menées par la Commission, destinés à en évaluer les effets en France et orienter les positions défendues par les autorités françaises. Ces travaux, en général confiés à la direction des études économiques et de l'évaluation environnementale (D4E), ont porté ou porteront, par exemple, sur le paquet « énergie-climat », en cours de négociation, le règlement REACH, la directive sur les plafonds d'émissions pour certains polluants atmosphériques ou encore la réforme de la PAC (cf. encadré).

L'évaluation d'impact au MEEDDAT

Dans le cadre de la proposition de révision de la directive 2003/87/CE établissant un système communautaire d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre , la D4E/ MEEDDAT a mené un travail visant à évaluer l'impact budgétaire des droits d'enchères sur la France et cadrer les propositions alternatives avancées par la France sur leur répartition entre Etats.

En partenariat avec le Laboratoire d'économie de la production et de l'intégration internationale (LEPII) un outil d'aide à la décision publique est construit afin d'apporter un appui (via la simulation des impacts de différents scénarii susceptibles d'être adoptés au niveau européen) aux négociations sur les propositions de directives (excepté celles qui concernent le stockage géologique du CO 2 ) relatives au paquet « énergie-climat ».

D'autres travaux d'évaluation ont été menés par la D4E/MEDDAT sur des projets de législation communautaire, ils concernent principalement REACH (règlement adopté mais qui entre dans sa phase opérationnelle), la directive sur les plafonds d'émissions pour certains polluants, et la réforme de la politique agricole commune.

Dans le cadre du règlement REACH , les travaux menés en 2005 ont abouti à proposer une méthode d'évaluation permettant de traduire, en termes économiques, les enjeux liés à l'application du principe de précaution . La réalisation d'une analyse coûts/bénéfices (comparaison des coûts liés à la mise en oeuvre du règlement aux bénéfices environnementaux et sanitaires escomptés) a permis de montrer que les bénéfices économiques environnementaux sont supérieurs aux coûts induits par REACH (bénéfice actualisé net compris entre 1,5 et 9,9 milliards d'euros). A l'heure actuelle, une étude plus fine de l'impact de REACH et ciblée sur les petites et moyennes entreprises est en cours sur la région Île-de-France.

Dans le cadre de la directive n° 2001/81/CE fixant des plafonds d'émission pour certains polluants atmosphériques , les travaux d'évaluation ont porté sur les instruments à privilégier en France pour atteindre les objectifs d'émissions eut égard à leur coût. L'option d'une taxe sur les émissions d'oxyde d'azote avec reversement a été expertisée et a permis de conclure qu'un tel instrument n'aurait qu'un impact très limité sur la compétitivité des entreprises françaises.

Enfin, dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune , les évaluations ont porté sur l'efficacité du dispositif de conditionnalité et sur l'impact environnemental du découplage des aides à la production. C'est ainsi que le découplage partiel des aides à la superficie dédiée à la production permettrait de diminuer de 7 % la consommation d'eau . Les réductions seraient particulièrement significatives pour les régions pour lesquelles la pression sur l'eau est la plus forte.

Source : MEEDDAT

c) Les enjeux liés au droit communautaire de l'environnement pris en compte dans les documents budgétaires

Votre rapporteur spécial avait recommandé de faire de la LOLF un outil de suivi des performances françaises en matière d'application du droit communautaire de l'environnement. Il convient, à cet égard, de saluer que les exigences liées au respect de ce droit transparaissent désormais clairement dans les documents budgétaires accompagnant le projet de loi de finances et le projet de loi de règlement .

Le projet annuel de performances (PAP) de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables » associe, par exemple, au programme « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables », un objectif 1 « Améliorer les délais d'élaboration et la qualité de la réglementation nationale, communautaire et internationale » dont l'indicateur de performance repose sur la part de textes transposés dans l'année rapportés au nombre de textes qui auraient dû être transposés avant l'année en cours .

Par ailleurs, plusieurs indicateurs de performance sont directement corrélés à l'application de directives communautaires, dont certaines font l'objet de procédures en cours. Il en va ainsi, au sein du programme « Protection de l'environnement et prévention des risques », de l'insertion d'un objectif 3 de « Gestion intégrée de la ressource en eau », propre à assurer un suivi de la mise en oeuvre de la directive-cadre sur l'eau 53 ( * ) . A cet objectif sont notamment associés :

1) un indicateur sur le pourcentage des masses d'eau en bon état (le « bon état écologique des eaux » doit être atteint en 2015, selon la directive-cadre) ;

2) un indicateur relatif au retraitement des eaux usées, dont les sous-indicateurs sont constitués par le taux de conformité aux normes européennes en équipement des stations d'épuration et un indicateur mesurant l'intervention des agences de l'eau pour la mise aux normes de ces stations » ;

3) un indicateur relatif à la teneur en nitrates des eaux fondé sur le taux de conformité des points du réseau nitrates, déployé en application de la directive n° 91/676/CEE concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles 54 ( * ) .

Votre rapporteur spécial jugerait opportun que l'ensemble de ces éléments soient complétés par la création d'un indicateur de performance assis sur l'évolution du montant des provisions pour litiges communautaires . Cette innovation est également suggérée par le Conseil d'Etat qui, dans son étude de 2007 précitée, estime que « des indicateurs portant notamment sur [...] l'évaluation du risque financier encouru par la France au titre de l'article 228 du traité pourraient être intégrés dans les programmes ( sic ) annuels de performance de chaque ministère ».

3. Quelle implication pour les Parlements nationaux et les collectivités territoriales ?

Au-delà des administrations placées sous l'autorité du gouvernement, votre rapporteur spécial estime que les enjeux européens doivent mobiliser le Parlement et les collectivités territoriales , dont les prérogatives et compétences conditionnent la bonne application du droit communautaire, et tout particulièrement du droit communautaire de l'environnement.

a) Des « leviers » d'action multiples pour le Parlement

Dans sa résolution du 21 février 2008 précédemment évoquée, le Parlement européen appelle de ses voeux « une coopération accrue entre les Parlements nationaux et le Parlement européen [...] afin de promouvoir et d'améliorer l'examen des affaires européennes au niveau national » et estime que « les Parlements nationaux peuvent jouer un rôle précieux dans le contrôle de l'application du droit communautaire ».

Votre rapporteur spécial souscrit à ces principes et considère que les Parlements nationaux disposent déjà de leviers multiples pour contribuer à améliorer le respect par les Etats membres du droit communautaire. Au premier rang de ces leviers figure l'examen par les délégations parlementaires pour l'Union européenne des projets ou propositions d'actes des Communautés européennes et de l'Union européenne transmis en application de l'article 88-4 de la Constitution 55 ( * ) . Cet examen donne lieu, le cas échéant, à l'adoption de résolutions européennes .

En deuxième lieu, l'exercice des compétences législatives de nos assemblées peut contribuer à améliorer les performances françaises en matière de transposition des directives. Les amendements déposés par notre collègue Jean Bizet 56 ( * ) , au nom de la commission des affaires économiques du Sénat, au projet de loi sur la responsabilité environnementale en sont une illustration récente, en ce qu'ils ont permis de résorber partiellement le « stock » de directives environnementales pour lesquelles la France accusait un retard de transposition ayant abouti au lancement de procédures d'infraction, ou pour lesquelles des corrections étaient nécessaires 57 ( * ) . En l'espèce, l'initiative parlementaire atténue donc sensiblement la « longueur » et la « complexité » de la transposition par voie législative diagnostiquée par le Conseil d'Etat.

Le Parlement a également vocation, dans l'exercice de sa fonction de contrôle du gouvernement, à veiller au respect par l'Etat de ses obligations communautaires. Si votre rapporteur spécial s'est efforcé de l'illustrer au travers de ses propres travaux, il relève que les enjeux budgétaires liés au non-respect du droit communautaire font l'objet d'un suivi attentif de la part de l'ensemble de votre commission des finances 58 ( * ) . En témoignent, notamment, les travaux actuellement conduits par notre collègue Joël Bourdin sur les pénalités financières résultant des refus d'apurement communautaire dans le domaine agricole 59 ( * ) .

Par ailleurs, le traité de Lisbonne prévoyait de renforcer l'information des Parlements nationaux et les modalités du contrôle de subsidiarité 60 ( * ) qu'ils opèrent sur les projets d'actes législatifs communautaires 61 ( * ) . Un groupe de travail associant les services des deux assemblées aux ministères concernés étudie actuellement les moyens d'approfondir les relations entre le gouvernement et le Parlement au regard du traité et de l'article 88-4 de la Constitution.

Il convient enfin d'attirer l'attention sur le fait que les parlementaires seront d'autant plus conscients des enjeux liés au respect droit communautaire qu'ils bénéficieront d'un accès immédiat et transparent à l'information disponible . La marge de progression est réelle en la matière :

1) tant pour les administrations communautaires , qui peuvent refuser l'accès aux documents dont la divulgation porterait atteinte à la protection des procédures juridictionnelles et des avis juridiques 62 ( * ) . Le Parlement européen fait, à cet égard, état de la « réticence de la Commission à fournir des informations précises sur les thèmes faisant l'objet de procédures d'infraction » 63 ( * ) ;

2) que pour les administrations nationales , qui transmettent souvent les informations demandées sous réserve de ne pas les rendre publiques, et au motif qu'une telle publicité pourrait porter préjudice à la France dans les négociations qu'elle mène avec la Commission sur les procédures d'infraction ouvertes.

b) Des collectivités territoriales mieux associées

Au cours de ses travaux de suivi, l'eau et les déchets sont apparus à votre rapporteur spécial comme des « points faibles » de l'application, en France, du droit communautaire de l'environnement. En effet, les statistiques 64 ( * ) fournies par les services de la Commission européenne démontrent que 17 % des cas français traités par la direction générale « Environnement » concernent les déchets et 21 % l'eau . Par ailleurs, trois procédures sont actuellement ouvertes en application de l'article 228 concernant la pollution de l'étang de Berre, les décharges illégales et l'eau potable (cf. tableau).

Eau et déchets : des points faibles pour la France

Affaire et stade de la procédure 228

Griefs soulevés par la Commission

Action mise en oeuvre par la France

Affaire C-239/03 - Etang de Berre (Arrêt du 7 octobre 2004 - Manquement aux obligations de la Convention de Barcelone et du Protocole d'Athènes)

Mise en demeure du 19.12.2005.

Pollution massive et prolongée de l'Etang de Berre.

Dans le cadre des négociations avec la Commission, les autorités françaises se sont engagées sur 3 points : limitation des déversements annuels d'eau douce à 1,2 milliards m 3 ; réduction des rattrapages hebdomadaires des volumes de rejet à 4 semaines par an ; augmentation à 75% du nombre de mesures de salinité qui, en moyenne hebdomadaire, doivent être supérieures à 20g/L. Dans le cadre de la transmission de leurs rapports semestriels sur l'évaluation de l'impact des nouvelles modalités d'exploitation de la centrale EDF, les autorités françaises ont pu confirmer que les contraintes en termes de limitation et de lissage des rejets d'eau douce ainsi que de suivi des seuils de salinité ont été respectées. L'état écologique de l'Etang est en amélioration substantielle. Issue favorable envisageable. Classement de l'infraction possible courant 2008.

Affaire C-423/05 - Décharges illégales (Arrêt du 29 mars 2007 - Manquement aux dispositions des directives 75/442 et 1999/31)

Mise en demeure le 6.5.2008

Exploitation de quelques 8.000 décharges non autorisées sur le territoire national (chiffres issus de plans départementaux élaborés dans les années 1990 et présentés en 2005 dans la requête devant al Cour).

Les autorités françaises ont conduit parallèlement 2 actions : la restitution de données historiques pour démontrer que le chiffre dont disposait la Commission était très ancien et erroné. En effet, à l'issue d'un recensement national conduit en 2004, près de 942 DNA ont été dénombrées. Les actions de résorption ont conduit progressivement à leur diminution substantielle. Il n'en restait plus que 51 en juin 2007. Aujourd'hui, elles sont au nombre de 14, géographiquement circonscrites : 1 en Corse du Sud et 13 en Guadeloupe. Actions d'information et de mobilisation en direction des autorités préfectorales.

Affaire C-147/07 - Eau potable Vendée, Deux-Sèvres et Charente-Maritime (Arrêt du 31 janvier 2008 - Manquement aux obligations de la directive 98/83/CE relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine)

Demande d'informations du 8.2.2008

Taux de nitrates et de pesticides supérieurs aux valeurs limites fixées par la directive dans certaines unités de distribution (UDI) situées dans les 3 départements cités.

Pour l'année 2007, seules 18 unités de distribution sur 314 ont été concernées de manière épisodique par un dépassement des limites de qualité en nitrates ou pesticides, ainsi réparties : pour la Vendée, Pesticides : 0 UDI - Nitrates : 1 UDI ; pour la Charente-Maritime, Pesticides : 12 UDI - Nitrates : 2 UDI ; pour les Deux-Sèvres, Pesticides : 0 UDI - Nitrates : 3 UDI. Toutes ces UDI sont couvertes par un arrêté préfectoral de dérogation. Dès lors, la France respecte les dispositions de la directive

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du SGAE

Ce phénomène n'est probablement pas étranger au fait que ces deux secteurs ressortissent, dans notre pays, au champ de compétences des collectivités territoriales , collectivités dont « l'acclimatation » aux problématiques communautaires doit être approfondie.

Le propos de votre rapporteur spécial n'est évidemment pas de pointer un quelconque désintérêt manifesté par les élus locaux à l'égard du droit communautaire. La méconnaissance des enjeux qui y sont attachés résulte plutôt du fait que les collectivités territoriales sont très faiblement associées au processus d'élaboration de la norme européenne, y compris lorsque la mise en oeuvre de cette norme leur incombera au premier chef. Elles ne sont pas davantage parties prenantes aux procédures d'infraction engagées contre la France, en vertu du principe selon lequel la Commission est « aveugle » à l'organisation territoriale interne de chaque Etat membre.

Votre rapporteur spécial a déjà attiré l'attention sur le fait que l'Etat envisageait, en particulier dans le cadre de l'affaire des eaux résiduaires urbaines, de faire supporter le poids d'éventuelles sanctions pécuniaires aux collectivités à qui un manquement au droit communautaire serait imputable.

L'ensemble de ces éléments plaide pour une association étroite des collectivités à l'ensemble des étapes du processus de décision communautaire, et à tout le moins dans les domaines où l'application de la norme européenne ressortira à leur champ de compétences.

Le SGAE a indiqué à votre rapporteur spécial que plusieurs initiatives 65 ( * ) avaient été prises dans cette direction, et en particulier :

1) la création d'une commission nationale des exécutifs locaux , qui organise la concertation entre les ministères et les principales associations d'élus locaux sur les sujets, notamment communautaires, qui les concernent ;

2) la réunion trimestrielle d'un groupe de travail technique associant les secteurs du SGAE et les correspondants sectoriels des associations de collectivités locales (deux réunions se sont déjà tenues, dont une sur les thèmes de l'énergie et du climat) ;

3) un effort d'association des collectivités territoriales à la préparation de la Présidence française de l'Union européenne.

Au titre de l'association plus étroite des collectivités territoriales au processus de décision communautaire, votre rapporteur spécial relève enfin l'amendement adopté sur proposition de notre collègue Alain Lambert au cours de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2007 66 ( * ) .

Aux termes de cet amendement 67 ( * ) , l'article L. 1211-4-1 du code général des collectivités territoriales dispose désormais qu'une formation restreinte dénommée commission consultative d'évaluation des normes est notamment chargée, au sein du comité des finances locales, « d'émettre un avis sur les propositions de textes communautaires ayant un impact technique et financier sur les collectivités territoriales et leurs établissements publics ».

* 47 Réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial.

* 48 Les procédures en la matière sont notamment régies par la circulaire du 27 septembre 2004 relative à la procédure de transposition en droit interne des directives et décisions-cadres négociées dans le cadre des institutions européennes.

* 49 Ces tableaux mettent en regard les dispositions des directives et les dispositions de droit national devant en opérer la transposition, assorties d'éventuelles observations.

* 50 Ses principales dispositions consistent à nommer deux correspondants du précontentieux communautaire dans chaque ministère, à veiller au respect des engagements pris par les autorités françaises dans les notes adressées à la Commission, et à confier au SGAE le pilotage de la gestion des procédures d'infraction et le soin de veiller à l'exécution des arrêts en manquement pour prévenir toute procédure de manquement sur manquement.

* 51 Ainsi de la directive cadre sur l'eau, qui prévoit l'atteinte du bon état écologique des eaux à l'horizon 2015.

* 52 Cette évolution s'inscrit dans le sens des engagements du Grenelle de l'environnement annoncés par le Président de la République sur les études d'impact associées à chaque projet de loi, sur l'évaluation environnementale des lois et mesures fiscales et des outils économiques existants.

* 53 Directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2000, établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau.

* 54 Cette directive n'est pas celle sur laquelle se fonde l'affaire « Nitrates de Bretagne ».

* 55 Cet article dispose que « Le Gouvernement soumet à l'Assemblée nationale et au Sénat, dès leur transmission au Conseil de l'Union européenne, les projets ou propositions d'actes des Communautés européennes et de l'Union européenne comportant des dispositions de nature législative. Il peut également leur soumettre les autres projets ou propositions d'actes ainsi que tout document émanant d'une institution de l'Union européenne. Selon des modalités fixées par le règlement de chaque assemblée, des résolutions peuvent être votées, le cas échéant en dehors des sessions, sur les projets, propositions ou documents mentionnés. »

* 56 Voir le rapport n° 348 (2007-2008) sur le projet de loi relatif à la responsabilité environnementale.

* 57 Notamment les directives relatives à la pollution causée par les navires, à la qualité de l'air ambiant, ou à la performance énergétique des bâtiments.

* 58 Rapport d'information n° 366 (2007-2008), sur le contrôle budgétaire, fait par MM. Jean Arthuis, Philippe Marini, Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne et François Trucy, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.

* 59 Enquête confiée à la Cour des comptes par votre commission des finances en application de l'article 58-2° de la LOLF.

* 60 Sur les modalités concrètes de ce contrôle, voir le rapport d'information de notre collègue Hubert Haenel, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, « Les Parlements nationaux et l'Union européenne après le traité de Lisbonne » (n° 393, 2007-2008).

* 61 Ainsi, en cas de contestation d'un tel projet par une majorité simple de Parlements nationaux et de maintien du projet d'acte par la Commission, le Conseil et le Parlement européen devront se prononcer sur la compatibilité de ce projet avec le principe de subsidiarité. Ce projet sera écarté si le Conseil (à la majorité de 55 % de ses membres) ou le Parlement européen (à la majorité simple) donnent une réponse négative. Cette procédure ouvre donc des possibilités inédites aux Parlements nationaux pour peser sur le processus décisionnel communautaire.

* 62 Article 4 du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2001, relatif à l'accès du public aux documents de Parlement européen, du Conseil et de la Commission.

* 63 Résolution du 21 février 2008, considérant 37.

* 64 Au 18 avril 2008.

* 65 Initiatives qui gagneraient à être déclinées au niveau territorial. S'agissant par exemple des questions d'application du droit communautaire dans le domaine de l'eau, des enceintes existantes, telles que le comité de bassin, peuvent utilement être mises à profit pour sensibiliser les collectivités territoriales aux enjeux européens.

* 66 Article 97 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007.

* 67 Cet amendement résulte des travaux confiés à notre collègue Alain Lambert par le gouvernement, sur les relations entre l'Etat et les collectivités territoriales.

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