CONCLUSIONS SUR LE CINÉMA

27. Impacts qualitatifs

Figure 68 : Ouverture de la pub TV pour le cinéma, menaces et opportunités pour le secteur

Impacts positifs - Opportunités

Impacts négatifs - Menaces

• Placerait les distributeurs dans une meilleure position de négociation vis-à-vis de leurs clients habituels (affichage notamment) et leur permettrait de mieux optimiser le rapport coût/efficacité en fonction des budgets.

• Permettrait de toucher plus facilement et à meilleur coût des populations difficilement atteintes par l'affichage (réseau lâche en Province : coût au contact utile élevé). Permettrait, mieux que d'autres médias, de toucher les 40% de français qui ne vont jamais au cinéma et les segments de population qui sous-consomment le cinéma mais sur-consomment la télévision (CSP-, provinciaux, adultes).

• Accélération de la montée en puissance pour les films sortis sur de petites combinaisons et bénéficiant d'un succès « surprise ».

• Intérêt des chaînes thématiques et cinéma pour cibler en fonction du genre des films.

• Risque de discrimination et d'abus de position dominante de la part des chaînes de télévision (également coproductrices voire distributrices de films).

• Explosion des dépenses marketing et détérioration de la rentabilité.

• Augmentation de la vitesse de rotation.

• Concentration de l'offre et du marché autour d'un plus petit nombre de films.

• Marginalisation des films français et des films indépendants.

• Il serait moins coûteux de conserver et renforcer les obligations de promotion gratuite du cinéma dans les cahiers des charges des chaînes, notamment publiques.

Source : BIPE

28. Impacts quantitatifs

Aujourd'hui le film de cinéma n'est pas totalement absent des spots TV. Il y est présent via la vidéo. La généralisation du modèle économique des suites et « franchises » (James Bond, Harry Potter, Matrix 1, 2 et 3, etc...) et la réduction du délai vidéo à 6 mois permet aux distributeurs de synchroniser les fenêtres d'exploitation de manière à pouvoir communiquer sur la sortie vidéo du n°1 au moment où le n°2 sort déjà dans les salles. La promotion croisée peut même être optimisée en ressortant en salle le film n°1 au moment où sort la vidéo du n°1 85 ( * ) .

En 2002, les distributeurs de films ont investi 227 millions d'euros bruts pour promouvoir les films en salle. Si l'on fait l'hypothèse d'un taux de remise moyen de 35% par rapport aux tarifs bruts « catalogue », ceci a représenté une dépense nette d'environ 150 M€.

La publicité extérieure a capté 63% de ce marché , soit 143 M€ bruts (6% des recettes brutes de la PE en 2002). Le reste s'est réparti entre radio, presse et... cinéma. En effet, en plus des films-annonces, diffusés en principe gratuitement - mais sans garantie - par les exploitants, les distributeurs préfèrent aujourd'hui diffuser les mini-films-annonce sous forme de spots dans les écrans publicitaires des deux régies Médiavision et Circuit A (Carlton Cinéma).

La recette guichet brute en 2002 a été de 1027 M€ ; après taxes et prélèvement de la part des exploitants, l'ensemble producteurs/distributeurs a obtenu en recettes 41% de ce montant, soit 425 M€. La dépense publicitaire représente environ 30% des recettes nettes distributeur (RND) , c'est donc un poste de coût particulièrement important.

Figure 69 : Investissements publicitaires bruts en 2002

Source : BIPE d'après TNS

Les exemples étrangers montrent une grande diversité de situations.

Figure 70 : Publicité et cinéma en Europe en 2001

Espagne

Italie

Allemagne

UK

France

Entrées en salles (en millions)

145.2

107

177.9

155.9

185.5

Part de marché des films américains

62 %

59 %

77 %

73 %

46 %

Dépenses publicitaires cinéma
brutes (M€)

160

52

131

153

205

Poids des 10 premiers distributeurs en dépenses pub

89%

90%

92%

92%

56%

Nombre de films distribués en salle

516

ND

373

318

506

Poids de la télévision dans le mix média des annonceurs cinéma

ND

80%

80%

40%

1% 86 ( * )

Invest moy par film

0.310

0.351

0.481

0.405

Invest moy par entrée

1.10

0.49

0.74

0.98

1.11

Source : BIPE, CNC, Carat-TVMI, TNS

Les 10 premiers annonceurs ont représenté 56% de l'investissement total, alors que partout ailleurs en Europe, il concentrent 89,5% de l'investissement publicitaire.

Les 10 premiers distributeurs français ont réalisé 90% des recettes totales. Les autres distributeurs (environ 70), réalisent à eux tous moins de 10% des recettes production/distribution totales (soit 44 M€) pour 44% de la dépense publicitaire nette estimée (soit 59 M€). Ainsi, autour d'un ratio Pub/CA moyen de 32%, l'écart est gigantesque entre les majors (ratio de 20%) et les autres (ratio moyen de 132%).

Il y a deux façons de considérer ce résultat : (i) d'un point de vue économique, on peut estimer qu'il s'agit d'un sur-investissement anormal 87 ( * ) et non viable 88 ( * ) , (ii) d'un point de vue culturel, on peut se féliciter de ce que les films « difficiles » à petit budget et sans stars, diffusés par les distributeurs indépendants soient ainsi surexposés en termes publicitaires, pour compenser leur sous-exposition relative en termes de copies.

Figure 71 : Concentration du marché français, parts de marché et parts de voix

2001, M€

CA (RND)

Dépense pub

CA (RND)

Dépense pub nette

Ratio

10 premiers distributeurs

89.5%

56.0%

379

75

20%

Autres

10.5%

44.0%

44

59

132%

Total

100.0%

100.0%

423

133 89 ( * )

32%

Source

CNC

CNC/Carat

CNC

Carat, e BIPE

BIPE

Dans certains pays, comme en Italie et en Allemagne, la télévision est le support privilégié de la publicité en faveur des films, elle concentre plus de 80 % des dépenses publicitaires des films. Le RU donne l'exemple d'un mix beaucoup plus diversifié : 40% en télévision, 30% en affichage, 15% en presse. Dans un pays comme l'Espagne, où l'ouverture de la publicité télévisuelle au cinéma s'est faite récemment, le CNC note qu'aucun impact positif de cette mesure sur la fréquentation n'a été constaté.

Figure 72 : Mix média des investissements publicitaires du cinéma en Europe

Source : BIPE d'après TNS, AC Nielsen

Si une ouverture totale avait lieu en France, nous estimons qu'il faudrait s'attendre à une augmentation modérée de l'investissement global qui est déjà à des niveaux élevés. Une augmentation de 10% de l'investissement total brut conjugué à une part de marché TV qui serait dans la fourchette basse européenne, soit 40% à 45% 90 ( * ) conduirait une dépense brute de 100 M€, et une perte d'environ 40 M€ bruts pour la publicité extérieure.

Figure 73 : Impact d'une ouverture cinéma sur le marché publicitaire
(en M€ bruts par an)

Source : BIPE

* 85 Le cas s'est produit en mai 2004 pour la sortie vidéo de Kill Bill 1, la sortie salle de Kill Bill 2 et la ressortie salle de Kill Bill 1 (285 copies). Mais le Bureau de Vérification de la Publicité (BVP) a considéré que le spot TV vantant la vidéo de Kill Bill 1 assurait aussi indirectement la promotion du même film en salle et était donc en contradiction avec la réglementation. Le distributeur TFM, sommé de choisir, a préféré renoncer temporairement à l'exploitation de Kill Bill 1 en salle, pendant la campagne TV pour le lancement de la vidéo.

* 86 Chaînes francophones sous régime déclaratif, non soumises à la réglementation publicitaire française.

* 87 Certains experts interrogés estiment qu'il y a une surpression publicitaire en région parisienne, par rapport aux besoins, notamment parce que les auteurs, réalisateurs, acteurs, producteurs, financeurs des films français résident tous à Paris.

* 88 Sur tous les marchés, les parts de voix publicitaires sont généralement proches des parts de marché, même si les challengers mettent souvent une légère surpression publicitaire par rapport à leur PDM. Sur le marché du cinéma dans les autres pays européens, les distributeurs du top 10 réalisent ainsi 90% de PDV et 90% de PDM.

* 89 Brut 205 M€. Taux de remise moyen estimé : 35%.

* 90 La référence britannique (40%) nous paraît meilleure à ce titre que l'Italie ou l'Allemagne (80%).

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