b) Les gestionnaires de réseaux « historiques » gardent le contrôle de cette activité
La gestion des réseaux de distribution conserve, pour l'heure, un régime de monopole de concession territoriale en France 255 ( * ) .
Toutefois, l'article 13 de la loi du 9 août 2004, modifié par l'article 23 de la loi du 7 décembre 2006, a étendu le principe de séparation juridique au domaine la distribution de l'électricité . En effet, selon ses dispositions, « la gestion d'un réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel desservant plus de 100.000 clients sur le territoire métropolitain continental est assurée par des personnes morales distinctes de celles qui exercent des activités de production ou de fourniture d'électricité ou de gaz naturel ». Cela a abouti à la création d'ERD, future filiale d'EDF chargée de cette activité .
A ce jour, le paysage des concessions de distribution d'électricité en France demeure donc fidèle à sa tradition historique : ERD détient 95 % de ce marché tandis que les 5 % restant sont sous le contrôle des entreprises de distribution d'électricité non nationalisées par la loi du 8 avril 1946 (selon les dispositions de ses articles 23 et 36). Il s'agit, pour l'essentiel, de sociétés d'économie mixtes ou de coopératives.
Le professeur Jean-Michel Glachant a jugé qu'une telle situation pouvait poser un problème à terme, des sociétés comme Electrabel pouvant souhaiter avoir accès à ce marché en France 256 ( * ) . Relevant qu'« en Grande-Bretagne, EDF gère très bien un réseau qui ne lui appartient pas. Il existe donc partout de très bons professionnels qui savent gérer un réseau », il a ajouté que la mise en concurrence n'était dangereuse « qu'en l'absence d'une régulation sérieuse et musclée de la qualité des réseaux de distribution et des investissements conséquents », ce qui n'est pas le cas en France. De fait, comme indiqué ci-dessus, il n'est pas exclu que le régime français de monopole de concession soit menacé, à terme, par l'évolution de la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes en matière d'attribution de concessions 257 ( * ) .
Vos rapporteurs réaffirment leur attachement au régime actuel en raison de la nécessaire solidarité territoriale (même si l'article 33 de la loi du 7 décembre 2006 est un bon « garde-fou »), de la qualité des opérateurs historiques et du caractère stratégique de cette activité, qui doit, à l'inverse du gaz visé par l'arrêt Coname, maintenir une universalité de la desserte.
* 255 Article 18 de la loi du 10 février 2000 : « Electricité de France et les distributeurs non nationalisés mentionnés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée sont les gestionnaires des réseaux publics de distribution d'électricité. Dans sa zone de desserte exclusive, le gestionnaire du réseau public de distribution est responsable de l'exploitation et de l'entretien du réseau public de distribution d'électricité ».
* 256 Audition du 16 mai 2007.
* 257 Extrait de l'arrêt Coname, CJCE, 21 juillet 2005 : « Les articles 43 CE et 49 CE s'opposent (...) à l'attribution directe par une commune d'une concession relative à la gestion du service public de distribution du gaz à une société à capitaux majoritairement publics et dont ladite commune détient une participation dans le capital à hauteur de 0,97 %, si cette attribution ne répond pas à des exigences de transparence qui, sans nécessairement impliquer une obligation de procéder à un appel d'offres, sont, notamment, de nature à permettre qu'une entreprise située sur le territoire d'un État membre autre que celui de ladite commune puisse avoir accès aux informations adéquates relatives à ladite concession avant que celle-ci soit attribuée de sorte que, si cette entreprise l'avait souhaité, elle aurait été en mesure de manifester son intérêt pour obtenir cette concession ».