4. Les garanties dans ce qui est décidé
9.1.5. Les garanties de la collégialité. La première garantie dont bénéficient les parties prenantes dont la situation est affectée par l'exercice que les Autorités administratives indépendantes font de leur pouvoir est tout d'abord la collégialité. La collégialité est tout à la fois ce qui bénéficie à l'autorité en confortant son indépendance 251 ( * ) et ce qui bénéficie aux parties prenantes. Le respect des garanties fait gagner à la fois les Autorités administratives indépendantes et les parties prenantes. La collégialité constitue en effet une protection pour les parties prenantes qui peuvent, notamment du fait de la diversité des compétences des collèges, ou des formations ad hoc comme il peut en exister en matière de sanction. C'est non seulement le cas de la Commission des sanctions au sein de l'Autorité des Marchés Financiers depuis la loi de 2003, mais encore le cas de la formation restreinte qui, au sein de la CNIL depuis 2004, sont en charge de l'exercice du pouvoir de sanction. Il semble donc que cette dissociation fonctionnelle au sein de l'Autorité dès l'instant qu'elle est dotée d'un pouvoir de sanction qui se superpose à d'autres et peuvent porter atteinte à son impartialité, constitue le modèle pour l'avenir. Le principe de collégialité permet de se fier à une discussion au sein des Autorités administratives indépendantes pouvant prendre en considération des éléments à la fois complexes et hétérogènes. Cette collégialité est présentée par les Autorités elles-mêmes comme une règle de fonctionnement très précieuse, qu'il s'agisse de l'AMF, du Comité Éthique, ou de la CNIL. C'est pourquoi la structure de principe d'Autorités administratives indépendantes construites autour d'un collège paraît préférable à d'autres, et pourrait être visée en référence dans une éventuelle loi-cadre sur les Autorités administratives indépendantes, sauf pour le législateur à en disposer autrement s'il a de bonnes raisons de le faire.
9.1.6. Les garanties de la motivation. La motivation, comme la collégialité, présente ce double aspect d'être à la fois favorable aux Autorités administratives indépendantes et favorable aux parties prenantes. En effet, la motivation permet à l'Autorité de donner à voir sa neutralité, sa compétence et l'adéquation de sa décision par rapport à la mission qu'elle doit efficacement remplir. La motivation est un mode essentiel de reddition des comptes, comme socle et non limite de l'indépendance 252 ( * ) . En outre, la motivation est une protection des parties prenantes, puisqu'elle leur permet de comprendre la décision, ce qui est important lorsqu'il y a un phénomène d'apprentissage et que l'Autorité a aussi une fonction pédagogique, ce qui est une fonction commune à toutes les Autorités administratives indépendantes. La motivation leur permet aussi d'exercer un droit au recours devant une juridiction. Elle doit donc être systématique pour toute décision individuelle. Mais l'on peut aussi considérer qu'elle serait bienvenue dans des décisions plus générales, y compris dans l'exercice du pouvoir réglementaire à travers les règlements généraux (de l'Autorité des Marchés Financiers, par exemple), exprimant une doctrine de l'Autorité à laquelle les parties prenantes seraient en droit de se fier.
9.1.7. La garantie du droit au recours. C'est le système juridique qui offre, ici comme partout, la protection constitutionnelle pour la personne à laquelle une décision fait grief, de pouvoir saisir un juge. Le Conseil constitutionnel a rappelé le principe du droit au recours en le fondant sur l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme en vertu duquel « Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » : le droit au juge fonde même la Constitution car sans lui, il n'y a pas plus de garanties des droits, et sans garanties des droits, il n'y a plus de Constitution 253 ( * ) . Le Conseil constitutionnel a souligné cette importance à propos des Autorités administratives indépendantes, en affirmant qu'il doit exister un recours ouvert pour solliciter du juge l'arrêt de l'exécution immédiate d'une décision, et que l'exercice des pouvoirs, notamment de sanction, par les Autorités administratives indépendantes, n'est concevable qu'assorti d'un tel droit au recours 254 ( * ) .
* 251 V. supra.
* 252 Sur cette question essentielle, v. infra.
* 253 Décision n°99-416 DC du 23 juillet 1999, Couverture maladie universelle, Rec., p. 100.
* 254 V. supra.