2. Le programme d'interventions territoriales de l'Etat à contre-courant ?
Votre rapporteur spécial souhaite enfin, au titre des « démembrements » de la politique de l'eau, évoquer les questions spécifiques que soulève, selon la direction de l'eau, le programme d'interventions territoriales de l'Etat (PITE).
a) Un programme fortement axé sur l'eau...
Rattaché à la mission « Politique des territoires », ce programme a pour objet de faire prévaloir une logique territoriale sur la nomenclature LOLF, afin de mettre en oeuvre des politiques à forte dimension interministérielle .
Votre rapporteur spécial observe que ce programme est fortement axé sur la politique de l'eau , dans la mesure où 6 de ses actions sur 7 lui sont consacrées en tout ou partie (cf. tableau ci-après).
Un PITE fortement axé sur l'eau
Actions liées à la politique de l'eau |
Thèmes |
1) Le Rhin et la bande rhénane - Alsace |
Développement de l'intermodalité fluvial / ferré. Maîtrise des risques liés à l'inondabilité, à la sécurité de la navigation et à l'activité industrielle. Préservation et reconquête de la biodiversité en cohérence avec la directive cadre sur l'eau. |
2) Eau - Agriculture en Bretagne |
Reconquête de la qualité des eaux, notamment à travers l'incitation des agriculteurs à supprimer les atteintes à l'environnement. |
3) Plan Loire Grandeur Nature (PLGN) |
Sécurité face au risque d'inondation. Gestion de la ressource en eau et des espaces naturels et ruraux. |
4) Programme exceptionnel d'investissements en faveur de la Corse |
Renforcement des infrastructures (dont eau et assainissement). |
6) Plan gouvernemental sur le Marais Poitevin |
Mise en oeuvre du DOCOB Natura 2000. Réalisation d'une gestion coordonnée de la ressource en eau. |
7) Plan Durance multi-usages - Provence-Alpes-Côte d'azur |
Augmenter la sécurité face au risque d'inondation. Restaurer les milieux aquatiques. Sécuriser et optimiser l'alimentation en eau. Etablir un partage équitable entre les usages. Organiser l'action des différents acteurs et des différentes procédures (contrat de rivière). |
Source : commission des finances
b) ... à contre-courant de la politique de l'eau
S'il a permis de mieux coordonner l'action des services de l'Etat dans la lutte contre la pollution par les nitrates en Bretagne, votre rapporteur spécial regrette qu'au motif de faire prévaloir une approche « territoriale », le PITE aboutisse parfois à mettre en oeuvre des actions peu cohérentes avec la politique de l'eau menée par le ministère chargé de l'écologie.
L'action Plan Loire Grandeur Nature (PLGN), axé sur la lutte contre les inondations, a par exemple substitué à un système souple et réactif de transfert géographique des crédits mis au point par la direction de l'eau une procédure interministérielle de gestion lourde et peu adaptée à un champ d'intervention où les aléas, climatiques et budgétaires, sont par définition fréquents. Cette innovation fait regretter à la direction de l'eau que des transferts de crédits prenant autrefois 48 heures nécessitent aujourd'hui un « travail ministériel qui, en 2006, a pris six mois ».
Dans le cadre de l'action Marais poitevin, le PITE sollicite l'ouverture d'autorisation d'engagements ou de fonds de concours sur les actions de gestion du milieu déjà financées par les agences de l'eau. Cette tendance à doublonner l'action des agences s'inscrit en contradiction avec les objectifs de décroisement des financements et de concentration des tâches d'instruction des demandes de subvention au sein des agences.
Par ailleurs, l'utilisation faite des crédits d'assainissement dans le cadre de l'action PEI Corse n'est pas cohérente avec la priorité nationale accordée au respect de la directive eaux résiduaires urbaines , puisqu'une partie des montants engagés par l'Etat sont allés au financement de réseaux de collecte, et non à la création ou à la mise aux normes de stations d'épuration.
Dans le cadre de l'action Rhin et bande rhénane enfin, une partie des autorisations d'engagement sollicitées pour réaliser des études urgentes sur la rupture des digues ont été utilisées pour financer des projets ne relevant pas de la politique de l'eau ou pour financer des actions de secours sur le Rhin, utilisation à laquelle le ministère chargé de l'écologie s'était, semble-t-il, expressément opposé.