7. Débat avec la salle

• M. Claude GATIGNOL

Merci, Monsieur GUERET, de cet exposé nous rappelant les conclusions de l'AIE dans une situation d'urgence où l'efficacité et l'application sont nécessaires. Nous arrivons à la fin des interventions, y a-t-il des questions pour nos intervenants ?

• M. Pierre BEUZIT

Plutôt une remarque : l'efficacité de la Toyota Prius n'est due qu'à moitié à la motorisation hybride, le reste vient d'autres éléments comme son poids, ses pneus, son aérodynamique, etc. Mais ce chemin peut être - et est déjà - suivi sur n'importe quel autre véhicule.

• M. Claude GATIGNOL

Vous nous dites que l'hybridation a conduit à apporter d'autres innovations permettant des économies sur le fonctionnement du véhicule ?

• M. Pierre BEUZIT

Pas du tout. Je dis que Toyota caricaturait son message en voulant forcer le trait, afin de vendre son véhicule. La voiture est en fait optimisée pour le cycle MVEG, non pas pour une utilisation normale. Des utilisateurs se sont d'ailleurs plaints car en utilisation normale, la voiture consomme sensiblement plus que ce que la communication de Toyota laissait penser.

• M. Claude GATIGNOL

Monsieur PINCHON ?

• M. Philippe PINCHON

Je voudrais faire un commentaire à propos de la dernière planche présentée par François BADIN opposant le véhicule hybride et les biocarburants, le gaz naturel comprimé, le GPL, etc. A mon sens, ces différents avantages procurés par la motorisation et les carburants sont parfaitement compatibles.

• M. François BADIN

Certes, mais du point de vue du coût et du volume - si l'on veut adapter du gaz naturel - il n'est pas possible de tout mettre sur un même véhicule. Les avancées réalisées sur le moteur thermique peuvent bénéficier aux véhicules hybrides, en revanche, adapter le gaz naturel sur un hybride est en projet, mais il faudrait pour ce faire, loger une batterie et un système de stockage sur le véhicule, ce qui ne simplifie pas le problème.

• M. Philippe PINCHON

Selon les dernières études, c'est pourtant la solution dans des délais assez courts afin d'obtenir de meilleurs résultats en termes d'émissions de CO 2 .

• Un intervenant de la salle

S'agissant des petites piles à combustible de 3 à 10 KW, leurs potentialités ne s'appliquent pas seulement aux transports. Ces piles seront de toute façon produites, sans que cela soit lié aux transports. En Chine, au Japon et aux Etats-Unis, le procédé CHP, pour Combined heat and power, est destiné à l'alimentation industrielle sans interruptions, par exemple.

• M. Claude GATIGNOL

Merci de cette précision sur la pile à combustible.

• M. Joël PEDESSAC

Je voudrais rebondir sur ce qu'a dit M. PINCHON. Ils ont en effet participé à un programme que nous avons financé. Sur la Prius, l'association du GPL avec la technologie hybride a permis d'abaisser les niveaux de 104 g d'émissions du kilomètre à 92, grâce à un investissement de 20 000 euros. Nous avons remplacé de l'essence par du GPL, et ce véhicule fait en ce moment même le tour d'Europe pour être présenté aux médias. Il lui faut à peine un plein pour effectuer la distance de Paris à Lyon. Il n'y a en tout état de cause pas de solution unique.

• M. Jean-Claude GAZEAU

Les exposés nous ont expliqué les technologies permettant de réduire les émissions de CO 2 . Il sera possible de diminuer de 30 à 40 % les rejets d'ici vingt ans, or, le transport automobile représente 30 % environ du total. Cela fait donc une diminution de 10 à 15 % des émissions de gaz à effet de serre, alors que certains gouvernements se sont engagés sur une division par quatre, soit 75 %. Par ailleurs, il en découlera des impacts sur d'autres secteurs, pour produire de l'électricité et de la biomasse, qui ne seront pas neutres en termes d'émissions. Il n'y a pas que l'automobile qui doive faire des efforts. Quelles sont les pistes en dehors du secteur automobile ?

• M. Claude GATIGNOL

Il faut quelquefois se méfier des effets d'annonce.

• M. Thomas GUERET

Le World energy outlook anticipe dans son scénario de référence, une augmentation de 150 % du volume des déplacements par voiture particulière, d'ici 2030. Il y a une telle marge de progression pour atteindre ce chiffre, tellement d'infrastructures et d'investissements à réaliser, que si nous nous posons dès maintenant toutes les questions pour organiser les activités, la vie urbaine, les modes de déplacement non motorisé et les transports en commun, il existe des possibilités de gains très importantes, pas suffisantes pour diminuer le chiffre par quatre, mais cela reste un potentiel important. Par ailleurs, les améliorations technologiques apporteront des réponses.

• M. Pierre BEUZIT

Pour vous répondre, le facteur quatre que vous mentionnez est pour 2050. En 2050, la voiture fonctionnera avec une pile à combustible dont l'hydrogène sera produit par thermochimie - l'énergie thermique venant du solaire et du nucléaire - le tout pour une émission zéro de CO 2 .

• M. Claude GATIGNOL

Monsieur GAZEAU ?

• M. Jean-Claude GAZEAU

L'objectif de division par quatre inclut les véhicules particuliers plus le transport de marchandises et le transport aérien.

• M. Claude GATIGNOL

Il est vrai que nous n'avons pas évoqué ces modes de transport, en particulier l'aérien. Or, certaines équivalences entre la production de kilomètres en voiture par passager, et de kilomètres aériens, ne seront pas rappelées ici, tant la comparaison serait désagréable !

• Un auditeur

Je voudrais effectuer une clarification quant à la capacité de substitution des biocarburants. La présentation de l'AIE, évoquait une valeur, que vous avez relevée également, de 10 %, elle a été évaluée en considérant uniquement les biocarburants actuels, dits de première génération. Pour aller au-delà de ces 10 %, il faut passer à d'autres procédés technologiques et à l'utilisation d'une ressource biomasse différente. 10 % n'est pas un potentiel maximal.

• M. Claude GATIGNOL

Nous avons bien noté qu'il s'agissait de ce que nous avons coutume d'appeler des biocarburants, soit les alcools, et les huiles végétales. Vous avez raison de souligner que ce que l'on appelle le BTL représente pour l'avenir une grande possibilité d'alternatives aux produits fossiles.

• M. PierPaolo CAZZOLA

Il s'agit de 10 % dans le cadre des objectifs actuels pour 2010, en ce qui concerne l'éthanol à base de cellulose. Nous pouvons arriver à d'autres objectifs.

• Conclusion de M. Claude GATIGNOL

Je voudrais en quelques mots dire que cette journée studieuse et suivie représente un des moyens pour le Parlement de recueillir auprès de personnes compétentes - professionnels, chercheurs, chargés de missions - tous les éléments sur un sujet particulier, aujourd'hui la voiture de demain, sujet économique et technique, qui cadre bien avec les missions de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques. Sur d'autres sujets, comme l'énergie, j'ai lu certaines déclarations jugeant inexistante l'information des parlementaires. Les parlementaires sont capables de s'informer de diverses façons, comme aujourd'hui. Au nom de Christian CABAL et moi-même, je vous remercie, vous qui avez partagé vos connaissances avec clarté et enthousiasme, sans refuser le débat. 150 % d'usage de la voiture en plus sont attendus, c'est qu'elle représente une réponse extraordinaire à la question de la mobilité individuelle. Un rapport récent du CNRS nous avait confortés dans l'idée que quelles que soient les propositions de changement effectuées, l'usage actuel ne varierait qu'à la marge.

La voiture a une place importante dans la totalité des émissions de gaz à effet de serre. La régulation de l'espace urbain pose un certain problème, en raison de la vitesse de circulation propice aux ralentissements. Il faut donc favoriser la fluidité en milieu urbain pour réduire la pollution. Une approche diversifiée sur le plan technologique est nécessaire dans le but d'obtenir des évolutions. Les changements souhaités par le consommateur ne sont pas toujours compatibles avec les écobilans. Il faut donc trouver un équilibre. La Commission européenne nous a rappelé que les normes européennes s'étaient imposées aux constructeurs, même si nous n'en sommes qu'à l'étape euro 4. Il y en a sûrement d'autres à franchir, mais avec sagesse, le représentant de la Commission européenne nous a déclaré qu'il ne faut pas aller à l'opposé de ce que peut nous fournir la technologie.

Les émissions dangereuses pour la santé ou le climat appellent une recherche d'efficacité énergétique. C'est une préoccupation présente à l'esprit de tous, il faut baisser la consommation globale. Par ailleurs, l'usage de dispositifs antipollution avant, pendant et après la combustion reste intéressant, tout comme l'usage de carburants plus élaborés - essence ou gazole -. Nous avons bien vu que parfois, il y a un hiatus entre ce que prévoient ces dispositifs et la consommation réelle.

Il faut tenir compte de la grande inertie entravant le renouvellement du parc automobile. Deux millions de voitures neuves par an sont vendues en France, cela n'est pas assez rapide. J'ai apprécié le terme de M./ DOUAUD d' « éco CO 2 compatibilité » en raison de l'usage du mot CO 2 dans l'expression. Les chiffres des émissions sont éloquents, il faut les avoir à l'esprit. Les incitations à l'usage de dispositifs propres sont naturelles pour l'usager français. Quant au choix de la motorisation, en France et en Europe, le diesel a une longueur d'avance. D'autres évolutions et possibilités d'évolution existent, dans tous les domaines. Il faut donc rester curieux des développements futurs. Les voitures hybrides peuvent être abordées de différentes façons et les voitures électriques sont toujours plus développées : j'ai eu la chance de conduire un véhicule de 800 CV, huit moteurs, huit roues, qui atteint les 320 km/h, et accomplit l'accélération de 0 à 100 km/h en 4,2 secondes. C'est intéressant, s'agissant d'un véhicule électrique, mais ce n'est qu'un prototype et non pas un modèle commercial !

M. BEUZIT a décrit dans sa synthèse le rêve de tout conducteur d'avoir un jour une voiture à émission zéro. L'hydrogène permettrait de relever ce défi, mais en attendant, il faudra aller vers le respect de certaines normes. Aujourd'hui, 140 g par kilomètre parcouru paraît une bonne norme.

Il existe une forte attente pour des apports multiples venant de la recherche en termes de matériaux, de systèmes divers, d'électronique, de progrès mécaniques et chimiques. J'ajouterai que « la chasse au gaspi » doit nous préoccuper constamment. J'espère que les pouvoirs publics apporteront par leurs décisions raisonnables, un accompagnement juste à la place de la voiture dans la société de demain, et je vous remercie encore pour votre participation.

La séance est levée à 19h00.

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