3. Les fruits de l'accompagnement social : un accès facilité aux dispositifs de lutte contre les exclusions
a) Le soutien à la démarche d'insertion : un dispositif essentiel mais limité aux bénéficiaires du RMI
La conception même du RMI, dès l'origine, comporte l'idée d'un accompagnement des bénéficiaires, signe de l'engagement réciproque de la société aux côtés de l'individu en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle. Ainsi, le dispositif du RMI allie le versement d'une allocation et la signature d'un contrat d'insertion. L'engagement réciproque de la société s'est également traduit, jusqu'à présent, par l'obligation, pour tout département, de consacrer chaque année à l'insertion des titulaires du RMI une somme correspondant à 17 % des sommes versées par l'État au titre de l'allocation l'année précédente.
Même si le taux de signature des contrats d'insertion et la consommation des crédits obligatoires d'insertion sont restés largement inférieurs aux prévisions, ces instruments ont permis le développement d'un réseau important de structures d'accompagnement social dédiées aux bénéficiaires du RMI.
Or, au-delà de l'assistance qu'il procure au bénéficiaire dans sa démarche de retour à l'emploi, cet accompagnement s'avère particulièrement important en termes de mobilisation des aides de toutes natures susceptibles de venir améliorer la situation du bénéficiaire. L'existence d'un dispositif d'insertion en faveur des titulaires du RMI se traduit en effet par une meilleure information des intéressés sur les droits, notamment sur les droits connexes, auxquels ils peuvent prétendre et par une limitation des situations de non recours.
La disparition de cet accompagnement, en cas de sortie du dispositif et de reprise d'activité, ne se traduit certes pas par une diminution des ressources mais elle laisse la personne livrée à elle-même dans le dédale des démarches à entreprendre pour faire valoir ses droits. En ce sens, l'accompagnement procuré aux bénéficiaires du RMI dans le cadre de leur contrat d'insertion est bien un droit connexe essentiel.
Pour cette raison, il est dommage que le RMI soit encore le seul minimum social pour lequel un tel dispositif contractuel d'aide à l'insertion soit prévu.
Les bénéficiaires de l'AAH et du minimum invalidité ont certes accès à un dispositif spécialisé d'aide à l'insertion professionnelle, à travers le réseau Cap Emploi, mais cette aide à l'insertion n'a jamais été formalisée de façon aussi poussée que dans le cadre du RMI et ne dépasse pas le strict cadre de l'accès à l'emploi 11 ( * ) .
Les bénéficiaires d'autres minima sociaux relèvent donc, à condition d'être inscrits comme demandeurs d'emploi, du dispositif de droit commun d'accompagnement vers l'emploi, dans le cadre du plan d'aide au retour à l'emploi (PARE). Or, l'inspection générale des affaires sociales souligne les insuffisances du PARE, concernant le ciblage des publics en difficulté et la qualité médiocre de l'accompagnement qui pouvait être proposé dans ce cadre à des personnes très éloignées de l'emploi.
Par ailleurs, compte tenu de conditions extrêmement restrictives d'engagement des crédits départementaux d'insertion, il n'a jamais été possible d'utiliser ces crédits pour financer une extension de la démarche d'insertion aux titulaires d'autres minima sociaux. Cette question s'est pourtant posée pour les bénéficiaires de l'ASS ou de l'API pour lesquels la problématique de l'insertion se posait dans des termes très proches et qui avaient vocation, si leur situation se prolongeait, à rejoindre les rangs des bénéficiaires du RMI.
Si la décentralisation du RMI ne résout pas la question de l'existence d'un contrat d'insertion pour d'autres minima sociaux, elle lève malgré tout l'obstacle juridique qui empêchait les départements de financer l'insertion des bénéficiaires d'autres minima sociaux sur leurs crédits d'insertion.
b) Les fonds de solidarité logement et les fonds « impayés énergie » : des instruments souvent mobilisés par les bénéficiaires de minima sociaux
Les fonds de solidarité pour le logement (FSL), institués dans chaque département par la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement et confiés à ces départements par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, accordent des aides financières aux ménages défavorisés, sous forme de prêts ou de subventions, pour permettre leur accession à un logement ou leur maintien dans celui-ci.
Par ailleurs, depuis la loi du 13 août 2004
précitée, les FSL ont vu leurs compétences étendues
aux aides pour le paiement des factures d'eau, d'énergie et de
téléphone
12
(
*
)
.
Les aides accordées par les FSL dépendent des orientations et des priorités définies au niveau de chaque département. Parmi ces aides, on retrouve généralement : - le cautionnement du paiement du loyer et des charges locatives ; - les prêts, avances remboursables et subventions en vue du paiement du dépôt de garantie, du premier loyer, des frais d'agence ou d'autres dépenses liées à l'entrée dans les lieux (frais de déménagement, assurance etc.) ; - les prêts, avances remboursables et subventions en vue du règlement des dettes locatives dont l'apurement conditionne l'accès à un nouveau logement ; - les prêts, avances remboursables et subventions en vue du règlement des dettes de loyers et de charges locatives et en vue du règlement des frais de procédure supportés par la personne ou la famille pour se maintenir dans le logement locatif : depuis la loi du 13 août 2004, l'aide peut également intervenir si l'intéressé ne peut pas assumer ses frais d'assurance locative ou ses obligations relatives au paiement des factures d'eau, d'énergie et de téléphone. Deux dispositifs nationaux sont également gérés par les FSL : - l'avance Loca-Pass, qui finance le dépôt de garantie : c'est une avance gratuite, consentie pour la durée de la location et versée au bailleur à l'entrée dans le logement. Elle est remboursable en 36 mensualités maximum après un différé de paiement de trois mois, et avec des mensualités de 15 euros minimum.
- la garantie Loca-Pass : il s'agit d'une garantie
de paiement du loyer et des charges (caution), gratuite, valable pour trois ans
et couvrant un nombre maximal de dix-huit mensualités de loyers et
charges (trente six mensualités dans certains cas). Cette garantie est
matérialisée par un acte de cautionnement annexé au bail.
|
Les aides des FSL ne sont pas réservées aux titulaires de minima sociaux, mais ces derniers y ont un accès privilégié, grâce à l'accompagnement social dont ils bénéficient par ailleurs, notamment de la part des centres communaux d'action sociale et des associations de lutte contre les exclusions.
Grâce à cet accompagnement social, qui est d'ailleurs en partie financé par les FSL dans sa composante liée au logement 13 ( * ) , les bénéficiaires de minima sociaux accèdent plus facilement que le reste de la population à l'information sur les aides distribuées par les fonds. Les travailleurs sociaux, qui les suivent régulièrement, ont également plus spontanément tendance à leur proposer ce type d'aide et à défendre leur dossier devant les commissions d'attribution.
Ainsi, les ménages bénéficiaires de minima sociaux représentaient, en 2003, 56 % des ménages aidés financièrement par les FSL.
Ménages aidés par les FSL en 2003
Ménages bénéficiaires d'un minimum social |
Proportion au sein de l'ensemble des ménages aidés |
RMI |
30 % |
API |
12 % |
ASS |
8 % |
AAH |
6 % |
Total |
56 % |
Source : Ministère délégué au logement
c) Une meilleure prévention du surendettement
Les procédures de prévention et de traitement du surendettement ne comportent pas de dispositions spécifiques aux bénéficiaires de minima sociaux.
Pourtant, on constate une sous représentation de ces derniers parmi les ménages victimes de surendettement : ainsi, une étude de la DREES montre que les ménages appartenant au premier décile de la distribution des revenus (ce qui correspond, sans la recouper totalement, à la population des bénéficiaires de minima sociaux) ne représentent que 6 % de l'ensemble des ménages surendettés. Cela semble d'autant plus paradoxal que la même étude rapporte que la faiblesse des revenus est l'un des principaux facteurs aggravants du surendettement 14 ( * ) .
Ces bons résultats en matière de surendettement résultent en fait du meilleur suivi de cette population par les travailleurs sociaux : les foyers allocataires de minima sociaux bénéficient en effet plus fréquemment que les autres ménages de l'intervention de conseillers en économie sociale et familiale ou de dispositifs d'aide à la gestion du budget.
Pour les foyers qui échappent à ce travail social, le seul dispositif légal de prévention du surendettement consiste en effet en une inscription de leurs incidents de paiement au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), celui-ci pouvant être consulté par les organismes prêteurs afin qu'ils évitent d'accorder un crédit à une personne dont la situation financière est déjà fragilisée.
Encore une fois, bien qu'il ne s'agisse pas d'un droit connexe au sens strict, ni même d'un dispositif prévoyant un accès privilégié pour les titulaires de minima sociaux, l'accompagnement social dont bénéficient ces derniers constitue un filet de sécurité d'une importance capitale et qui, bien souvent, disparaît lors du retour à l'emploi.
* 11 Il convient toutefois de souligner que, parmi les missions des maisons départementales des personnes handicapées créées par la loi du 11 février 2005, figure désormais l'accompagnement et le conseil en direction des personnes handicapées dans tous les domaines de la vie quotidienne.
* 12 Ces aides relevaient jusqu'ici de dispositifs conventionnels nationaux.
* 13 Les FSL consacraient, en 2002, 60,5 millions d'euros (sur un total de 276,2 millions d'euros) aux subventions aux organismes oeuvrant dans l'accompagnement social liés au logement.
* 14 « Endettement et surendettement : des ménages aux caractéristiques différentes », DREES, Etudes et Résultats, n° 251, août 2003.