2. Des études thématiques peu nombreuses et hétérogènes

Des études thématiques a posteriori sont parfois menées pour évaluer l'orientation d'un dispositif de droit commun vers les zones d'intervention de la politique de la ville.

- La DARES 108 ( * ) analyse, ainsi, régulièrement l'accès des résidents de ZUS aux dispositifs de la politique de l'emploi 109 ( * ) . La dernière étude disponible porte sur l'année 2004 : sur les 823 000 salariés embauchés cette année-là dans un dispositif de la politique de l'emploi financé par l'État, hors apprentissage, 12 % résidaient dans une ZUS de France métropolitaine, soit une proportion nettement supérieure au poids des ZUS dans la population active (7 %). Cependant, les résidents de ZUS sont relativement plus représentés dans les dispositifs qui donnent le moins facilement accès à un emploi durable non aidé 110 ( * ) . En sens inverse, pour d'autres dispositifs permettant un accès plus durable à l'emploi non aidé, les résidents de ZUS sont relativement défavorisés 111 ( * ) . Cependant, cette étude ne fait pas apparaître la part des résidents de ZUS dans le total des financements destinés aux dispositifs de la politique de l'emploi. Un groupe de projet réunissant la DIV, la DARES et la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) a été constitué, à la fin de l'année 2006, pour améliorer le recueil et le traitement des données relatives à la politique de l'emploi.

- Opérateur de l'État financé à plus de 90 % par des subventions retracées sur le programme 135 « développement et amélioration de l'offre de logement » , l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) publie également des données sur le versement en ZUS de ses subventions d'amélioration de l'habitat 112 ( * ) .

Cependant, de telles études - instructives pour le champ concerné - sont trop rares et trop hétérogènes dans leurs méthodologies pour que puissent en être tirées des conclusions transversales sur la mobilisation des politiques de droit commun.

3. Un document budgétaire transversal qui doit encore être amélioré

a- Les évolutions du jaune budgétaire

La Cour avait formulé, dans son rapport public particulier de 2002, plusieurs critiques à l'égard du « jaune » budgétaire annexé au projet de loi de finances et consacré à la politique de la ville 113 ( * ) .

Les critiques de la Cour en 2002 à l'encontre du jaune budgétaire

« politique de la ville »

La Cour estimait le document peu fiable : « l'insuffisance des systèmes de suivi financier rend très difficile l'élaboration d'un document bien renseigné. Il n'est donc pas possible actuellement de donner un chiffrage précis et incontestable du montant des crédits publics affectés à la politique de la ville, ni pour l'ensemble des acteurs publics, ni même pour le seul État. »

La Cour relevait également :

- Des défauts de présentation : absence d'un tableau récapitulant les actions des ministères ; insuffisance des commentaires sur le montant annuel des agrégats et leur évolution sur plusieurs années ; absence de bilans des principaux dispositifs de la politique de la ville ou des engagements financiers pluriannuels ; absence d'illustrations concrètes des politiques menées et de leur impact ; hétérogénéité des présentations des ministères et organismes publics qui semblent juxtaposées au lieu d'être mises en cohérence.

- Une fiabilité douteuse des informations financières : faible nombre d'informations budgétaires et leur caractère parcellaire et hétérogène ; remontée d'informations sur les contrats de ville peu performante ; incertitudes sur la méthode d'évaluation de la contribution des ministères ; choix d'imputation ou de présentation pouvant porter atteinte à la sincérité de l'évaluation financière ; une conception large du « jaune » pouvant engendrer une confusion entre effort de l'État et effort public en faveur de la ville ; une prise en compte du montant total d'une mesure alors qu'une partie seulement peut être raisonnablement rattachée à la politique de la ville ; addition de données hétérogènes.

Plusieurs améliorations ont été apportées à ce document budgétaire pour répondre à ces critiques. Afin de gommer l'hétérogénéité des contributions et de leur donner plus de cohérence, la présentation du « jaune » a été organisée autour de plusieurs thématiques : « rénovation urbaine » , « équité sociale et territoriale » , « stratégie, ressource, évaluation » . Cette approche devait permettre d'affiner l'évaluation du coût pour l'État et ses partenaires des actions menées au titre de la politique de la ville. Le « jaune » a également été enrichi de tableaux précisant par thématiques les interventions des ministères. Des évolutions ont également permis de mieux homogénéiser les données financières prises en compte 114 ( * ) .

b- Le nouveau document de politique transversale (DPT) « Ville »

Prévus par l'article 128 de la loi de finances rectificative pour 2005 du 30 décembre 2005, les DPT « développent pour chaque politique concernée la stratégie mise en oeuvre, les crédits, objectifs et indicateurs y concourant. Ils comportent également une présentation de l'effort financier consacré par l'État à ces politiques » . Ce texte institue huit documents de politique transversale. La mission « Ville et logement » est concernée par deux d'entre eux : le DPT « Inclusion sociale » 115 ( * ) et le DPT « Ville » . L'intérêt pour l'information budgétaire d'un document de politique transversale sur la politique interministérielle qu'est celle de la Ville est réel.

Pour la première fois en 2007 116 ( * ) , un DPT « Ville » a été élaboré : 26,30 % des crédits de paiement de la mission « Ville et logement » demandés dans le cadre du PAP 2007 sont concernés par ce DPT 117 ( * ) . Le DPT « Ville », pour l'élaboration duquel la DIV exerce un rôle de chef de file, est composé de 24 programmes relevant de 10 missions de l'État et des deux programmes « Ville » (147 et 202) de la mission « Ville et logement » dont les actions sont spécifiques aux quartiers défavorisés. Au-delà des moyens spécifiques de la politique de la ville (1,18 Md€ de CP pour les deux programmes Ville), les autres ministères concourent à la politique de la ville à hauteur de 2,55 Md€ (CP), selon les données du DPT,.

Tableau n° 22 :  Evaluation des crédits budgétaires consacrés à la politique transversale (en M€)

2005

2006

2007

CP

CP

CP

TOTAL des 2 programmes Ville

883.9

1026.2

1181

TOTAL des autres missions

1658.8

2609.6

2554

TOTAL des crédits budgétaires

2542,7

3635,8

3735

Source : DPT 2007

c- Les limites du DPT 2007

Six programmes sur les vingt-cinq rattachés au DPT ne comportent pas d'évaluation des crédits contribuant à la politique de la ville, ce qui réduit la portée du document.

En outre, en dépit des améliorations apportées au « jaune », la fiabilité de la remontée d'informations pour l'évaluation des crédits de droit commun reste incertaine. De nombreux ministères n'intègrent pas, en effet, la géographie prioritaire de la politique de la ville dans la gestion de leurs dispositifs de droit commun. Les moyens consacrés par le ministère de la culture et de la communication destinés aux quartiers d'intervention de cette politique restent, ainsi, mal connus. En matière d'emploi, le nombre de contrats aidés dont bénéficient les demandeurs d'emploi en ZUS ne peut être connu suffisamment tôt pour être mentionné au DPT, en dépit du caractère prioritaire de ces publics dans les dispositifs.

* 108 Direction de l'animation de la recherche des études et des statistiques du ministère chargé de l'emploi.

* 109 Les dispositifs de politique de l'emploi dans les zones urbaines sensibles : un accès privilégié aux CES et SIFE collectifs , Premières synthèses, premières informations, n° 39.2, septembre 2005.

* 110 Comme les contrats emploi solidarité (CES) et les contrats emploi consolidé (CEC), pour lesquels les taux d'accès des résidents de ZUS sont plus élevés que ceux des résidents hors ZUS.

* 111 Comme le contrat initiative emploi (CIE) et l'aide aux chômeurs créateurs et repreneurs d'entreprises (ACCRE) pour lesquels les taux d'accès des résidents de ZUS sont moins élevés que ceux des résidents hors ZUS.

* 112 Il ressort de ces données que le nombre de logements du parc privé situés en ZUS bénéficiant de subventions de l'ANAH a diminué en 2005 par rapport aux années 2003 et 2004. Durant ces deux années en effet, les aides annuelles concernaient plus de 15 000 logements, contre 11 600 logements en 2005. La baisse est également importante sur les seuls logements locatifs : de 14 300 logements en 2004, à moins de 10 000 en 2005 alors qu'au niveau de la France entière le nombre de logements dans cette catégorie a augmenté de 11 %. Il est à noter toutefois que les subventions destinées aux ZUS ont augmenté entre 2004 et 2005 : 29,3 M€ ont bénéficié aux propriétaires habitant en ZUS en 2005, contre 25,6 M€ en 2004 (source : rapport ONZUS 2006, données ANAH).

* 113 Etat récapitulatif de l'effort financier consacré à la politique de la ville et du développement sociale urbain . Un tableau de synthèse sur longue période est présenté en annexe.

* 114 La contribution de la Caisse des dépôts et consignations fait l'objet d'une double déclinaison permettant de distinguer le montant global de sa participation (prêts et aides) et le coût définitif qu'il représente (bonification des prêts et aides). Les sommes versées au titre de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU-CS) aux communes relevant de la géographie prioritaire ont été retranchées du montant global de la participation des collectivités territoriales pour prévenir le risque de double compte.

* 115 78 % des crédits de paiement de la mission « Ville et logement » (PLF 2006).

* 116 Le DPT « Ville » n'a pas été élaboré en 2006, contrairement aux dispositions de la LFR pour 2005. Les sept autres DPT prévus ont été annexés au PLF pour 2006. En 2006, un « jaune » relatif à la politique de la Ville a dû être à nouveau élaboré.

* 117 Une analyse du DPT est présentée en annexe.

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