3. Le Plan national santé environnement (PNSE) de juin 2004
Devant la mission, le directeur général de l'InVS a estimé que « l'élargissement du champ environnemental des risques [était] une réalité depuis quelques années » . Citant notamment le cas des dioxines, « produits essentiellement dispersés dans l'environnement par les incinérateurs d'ordures ménagères » , de la légionellose, de la canicule et de la grippe aviaire, il a estimé que « la prise en compte du champ environnemental dans le cadre des maladies infectieuses a constitué, dans ce cadre, une grande avancée en matière de santé publique, l'anticipation en ce domaine nécessitant une attention quotidienne aux publications ».
A titre d'exemple, le professeur Dominique Belpomme, cancérologue et président fondateur de l'Association pour la recherche thérapeutique anti-cancéreuse (ARTAC) a notamment alerté les membres de la mission sur les effets nuisibles des phtalates, dont le sujet a été abordé lors de la conférence de Budapest 135 ( * ) , le 24 juin 2004.
Il a rappelé que « les phtalates étaient des molécules destinées à assouplir le plastique qui est utilisé pour la fabrication des poches de perfusion... Or, ces substances passent dans les perfusions et sont neurotoxiques. Elles sont donc responsables d'avortements prématurés, de naissances prématurées et de stérilité ».
Il a dénoncé l'inertie des pouvoirs publics français sur ce sujet alors que « la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Autriche, le Danemark, les Etats-Unis et le Japon en ont interdit l'usage » et que « quasiment tous les pays d'Europe ont suivi cette voie » , estimant que « l'utilisation de ces molécules va être à l'origine de multiples procès dans le futur. Elle risque de créer un nouveau scandale de l'ampleur de celui du sang contaminé. »
En présentant le Plan national santé environnement, le 21 juin 2004, le Premier ministre a reconnu que celui-ci résultait principalement du constat de la dégradation de notre environnement et de ses conséquences potentielles sur la santé, dont témoignent les observations suivantes :
- environ 30.000 décès anticipés par an sont liés à la pollution atmosphérique urbaine ;
- un doublement de la prévalence des maladies allergiques respiratoires est enregistré depuis 20 ans ;
- seules 37 % des ressources en eau potable disposent aujourd'hui de périmètres de protection ;
- 14 % des couples consultent pour des difficultés à concevoir qui pourraient être liées en partie à des expositions à des substances toxiques pour la reproduction ;
- 7 à 20 % des cancers seraient imputables à des facteurs environnementaux ;
- près d'un million de travailleurs seraient exposés à des substances cancérogènes ;
- l'évaluation des risques liés aux substances chimiques est insuffisante, les capacités d'expertise française sont trop peu développées ;
- la recherche, l'expertise, la formation et l'information en matière de santé environnement sont très insuffisantes.
Devant la mission, le professeur Dominique Belpomme a complété ce constat alarmant :
« - la plupart des maladies actuelles sont liées à des problèmes environnementaux, comme la pollution chimique par exemple ;
« - l'enfant est en danger : le nombre d'enfants souffrant de cancers augmente chaque année de 1 % depuis 20 ans. De plus, un enfant sur sept est désormais asthmatique ;
« - la pollution de l'environnement risque de faire courir un risque à terme à l'espèce humaine : depuis 20 ans, les cas de cancer du sein chez la femme ont été multipliés par deux et les cas de cancer de prostate chez l'homme par trois ».
a) Les trois objectifs du PNSE
Le PNSE vise ainsi à répondre à trois objectifs majeurs :
• garantir un air et une eau de bonne qualité ;
• prévenir les pathologies d'origine environnementale et notamment les cancers ;
• mieux informer le public et protéger les populations sensibles (enfants, femmes enceintes et personnes âgées).
Les objectifs et les indicateurs du PNSE Pathologies : |
Ø Réduire de 50 % l'incidence de la légionellose à l'horizon 2008 ; |
Ø Réduire de 30 % la mortalité par intoxication. Expositions : |
Ø Respecter les valeurs limites européennes de qualité de l'air, en 2008, dans toutes les villes ; |
Ø Réduire d'un facteur 5 le nombre total d'heures où la concentration en ozone dans l'air dépasse la valeur de seuil d'information (180ug/m3) ; |
Ø Diminuer par deux d'ici 2008 le pourcentage de la population alimentée par une eau de distribution publique dont les limites de qualité ne sont pas respectées en permanence pour les paramètres microbiologiques ou les pesticides. Emissions et protection des ressources : |
Ø Réduire les rejets atmosphériques toutes sources anthropique : - 40 % pour les composés organiques volatils et les oxydes d'azote entre 2000 et 2010 ; |
Ø Diminuer à l'horizon 2010 les émissions industrielles dans l'air de 85 % pour les dioxines, 50 % pour le cadmium, 65 % pour le plomb, 40 % pour le chlorure de vinyle monomère et de 35 % pour le benzène (années de référence 2000 ou 2002 selon les cas) ; |
Ø Assurer la protection de 80 % des captages d'eau potable en 2008 et 100 % en 2010 ; |
Ø Réduire de 30 % dans l'air les émissions de particules des véhicules diesel ; |
Ø Afficher les caractéristiques sanitaires et environnementales de 50 % des produits et matériaux de construction à horizon 2010. Indicateurs à construire |
Ø Exposition aux bruits (population générale/milieu professionnel) ; |
Ø Nombre de substances chimiques évaluées (en France et dans l'Union européenne) au regard des risques chroniques (toxicologie et ecotoxicologie) ; |
Ø Exposition des travailleurs aux agents cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques. |
* 135 Conférence ministérielle sur l'environnement et la santé, qui s'est tenue à Budapest du 23 au 28 juin 2004 sur le thème : « Un futur pour nos enfants ».