B. MODIFIER LA CONSTITUTION DE LA BOSNIE-HERZÉGOVINE
1. Une Constitution sans adhésion citoyenne
La Constitution actuelle de la Bosnie-Herzégovine présente deux handicaps majeurs :
- premier handicap fondamental : cette Constitution est une simple annexe à l'accord de paix conclu à Dayton, rédigée et publiée officiellement uniquement en anglais, et elle n'a fait l'objet d'aucune adoption démocratique. Dix ans après Dayton, il serait temps que les citoyens de Bosnie-Herzégovine puissent disposer d'une Constitution démocratiquement adoptée et qui reflète leur volonté ;
- second handicap : la Constitution n'est plus adaptée à l'évolution du pays. Le Haut Représentant a pris de nombreuses mesures, les pouvoirs de l'État central ont évolué. Une réforme constitutionnelle permettrait d'adapter le texte à la réalité politique, et pourrait être l'occasion de simplifications. La Bosnie compte trois parlements bicaméraux, des systèmes administratifs lourds et complexes. Une révision est urgente et indispensable.
Une fois de plus, le rapport de la Commission de Venise a parfaitement mis en lumière les insuffisances du cadre constitutionnel de l'Etat de Bosnie-Herzégovine.
2. Redéfinir le cadre institutionnel
Certains estiment que, dans la mesure où la Constitution de Bosnie-Herzégovine permet des transferts volontaires de responsabilités des Entités, il n'y a pas lieu de la modifier. Cependant, il est un fait que les pouvoirs de l'État central sont trop faibles, en comparaison d'autres États fédéraux (Suisse, Belgique, Autriche, Allemagne ou Russie).
Un État aussi faible que la Bosnie-Herzégovine ne peut faire beaucoup de progrès dans la voie de l'intégration européenne. L'Union européenne négociera avec un interlocuteur unique. En l'état actuel, l'État ne peut garantir que ses décisions seront mises en oeuvre dans les deux entités.
La révision constitutionnelle, prévue par l'article X de la Constitution, est soumise à la majorité des trois peuples constituants. La Commission de Venise propose une révision constitutionnelle sur la base de ces dispositions, tout en soulignant qu'une telle réforme ne peut être imposée.
Sur le fond de la révision constitutionnelle, les propositions de la Commission de Venise sont axées sur deux points essentiels :
- le transfert de responsabilités des Entités vers l'Etat central ;
- une définition plus stricte du veto au nom des intérêts vitaux , axée sur les droits qui revêtent une importance particulière pour les peuples (langue éducation, culture) afin que ce veto ne soit pas un simple pouvoir de blocage au nom d'intérêts partisans.
Extrait du rapport de la Commission de Venise : « Dans une première phase de la révision constitutionnelle, il est impératif d'opérer un transfert de responsabilités des Entités à la B-H en modifiant la Constitution de la B-H. C'est une étape indispensable pour pouvoir avancer sur la voie de l'intégration européenne de la B-H. Cette étape sera difficile car, comme dans le cas des autres modifications constitutionnelles en B-H, elle devra reposer sur le consensus des représentants des trois peuples constituants. La révision constitutionnelle ne peut pas être imposée. La première phase devrait consister à rationaliser les procédures décisionnelles au sein de la B-H, notamment en ce qui concerne le veto au nom d'intérêts vitaux, et à réformer les dispositions régissant la composition et l'élection de la Présidence et de la Chambre des peuples qui semblent incompatibles avec la CEDH soit maintenant, soit à compter de l'entrée en vigueur du Protocole n° 12, qui interviendra le 1er avril 2005. En ce qui concerne la réforme du veto au nom d'intérêts vitaux au niveau de l'État, le mieux serait de la mener à bien parallèlement à la conduite de réformes analogues dans les deux Entités. » |