2. L'émergence progressive d'un nouvel acteur : la région
a) 1983 : l'affirmation d'une compétence de droit commun, mais encore largement partagée par l'État
L'affirmation d'une compétence de droit commun en faveur des régions
Simple lieu de déconcentration des pouvoirs de l'État dans les années cinquante et soixante, les régions sont devenues des établissements publics en 1972 avant de devenir des collectivités territoriales de plein exercice en 1982 et de se doter d'un conseil élu pour la première fois au suffrage universel en 1986.
Cette consécration s'est accompagnée d'un élargissement de leurs compétences parmi lesquelles la formation professionnelle et l'apprentissage, prolongement naturel des nouvelles attributions régionales en matière de développement économique, d'aménagement du territoire et de planification.
A l'origine de ce transfert de compétences, il y a la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État , qui a accordé aux régions une compétence de droit commun pour la mise en oeuvre des actions d'apprentissage et de formation professionnelle continue. Il leur revient désormais d'élaborer, en toute autonomie, leur politique de formation et d'apprentissage, de définir leurs propres priorités, d'arrêter librement le choix de leurs actions et le mode de conventionnement avec les organismes de formation.
Les régions se sont vu reconnaître toute liberté pour répartir leurs dépenses entre les différents domaines de formation. A cet effet, un fonds régional de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue (FRAFP), servant de réceptacle de ces crédits ainsi que de ceux votés par le conseil régional, est créé dans chaque région et sa gestion est confiée au conseil régional.
Une compétence étatique encore forte
En contrepartie, l'article 82 de la loi du 7 janvier 1983 a maintenu à l'État des compétences d'attribution, limitativement énumérées, encore importantes :
- la compétence normative : elle couvrait la définition du cadre législatif et réglementaire et le contrôle de l'application de l'obligation légale de financement de la formation par les employeurs ;
- les actions de portée nationale : elles concernaient les stages assurés par un même organisme dans plusieurs régions, ou des formations destinées à des stagiaires ou des apprentis sans considération d'origine régionale. Il en est ainsi des actions de formation financées par le Fonds national de l'emploi (dont celles assurées par l'AFPA) et des actions de formation en faveur des publics spécifiques : les illettrés, les détenus, les réfugiés et les personnes handicapées ;
- les actions de portée générale : elles découlaient des programmes établis au titre des orientations prioritaires de l'État et définies annuellement par le Comité interministériel de la formation professionnelle et de la promotion sociale, après concertation avec les organisations professionnelles et syndicales au sein des instances prévues à cet effet. Il ne s'agissait pas, pour ce type d'actions, d'une exclusivité de l'État, mais d'une obligation nationale à laquelle les partenaires sociaux et les régions devaient également contribuer ;
- les études et les actions expérimentales : il s'agissait des études nécessaires à la préparation des politiques menées par l'État ainsi que de la définition des moyens permettant d'assurer l'information sur les politiques engagées.
Au total, au moment du vote de la loi de 1983, les 4/5 e des moyens publics d'intervention en matière de formation professionnelle continuaient à relever de la responsabilité de l'État.
Cette répartition des attributions traduisait bien l'approche selon laquelle la formation professionnelle était encore conçue comme un instrument de long terme de développement économique et de qualification des actifs. Ce n'est que progressivement, avec la montée du chômage, qu'elle est devenue un moyen de gestion conjoncturelle du chômage.
Mais, si l'État gardait un large champ d'attribution, obligation lui était faite désormais de consulter les régions sur le choix et la localisation de ses actions.