2. Inéluctabilité de la montée en gamme et en puissance ? L'exception française
Dans les pays développés (Europe, Japon, États-Unis) la tendance habituellement constatée est à la hausse des modèles de grande taille, puissants et luxueux, dont la principale illustration sont les « Sport utility vehicles » américains qui semblent devoir envahir le marché européen.
Aux États-Unis, les light trucks représentaient, en 2003, 54 % des ventes . Cette tendance très forte semble s'essouffler sous l'effet de la hausse des prix du pétrole. Les acheteurs américains semblent se tourner vers des véhicules moins gros et moins puissants, mettant d'ailleurs en difficulté les constructeurs automobiles américains mais favorisant leurs concurrents asiatiques.
Dans de nombreux pays d'Europe, la culture de la grande berline est beaucoup plus forte qu'en France . Vos rapporteurs ont été frappés, au cours de leurs missions au Royaume-Uni et en Allemagne, de constater que le marché français était bien plus vertueux que les marchés de nos deux principaux partenaires. Ces deux pays connaissent des niveaux d'émissions de CO 2 beaucoup plus élevés en raison d'un marché automobile tourné encore majoritairement vers l'essence (Royaume-Uni) et vers les grosses berlines. Ces remarques sont également vraies pour les pays du nord de l'Europe. Il est certain que l'influence des constructeurs nationaux est importante. Si Renault et Peugeot, comme Fiat en Italie, sont les pionniers des petits véhicules économes produits en grande série, les constructeurs nationaux britanniques, allemands et suédois apparaissent plus comme les meilleurs représentants de la puissance, du confort et du luxe automobile.
En France , en 2004, le marché a confirmé sa tendance depuis plusieurs années. Le segment économique/inférieur représente 38,24 % et le segment moyen inférieur 35,23 % . Ainsi ces deux classes sont en augmentation et représentent plus de 70 % du marché.
Les évolutions les plus sensibles se font sentir dans les trois autres classes : moyenne supérieure, supérieure/luxe et tous terrains/SUV. Les deux premières sont en régression au profit des gammes inférieures et des SUV qui représentent désormais 8,71 % du marché .
• Évolution du rapport masse-puissance
Le rapport annuel de l'ADEME permet aussi de bien mesurer l'évolution des caractéristiques des véhicules qui influent le plus sur leur consommation et sur leurs émissions de polluants : la masse et la puissance.
Depuis 1984, la puissance moyenne (kW) des véhicules a augmenté de 38 % .
L'augmentation de la puissance des véhicules se traduit aussi par l'augmentation du nombre de véhicules vendus ayant la capacité de rouler au-delà de la limitation de vitesse. L'ADEME retient que 12 % seulement des voitures vendues ont une vitesse maximale inférieure à 160 km/h. Plus des quatre cinquièmes des véhicules vendus disposent donc d'une puissance très supérieure à ce qui serait strictement nécessaire. Il n'existe quasiment plus de véhicules vendus ayant une vitesse maximale inférieure à la limitation de vitesse sur autoroute en France (0,11 %).
Par ailleurs, la masse des véhicules ne cesse d'augmenter depuis 1984, 15 kg/an en moyenne , en raison de l'amélioration de la sécurité et du confort des véhicules mais aussi de l'installation de dispositifs anti-pollution.
L'augmentation du poids étant plus rapide que l'augmentation de la puissance des véhicules, l'ADEME relève pour la première fois depuis 1995 une diminution de la puissance massique (kW/t).
Pour vos rapporteurs, l'examen attentif du marché français est plutôt encourageant puisque les Français s'orientent vers des voitures beaucoup moins puissantes et polluantes que leurs homologues européens . Il reste néanmoins à être vigilants et à poursuivre sur cette tendance, la demande de confort et de sécurité étant très forte et malheureusement peu compatible avec la sobriété des véhicules.