III. LA DURÉE EXCESSIVE DES PHASES DE RECOUVREMENT

Les modalités du recouvrement des amendes et condamnations judiciaires sont décrites par le décret du 22 décembre 1964. Il convient de remarquer que le décret n'impose aucun délai précisé par un nombre de jours aux comptables dans la mise en oeuvre des actions de recouvrement. Mais l'article 2 du décret renvoie implicitement au code de procédure pénale qui précise les délais dans lequel les condamnations acquièrent un caractère définitif.

A - LA PRISE EN CHARGE PAR LE TRÉSOR PUBLIC

L'instruction codificatrice de la direction générale de la comptabilité publique, datée du 13 avril 2006 41 ( * ) , rappelle que la prise en charge est effectuée au vu de l'« extrait finances » et qu'elle est comptabilisée exclusivement dans les écritures du trésorier-payeur général. Les prises en charge comptables sont effectuées mensuellement ; elles sont hebdomadaires dans le cas des amendes relevant du contrôle automatisé.

Un avis doit être adressé au redevable « dès réception du titre de recouvrement » (art. 3 du décret du 22 décembre 1964). Les mentions obligatoires contenues dans l'avis sont prévues par le code de procédure pénale au sujet des amendes forfaitaires majorées (art. R49-5 et R49-6). Ce sont notamment le lieu et la date de la contravention, le montant de l'amende forfaitaire majorée ainsi que le délai et les modalités de réclamation.

B - LES TROIS PHASES DU RECOUVREMENT

Le décret du 22 décembre 1964 et l'article 128 de la loi de finances rectificative n° 1485 du 30 décembre 2004 précisent les moyens juridiques à la disposition des comptables. Ne contenant aucune mention de délai exprimé en nombre de jours, ces textes ne délimitent pas les « phases » de recouvrement.

1 - La phase de règlement spontané

Cette phase démarre à l'issue de la prise en charge des titres à recouvrer. La direction de la comptabilité publique fixe une durée de 3 mois afin de permettre au débiteur de s'acquitter spontanément de sa dette ou de voir sa contestation traitée ; pendant cette phase, aucune poursuite n'est engagée.

La durée de 3 mois a pour origine l'article 530-alinea 2 du code de procédure pénal relatif aux amendes forfaitaires majorées sanctionnant les contraventions au code de la route. Cet article dispose : « s'il s'agit d'une contravention au code de la route, la réclamation n'est toutefois plus recevable à l'issue d'un délai de trois mois lorsque l'avis d'amende forfaitaire majorée est envoyé par lettre recommandée à l'adresse figurant sur le certificat d'immatriculation du véhicule » .

En pratique, la direction de la comptabilité publique a aligné la phase de règlement spontané de l'ensemble des décisions d'amendes et de condamnations pécuniaires sur le délai le plus long, octroyé aux décisions d'amendes forfaitaires majorées relatives aux contraventions au code de la route.

Or cette durée de trois mois, appliquée à l'ensemble des amendes et condamnations pécuniaires, n'est pas conforme aux conditions posées par l'article 2 du décret du 22 décembre 1964 qui prévoit que la phase active de recouvrement démarre lorsque les décisions judiciaires ont acquis un caractère définitif.

Le caractère définitif s'acquiert dans un délai qui diffère selon la procédure de jugement ; ce délai est défini en nombre de jours au livre II du code de procédure pénale pour chaque procédure de jugement. Lorsque la décision est contestée, le caractère définitif n'est acquis qu'après épuisement des voies de recours.

Afin d'appliquer correctement l'article 2 du décret du 22 décembre 1964, la direction de la comptabilité publique devrait adapter la durée de la phase de règlement spontané en fonction du délai d'acquisition du caractère définitif prévu par chaque procédure de jugement à l'origine de l'amende.

La direction générale de la comptabilité publique (DGCP) répond que la distinction des délais selon les catégories d'amendes serait complexe à mettre en oeuvre sur le plan technique et organisationnel.

La Cour observe que les délais ne doivent pas être distingués selon les catégories d'amendes mais selon les procédures de jugement, qui sont, elles, peu nombreuses.

Par ailleurs, en ce qui concerne les amendes forfaitaires majorées relatives aux contraventions au code de la route, le délai réservé au règlement spontané par la DGCP épouse le délai légal défini par le code de procédure pénale. Mais ce délai ne parait pas justifié au plan pénal car il constitue le prolongement du délai de règlement spontané de 45 jours applicable aux amendes forfaitaires, avant leur majoration pour cause de non paiement.

La seule justification parait résider dans des considérations pratiques tenant à l'encombrement des services des officiers du Ministère public par les réclamations portant sur les amendes forfaitaires du code de la route. Dès lors, afin de pouvoir réduire le délai de recours de 3 mois en cas d'amendes forfaitaires majorées, il est sans doute nécessaire d'allonger, en amont, le délai de recours de 45 jours, actuellement applicable en amont aux amendes forfaitaires.

2 - La phase comminatoire amiable

A l'issue de la phase de règlement spontané, débute la phase comminatoire amiable, préalable à toute poursuite. Toutes les amendes n'ayant pas fait l'objet d'un « retour NPAI » (N'habite Pas à l'Adresse Indiquée) sont éligibles à la phase comminatoire amiable.

Depuis l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 128 de la loi de finances rectificative de 2004, cette phase est confiée aux huissiers de justice. Elle reste pilotée par le comptable à qui l'huissier adresse des comptes rendus dématérialisés d'exécution.

En vertu de la convention signée entre la direction générale de la comptabilité publique et la Chambre nationale des huissiers de justice, les huissiers disposent de 3 mois pour procéder au recouvrement des dettes par voie de relances amiables.

La direction de la comptabilité publique souligne que cette procédure « présente le double avantage d'être sans coût pour l'État, puisque la rémunération des huissiers est supportée par le débiteur (15% du montant recouvré) et efficace en terme de recouvrement ». La procédure mise en place mi 2006 a permis, selon la DGCP, d'obtenir un taux de recouvrement moyen de 20 %.

Néanmoins, le cumul de la phase de règlement spontané avec la phase comminatoire amiable aboutit à un délai de 6 mois pendant lequel aucune poursuite n'est déclenchée par les comptables du Trésor. Ce délai réduit l'efficacité des poursuites car il les éloigne trop de la date à laquelle l'infraction a été commise.

C - LA PHASE DE RECOUVREMENT FORCÉ

En cas d'échec de la phase comminatoire amiable, débute la phase de recouvrement forcé : des actions coercitives sont engagées par le comptable. Ces actions peuvent être l'opposition administrative, puis, le cas échéant, la saisie par un huissier du Trésor ou un huissier de justice.

En toute hypothèse, pour une amende liée à une infraction au code de la route, les droits du Trésor peuvent être garantis par une déclaration en préfecture, dans le cas d'une adresse connue, et par une opposition au transfert du certificat d'immatriculation (OTCI ), dans le cas d'une adresse inconnue .

* 41 L'instruction codificatrice N° 06-029-P-R publiée au bulletin officiel de la comptabilité publique

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page