5. Une lacune majeure : de nombreux indicateurs restent à construire
Deux écueils doivent être évités dans la construction des indicateurs. D'une part, la réutilisation d'indicateurs déjà existants et renseignés, mais qui souvent ne relèvent pas d'une démarche de performance. D'autre part, la construction de nouveaux indicateurs certes corrélés aux objectifs définis mais qui risqueraient d'être disponibles à trop longue échéance pour mesurer annuellement la performance .
64 % des indicateurs du budget général restaient à construire lors de l'élaboration des avant-PAP annexés au projet de loi de finances initiale pour 2005 . Les données varient fortement selon les missions : votre commission des finances se félicite d'un taux élevé pour le programme « Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public local » de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques », du fait d'une adaptation des systèmes d'information dans le cadre des contrats d'objectifs et de moyens puis de performance des services concernés.
Ce chiffre de 64 % témoigne des réels efforts effectués par les administrations pour construire de véritables indicateurs de performance , et non « recycler » des données existantes en partie centrées sur l'activité - telles qu'elles figuraient notamment, en trop grand nombre, dans la description des agrégats . Toutefois, certains ministères ont manifestement réutilisé les statistiques dont ils disposaient déjà, par exemple en ce qui concerne les indicateurs du programme « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et du développement durable » de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».
Les précisions méthodologiques apportées dans le calcul des indicateurs font apparaître qu' environ la moitié d'entre eux devraient être disponibles dès l'examen du projet de loi de finances pour 2006 . Votre commission des finances prend acte de cet engagement pris par les ministères d'inverser le rapport entre les indicateurs déjà renseignés et ceux restant à construire dès le projet de loi de finances pour 2006. Les indicateurs non renseignés doivent très rapidement devenir l'exception.
Les données relatives à l'indicateur n° 2 « Taux de satisfaction des commanditaires de prestations de services » de l'objectif n° 9 « Améliorer la satisfaction des commanditaires directs » du programme « Soutien des politiques économiques, financières et industrielles » de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » ne seront disponibles que pour l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2007. Les délais de construction d'un dispositif d'enquête ne semblent pas devoir être aussi longs.
Il apparaît particulièrement peu satisfaisant que les délais de disponibilité de certains indicateurs ne soient parfois pas indiqués 57 ( * ) : doit-on interpréter cette lacune comme une omission ou le signe d'une incapacité à construire l'indicateur ? En tout état de cause, l'information devra figurer dans les PAP relatifs au projet de loi de finances pour 2006.
La longueur des délais de disponibilité de certains indicateurs n'est toutefois pas toujours imputable au seul gouvernement : ainsi, les critères de certification par l'Union européenne et l'OTAN, en cours d'élaboration, déterminent l'élaboration des indicateurs n° s 1 (« Niveau de certification par l'Union européenne d'un poste de commandement interalliés et interarmées et capacités de ce dernier ») et 2 (« Niveau de certification par l'OTAN des postes de commandement projetables et capacités de ces derniers ») de l'objectif n° 1 « Renforcer nos capacités de commandement interarmées et interalliés » du programme « Préparation et emploi des forces » de la mission « Défense ».
Le manque de renseignements est parfois surprenant pour des indicateurs mesurant des priorités de politique publique de longue date : par exemple, pour l'indicateur n° 3 (« Taux de jeunes sortis sans diplôme de l'enseignement supérieur ») de l'objectif n° 2 « Garantir l'excellence à tous les niveaux de formation » du programme « Formation supérieure et recherche universitaire » de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Cette donnée devrait figurer dans le PAP du projet de loi de finances pour 2006.
Votre commission des finances déplore également le manque de fiabilité de certains indicateurs qui restent à renseigner. Une illustration peut être donnée par l'indicateur n° 1 « Nombre de visiteurs (payants ou décomptés au moyen d'un système fiable) dans les mémoriaux dépendant de la défense » de l'objectif n° 1 « Sensibiliser à la mémoire des conflits » associé à l'action 2 « Politique de mémoire » du programme 1 « Liens entre la nation et son armée » de la mission « Mémoire et liens avec la nation ».
Selon les précisions méthodologiques accompagnant cet indicateur, il s'agit de décompter le nombre total de visiteurs sur les hauts lieux de mémoire, tant pour les sites payants que pour les autres sites, tout en observant qu'aucun système de comptage des visiteurs du mémorial national de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie n'est envisageable compte tenu de son implantation sur un lieu de passage ouvert à tous les publics. Cet indicateur d'activité s'avère peu fiable, dans la mesure où les valeurs sur lesquelles l'indicateur prend appui ne reflètent que très partiellement la fréquentation des sept mémoriaux de la défense, dont seulement deux sont équipés d'un dispositif de comptage des visiteurs. Pour les autres mémoriaux, souvent sur sites ouverts, une estimation du nombre de visiteurs peut être effectuée mais elle ne peut être considérée comme une mesure du niveau réel de fréquentation.
La fiabilité des données des indicateurs dépend également de l'homogénéité des sources . A cet égard, votre commission des finances relève, dans les précisions méthodologiques de l'avant-PAP accompagnant l'indicateur « Coût réel d'un secours primaire par hélicoptère » associé à l'objectif n° 5 « Optimiser le coût net du secours par hélicoptère » du programme « Intervention sur moyens nationaux » de la mission « Sécurité civile », que « en l'absence d'une définition commune à tous les intervenants, il n'est pas possible de définir une échéance précise quant à la livraison de l'indicateur spécifique du secours par hélicoptère ».
En tout état de cause, les difficultés méthodologiques ne doivent pas justifier de tels retards lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, afin que le Parlement dispose au plus vite d'outils de contrôle budgétaire.
* 57 Cette situation concerne par exemple l'indicateur n° 1 « Information » associé à l'objectif n° 3 « Améliorer la qualité de l'information sur les crues des habitants résidant en zone inondable et réduire les dommages par l'amélioration des ouvrages et dispositifs de prévention » du programme « Prévention des risques et des pollutions » de la mission « Ecologie et développement durable », ou l'indicateur « Taux d'élucidation global et détaillé pour chacune des quatre grandes catégories d'infractions de l'état 4001 » de l'objectif « Améliorer l'élucidation des crimes et délits, l'interpellation de leurs auteurs, la lutte contre la criminalité organisée sous toutes ses formes » associé à l'action « Police judiciaire et concours à la justice » du programme « Police nationale » de la mission « Sécurité ».