2. Des obstacles surmontables
a) La place et les missions des préfets délégués à la ville
La concurrence d'intérêt et d'organisation entre sous-préfets d'arrondissements et sous-préfets « ville » a parfois été avancée comme un élément déterminant qui a pu empêcher la mise en place d'équipes de délégués.
Il est exact que les choix de l'organisation de l'Etat en département peuvent avoir une influence.
En réponse à une interrogation de votre rapporteur spécial sur le bilan de la concordance entre le recours aux délégués de l'Etat et les contrats de ville, la DIV soulignait ainsi que « la logique voudrait que les départements urbanisés soient les plus dotés en délégués de l'Etat, et en priorité sur les sites les plus importants pour la politique de la ville. Toutefois certains grands départements n'utilisaient pas, jusqu'à une date récente, ce dispositif. Ainsi la Seine Saint Denis, où le poids des sous-préfets d'arrondissement a longtemps prévalu sur celui du sous-préfet ville, les premiers étant considérés comme interlocuteurs de premier rang des élus, y compris pour la politique de la ville. Jusqu'à 2006, les préfets successifs de ce département n'avaient donc pas souhaité instaurer un dispositif de délégués de l'Etat, nécessairement animé de façon transversale par le sous-préfet ville en préfecture.
« Ailleurs au contraire, de nombreux contrats de ville ont pu bénéficier de ce dispositif. A titre d'exemple ont peut citer le Val de Marne, où 22 des 47 communes du département sont regroupées en 8 contrats de ville, presque tous intercommunaux, et où 10 délégués de l'Etat sont en poste en 2006 ».
Votre rapporteur spécial considère pour autant que les traditions administratives de certains départements ne sauraient constituer un motif légitime de non exécution d'une décision prise par le gouvernement , même si elle amène à bousculer certaines procédures habituelles et à remettre en question des modes établis de fonctionnement et de management.
En outre, la question de la double articulation avec le sous-préfet d'arrondissement territorialement compétent et le sous-préfet chargé de mission pour la politique de la ville n'est pas nouvelle et elle avait été traitée par la circulaire du 17 juin 1996 10 ( * ) qui précisait que : « le délégué de l'Etat exerce sa mission sous l'autorité du sous-préfet d'arrondissement compétent (sous-préfet d'arrondissement, ou, dans l'arrondissement chef-lieu, selon le cas, secrétaire général de la préfecture ou sous-préfet chargé de mission pour la politique de la ville). Elle doit être complétée par une relation fonctionnelle permettant au sous-préfet chargé de mission pour la politique de la ville d'exercer auprès de tous les délégués un rôle d'animation. Cette formule doit permettre de donner au sous-préfet chargé de mission pour la politique de la ville une vision d'ensemble des réalités de terrain et de donner au sous-préfet d'arrondissement les éléments susceptibles de renforcer l'efficacité de son action d'ensemble dans ces quartiers » .
b) Les réticences de certains services déconcentrés
Une des conditions de l'intérêt et de la réussite des équipes de délégués de l'Etat tient à ce qu'elles rassemblent des agents provenant d'administrations diverses .
Cet objectif est globalement atteint comme en témoignent les résultats d'une enquête réalisée à la demande de la DIV, à l'occasion de la première rencontre nationale des délégués de l'Etat, en 2002, à Lyon.
La répartition des départements ministériels des délégués de l'Etat était en effet la suivante :
23 % Emploi et solidarité,
18,5 % Equipement,
16,5 % Intérieur, préfecture,
16,5 % Education nationale,
13 % Jeunesse et Sports,
5 % Justice,
3,5 % Intérieur, police,
4 % Autres : Culture, Finances, Défense (gendarmerie) mais aussi FAS (Fonds d'action sociale), ANPE et Poste.
Certains services déconcentrés semblent pourtant faire preuve d'une grande réticence à laisser leurs agents participer aux équipes de délégués de l'Etat. Au cours de ses déplacements, il a été signalé à votre rapporteur spécial plusieurs cas mettant en cause l' Education nationale, des DDASS et des directions du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle .
Les arguments avancés en cas de refus mentionnent généralement les manques d'effectifs et les découpages administratifs spécifiques.
Votre rapporteur spécial a pu ainsi disposer d'une copie du courrier d'un directeur départemental des affaires sanitaires et sociales, indiquant en réponse à un appel à candidatures pour un des sites politiques de la ville qui ne disposait pas de délégué : « la mission des délégués de l'Etat impose une proximité territoriale dans les quartiers qui ne peut être assurée par les agents de la DDASS, leur mission s'exerçant au niveau de l'animation des politiques départementales. La DDASS ne bénéficie pas d'implantation locale qui pourrait assurer le support de cette nouvelle mission ».
* 10 Sous le triple timbre du ministre de l'Intérieur, du ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration et du ministre délégué à la ville et à l'intégration.