3. La nécessaire remise à niveau des moyens en personnel de l'inspection du travail
L'inspection du travail joue bien sûr un rôle déterminant dans la répression de l'emploi d'étrangers sans titre, même si le premier agent de constatation du travail illégal est aujourd'hui la gendarmerie.
La commission d'enquête a pu constater, à l'occasion de ses déplacements, la détermination des inspecteurs et contrôleurs du travail, ainsi que des directeurs du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. Elle se doit néanmoins de poser la question des moyens en personnel alloués à ces services, qui sont notoirement inférieurs à ceux observés dans plusieurs pays européens comparables au nôtre. Alors que l'inspection compte aujourd'hui environ 1.370 membres, ses effectifs devraient être augmentés de 700 postes pour ramener la France au niveau de la moyenne européenne.
La commission d'enquête note cependant, avec satisfaction, que le plan de modernisation et de développement de l'inspection du travail, présenté, le 6 mars 2006, par M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à la formation professionnelle des jeunes, prévoit justement la création de 700 postes sur la période 2007-2010 ; dès 2006, le nombre de places ouvertes au concours de l'inspection du travail est porté à 231, contre 140 en 2005.
La répartition des postes sur le territoire revêtira ensuite une importance cruciale. Le ministre a indiqué qu'elle serait fonction d'objectifs définis aux niveaux national et régional. La commission d'enquête demande qu'un accent particulier soit mis sur le renforcement des effectifs en Guyane et à Mayotte 117 ( * ) . Elle a en effet perçu, dans ces territoires, une forme d'accoutumance à l'existence, ordinaire, d'un important volet de travail clandestin, qui requiert une action énergique des pouvoirs publics.
Recommandation n° 30 : Renforcer, par priorité, les effectifs de l'inspection du travail en Guyane et à Mayotte et, plus généralement, dans les collectivités ultramarines. |
4. Les problèmes posés par l'emploi de personnel à domicile
Outre-mer comme en métropole, une part importante de l'emploi d'étrangers sans titre est le fait de particuliers qui emploient du personnel de maison.
Or, la répression des infractions commises par les particuliers se heurte au nécessaire respect des domiciles privés. Mme Colette Horel a souligné, lors de son audition, qu' « aucun des corps [de contrôle] ne peut pénétrer dans le domicile des particuliers » et estimé qu'une approche de prévention était donc la seule envisageable.
La jurisprudence du Conseil constitutionnel impose en effet que les mesures portant atteinte à la liberté individuelle, une visite domiciliaire par exemple, se déroulent sous le contrôle effectif du juge judiciaire 118 ( * ) . L'article 76 du code de procédure pénale indique que les perquisitions et visites domiciliaires, effectuées sans l'assentiment exprès de la personne chez qui l'opération a lieu, sont autorisées par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance, saisi sur requête du procureur. Elles ne peuvent être décidées que dans le cadre d'une enquête relative à un délit puni d'une peine d'emprisonnement d'une durée égale ou supérieure à cinq ans.
Tenant compte de l'importance du travail illégal à Mayotte, la mission d'information de la commission des Lois de l'Assemblée nationale sur l'immigration clandestine à Mayotte a proposé d'autoriser l'inspection du travail à accéder au domicile des employeurs présumés de travailleurs en situation irrégulière, sous le contrôle du juge des libertés 119 ( * ) .
Le projet de loi sur l'immigration et l'intégration reprend cette proposition : les inspecteurs et contrôleurs du travail pourraient pénétrer dans les domiciles privés, entre 7 h et 19 h, avec l'autorisation du juge des libertés et de la détention.
Dans l'attente de sa mise en oeuvre, la commission d'enquête rappelle que l'allègement des formalités administratives, avec des dispositifs tels que les chèques emplois services, et la réduction du coût de l'embauche de salariés réguliers, grâce à des allègements fiscaux, sont de nature à réduire les incitations à l'emploi d'irréguliers.
Recommandation n° 31 : Autoriser, à Mayotte, les inspecteurs et contrôleurs du travail à pénétrer dans les domiciles privés pour combattre le travail clandestin, avec l'autorisation et sous le contrôle du juge des libertés et de la détention. |
* 117 On compte à Mayotte un inspecteur du travail et trois contrôleurs du travail.
* 118 Décisions 75 DC du 12 janvier 1977, 164 DC du 29 décembre 1983 et 181 DC des 10 et 11 octobre 1984.
* 119 Rapport d'information n°2932 (Assemblée nationale, douzième législature), « Vers une immigration maîtrisée à Mayotte. 36 propositions pour un archipel rasséréné », de M. Didier Quentin, au nom de la mission d'information présidée par M. René Dosière, p. 52.