III. PROPOSITIONS : PASSER D'UNE DÉCENTRALISATION DE GUICHET À UNE POLITIQUE PUBLIQUE DÉCENTRALISÉE
Votre rapporteur n'a pas pour ambition de se prononcer sur les régimes mêmes du revenu minimum d'insertion et du revenu minimum d'activité : tel n'est pas le mandat que s'est fixé l'observatoire de la décentralisation.
En revanche, il formule des propositions de nature à améliorer les conditions de la gestion des RMI/RMA, tels qu'ils existent aujourd'hui, par les départements.
Ces propositions peuvent se regrouper en trois ensembles :
- d'abord une amélioration de la prise en charge du RMI, de manière à créer les conditions d'un financement pérenne et à assurer une juste péréquation ;
- ensuite une amélioration de l'organisation de la gestion du RMI, par une meilleure coordination du travail des conseils généraux avec les autres intervenants : CAF, ANPE, services déconcentrés de l'Etat ;
- enfin, le passage d'une logique de décentralisation de guichet à une véritable politique publique décentralisée, par l'association étroite des départements aux décisions nationales touchant le RMI (et le RMA).
A. RÉFORMER LE FINANCEMENT DU RMI
Dès sa première année d'application, le mode de financement du RMI a montré son inadéquation, avec un déficit global supérieur à 8 %. Il convient donc de le réformer, en vue de mettre en place une modalité pérenne, ne nécessitant pas d'ajustements chaque année.
1. Les principes à respecter
Le principe légal de financement des compétences transférées, qui prévoit que l'Etat transfère une ressource équivalente au montant consacré à la compétence lors des dernières années (moyenne sur 3 ans pour le fonctionnement, 5 ans pour l'investissement), ne peut gère être remis en cause, et il est garanti par le Conseil constitutionnel, qui a indiqué que le montant de la ressource transférée devait rester au moins égal à celui de l'année du transfert. (voir supra . Introduction).
Toutefois, les modalités d'application de ce principe doivent nécessairement tenir compte du droit budgétaire applicable aux collectivités locales , et notamment de l'obligation d'équilibre des dépenses de fonctionnement . Un des objectifs rarement évoqué, mais réel, de la décentralisation, est un assainissement des comptes publics : l'Etat transfère des compétences qu'il finançait bien souvent à crédit, à des collectivités qui doivent les payer comptant.
Votre rapporteur considère que trois modalités de transfert des financements peuvent être distinguées, en fonction de la nature des compétences transférées :
- les dépenses d'investissement peuvent être financées par le transfert d'une ressource qui n'évoluera pas nécessairement comme la dépense, du fait à la fois de leur caractère partiellement discrétionnaire et de la possibilité de les financer par emprunt . Il convient en ce cas de procéder à un calcul économique, transférant à la collectivité une ressource permettant de maintenir les équipements en bon état de fonctionnement sur leur durée de vie, et de les renouveler (calcul analogue à celui prévu pour les transferts d'équipement dans le cadre de l'intercommunalité), en laissant aux collectivités la charge des équipements entièrement nouveaux ;
- les dépenses de fonctionnement discrétionnaires doivent être compensées par une ressource équivalente au moment du transfert, mais dont l'évolution à l'avenir peut être incertaine (sous réserve de la garantie prévue par le Conseil constitutionnel). En effet, les collectivités conservent sur ce type de dépenses une marge de choix et il n'y a pas lieu de contraindre l'Etat à assumer les conséquences financières de ces choix ;
- les dépenses de fonctionnement à la fois obligatoires et contraintes (« mandatory » dans la terminologie anglo-saxonne) ; c'est-à-dire dont l'évolution échappe largement, voire en totalité, aux choix de la collectivité, doivent être financées par une ressource s'adaptant en permanence au niveau de la dépense, compte tenu de l'obligation d'équilibre des dépenses de fonctionnement .
De toute évidence, le RMI correspond à ce troisième cas, même si votre rapporteur estime que les départements doivent être très fortement incités à en assurer la gestion la plus rigoureuse et la plus efficace possible.